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Le fameux modèle suédois semble avoir du plomb dans l'aile. C'est ce que semblent confirmer les dernières nouvelles en provenance de Stockholm, où les dernières nuits ont été particulièrement agitées. La faute à des émeutiers qui ont incendié des dizaines de voitures et caillassé les pompiers et les forces de l'ordre. Un poste de police a même été pris d'assaut. Une situation qui rappelle beaucoup les émeutes dans les banlieues françaises en 2005 et celles de Londres et d'autres villes anglaises il y a deux ans. À la seule différence que les violences avaient dans l'un et l'autre cas duré un certain temps, alors qu'elles ne font que commencer en Suède. Leurs causes, sous-jacentes, restent pourtant identiques : les brutalités policières.

À Clichy-sous-Bois, deux jeunes avaient été électrocutés le 27 octobre 2005 en se réfugiant dans un transformateur EDF alors qu'ils étaient poursuivis par la police suite au signalement d'un vol par un riverain. À Londres, c'est un homme soupçonné d'être un trafiquant de drogue qui est abattu lors de son arrestation. À Stockholm dernièrement, un homme âgé de 69 ans armé d'une machette s'était enfermé avec sa femme dans son appartement tout en menaçant la police ; il est abattu.

Paris, Londres ou Stockholm : trois étincelles dans autant de poudrières du désespoir. Les quartiers d'où sont issus quantité de travailleurs d'origine étrangère n'offrent plus les mêmes possibilités de promotion sociale qu'il y a trente ans ou même dix ans en arrière. On ne pourra que constater que le front des émeutes, tout comme la crise économique et les coupes claires réalisées dans les budgets sociaux et dans la fonction publique, est en train petit à petit de remonter du sud vers le nord. Le modèle scandinave, qui s'appuyait jusque-là sur un système de protection sociale conçu sur l'harmonie sociale et le consensus, est désormais frappé à son tour par la violence. La situation de la Suède est bien entendu encore largement enviable par rapport aux infortunés PIGS européens, mais l'austérité commence là aussi à marquer le pays de son empreinte.

Les symptômes des révoltes de Stockholm apparaissent finalement clairement : le passage d'une société « ouverte » à une société « fermée » est source de conflits. D'un système qui offrait des opportunités concrètes à tous (ou presque...), on est désormais arrivé à une société où un nombre croissant de personnes en état de vulnérabilité sociale finissent par se trouver déclassés. Et du déclassement à l'exclusion puis à la rébellion, il n'y a parfois qu'un pas.

Il sera intéressant de comptabiliser le nombre de révoltes qui éclateront encore ici ou là dans les banlieues avant que cette évidence ne soit comprise... et peut-être prise en compte.