Le logement 1,56 m2 à Parisloué par Dominique depuis 1995
© Fondation Abbé PierreLe logement loué par Dominique depuis 1995

Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, commente le cas de Dominique, qui louait un minuscule logement depuis 1995 pour 330 euros mensuels.

211 euros le mètre carré. C'est à ce tarif délirant que Dominique, 50 ans, louait il y a encore quelques mois un « appartement » parisien. L'affaire a été révélée par la Fondation Abbé Pierre et RTL ce jeudi matin. L'homme logeait dans la pièce - 1,56 m² habitable - depuis 1995. Il payait 1 650 francs (environ 250 euros) à l'origine, 330 euros jusqu'en mars 2012. Pour cette somme, il disposait d'un espace en sous-pente, lui permettant de se tenir debout « sur 20 centimètres ». « Je rentre, je me couche », a-t-il expliqué à RTL, avant de confier : « On finit par se dire que c'est ça ou la rue. Ça me paraissait normal...»

Aujourd'hui, Dominique a quitté les lieux, touchés par un dégât des eaux. Il attend que sa propriétaire lui fournisse un nouveau logement, comme la loi l'y oblige. Sans succès pour l'instant. « Elle ne répond à aucune sollicitation. Et comme elle ne reçoit aucune pression, elle ne le fait pas », explique Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.

Comment avez-vous pris connaissance du cas de Dominique ?

Il est venu nous voir en septembre pour demander de l'aide. Quand on est allé visiter les lieux, on ne s'attendait pas à trouver quelque chose de si petit. Il y a quelques années, on était tombé sur un « appartement » de 3 m², on ne pensait pas descendre en-dessous. Il faut se rendre compte : c'est une chambre de bonne avec une sous-pente, qui permet de se tenir debout sur 1,56 m² seulement.

Depuis mars 2012, la propriétaire des lieux est en théorie contrainte par un arrêté préfectoral, qui lui interdit de mettre le « logement » en location. Pourtant, Dominique y est encore resté de longs mois, avant de s'en aller récemment. On a également appris que la propriétaire est passée par trois agences immobilières successives pour louer. Cela veut dire que celles-ci ne font pas leur boulot et qu'elles ne vérifient pas si leurs logements sont aux normes. Je rappelle que le minimum légal est fixé à 9 mètres carrés.

Avez-vous connaissance de nombreux cas de ce genre ?

Oui, on commence à voir des locations de garages, de caves, mis sur le marché comme des appartements normaux. Une économie parallèle est en train de se mettre en place. Les gens sont acculés à accepter des logements qui n'en sont pas sous l'effet de deux phénomènes : la crise économique - qui engendre plus de chômage et de précarité - et la crise du logement - il en manque près de 900 000 aujourd'hui en France. Cette double crise fait le bonheur des marchands de sommeil et des propriétaires indélicats. L'exemple de cet appartement de 1,56 m² montre en tout cas qu'il ne faut pas reculer sur les règles dans l'immobilier : à moins de 9 mètres carrés, ce sont souvent des trous à rats.

La ministre du Logement, Cécile Duflot, en fait-elle assez contre l'habitat indigne ?

Au niveau du discours et des intentions, on a vraiment l'impression qu'elle est consciente des problèmes et qu'elle veut les prendre à bras le corps. Mais dans les faits, on n'a pas encore vu de saut qualitatif depuis six mois. On peut accepter qu'un gouvernement mette du temps à agir, mais nous resterons très vigilants. Notamment par rapport au projet de loi qui doit être présenté en juin, et son volet sur l'habitat indigne, qui représente à peu près 600 000 logements en France. Il faut des dispositifs d'observation et de recensement. C'est quand on cherche qu'on trouve !