Le Premier ministre bulgare Boïko Borissov a remis sa démission mercredi au Parlement après dix jours de manifestations parfois violentes contre la pauvreté en Bulgarie, ouvrant la voie à des élections législatives au printemps.

"Nous avons de la dignité et de l'honneur. C'est le peuple qui nous a confié le pouvoir, aujourd'hui nous le lui rendons", a déclaré Boïko Borissov.

Les élections législatives étaient normalement prévues pour juillet, mais, avec la démission du gouvernement - qui selon toutes les attentes devrait être entérinée jeudi par le Parlement-, elles vont sans doute se dérouler au printemps.

Conformément à la Constitution, le président Rossen Plevneliev doit successivement proposer à trois partis parlementaires - l'actuel parti gouvernemental de centre droit GERB, la principale force d'opposition, les socialistes, et un troisième de son choix - de former un gouvernement.

Comme ces partis se déclarent tous pour des élections anticipées, cette procédure ne devrait pas aboutir et le chef de l'Etat devra nommer un gouvernement d'experts chargé d'organiser les élections.

Selon les socialistes, les législatives pourraient ainsi avoir lieu fin avril.

Les factures d'électricité de janvier, dont le montant avait doublé par rapport au mois précédent, avaient mis le feu aux poudres, provoquant une vague de manifestations en Bulgarie contre l'austérité et la pauvreté.

M. Borissov, 53 ans, un ancien garde du corps, avait tenté d'apaiser les tensions en limogeant ministre des Finances impopulaire et en promettant d'abaisser les prix de l'électricité de 8%.

Les manifestations ont fait à Sofia 28 blessés dont cinq policiers lundi et mardi. Deux hommes, dont l'un est décédé et l'autre dans un état grave, se sont immolés par le feu en province mardi et mercredi.

De nouveaux rassemblements, sans incident, ont eu lieu mercredi en soirée à Sofia et dans d'autres villes. Dans la capitale, un millier de personnes ont défilé près du parlement, scandant "tous dehors!" et "Mafia!".

Une grande manifestation "contre toute la classe politique" est prévue dimanche.

Selon un sondage mercredi de l'institut Alpha Research dans les grandes villes, 50% des habitants approuvent la démission du gouvernement et 47%, pour la plupart sympathisants de GERB, la désapprouvent.

La présidente de cet institut, Boriana Dimitrova, a cependant souligné que "les manifestants avaient plutôt des motifs économiques et la démission du gouvernement risquait de ne pas les satisfaire".

Concernant les prochaines élections, 66% se déclarent prêts à voter, 20% ne voteront pas, les autres étant indécis.

Les élections s'annoncent serrées. Dans un récent sondage de Gallup, M. Borissov recueillait autant d'avis favorables que le chef de l'opposition socialiste, Serguei Stanichev (29%).

Le politologue de Gallup Andrey Raytchev juge de son côté que "le prochain gouvernement risque de ne pas tenir plus de deux ans", car il devra mettre en place des réformes indispensables, mais hautement impopulaires, que GERB a, selon lui, évité d'aborder.

Parmi ces mesures figurent une réduction du nombre des hôpitaux et des universités et un nouvel allongement de l'âge du départ à la retraite.

L'analyste Tsvetozar Tomov, de l'institut de sociologie Scala, souligne que malgré sa stabilité macroéconomique, la Bulgarie a épuisé toutes ses réserves financières. "Les caisses sont vides, il n'est plus possible d'éviter un emprunt", a-t-il dit.

Le ministère des Finances a d'ailleurs émis mercredi des titres d'une valeur 800 millions de leva (409 millions d'euros ) devant compenser les subventions de 841,6 millions de leva (430 millions d'euros) versées lundi aux producteurs de céréales, qui menaçaient d'assiéger la capitale à l'aide de machines agricoles.

La Bulgarie, qui applique depuis une grave crise en 1997 un régime d'austérité, présentait un déficit public de seulement 1,4% du produit intérieur brut (PIB) en 2012, et un ratio d'endettement de 17%.

Cependant, la dette des entreprises, qui a atteint 227% du PIB en 2011, constitue un frein au développement économique de ce pays.

Le taux de chômage a atteint 11,9% en janvier et touche particulièrement les jeunes.

"Le problème de la pauvreté de ceux qui travaillent est un des principaux facteurs de mécontentement", le salaire moyen mensuel n'atteignant que 400 euros, a déclaré le politologue de Gallup Jivko Gueorguiev.

La Bulgarie est le pays le plus pauvre de l'Union européenne, qu'elle a rejointe en 2007.