Les Mythes grecs, Robert Graves, cover-book
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Les récits de Cécrops, Prométhée, Pandore, Arachné et Méduse relatent l'instauration du patriarcat, le renversement de l'ancienne ordre matriarcal par l'ordre patriarcal de Zeus et le rôle majeur d'Athéna dans ce bouleversement que connait le monde des dieux. Athèna, fille sans mère, est le bras armé du patriarcat dans cette lutte sanglante.

Lire « Guerre d'extermination du matriarcat, et avènement du patriarcat dans la société et la religion méditerranéenne »

L'instauration de la filiation paternelle par Cécrops

Aux temps où « les fils ne connaissaient même pas leur propre père », la région de l'Attique (Grèce) était peuplée de confédérations tribales. Le roi Cécrops, né d'un dragon (Zeus?) et de Gaïa (union forcée), mi-homme mi-serpent, unifia les tribus sous son autorité et fonda Athènes. Il est le premier à reconnaître la descendance par le père, et imposa le mariage monogamique. Un jour, Athéna et Poséidon se disputèrent pour savoir qui sera la divinité tutélaire de la cité. Cécrops convoqua alors une assemblée de citoyens, à savoir les hommes et les femmes, car c'était alors la coutume d'admettre les femmes aux délibérations publiques. Les femmes votent en faveur d'Athéna et les hommes de Poséidon.
Cecrops
© InconnuCecrops
Les femmes, plus nombreuses d'une voix, font pencher la balance en faveur d'Athéna. Furieux, Poséidon submerge l'Attique sous les flots. Pour apaiser sa colère, les Athéniens imposent aux femmes trois punitions :
  • les femmes n'auront plus le droit de vote ;
  • enfant ne portera le nom de sa mère ;
  • les femmes ne seront plus appelées Athéniennes (statut d'esclaves).
  • Le matricien Prométhée tente de renverser le patricien Zeus

    Le mythe tel qu'il est rapporté par de nombreux auteurs fait du titan Prométhée un rebelle contre l'ordre patriarcal de Zeus. Il tente de restaurer l'ère matriarcale des déesses-mères, et de leurs frères les titans. Lors de sa prise de pouvoir sur le mont Olympe, il rend aux mortels le « feu sacré » qui permet de bâtir familles et cités, après l'avoir volé à Zeus. Agacé par ses excès, Zeus, le roi des dieux, le condamne à finir enchaîné et torturé.

    Lire « Le mythe de Prométhée - le culte du feu - extraits de Paul Lafargue »

    Pandore, accusée d'engendrer tous les malheurs du monde

    Selon la Théogonie d'Hésiode, Zeus, pour punir les mortels, ordonna à Hephaïstos de modeler dans la terre une « timide vierge » que les dieux accablèrent de présents, d'où son nom, Pandore (« tous les dons »). Pandore ouvrit la boîte offerte par Zeus, alors qu'il lui avait défendu de le faire. Celle-ci contenait tous les maux de l'humanité, notamment la Vieillesse, la Maladie, la Guerre, la Famine, la Misère, la Folie, le Vice, la Tromperie, la Passion... En ouvrant la boite, Pandore devint la responsable de tous les malheurs de l'humanité, ce qui fait de Pandore une équivalente de Eve. La femme qui, à l'époque matriarcale, avait été la Mère « sainte et providentielle » de l'homme, devint, dès l'époque patriarcale, la génératrice de ses maux.

    La patricienne Athéna jalouse de la belle Arachné

    Selon le récit rapporté dans Les Métamorphoses d'Ovide, Arachné est une jeune femme de Lydie (cité de la Turquie antique matriarcale). Insoumise à la déesse patricienne Athéna, cette dernière la défie à un concours de tissage pour lequel elles excellent toutes les deux. Tandis qu'Athéna représentent les dieux olympiens dans toute leur noblesse, Arachné représente Zeus violant mortelles et mortels. Arachné gagne le concours. Outrée, Athéna la frappe et cette dernière se suicide. Athéna la résuscite en araignée, afin qu'elle continue à tisser pour l'éternité. Télécharger l'article complet PDF : Arachné contre les modernes.pdf (Conférence d'Agnès Echenes, à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Toulouse).

    La matricienne Méduse terrassée par la patricienne Athéna

    Méduse est une figure assimilable à la déesse-mère de Libye (berbères matriarcaux) qui a été transformée en créature monstrueuse dans la mythologie grecque. Hésiode raconte, dans sa Théogonie, qu'au départ, c'est une très belle jeune fille convoitée par Poséidon. Un beau jour, Athéna spolie son temple en l'accusant d'avoir forniqué dans le sien. Elle la transforme en femme-serpent. Ensuite, Athéna charge le prince Persée de lui ramener sa tête, qu'elle exhibera désormais en trophée de guerre sur son bouclier.

    Téléchargez l'article complet au format .pdf : « Oreste, Horace, Prométhée, Pandore, Arachné & Méduse.pdf ».

    (Conférence d'Agnès Echenes, à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Toulouse)

    Pandore, accusée d'engendrer tous les malheurs du monde

    Pandora, John Waterhouse, painting
    © InconnuPandora, John Waterhouse
    Selon la Théogonie d'Hésiode, Zeus, pour punir les mortels, ordonna à Hephaïstos de modeler dans la terre une « timide vierge » que les dieux accablèrent de présents, d'où son nom, Pandore (« tous les dons »). Pandore ouvrit la boîte offerte par Zeus, alors qu'il lui avait défendu de le faire. Celle-ci contenait tous les maux de l'humanité, notamment la Vieillesse, la Maladie, la Guerre, la Famine, la Misère, la Folie, le Vice, la Tromperie, la Passion... En ouvrant la boite, Pandore devint la responsable de tous les malheurs de l'humanité, ce qui fait de Pandore une équivalente de Ève. La femme qui, à l'époque matriarcale, avait été la Mère « sainte et providentielle » de l'homme, devint, dès l'époque patriarcale, la génératrice de ses maux.

    Extraits de Recherches sur l'origine et l'évolution des idées de justice, du bien, de l'âme et de dieu - Paul Lafargue

    La femme, lors de la dissolution de la famille patriarcale, ne rentra pas en possession de l'âme qu'elle avait possédée au temps matriarcal, mais elle gagna la réputation d'être la cause des misères humaines. Les perfides calomnies et les violentes diatribes, que poètes, philosophes et Pères de l'Église ont lancées contre la femme, ne sont que la rageuse expression du profond dépit qui rongea le cœur de l'homme lorsqu'il vit la femme commencer à s'affranchir de son brutal despotisme.

    Zeus, pour punir les mortels, qui, en allumant des foyers familiaux, devenaient immortels, ordonna à Hephaestos de modeler avec de la terre « trempée de larmes » une « timide vierge » qu'il anima et que les dieux accablèrent de présents, d'où son nom, Pandore. Hermès la « dota de faussetés, de perfides discours et de manières insinuantes ». « Elle donna naissance à la race perverse et dépensière des femmes efféminées » - γυναίχων θηλυτεράων (Théogonie, v. 590). Pandore, ouvrant la boîte qu'elle avait reçue en cadeau de noces, fit envoler les maux qui affligent l'humanité. L'espérance resta au fond. La femme qui, à l'époque matriarcale, avait été la Mère « sainte et providentielle » de l'homme, devint, à l'époque de la famille bourgeoise, la génératrice de ses maux.