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Le livre de Paul Levy, voir son site.
Quelques jours avant mon interview sur l'émission de radio sur internet Why Shamanism Now ? , j'ai reçu un email d'un anthropologue bien connu, auteur et praticien chamanique, Hank Wesselman. Il m'a indiqué que ce que j'appelais « wetiko » se retrouvait aussi dans la tradition hawaïenne kahuna, qui appelait ces parasites de l'esprit les « 'e'epa« .

Il m'a dit qu'il évoquait ces entités de type archontes dans son dernier livre, The Bowl of Light : Ancestral Wisdom from a Hawaiian Shaman, que je me suis empressé d'acheter. Quand j'ai découvert la section sur les 'e'epa, les yeux m'en sont presque tombés de la tête, car la description des 'e'epa par un chaman kahuna hawaïen réputé correspondait presque mot pour mot à ce que j'avais écrit dans mon dernier livre Dispelling Wetiko : Breaking the Curse of Evil.

En approfondissant mes recherches, je réalisé de plus en plus que toutes les traditions de sagesse de l'histoire de notre planète ont leurs propres termes et systèmes de symboles pour décrire ce que les Amérindiens appelaient wetiko. Ayant juste terminé un article sur la manière unique dont la Kabbale décrit le mal du wetiko, j'ai récemment commencé à faire des recherches pour écrire un nouvel article sur une pratique particulièrement puissante de la tradition islamique, spécialement conçue pour dissoudre les effets pernicieux du wetiko.

Après avoir pris connaissance des 'e'epa, j'avais le sentiment d'être destiné à découvrir un nombre croissant de traditions de sagesse qui expriment à leur manière la psychose du wetiko, chacune avec leur propre vocabulaire. Quel que soit le nom qu'on lui donne, le wetiko est sans aucun doute la plus grande découverte jamais faite.

Pour preuve de l'importance extrême d'en savoir plus sur l'action du prédateur de l'esprit, Don Juan, dans les livres de Carlos Castaneda affirme qu'il s'agit du « sujet des sujets. » Wetiko signifie littéralement « au fond », c'est-à-dire à la racine même de la destruction encore et encore recommencée que nous infligeons aux autres et à la biosphère même dont nous dépendons pour notre survie en tant qu'espèce. Il est très utile de trouver d'autres lignages et traditions qui expliquent à leur manière la maladie du wetiko, car des perspectives multiples nous permettent d'y voir plus clair, augmentant par-là même notre portée et notre capacité à identifier ce qu'aucun modèle ou carte ne peut révéler.

Le livre de Wesselmann est une introduction aux enseignements de la sagesse profonde d'un Ancien des kahuna d'Hawaï, Hale Makua. Pour citer la discussion de Makua avec Wesselman, « Les 'e'epa sont des trompeurs. Certains les appellent les maîtres de la tromperie. » [1]

Fait intéressant, étymologiquement parlant, l'une des significations profondes de « diable » est « le trompeur » (séducteur). Makua, gardien de sagesse d'une lignée polynésienne ancienne, poursuit : « Ce sont des entités psychiques qui circulent librement, des êtres invisibles qui agissent comme des parasites de l'esprit. En tant que tels, ils s'en prennent à ceux qui sont vulnérables à leur influence. »

Le génie de notre esprit, qui permet de créer notre propre réalité, est une tendance que nous partageons tous, il fait que nous pouvons tous nous illusionner; et les 'e'epa incitent et amplifient notre propension apparemment innée à nous illusionner nous-mêmes. En raison de notre capacité quasi illimitée à nous voiler la face, le psychiatre R. D. Laing a écrit que notre espèce s'est « piégée elle-même par son propre esprit » [2], un état que je dirais secrètement inspiré par les 'e'epa. Les gens qui ne sont pas en contact avec la réalité vivante et auto-authentifiante de leur propre expérience sont des proies faciles pour ces « maîtres de l'illusion ». Comme ils connaissent mal la nature de leurs propres esprits et qu'ils sont excessivement influençables, ils adoptent le regard que les autres portent sur le monde et sur eux. Ils sont donc vulnérables à la pensée unique dominante du troupeau et aux parasites 'e'epa.

Certaines personnes « sensibles », comme les médiums et les channels, ont une frontière perméable entre le conscient et l'inconscient. Elles peuvent, même avec les meilleures intentions du monde, devenir les instruments inconscients des maîtres incorporels de l'illusion, et détruire la vie d'autres personnes. Makua explique que c'est parce que : « les trompeurs résident dans la même réalité que les médiums ─ les niveaux de conscience et d'expérience du mental/émotionnel. » Makua poursuit en disant qu'ils adoptent une certaine apparence pour avoir le plus d'impact sur la personne : « ils peuvent tout simplement extraire les images de l'esprit du médium, pour lui apparaître sous cette forme... Les 'e'epa disent simplement aux médiums ce qu'ils veulent entendre. » Quand nous sommes inspirés par les « esprits, » c'est toujours une bonne idée de vérifier nos sources, de discerner s'ils sont de la voie de la main droite ou gauche.

Makua note que :
« Les 'e'epa savent à perfection changer de forme et sont de très bon imitateurs. Ils peuvent prendre les formes qui ont un sens pour ceux qu'ils choisissent de tromper... ils sont sournois, et leur but est de tromper. Ils se servent de l'illusion, et ce sont les maîtres de cet exercice. » Les 'e'epa, autre nom du virus du wetiko, ont pour très dérangeante caractéristique, comme les « tricksters« , d'apparaître sous une forme humaine. Ils se font passer pour nous et enfilent un camouflage « humain », ils nous imitent pour nous tromper. En devenant la proie de leur intelligence factice, bien que surnaturelle, nous perdons notre sincérité. Embobiné et berné par cet imposteur et imitateur, nous nous mimons nous-mêmes, devenons une simple copie, un duplicata qui se substitue à nos individualités originales et authentiques. Dépossédés de nous-mêmes, nous ne nous appartenons plus, nous nous identifions alors à ce que nous ne sommes pas, tout en nous oubliant, et nous dissociant de ce que nous sommes réellement. Ce faisant, nous avons effectivement « perdu notre âme ».
D'un point de vue « absolu », ultime [3], le virus du 'e'epa/wetiko n'a pas d'existence objective et indépendante en dehors de notre propre esprit, mais comme il est « relativement » réel, il doit bien évidemment être traité et confronté dans ce niveau de réalité relative.

On peut le comparer à un vampire incapable d'être autonome, de vivre indépendamment. Un vampire ne peut exister que par rapport à nous, en se nourrissant de nous. Aucune entité extérieure ne peut voler notre âme; le phénomène « rêvé » du virus du 'e'epa/wetiko, apparaissant dans la sphère de notre esprit, se joue de nous pour que nous la lui cédions nous-mêmes. L'aspect le plus pervers de ce tour de passe-passe du virus du 'e'epa/wetiko est qu'en fin de compte il implique l'assentiment de notre propre libre-arbitre, car nous avons choisi, même inconsciemment, d'adhérer à notre condition d'esclave; ce qui veut dire qu'au final nous sommes les seuls responsables de notre situation.

En effet, l'infection du 'e'epa/wetiko n'est pas due à une entité qui existe objectivement, indépendamment ou concrètement, c'est pourquoi il n'y a en réalité rien dont nous devrions avoir peur en dehors de nous-mêmes.

Si nous réifions le parasite 'e'epa/wetiko en le considérant comme réel, « étranger », doté d'une existence indépendante, et donc comme une grande menace, ce virus de l'esprit alimentera, amplifiera et se nourrira de notre peur. A l'inverse, si nous pensons que le virus 'e'epa/wetiko n'existe qu'en fonction de notre imagination, qu'il est « irréel » et qu'il doit être ignoré, nous sommes aussi tombés sous son charme. Il peut alors agir librement en nous, sous le seuil de la conscience.

Ce sont des points très importants, extrêmement paradoxaux, que nous devons embrasser en nous-mêmes pour appréhender les forces de type « trickster ». Le virus du 'e'epa/wetiko existe dans une réalité intermédiaire dans laquelle il est à la fois réel et irréel (j'utilise souvent ce paradoxe dans mon livre). Bien que n'existant pas objectivement dans un sens absolu, le pathogène du 'e'epa/wetiko se meut dans cette « réalité virtuelle » qui lui permet de détruire non seulement des individus, mais peut-être aussi toute notre espèce. Le fait est que quelque chose qui n'existe qu'en fonction de nous et qui peut libérer des forces destructrices colossales dans le monde jusqu'à peut-être nous détruire, signale et nous introduit à notre puissance créatrice latente, incroyablement vaste, invisible et généralement inexploitée, qui est un droit de naissance inhérent aux humains.

Jung fait référence à cet esprit séducteur sous le nom d'Antimimos, qu'il décrit comme étant « l'esprit malin et imitateur. »

Antithétique à la lumière, Antimimos fait référence à un type de tromperie qui pourrait être considéré comme un »contre-mimétisme ». Nommé antimimon pneuma dans l'Apocryphe de Jean (Apoc. Jean III, 36:17), cet esprit de la contrefaçon imite quelque chose ─ nous, en l'occurrence ─ mais avec l'intention que la copie, une fausse version, serve un objectif opposé à celui de l'original. En tombant dans le panneau de ce charlatan de l'esprit, nous perdons notre orientation, notre sentiment de vocation spirituelle, notre mission dans la vie, et même notre propre individualité.

L'écrivain et poète Max Pulver, lors de la Conférence Eranos en 1943, a déclaré que l'antimimon pneuma [c'est-à-dire le virus du 'e'epa/wetiko] est la racine profonde de tous les maux qui assaillent l'âme humaine. » [4] Le célèbre texte gnostique de la Pistis Sophia explique que l'antimimon pneuma s'est attaché à l'humanité comme une « maladie ».

Makua dit que les 'e'epa pourraient être appelés des »démons ─ des démons interdimensionnels. » Les forces psychiques inconscientes, les « démons » (voyez s'il vous plaît mon article « Sommes-nous possédés ? ») ont une réalité psychologique, parce qu'ils affectent et modifient notre expérience de nous-mêmes.

Dans mon livre, j'explique que le démon wetiko a pour origine les parties séparées de notre psyché, ce que Jung appelait des « complexes autonomes« . En raison d'un trauma ou d'une autre sorte de transgression de nos frontières psychiques, une partie de la totalité de notre psyché se dissocie et développe d'elle-même une vie apparemment indépendante et autonome.

Les peuples autochtones du monde entier appellent ces complexes autonomes des « démons ». Ces démons vivent dans les mondes supérieurs (et inférieurs) de l'esprit, de telle sorte que, comme le souligne Makua, ils sont vraiment « interdimensionnels ». Ils circulent librement, ont une grande marge de manœuvre, et traversent les frontières apparemment solides de l'esprit et de la matière, du monde intérieur et extérieur, du rêve et de la réalité. Comme ils n'ont pas les contraintes des lois conventionnelles de l'espace et du temps, ces « démons interdimensionels » non locaux se manifestent - et se révèlent - par des événements qu'ils forment et qu'ils configurent de façon synchrone dans le monde « extérieur », qui leur permet de s'exprimer.

Tout comme dans un rêve, les événements du monde extérieur reflètent symboliquement un état plus profond de chacune de nos psychés. Les « pouvoirs en place » (terrestres) - les individus et les institutions au pouvoir qui influencent la perception et trompent les masses - sont eux-mêmes des reflets à un niveau inférieur, des instruments de ces « maîtres de l'illusion » des dimensions supérieures qui en définitive forment et guident une grande partie de l'illusion placée en nous, entre nous et parmi nous.

Si nous ne comprenons pas que la crise mondiale actuelle vient de l'intérieur et qu'elle est une expression de la psyché humaine, et qu'à la place nous croyons dur comme fer que les nombreux problèmes auxquels nous sommes confrontés en tant qu'espèce ont une origine concrète, objective et extra-psychique, nous sommes condamnés à répéter inconsciemment et à recréer une souffrance interminable, une destruction de plus en plus grande, comme si nous faisions le même cauchemar encore et encore.

Le virus du mal s'insinue dans l'âme progressivement, de manière inaperçue et insidieuse, mais à un certain point cette leucémie de l'âme est apparemment irréversible, conduisant à la destruction de son hôte. Makua clarifie que : « Les 'e'epa encouragent les êtres humains à se polariser négativement... et plus nous nous polarisons de la sorte, plus nous arrivons à un point où nous ne pouvons plus nous corriger nous-mêmes. C'est à ce moment là que les trompeurs nous encouragent à poursuivre dans cette direction. »

Une fois que nous avons chuté dans notre inconscient, et que nous agissons à partir d'un point de vue irréfléchi auquel nous nous sommes identifiés, cette erreur non corrigée est une porte ouverte pour le virus du 'e'epa/wetiko qui en nous prêtant sa force déviante nous égare de plus en plus, nous emmenant de plus en plus bas sur une spirale de mort. Nous inspirant une logique inversée, la tête en bas, un illogisme parfait et vraiment mortel (ce que j'appelle dans mon livre une « logique wetiko »), le virus du 'e'epa/wetiko influence ceux qui sont sous son emprise pour qu'ils utilisent des déductions fallacieuses leur permettant d'inconsciemment sélectionner les données qui les conduiront invariablement aux conclusions qui ne font que perpétuer l'évitement chronique du nœud du problème.


Commentaire : Quelqu'un a du lire Ponérologie politique !
« [...] Parmi les langues européennes le « discours autrichien » est devenu le terme commun pour décrire un discours paralogistique. Bien des gens qui utilisent cette expression de nos jours ne connaissent pas son origine. Dans le contexte d'hystérie maximale en Europe à l'époque, « l'article authentique » était un produit typique du faux raisonnement : la sélection subconsciente et la substitution d'éléments finissent par éviter de manière chronique le cœur du problème. De même, la supposition-réflexe que tout interlocuteur est un menteur est une indication de l'anti-culture hystérique du mensonge, dans laquelle dire la vérité devient « immoral ». [...]

Sélection et substitution d'information : certains phénomènes psychologiques concernant le subconscient, et déjà connus d'étudiants en philosophie préfreudienne valent d'être revisités. Les processus psychologiques inconscients prennent le pas sur les raisonnements conscients, en temps et en portée, ce qui rend possibles de nombreux phénomènes psychologiques, y compris ceux généralement décrits comme inversifs, tels le blocage subconscient de conclusions, la sélection, et aussi substitution d'hypothèses qui paraissent inconfortables.

On peut parler de blocage des conclusions lorsque le processus d'inférence est adéquat dans son principe, qu'il a quasiment abouti à la conclusion et à la compréhension finales dans l'action de projection intérieur, mais est bloqué par une précédente directive émanant du subconscient qui le considère comme inefficace ou dérangeant. Cette primitive prévention de la désintégration de la personnalité peut paraître avantageuse ; mais elle fait aussi obstacles à tout les avantages qui pourraient provenir d'une conclusion et d'une réintégration sciemment élaborées. Une conclusion ainsi rejetée reste dans notre subconscient, et de manière plus inconsciente encore provoque le blocage et la sélection suivants. Ceci peut être très dommageable, soumettre progressivement une personne à son propre subconscient, et est souvent accompagné d'un sentiment de tension et d'amertume.

Nous parlons d'une sélection de prémisses quand un feed-back pénètre profondément dans un raisonnement résultant de certaines prémisses, et supprime de sa base de données pour la reléguer dans le subconscient, l'information responsable de l'inconfortable conclusion. Notre subconscient permet alors de poursuivre le raisonnement logique, mais le résultat sera erroné en rapport direct avec la signification réelle des données réprimées. Un nombre de plus en plus grand d'informations réprimées sont ainsi stockées dans notre mémoire subconsciente. Et pour finir, une sorte d'habitude s'installe : les éléments similaires sont traités de la même manière, même quand un raisonnement aurait été plus avantageux pour la personne.

Le processus de ce type le plus complexe est la substitution de prémisses remplacées par d'autres données, qui assure une conclusion plus confortable. Notre faculté d'association met rapidement en place un nouvel élément qui remplace celui qui a été enlevé, mais c'est un élément qui aboutit à une conclusion confortable. Cette opération prend du temps et il est peu probable qu'elle soit exclusivement subconsciente. Ces substitutions sont souvent effectuées collectivement, à l'intérieur de certains groupes, par la communication verbale. Voilà pourquoi elles répondent mieux à l'épithète moralisante d' »hypocrite » qu'aucun autre des processus sus-mentionnés. [...]



Tout comme les virus ou logiciels malveillants infectent un ordinateur ou un programme pour qu'il s'auto-détruise, les virus de l'esprit comme le pathogène du 'e'epa/wetiko programment le bio-ordinateur humain à penser, à croire et à agir de manière à s'auto-détruire. Les personnes qui en souffrent, comme par exemple les personnes en proie à une addiction ou à un trauma, créent involontairement le problème qu'ils tentent de résoudre, s'accrochant désespérément à une fausse conviction, celle-même qui les égare en les torturant et les détruisant.

Makua conclut ce qu'il vient de dire par un avertissement, « C'est là que nous franchissons le seuil et entrons dans le royaume du mal. »

Le mal est simplement l'anti-vie, la vie qui se retourne contre elle. En anglais, « live » (vie) épelé à l'envers donne « evil » (le mal) [NdT : Paul Levy fait aussi un jeu de mot avec "épelé" (spell) qui en anglais signifie aussi un sortilège]. Dans l'âme traumatisée (et dans une certaine mesure, nous sommes tous dans un état de trauma, le trauma de ne pas être nous-mêmes), Freud et Jung ont reconnu qu'il y avait un facteur dans la psyché qui, une fois qu'il était assez puissant et en apparence autonome, maintenait en permanence la souffrance improductive et névrotique. Il y a en nous une autorité agressive, anti-intégrité, comme « fabriquée » par l'agression inversée, réprimée, inexprimée, reniée, retournée contre soi, qui cultive et engendre activement la dissociation dans la psyché.

Le processus fluide, intarissable, auto-réfléchi/réfléchissant, de la psyché sans cesse en évolution, se déployant/s'enrichissant toujours est alors suspendu, rigidifié et gelé dans le temps, dans une boucle de rétroaction apparemment sans fin et auto-générée.

Ce facteur d'inertie, entropique et thanatique semble résister activement à la guérison, nous empêchant de récupérer, redécouvrir et atteindre notre plénitude intrinsèque. Jung explique que ce facteur de dés-intégration est un fragment « morbide » de la personnalité qui inspire une « volonté d'être malade ». C'est comme s'il y avait un contrepoids inconscient à la faculté de la volonté, une « ombre de la volonté », pour ainsi dire, qui interdit la synthèse des fragments de notre expérience dans des constructions et des perceptions significatives qui forment une psyché saine, complète et cohérente.

Dans la mesure où nous sommes inconsciemment possédés et gouvernés par les impulsions inspirées par le virus du 'e'epa/wetiko virus, avec lesquelles nous nous identifions, c'est comme si un parasite ou un ténia psychique avait réquisitionné notre cerveau, en trompant son hôte, lui faisant croire que nous nous alimentons et renforçons, alors qu'en fait nous nourrissons le parasite. Ce virus de l'esprit est un pathogène psychique virulent qui insinue des formes-pensées et des croyances dans notre esprit qui, lorsque inconsciemment adoptées, vont le nourrir et finalement tuer son hôte - c'est-à-dire nous.

Comme nous ne sommes pas conscients du virus du 'e'epa/wetiko, il colonise littéralement notre esprit et instaure un régime apparemment autonome, un « gouvernement de l'ombre » dans notre psyché (reflété à l'extérieur par un « gouvernement de l'ombre » dans le monde) de telle sorte que nous sommes opprimés dans l'espace souverain de notre propre être. Le virus du 'e'epa/wetiko paralyse et bloque l'ego dans un état d'impuissance, d'immobilité, de non-vie, qui vampirise littéralement notre force de vie et notre potentiel énergétique.

Imperceptiblement, des forces psychiques impersonnelles vont peu à peu prendre le contrôle de notre psyché. Un joueur invisible nous pousse comme un pion sur un échiquier, nous sommes animés et manipulés comme des marionnettes. Nous sommes alors constamment « tenus en échec » par ces forces intangibles, qui à notre insu, « jouent » de nous depuis une zone d'ombre de notre psyché non-illuminée. Par rapport à quelque chose dont l'existence est « en vertu de... », le parasite 'e'epa/wetiko ne peut exister que par le « manque de vertu » de nos esprits obscurs et mal connus.

Cette partie pathologique de la psyché peut absorber toutes les parties saines de telle sorte qu'elles soient dominées par la maladie, qu'elles soient à son service, comme des esclaves. Pour citer Jung, cette partie morbide et perverse de la personnalité « dévore ce qu'il reste de l'ego normal et l'oblige à prendre le rôle d'un complexe secondaire (opprimé). » [5]

C'est comme si un coup d'État invisible avait eu lieu dans la psyché, pour nous destituer nous, les gouvernants légitimes de notre propre paysage psychique. Nous vivons alors sous une « occupation étrangère » (ce que Don Juan appelle une « installation étrangère« ), nous ne sommes plus les maîtres dans notre propre maison. C'est comme si, coupés en deux, notre main gauche ne savait pas ce que faisait notre main droite.

Quand cette partie pathologique scindée et rebelle « s'incorpore » dans notre psyché, elle prend le pouvoir sur l'organisme vivant et « dicte » ses volontés à l'ego de telle sorte que l'ego croit qu'il se dirige lui-même. Nous avons accès à une liberté apparente et pouvons vivre des vies « normales », tant que cela ne conteste pas, ne menace pas et ne contrarier pas ces forces sinistres qui cherchent secrètement à centraliser le pouvoir et le contrôle. Ce processus interne se manifeste extérieurement, dans le gouvernement des États-Unis et le monde en général, par une tendance incontrôlée vers le fascisme.

Curieusement, lors de la rédaction de cet article, la NSA a fait les titres des journaux du monde entier. Il a été révélé qu'elle surveillait les citoyens américains mais aussi les peuples et gouvernements du monde entier, 24h/24 et 7j/7. C'est un total abus de pouvoir, et un exemple de la logique inversée du wetiko, car le gouvernement prétend « protéger » ses citoyens en les espionnant ─ en les mettant sur « écoute » ─ c'est ridicule.

C'est tout le contraire d'une société libre - avec un gouvernement transparent et une protection de la vie privée des habitants - car le gouvernement américain exige pour lui le secret, tout en détruisant la vie privée de tout le monde. L'espionnage est une caractéristique archétypale classique du modus operandi d'un esprit infecté par la logique de la peur et de la séparation, la condition sine qua non du système d'exploitation du virus du 'e'epa/wetiko.

Lorsque ceux qui espionnent se retrouvent à leur tour espionnés, ils considèrent cela comme un outrage inacceptable. Lorsque leurs actions infâmes sont mises en lumière, la NSA se comporte en victime, alors qu'en vérité c'est elle qui a violé les droits humains fondamentaux, c'est elle la coupable/traître, le « bourreau déguisé en victime. »

Les traces de l'action du virus du 'e'epa/wetiko se retrouvent dans ce deux poids deux mesures aussi flagrant, cette contradiction logique, cette hypocrisie et cette logique inversée. En violation illégale et criminelle de nos droits souverains de liberté et de vie privée, cette surveillance complète de nos vies, présentée au public comme une chose nécessaire pour notre sécurité, est un exemple de contre-mimétisme en action, car elle recouvre une volonté silencieuse et sous-jacente de pouvoir, de domination et de contrôle qui produit exactement le contraire de son intention publiquement déclarée. Difficile d'imaginer un plus bel exemple vivant de la manière par laquelle opère le parasite du 'e'epa/wetiko dans le théâtre du monde.

Le parasite du 'e'epa/wetiko ne reconnaît pas et ne respecte pas la fausse dichotomie sujet/objet, agissant en dehors de ces contraintes. Le subterfuge principal du virus du 'e'epa/wetiko consiste à tirer parti de l'inexistence d'une réelle frontière entre le monde intérieur et extérieur. Le scandale de l'espionnage de la NSA renvoie à un processus « interdimensionel » qui se déroule dans les profondeurs de l'âme de l'humanité. Ce processus s'est « échappé de nos crânes » et s'est répercuté dans des événements et circonstances extérieures. Le virus du 'e'epa/wetiko, se manifeste à l'extérieur mais vient pourtant de l'intérieur. Il utilise le support du monde extérieur comme une toile pour se révéler dans toute son ampleur.

Le processus intérieur du parasite 'e'epa/wetiko, opérant secrètement dans notre psyché, est double. Il se trouve à la fois dans notre imaginaire et dans la réalité où il apparaît concrètement. Tous ceux qui ont des yeux pour voir, se rendent compte que la scène internationale est le reflet d'une dynamique qui existe en nous.

Makua poursuit à propos des 'e'epa : « Si nous regardons l'état actuel du monde, nous voyons leur influence partout, et à tous les niveaux... Ils s'attachent surtout à nos chefs politiques, économiques, et religieux ─ tous les principaux acteurs du jeu ─ et en toute équité, ces braves gens sont bien conscients de leur influence négative. »

Les gens qui sont contrôlés par le parasite du 'e'epa/wetiko ne savent pas qu'ils sont en leur pouvoir, car ce « coup d'Etat psychique » se déroule dans les zones d'ombre de leur inconscient. Par définition, si nous sommes contrôlés par des forces psychiques puissantes, nous ne savons pas que nous sommes possédés par quelque chose qui nous dépasse, et c'est précisément ce que veut le virus du 'e'epa/wetiko.

Ceux qui sont attirés par le pouvoir sont particulièrement susceptibles de passer sous le contrôle de ces imposteurs, qui se nourrissent de leur attrait et addiction au pouvoir. Une prédilection pour le pouvoir conduit à un aveuglement égoïste qui peut facilement être repéré, manipulé et amplifié à l'extrême par le virus du 'e'epa/wetiko. Les gens qui se trouvent dans des positions de pouvoir matériel et d'influence dans le monde peuvent facilement propager leur pathologie dans le monde entier, contribuant ainsi de manière significative à étendre la portée et la puissance de ce fléau psychique.

Wesselman indique que : « Ce que le chef a dit est tout à fait logique ─ un grand imposteur s'est servi de nos principaux systèmes religieux et politiques depuis des centaines ou même des milliers d'années, semant le chaos, car les 'e'epa nous ont poussé de plus en plus loin dans la polarité négative. »

Il semble que nous soyons nombreux à ne pas vouloir voir et affronter consciemment ces forces obscures qui se sont insinuées dans le grand corps politique et qui opèrent à tous les niveaux de notre société. Pour citer Makua : « Une telle résistance culturelle est en partie due à la programmation obscure des trompeurs. » Cette « programmation obscure » est un lavage de cerveau culturel, un sortilège hypnotique entremêlé à la chaîne et la trame de tous les aspects de notre civilisation. Les organes de la propagande massive du virus du 'e'epa/wetiko sont les grands médias et l'industrie du divertissement, cette « l'industrie pour nous entraîner » contrôlée par de grands groupes [NdT : jeu de mot avec "entertain" (divertir)]. Nous détournons le regard par crainte d'entrer en relation avec une partie de nous-mêmes. Notre politique de l'autruche, qui consiste à fermer les yeux sur des événements d'une importance collective négative énorme, révèle l'action du virus du 'e'epa/wetiko.

Le wetiko est une forme de cécité psychique qui non seulement pense voir, mais croit avec arrogance mieux voir que tout le monde. Le virus du 'e'epa/wetiko colore et gère secrètement nos perceptions dans l'obscurité de notre inconscient, de sorte qu'il agit à travers nous tout en passant inaperçu. Le virus du 'e'epa/wetiko éblouit, envoûte, et tourmente la conscience de telle manière à ce que nous ne puissions pas voir les points de vue tacites, sous-jacents, par lesquels nous percevons, produisons et donnons du sens à notre expérience habituelle du monde et de nous-même. Une fois infiltré et insinué dans le corps politique, que ce soit celui d'un individu ou d'une société, le virus du 'e'epa/wetiko s'imagine perversement être lui-même l'anticorps curatif. Ironiquement, il se fait passer pour une partie réellement saine du système global tout entier (le réel anticorps), à la manière d'une tumeur cancéreuse.

Le virus du 'e'epa/wetiko utilise subversivement contre nous notre « génie », celui-là même qui nous permet de créer des réalités. Il peut ainsi littéralement nous ensorceler grâce aux tendances projectives de notre propre esprit. Nous sommes alors fascinés par nos dons et talents intrinsèques qui nous permettent de rêver notre monde. Notre pouvoir divin et créateur de manifester la réalité nous a hypnotisé, et il revient nous frapper comme un boomerang, sapant notre potentiel individuel et l'évolution collective.

Évoquant les 'e'epa, Makua dit avec raison que : « Si nous regardons l'état actuel du monde, nous voyons leur influence partout, et à tous les niveaux. Nous pourrions dire que ce sont des vampires psychiques. Ce sont eux les vrais vampires. » En lisant Makua, je ressentais une excitation palpable, c'était comme si je lisais mes propres mots dans le livre de quelqu'un d'autre.

Les légendes et mythes de vampires depuis la nuit des temps décrivent et renvoient symboliquement au virus du 'e'epa/wetiko. Tout comme les vampires, le virus du 'e'epa/wetiko a soif de ce qui lui manque ─ l'essence mystique de la vie ─ le « sang » de notre âme, notre force vitale. Comme un « mort-vivant », le virus vampirique du 'e'epa/wetiko est fondamentalement de la matière « morte » qui « revêt » l'apparence de la vie; c'est seulement à l'intérieur et au-travers d'un être vivant qu'il acquiert un semblant de vie.

Ces vampires psychiques ne peuvent pas se reproduire par leur propre énergie, ils doivent obligatoirement se propager par nous pour que nous puissions les dissimuler, nous « sacrifier » et transmettre à d'autres ce parasite.

Le virus du 'e'epa/wetiko anime une forme virulente de psychose, très contagieuse, qui se propage par le canal de notre inconscience partagée. Quand ce virus de l'esprit nous atteint, il a une logique ou un code alién-ant qui affecte/infecte la conscience, tout comme l'ADN d'un virus se transmet à une cellule et l'infecte. Cependant, ses vecteurs d'infection ne voyagent pas comme des pathogènes physiques. Ce parasite errant, fluide et nomade, se propage de manière non-locale dans le champ en se renforçant mutuellement et en se nourrissant de toutes les zones d'ombres de nos inconscients.

Comme Jung nous l'a rappelé, le plus grand danger qui menace l'humanité à notre époque est la possibilité que des millions de personnes (peut-être même des milliards ?) cèdent ensemble aux influences de l'inconscient, renforçant mutuellement leur folie, comme si par une peste psychique qui reste invisible parce que justement sa nature est de rendre aveugle, nous soyons involontairement complices de notre propre auto-destruction.

Makua poursuit : « Les 'e'epa sont des forces mentales qui peuvent s'immiscer dans l'esprit humain... à tout instant. Ils utilisent la ruse et la furtivité psychique. Ce sont des adversaires qui sont attirés par les humains car ils veulent acquérir la capacité humaine de l'imagination créatrice. Vous voyez... c'est ce qui leur manque cruellement. Les humains sont des créateurs, eux ne le sont pas. »


Commentaire : Une meilleure façon de le formuler serait de dire que les humains ont la possibilité d'être des transducteurs des forces créatrices, tandis que les psychopathes et les humains infectés par le virus transduisent les forces de l'entropie. Comme ces forces mentales adverses convoitent l'imagination créatrice qui leur manque, si nous ne mettons pas au service de la vie le don divin de notre imagination créatrice, elles utiliseront notre imagination à notre place (et contre nous), avec des conséquences mortelles. Ces prédateurs sont en concurrence avec nous, ils souhaitent que nous leur « partagions » notre propre esprit, pour « s'asseoir dans notre siège. »


Comme ces forces adverses pensent littéralement à notre place, nous ne sommes plus des êtres souverains créant consciemment par la pensée. Nous sommes leurs créations. Il est intéressant de noter que le mot « Satan » signifie « l'adversaire ». Comme un vampire, le virus du 'e'epa/wetiko ne supporte pas la lumière, car si nous le voyons agir secrètement dans notre conscience, il perd son autonomie apparente et son pouvoir sur nous. Nous nous élevant en le neutralisant.

Makua déclare à propos des 'e'epa que : « Nous devons affronter nos impulsions inférieures sans cesse encouragées par les imposteurs. Nous nous heurtons tous à eux, jour après jour. Ils sont ici depuis longtemps, et ils connaissent intimement l'esprit humain, car c'est là qu'ils résident. »

C'est comme si le virus du 'e'epa/wetiko connaissait mieux notre esprit que nous, étant donné que nous ne sommes pas éveillés. C'est comme si, avec le virus du 'e'epa/wetiko, un étranger, un « autre » métaphysique, introduisait de façon subliminale des formes-pensées et des croyances dans notre propre esprit, qui si l'on s'y identifie, nous obligent à agir contre nos propres intérêts. De même, les « gnostiques » (ceux « qui savent ») dénoncent le virus du 'e'epa/wetiko quand ils évoquent les parasites de l'esprit nommés « archontes », qui infiltrent et subvertissent le fonctionnement de notre propre esprit.


Commentaire : Voir aussi l'article « Un scientifique mourant de la Nasa dévoile la vérité sur la vie sur Mars » : « C'est important de comprendre que ces êtres peuvent exister à l'intérieur de vous sous la forme de forme-pensées, sous la forme de formes-pensées négatives, et ils se reproduisent eux-mêmes par la langage, et par les choses que vous dites tous les jours. Je sais que c'est très difficile à imaginer, c'est l'une des choses les plus compliquées pour moi à comprendre, nous avons été tellement conditionnés à penser que les aliens sont des créatures vertes qui atterrissent en vaisseaux avec des pistolets pour nous tuer, mais la réalité est bien plus sinistre et horrifiante. Ces êtres existent dans notre propre langage, dans nos propres pensées, et nos propres modèles de pensées. »


Se référant aux 'e'epa, Makua poursuit : « Les affronter et savoir qui ils sont et ce qu'ils sont est la première étape d'un processus de transformation ─ un processus qui peut nous amener à traverser l'horizon des événements que vous avez mentionné, au-delà duquel plus rien n'est jamais pareil. » Pour citer Makua, une fois que nous savons « qui sont et ce que sont » les 'e'epa, « notre potentiel de croissance spirituelle et évolutionnaire est infinie. »

Le virus du 'e'epa/wetiko ne peut être perçu que lorsque nous réalisons la nature onirique de notre univers, que nous abandonnons l'idée d'un moi séparé, et reconnaissons le champ sous-jacent et profond dont nous sommes tous l'expression, qui nous contient tous, et dans lequel nous sommes tous interconnectés. L'expression énergétique de cette réalisation, le dissolvant par excellence du virus du 'e'epa/wetiko, est la compassion.

Makua explique que les « gardiens hautement spirituels qui nous amenèrent dans ce monde » savaient que « l'humanité existait déjà sous la forme d'un rêve. En tant qu'individus, nous sommes les aspects manifestés de ce rêve ─ des aspects qui ont désormais grandi au point de devenir des êtres créateurs comme jamais il n'y en a eu dans ce monde. » En tant que créateurs, nous sommes des organismes autopoïétiques en co-évolution réciproque avec nous et avec l'univers dans son ensemble [NdT : autopoïèse = propriété d'un système de se produire lui-même, en permanence et en interaction avec son environnement, et ainsi de maintenir sa structure malgré le changement de composants]. Pour citer Makua, une fois que nous reconnaissons le virus du 'e'epa/wetiko, « nous pouvons participer à notre propre évolution et forger notre destinée personnelle et collective. » En me familiarisant avec les enseignants stimulants et éclairants de Makua, j'ai éprouvé une immense gratitude à l'égard de son incroyable travail.

L'origine du virus du 'e'epa/wetiko est la psyché humaine [6] (voir mon article « Le Monde est Psyché » - non traduit), et c'est en identifiant le fonctionnement de ce virus de l'esprit dans notre inconscient que nous pouvons tout changer - voilà le véritable remède. Notre avenir commun dépend principalement des changements qui auront lieu dans la psyché de l'humanité, parce qu'elle est le pivot du monde. Le virus du 'e'epa/wetiko exige littéralement que nous prêtions attention au rôle fondamental que le psychisme joue dans la création de l'expérience que nous avons de nous-mêmes et du monde.

Moins nous identifions ce virus du 'e'epa/wetiko, plus il paraît puissant et dangereux. Pour citer le texte gnostique de L'Évangile de Philippe, « tant que la racine du mal est cachée, elle est forte, mais si on la reconnaît, elle est détruite, si elle est exposée, elle périt. » [7]

Pour une personne séduite par le charme de la réalité consensuelle convenue collectivement, un tel discours sur les démons, vampires, virus de l'esprit et parasites psychiques, etc, fait penser à tous ces dogmes superstitieux, au new age, à des absurdités spirituelles et à du charabia, ou aux divagations d'une imagination enfiévrée et paranoïaque qui croit en d'étranges théories du complot.

Il convient de souligner que chacun de nous fait l'expérience du virus du 'e'epa/wetiko à sa façon, indépendamment des concepts ou des mots que nous utilisons pour décrire l'expérience, ou de notre croyance en ces choses. Nous devrions cependant noter, et cela mérite notre plus grande attention que certains des plus grands penseurs, philosophes, visionnaires et maîtres ont témoigné à leur manière du virus 'e'epa/wetiko depuis des millénaires.

La mystique, philosophe et activiste sociale Simone Weil, évoquant l'état de l'humanité, écrit : « C'est comme si le malheur était installé en lui à la manière d'un parasite et le dirigeait à ses propres fins. » [8]

Le maître spirituel révolutionnaire Gurdjieff dit qu'en observant attentivement, « Vous verrez que vous êtes différent de que ce que vous croyez être. Vous verrez que vous êtes deux. Un qui n'est pas, mais qui prend la place et joue le rôle de l'autre. » [9]

Le physicien David Bohm, un des penseurs les plus originaux, radicaux et importants de la seconde moitié du XXe siècle, parle du parasite 'e'epa/wetiko à sa façon, quand il écrit : « Semblable à un virus ─ c'est en quelque sorte une maladie de la pensée, de la connaissance, de l'information, qui se répand dans le monde entier... Elle se répand comme un virus et chacun de nous alimente ce virus. » [10] Bohm a réalisé que comme nous n'étions pas conscients de ce virus de la pensée, nous étions tous complices de sa propagation. Il a reconnu que ce virus de l'esprit était la chose même qui « empêchait l'humanité de travailler ensemble pour le bien commun, et donc, pour notre survie. » Il a réalisé que cette « maladie de la pensée » contagieuse s'était introduite subrepticement dans le champ de l'esprit lui-même, lui permettant ainsi de profiter de notre ignorance pour vaquer à sa magie noire.

Bohm se demande alors : « Avons-nous une sorte de système immunitaire pouvant l'arrêter ? La seule manière de l'arrêter est de l'identifier, de le reconnaître, pour voir ce dont il s'agit. Dès que nous le regardons, nous nous penchons sur la source du problème. » [11]

Dans le processus de l'illumination de Bouddha, le fait de voir et de reconnaître la présence et l'activité du virus du 'e'epa/wetiko sont des éléments importants. La tradition bouddhiste appelle ce virus « Māra » - le Malin, ou le Ténébreux. Les enseignements du Bouddha soulignent que c'est l'ignorance et l'obscurité, de pair avec la capacité de rendre l'humanité « aveugle » - caractéristiques d'une infection par le virus du 'e'epa/wetiko - qui ont été dissipées au moment de l'illumination.

On compare souvent l'image de Bouddha déroutant les armées de Māra au soleil qui dissipe l'obscurité. Après l'illumination, le Bouddha a toujours reconnu l'instant où Māra était apparu; car reconnaître pleinement Māra c'est le vaincre instantanément. C'est pourquoi Māra s'exclame avec consternation et désespoir, « L'Exalté me connait ! » (L'Exalté est le Bouddha, celui qui s'est éveillé à sa nature onirique).

Rappelez-vous aussi de ce que dit l'Évangile Gnostique de Philippe à propos du mal : »si on le reconnaît, il est détruit. » Bien que Māra (le virus du 'e'epa/wetiko) paraissait à un certain niveau en opposition à l'illumination de Bouddha, c'était en fait son allié secret, un aspect projeté de la propre conscience de Bouddha, car Bouddha n'aurait pas pu développer le « muscle » de sa réalisation sans le défi de Māra.

Makua conclut : « Tôt ou tard, nous prenons tous conscience de la présence d'une noirceur en nous ─ l'obscurité dans laquelle nos adversaires - les imposteurs - nous ont entraîné. » Je dirais que plus vite nous faisons la lumière sur « l'obscurité qui est en nous » et en prenons conscience, mieux c'est. Une « illumination » ne change rien si elle ne nous aide pas à illuminer notre propre obscurité.

Comme Jung nous le rappelle, « On ne devient pas éclairé en imaginant des figures de lumière, mais en rendant l'obscurité consciente. » [12] La lumière est finalement révélée par l'obscurité; elle a besoin de l'obscurité, car autrement, comment pourrait-elle être la lumière ? Les ombres sont à la fois l'expression d'une absence et d'une présence de lumière, car il n'y a pas d'ombre sans lumière. Plus l'ombre est noire, plus la lumière qui produit la projection est forte. Nous pensons d'habitude que « l'illumination » est de « voir la lumière », mais « voir l'obscurité » est aussi une forme d'illumination. Il existe une forme supérieure de lumière, encodée et cachée dans l'obscurité, qui transcende la dualité de la lumière VS l'obscurité : c'est la lumière de la conscience elle-même. Cette lumière sans forme a la propriété d'être non seulement invulnérable aux forces négatives de l'ombre, mais de toucher et transfigurer quiconque la « voit ». La lumière de la conscience primordiale, lucide, auto-réflexive, nous éveille à la nature onirique de la réalité.

Wesselman parle de cette lumière dans sa discussion avec Makua : »Les vibrations des états d'être supérieurs sont connectés à la Lumière qui émane de la Source. Cela révèle sans équivoque que notre être de lumière, notre Âme [notre Soi Supérieur], est un fragment de la grande Lumière spirituelle qui n'est pas soumise à la distorsion des forces obscures. » La meilleure protection contre les influences négatives, et dans certains cas la possession, par les aspects malins du virus 'e'epa/wetiko est d'être en contact avec son intégrité intrinsèque, c'est-à-dire être « maître de soi » - en possession de la partie de soi qui ne peut pas être possédée, c'est-à-dire le Soi, la totalité de son être.

Être en contact avec sa vraie nature agit comme une amulette ou un talisman sacré, nous protégeant et nous blindant des effets pernicieux du mal. Nous ne « vainquons » pas le mal en luttant contre lui (dans ce cas, si nous jouons son jeu, nous avons déjà perdu), mais en contactant la partie de soi qui est invulnérable à ses effets. Il est très important de contempler les multiples façons par lesquelles le virus du 'e'epa/wetiko dévie la psyché, car ce faisant, nous pouvons découvrir et faire l'expérience directe de la partie de nous qui est incorruptible, qui est l'endroit même depuis lequel nous pouvons apporter des changements réels et durables à notre monde. Ces forces vampiriques non-locales semblent être les gardiens du seuil de notre évolution consciente, en testant l'humanité.

En illuminant l'obscurité, nous devons compter sur une « puissance supérieure » (la « sur-âme » de Wesselman, ou Soi Supérieur), une force en nous qui dépasse et transcende notre propre ego, c'est-à-dire le Soi, notre totalité intrinsèque. Paradoxalement, nous ne nous serions pas reliés avec la totalité du Soi sans l'intervention du virus du 'e'epa/wetiko.

Sans une rupture dans sa symétrie, l'ordre supérieur et la vraie nature de notre Être n'aurait pas pu se rencontrer et prendre conscience d'elle-même. S'il n'y avait pas les obstacles du virus du 'e'epa/wetiko, nous aurions dû les inventer intentionnellement, car c'est en surmontant les obstacles que nous développons les qualités supérieures dont nous avons besoin pour libérer notre potentiel inexploité. D'ailleurs, le mot « Satan » signifie aussi celui qui crée des « obstacles ».

Tout comme un virus normal mute pour résister aux tentatives de guérison, le virus 'e'epa/wetiko, polymorphe et mercuriel, nous oblige à muter ─ et évoluer ─ par rapport à lui. D'une manière très concrète, le virus 'e'epa/wetiko nous « soigne » de notre attitude erronée envers lui et envers nous-mêmes. C'est comme si le mal du virus 'e'epa/wetiko était lui-même l'instrument d'une intelligence supérieure conçue pour nous relier à une source sacrée, créatrice, en nous-mêmes. Le virus du 'e'epa/wetiko exige littéralement que nous trouvions notre pouvoir et devenions insensibles à son oppression, de manière à mettre un terme à la servitude et nous affranchir. Le parasite du 'e'epa/wetiko est à la fois la cause de l'inhumanité de l'humanité, et à la fois la plus grande force catalytique de l'évolution que l'humanité connaisse (ou ne connaisse pas). Il nous confronte à un choix difficile : évoluer ou s'auto-détruire.

Bien qu'apparemment en opposition à notre vraie nature, d'un point de vue plus large le virus du 'e'epa/wetiko nous introduit à elle, et est lui-même son expression déguisée. Quand nous en prenons conscience, la question se pose : comme le virus du 'e'epa/wetiko nous introduit à une plus grande unité et une perfection que nous ne soupçonnions pas, est-il le plus grand mal, ou au contraire l'instrument du plus grand bien ?

Ce point de vue intérieur où coïncident et se mélangent les opposés ─ la « coincidentia oppositorum » ─ est le point de vue transpersonnel du Soi. Voir à travers la lentille « transpersonnalisante » du Soi nous permet de ne pas nous personnaliser, de ne pas nous figer dans un individu séparé et a priori concret.

Véritable phénomène quantique, [13] le virus du 'e'epa/wetiko est simultanément le pire poison et le meilleur des remèdes. Le virus du 'e'epa/wetiko fera-t-il chuter notre espèce, continuera-t-il à inspirer notre auto-destruction, ou va-t-il nous éveiller ? Sommes-nous prêts à accepter ce qu'il révèle sur nous ? En tant que phénomène « rêvé », la manifestation du virus du 'e'epa/wetiko dépendra de la façon dont nous le rêverons à l'avenir.

Notes

1. Toutes les citations du livre de Wesselman The Bowl of Light (Boulder: Sounds True, 2011) sont extraites des pp. 224 - 237.
2. R. D. Laing, The Politics of Experience (New York: Pantheon, 1971), 73.
3. Les points de vue relatifs et absolus s'interpénètrent tant et si bien qu'ils ne devraient pas être considérés comme séparés. Par exemple, ce serait une erreur de s'identifier uniquement au point de vue absolu (dans lequel le virus 'e'epa/wetiko est perçu comme virus « irréel », et où donc il n'existe pas) et de ce fait marginaliser le point de vue relatif; les deux doivent être simultanément honorés.
4. Joseph Campbell, ed. Spiritual Disciplines: Papers from the Eranos Yearbooks, Vol. 4 (Princeton: Princeton University Press, 1985). p. 254.
5. Citation tirée de Minder, « Sabina Speilbrein, Jung's patient in the Burgholzli, » Journal of Analytical Psychology, 46 (1): 45.
6. J'emploie le terme « psyché » comme Jung, dans le sens où elle inclut la totalité des processus psychiques, conscients comme inconscients. La psyché, comme elle est non-locale, n'est pas juste contenue dans notre crâne; nous sommes entourés, et contenus dans la psyché.
7. II, 3, 83.5-30.
8. Simone Weil, « The Love of God and Affliction, » in Simone Weil Reader, ed. G. Panichas (Mt. Kisco, NY; Moyer Bell Limited, 1977), 441.
9. Extrait d'un texte de Jeanne de Salzmann publié à l'origine dans Gurdjieff: Essays and Reflections on the Man and His Teaching (New York: Continuum, 1996), ed. Jacob Needleman and George Baker; en anglais ici.
10. Bohm, Sur le dialogue, 58.
11. Ibid., p. 58-59.
12. Jung, Alchemical Studies, CW 13, par. 335.
13. Par phénomène quantique, je fais référence à la nature de la lumière - onde ou particule ? La réponse : cela dépend de la façon dont elle est observée (ou comme je le dis, de la façon dont nous la « rêvons »).