Pendant la majorité de son histoire (surtout préhistoire), l'homme se levait avec le soleil et se couchait avec lui. Les bougies, puis, surtout, les ampoules nous ont permis de travailler et de nous distraire tard la nuit. Une étude réalisée sur des souris montre que notre récente « évolution » a un coût. Lorsque nous devenons trop dépendants et victimes de cette lumière artificielle, nous risquons la dépression et des problèmes d'apprentissage. Le manque de sommeil n'est pas seulement en cause. Le coupable serait tout bonnement l'exposition à la lumière trop vive de nos ampoules et écrans.

Très schématiquement, l'exposition chronique à la lumière artificielle brillante élève les niveaux d'une certaine hormone de stress dans le corps. Il peut en résulter des performances cognitives diminuées et une dépression. L'étude a montré que des cellules particulières de notre oeil sont activées par la lumière vive et que cela affecte notre centre de gestion de l'humeur, de la mémoire et de l'apprentissage. D'autres études avaient déjà montré l'impact de la lumière vive sur notre système limbique. La même chose est à l'oeuvre sur les souris.

Les scientifiques savent aussi que les jours plus courts l'hiver font que certaines personnes développent une forme de dépression. C'est pour eux que l'on a développé des thérapies à base de lumière vive. On a exposé les souris à 3,5 heures de lumière, puis 3,5 heures d'obscurité. Des études antérieures avaient montré que cela ne perturbait pas les cycles de sommeil de ces rongeurs. Certes, cela a été confirmé par cette étude, mais on a prouvé au passage que cela développait des symptômes de dépression chez eux !

On ne peut évidemment pas demander le ressenti, mais on connaît les comportements types : manque d'intérêt pour le sucre, la recherche de plaisir ou peu de mouvements. Elles apprenaient aussi moins vite et étaient moins intéressées par de nouveaux objets par rapport aux rongeurs qui ont des cycles normaux. Les niveaux de cortisol (hormone de stress) étaient anormalement élevés. Un traitement au Prozac diminuait largement les symptômes : cela montre que c'est la dépression qui est bien à l'oeuvre.

L'idée n'est pas de revenir en arrière et de se coucher avec le soleil, mais de diminuer l'intensité des lampes le soir, ainsi que limiter l'usage des écrans (ou privilégier des écrans mats).

Pour aller plus loin: Tara A. LeGates, Cara M. Altimus, Hui Wang, Hey-Kyoung Lee, Sunggu Yang, Haiqing Zhao, Alfredo Kirkwood, E. Todd Weber, Samer Hattar Aberrant light directly impairs mood and learning through melanopsin-expressing neurons Nature 491,594 - 598 (22 November 2012) doi:10.1038/nature11673