Agriculteur désespéré
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Entre le porc, le lait et la volaille, la Bretagne, première région agricole de France, particulièrement concernée par ces trois filières en grande difficulté, enregistre « un suicide d'agriculteur toutes les deux semaines », a indiqué jeudi à l'AFP Agnès Le Brun, élue de la région au Parlement européen.

« Quand on parle de désespoir des agriculteurs, on n'exagère pas : dans le Finistère, on compte un suicide toutes les deux semaines », a déclaré Agnès Le Brun, également maire de Morlaix, à 60 km de Brest. Mme Le Brun l'a également écrit, dans une lettre ouverte au président François Hollande, dont elle a donné copie à l'AFP : « Depuis le début de l'année, un agriculteur se suicide toutes les deux semaines en Bretagne », la situation est d'une « extrême gravité ».

La région a connu ces deux dernières semaines de violentes manifestations d'agriculteurs qui ont pris pour cible des hypermarchés du Morbihan et du Finistère, ainsi que la maison du ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll, dans le Finistère. « Même si personne ne cautionne ces actes, ils traduisent une forme de désespoir : il arrive un moment où les agriculteurs n'ont tout simplement plus un rond », relève l'élue. « Je vois passer de plus en plus de demandes d'aides de Rsa », le revenu minimum social.

« Le vrai patron sur l'exploitation, c'est la banque »

Pour Olivier Billon, président des Jeunes agriculteurs (JA) du Finistère et éleveur de porc près de Landivisiau, qui confirme la fréquence des suicides dans sa région, la détresse « ne touche pas que les jeunes, mais tous les âges ». « On voit des plus de 50 ans qui avaient mis de côté l'argent de leur retraite et qui ont été contraints de réinjecter du liquide dans leur exploitation : ils arrivent en fin de carrière, ils n'ont plus rien, a-t-il insisté. Aujourd'hui, le vrai patron sur l'exploitation, ce n'est pas l'agriculteur, c'est la banque. »

Selon les JA, un quart des agriculteurs de Bretagne a plus de 55 ans et 18 % moins de 40 ans. La Bretagne produit 55 % des porcs français et 20 % du lait. Ces deux filières sont particulièrement frappées par la hausse des coûts de production due à la flambée des cours de l'alimentation animale. « Produire un kilo de porc coûte un euro, rien qu'en nourriture. Ensuite, il reste les charges à payer », a souligné le président des JA du Finistère. L'agriculture représente 39 % du chiffre d'affaires de la région Bretagne, tandis qu'un tiers des emplois bretons sont liés à l'agriculture ou à l'agroalimentaire. Récemment, deux grandes entreprises agroalimentaires ont déposé le bilan dans la région, le volailler Doux l'été dernier et, cette semaine, Gad Sas pour le porc.