Contribution au débat du 28 juin 2011 à Paris à l'initiative du Collectif Tunisie Nouvelle - «Campagne pour l'audit des créances de l'UE envers la Tunisie et l'abolition de la part illégitime de celles-ci».

L'origine d'une relation inégale

La dette extérieure d'un pays est historiquement un mécanisme de domination de pays puissants sur des pays vassaux ou colonisés. Incontestablement la Pologne, comme d'autres pays d'Europe de l'Est, a une histoire de vassalité, de soumission politique face aux pays d'Europe occidentale puissants (France Angleterre) et face aux Etats-Unis. La dette publique est donc consubstantielle de cette vassalité.

Arrêtons-nous sur le premier créancier historique de la Pologne, la France. Les liens entre la Pologne et la France sont anciens, ils datent du 17 siècle au moins, mais ils sont marqués par une relation inégalitaire : la France s'immisçait tout au long du 17 et 18 siècle dans les affaires intérieures de la Première République nobiliaire polonaise en soutenant financièrement et militairement des prétendants au trône électif polonais contre les candidats proches des Habsbourg. Ce processus allait si loin qu'un des rois polonais du 18ème siècle, Stanislaw Leszczynski, chassé par les Habsbourg de son royaume obtint de la part du roi de France le duché de Lorraine en fief et sa fille épousa Louis XV. Lorsque la Pologne perdit son indépendance entre 1772 et 1795, partagée entre ses voisins la Prusse, la Russie tsariste et l'Autriche des Habsbourg, ce fut grâce aux idéaux de la Révolution Française que les Polonais construisirent un mouvement indépendantiste moderne.

L'objectif des indépendantistes polonais fut d'emblée la construction d'une communauté politique moderne basée sur l'égalité des citoyens devant la loi et l'abolition des ordres féodaux et du servage des paysans. C'est ainsi que tout au long du 19ème siècle les indépendantistes polonais comptent sur le soutien de la France républicaine et/ou bonapartiste. Le jacobin Tadeusz Kosciuszko dirige l'insurrection de 1794, le général Jan Henryk Dabrowski, dont le nom est gravé sur l'Arc de Triomphe, la légion polonaise de Napoléon Bonaparte. Les révolutions de 1830 et 1848 sont accomplies en France en soutien à la Pologne victime des rois oppresseurs, les intellectuels et les chefs politique polonais trouvent massivement refuge en France après 1830 (« la Grande Emigration »). Jaroslaw Dabrowski, chef indépendantiste de l'insurrection anti-tsariste de 1863, dirige l'armée de la Commune de Paris. Parmi les Communards, 400 sont des exilés polonais. Non seulement des Polonais participent à la fondation de la 1ère Internationale des Travailleurs, mais encore, c'est à Paris qu'est créé le 17-21 novembre 1892 le Parti Socialiste Polonais ! C'est donc tout naturellement que les Polonais pensent qu'une France Républicaine va les aider à combattre les régimes tsariste, prussien et habsbourgeois qui occupent leur pays. Ils et elles sont bien déçu/es lorsque la 3ème République s'allie avec la Russie tsariste, dernier empire absolutiste et liberticide en Europe pour mener avec lui la Grande Guerre contre l'Allemagne. Mais c'est justement la guerre de 1914-1918 qui apporte l'occasion rêvée pour l'indépendance polonaise : lorsque la Russie révolutionnaire se retire du conflit (et que Lénine proclame la paix sans annexions ni réparations tout en répudiant la dette tsariste considérée comme illégitime envers le peuple russe) et que l'Allemagne s'effondre en nombre 1918, les socialistes polonais forment le premier gouvernement de la Pologne indépendante et proclament la République.

L'aide ou la dette

C'est à ce moment-là qu'intervient la question de la dette. La nouvelle Pologne est un pays pauvre, sous-développé. Il lui faut tout construire : un appareil d'Etat, une armée, des institutions sociales et culturelles, des écoles, une industrie, développer les chemins de fer, les ports, les routes. Il faut également sortir la masse des paysans des restes de la féodalité en partageant les propriétés terriennes de l'aristocratie afin de satisfaire la « soif de la terre » de la campagne surpeuplée. Pour cela les dirigeants polonais demandent de l'aide aux pays puissants qui soutiennent la création de ce nouvel Etat : la France, la Grande-Bretagne et les Etat Unis d'Amérique. Ce soutien n'est pas désintéressé : particulièrement la France a besoin des nouveaux pays de l'Est de l'Europe (Pologne, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Roumanie) afin de faire barrage aussi bien à la revanche du nationalisme allemand qu'à l'expansion redoutée de la Russie soviétique. Ce fut cette aide qui constitua la première dette. La France organise et arme la nouvelle armée polonaise utilisée immédiatement contre la Russie bolchévique en 1920. Un prêt français de 1923 de 500 millions de francs or sert à créer et à soutenir la monnaie polonaise. Un prêt des Etats-Unis de 1924 de 27 millions de dollars sert à la création de la banque centrale polonaise. Les capitaux anglais, américains, mais aussi allemands et italiens, privés et publics, investissent en Pologne qui est avant tout un pays capitaliste participant à l'économie mondiale capitaliste en tant que pays périphérique, source de matière premières, de produits agricoles et de main-d'œuvre bon marché. En 1925, 7 ans après la proclamation de l'indépendance, la dette publique polonaise vis-à-vis des prêteurs étrangers s'élève à 70 millions de dollars. Elle augmente constamment depuis. Les banques polonaises sont détenues à 33% par le capital étranger. Certains secteurs industriels clés sont entièrement aux mains de capitalistes étrangers (charbon, sidérurgie, téléphonie, électricité, chimie). Mais on ne peut pas dire qu'à l'époque l'Etat polonais n'a aucune marge de manoeuvre ou qu'il dilapide l'argent des créanciers. Malgré la domination politique d'une aristocratie conservatrice, mais animés par un idéal patriotique, les leaders politiques, les fonctionnaires du nouvel Etat ainsi que le peuple qui croit en une amélioration de sa vie dans un pays indépendant parviennent à de vraies réalisations en tout juste 20 ans : construction du port de Gdynia, de la marine marchande polonaise, de nouvelles industries modernes dans les régions défavorisés, mise sur pied d'un système scolaire général...

La guerre et la dette

C'est la guerre que l'Allemagne nazie mène contre les « races sous-hommes » qui anéantit ces efforts. L'occupation nazie en Pologne (1939-1945) est féroce, beaucoup plus dure que l'occupation de la France par exemple. La Pologne est ravagée. Six millions de ses citoyens, dont la totalité des citoyens polonais de confession juive, sont tués. L'armée polonaise en exil, dirigée par le général Sikorski, fidèle à « l'accord d'amitié » pourtant si inégal, participe en 1940 à la bataille de la France et les escadrons de pilotes polonais s'illustrent dans la bataille d'Angleterre. Les Polonais sont présents sur tous les fronts dans toutes les armées alliées, en Afrique, lors du Débarquement....Cette précision est d'importance lorsqu'on s'aperçoit qu'une fois la victoire sur le nazisme acquise, les « alliés » occidentaux somment sans vergogne leur «ami » de payer sa dette.... La Pologne doit en 1939 4,5 milliards de Zlotys à ses créanciers occidentaux, dont respectivement 2 millions de dollars/or aux Etats-Unis, 2,5 millions de Francs/or à la France, 4,5 millions de livres à la Grande-Bretagne ainsi que d'autres dettes vis-à-vis de l'ancien empire habsbourgeois pourtant aboli en 1918. Quand à l'Union Soviétique, elle se sert sur place puisque la progression de son armée contre Hitler l'amène à occuper la Pologne et à imposer un gouvernement polonais qu'elle contrôle : durant les premières années d'après-guerre l'URSS démonte ce qui reste des usines ayant appartenu à des Allemands ou passés sous contrôle allemand pendant l'occupation. Tout au long de l'existence du système communiste, l'URSS, en tant que premier partenaire imposé à une Pologne vassale, achètera des matières premières polonaises non pas en devises occidentales pouvant servir à des échanges internationaux, mais en « roubles de transfert ». En ce qui concerne les alliés occidentaux (France, Grande Bretagne et Etats-Unis d'Amérique), la « dette de sang » n'a servi à rien à la Pologne : dès 1945 la Pologne est sommée de payer sa dette financière et le gouvernement polonais communiste accepte de le faire. A peine la paix proclamée, la France réclame 4,2 milliards de Francs à son allié et le somme d'engager des négociations qui se poursuivent pendant plusieurs années. Ce chiffre inclut les très anciennes dettes datant de la création de la République en 1918, le coût de l'entretien de l'armée polonaise en France (sic !) ainsi qu'un facteur de discorde qui devait aller en s'amplifiant au fil des ans : le coût de nationalisation des usines de capitalistes français installés en Pologne par la loi polonaise de 1946. Alors que la Pologne a déjà payé un lourd tribut de sang, Anglais et Américains réclament des indemnités pour « leurs biens ». Il n'y a que l'Allemagne qui ne peut prétendre à rien, tout le monde étant d'accord sur le fait que la saisie des biens allemands constituait pour les pays qu'elle avait occupée des réparations de guerre. La Pologne communiste accepte de payer, mais elle avance aussi des arguments qui équilibrent la balance de pouvoir : la France détient toujours l'or du Trésor polonais du gouvernement en exil, de nombreuses entreprises françaises en Pologne ont appartenu à des dignitaires vichystes collaborateurs nazis et il est évident que les usines dont il est question sont en ruine du fait des ravages terribles des combats armés. C'est plutôt le gouvernement polonais qui devrait être indemnisé pour les avoir remises en marche....

Devant la perspective d'un refus de paiement, la France renonce à faire payer le gouvernement polonais cash et accepte un accord signé le 19 mars 1948 qui lie le remboursement de la dette à la poursuite et l'approfondissement d'une coopération économique entre les deux pays. En effet, une somme fixe sera prélevée sur la balance de paiement entre les deux pays. Ainsi, l'augmentation de la somme dépendra de l'augmentation du volume des échanges commerciaux entre les deux pays. Ce système arrange parfaitement le gouvernement communiste soumis la domination soviétique - Staline force alors la Pologne à renoncer à l'argent du Plan Marshall alors que le pays a cruellement besoin de fonds pour se relever des ruines, construire et équiper son industrie, réaliser les ambitieux projets éducatifs, culturels, sociaux et économiques du nouveau système. Ainsi, le gouvernement polonais lie son existence à la poursuite des échanges avec l'Occident et peut espérer desserrer un tant soit peu l'étau soviétique. En effet, le charbon polonais est toujours recherché en ces temps d'après-guerre alors que la Pologne souhaite accéder aux technologies dont le capital français est propriétaire : équipement pour l'industrie sidérurgique et navale, technologies de construction des routes, aéroport, tunnels, centrales électriques... Certains diplomates français voient dans cette ouverture également une aubaine : la Pologne peut devenir pays de sous-traitance pour les industries françaises selon la vieille dialectique du pays développé produisant à bas coûts dans un pays vassal.

La « guerre froide » - la dette contre le développement ?

L'accord ne sera cependant pas appliqué en 1948 pour cause de « guerre froide » : suite à la montée de l'hostilité entre les Etats-Unis et l'URSS, les relations de la Pologne sont gelées avec tous les pays occidentaux. Lorsque les relations reprennent en 1956, le gouvernement polonais est dirigé par Wladyslaw Gomulka, porté au pouvoir par le peuple lors de la « révolution d'octobre 1956 » contre l'avis de l'Union Sovétique. Gomulka est avant tout un nationaliste polonais : s'il entend payer la dette, c'est pour réaliser le programme de modernisation de la Pologne afin de sortir du sous-développement et traiter d'égal à égal avec l'Occident. Certes, la faiblesse économique polonaise est telle que pour solder le passé, Gomulka accepte une petite dette : en 1956 la Pologne paie les indemnités pour la nationalisation des biens des capitalistes américains avec un prêt de 233 millions de dollars accordé par les mêmes... Cependant, le montant de cette dette est bien dérisoire comparé aux chiffres dont nous serons coutumiers 20 ans plus tard : en 1970 la dette polonaise extérieure est de 1,7 milliard de dollars, mais en 1980 elle est de 25 milliards !

En ce qui concerne la France, les relations de la Pologne avec ce pays s'améliorent dès 1956 et plus encore avec l'arrivée au pouvoir du Général de Gaulle en France. La France gaulliste pratique une politique de « détachement » en douceur de la sphère d'influence soviétique des pays communistes anciennement alliés et vassaux en leur accordant tout ce dont ils ont besoin pour leur développement autonome. Certains diplomates particulièrement polonophiles (Etienne Burin des Roziers, proche de De Gaulle et ambassadeur en Pologne dans les années 60) comparent même l'aspiration polonaise au développement et au bien-être de sa population à l'ambition largement partagée par la droite gaulliste et la gauche d'une France moderne, urbaine, profitant de la société de consommation ! Les équipes de fonctionnaires des différents ministères, les délégations d'entreprises, d'universitaires, de scientifiques et d'artistes se succèdent de la France vers la Pologne et de la Pologne vers la France tout au long des années 60 . Les possibilités de coopération industrielle, commerciale, scientifique et technique sont examinées et dûment fixées par des accords bilatéraux avantageux pour les deux partenaires. La Pologne cherche à acheter auprès de la France les biens d'équipement pour ses industries naissantes : les infrastructures ferroviaires, aéronautiques, les centrales thermiques et hydrauliques, les équipements de sidérurgie... La Pologne a besoin de tout cela pour pouvoir elle-même produire, en plus du charbon, des machines-outils, des voitures, des trains, des bateaux sans parler des biens de consommation modernes dont la population polonaise, qui vit une formidable ascension sociale par l'éducation gratuite et une urbanisation sans précédent, est littéralement assoiffée. Les plans économiques du gouvernement polonais incluent la création de secteurs qui n'existaient pas auparavant : la chimie (raffinerie de pétrole, chimie fine, engrais artificiels), les médicaments, les cosmétiques, le plastique, en plus de l'essor de la production du textile, agroalimentaire et de la mécanisation de l'agriculture polonaise. Un tel chantier ainsi que les possibilités de débouchés qui s'ouvrent pour les entreprises de pointe françaises enthousiasment le diplomate français Eric de Carbonne, qui dans une note au MAE du 2 mai 1957 va jusqu'à affirmer que la France devrait absolument soutenir ce projet de «sortie d'une économie coloniale»!

Mais la dette est là pour contrecarrer ces beaux projets. Le paiement de la dette reprend selon les modalités de l'accord de 1948 mais le résultat est mitigé, la demande en charbon s'amenuisant dans l'économie alors que la Pologne des années 1960 n'a toujours à offrir que cette matière première ainsi que ses produits agricoles sur les marchés internationaux. Les fonctionnaires du ministère de l'économie et du budget français qui dirigent les nouvelles négociations pour le paiement de la dette de 1957 à 1959 sont beaucoup moins gaullistes que le Quai d'Orsay. Pour eux, seule la dette compte et son remboursement doit être prioritaire. C'est à l'obstination de ces défenseurs du capital français que l'on peut comprendre à quel point la dette du pays dominé à l'égard du pays dominant et créancier est consubstantielle du capitalisme. Pour permettre à la Pologne d'acheter des biens industriels indispensables et -naturellement - de payer sa dette, on a donc recours à ... une nouvelle dette. En 1959 la France accorde à la Pologne un prêt de 10 milliards de Nouveaux Francs. La Pologne s'endette également auprès de la Grande-Bretagne, de l'URSS, des USA, du Canada et de la Tchécoslovaquie pour réaliser son programme de développement. Pour faciliter son intégration dans la sphère d'échange capitaliste et lui permettre d'accèder aux devises indispensables pour payer sa dette, les puissances occidentales l'associe au GATT dès 1959.

L'essor de la dette et la chute

Petit petit, l'industrie polonaise se construit. Si les échanges franco-polonais restent finalement modestes dans les années 60, un ambitieux programme culturel et scientifique a formé une nouvelle génération de cadres polonais tournés vers l'Occident qui seront au premier plan pour les transformations majeures des années 70-90. En effet, la politique gaulliste a aussi encouragé et financé la création de structures d'enseignement du Français en Pologne, les échanges universitaires dans de multiples domaines (y compris l'histoire, l'archéologie, la littérature, les sciences exactes, jusqu'à la fondation de la première faculté de traduction et interprétariat à l'Université de Varsovie), les nombreux voyages d'étudiants boursiers en France, les échanges artistiques qui donnent au peuple polonais l'impression de participer à la Culture Universelle. Les années 70 voient une accélération de cette politique. Dans l'imaginaire politique polonais (des pro-communistes comme des dissidents), ce sont les bonnes relations du premier secrétaire du parti communiste et chef d'Etat polonais, le francophone et ancien migrant en France Edward Gierek, qui lui ont permis l'obtention de très nombreux crédits auprès des banques et les Etats occidentaux. Dès l'avènement de Solidarnosc et la crise de la dette de 1980 les Polonais ont fustigé la « naïveté » de ce dirigeant tandis que lui-même dans ses mémoires défend sa politique comme la seule rationnelle possible pour continuer à moderniser l'industrie du pays et permettre à la société d'accéder à un succédané de société de consommation. Ce n'est que depuis peu que la gauche polonaise a pris conscience de l'imbrication de la Pologne communiste dans le système économique capitaliste mondial et par conséquent du fait que les crédits accordés dans les années 70 constituaient des pétrodollars recyclés en dette à destination des pays pauvres. Aujourd'hui encore il n'est pas facile pour le peuple polonais de se percevoir comme un pays pauvre et manipulé par des plus puissants, et pourtant la question de la dette nous montre notre véritable statut au sein du système politique et économique mondial. Il est du devoir de la gauche de démystifier le nationalisme polonais en présentant aux citoyens les véritables origines des catastrophes de 1980-89 dont nous payons toujours les effets.

De même il serait faux de dire que les crédits à l'origine de la dette de 25 milliards de dollars en 1980 auraient été tous gaspillés. Ils ont bien servi à la modernisation de l'industrie mais principalement à équiper les industries extractives (charbon, cuivre, souffre...) dont le produit servit tout d'abord à payer la dette sur le marché international au détriment du développement intérieur. La Pologne des années 70 produit certes de l'acier, des machines, des trains, des voitures, des bateaux etc. mais avec des technologies anciennes qui ne sont pas à même de concurrencer l'Occident sur son propre terrain. C'est pour cela que le principal marché des produits industriels polonais sont les pays émergents grâce à des relations que la diplomatie polonaise crée et entretient non sans talent. Mais la population polonaise a soif de société de consommation - elle veut vivre à l'occidental, consommer des produits des nouvelles technologies (équipement ménager, voitures individuelles, téléphones, téléviseurs, matériel hifi...) et ne se satisfait plus des rares produits nationaux. Le gouvernement a donc également utilisé les crédit en pure perte pour acheter des biens de consommation et une partie de l'argent a été détournée et gaspillée par les fonctionnaires du parti.

La crise de la dette polonaise en 1980 a donc les mêmes origines que dans tous les autres pays en développement soumis au même mécanisme de domination : l'augmentation du taux d'intérêt du dollar par le gouvernement des Etats-Unis et la chute des cours des matières premières. La Pologne doit payer 8 milliards de dollars immédiatement dont 2,5 milliards de dollars au titre du service de la dette. Elle ne peut pas. En avril 1980 une délégation des banques occidentales créditrices vient à Varsovie et contraint Gierek à accepter le premier plan d'ajustement structurel. S'agissant d'un système économique dirigé entièrement par l'Etat, la manoeuvre est simple : le gouvernement augmente le prix de la nourriture. En août 1980 c'est la grève dans les chantiers navals de Gdansk et la création du syndicat indépendant Solidarnosc (Solidarité). Les grèves gagnent tout le pays, le chef du part est destitué et accusé d'être responsable de la crise de la dette. Les 8 millions de Polonais membres de Solidarnosc, premier mouvement social de cette ampleur dans toute l'histoire du pays, ont l'impression qu'ils luttent pour un « autre socialisme » où les ouvriers dirigeraient réellement leurs usines et leur pays, sans se rendre compte que Solidarnosc n'est en définitive qu'un premier mouvement social en réponse à la crise de la dette .... Cette méconnaissance des vraies causes de la crise sera par la suite fatale au mouvement et aux travailleurs polonais. L'agitation sociale de Solidarnosc dure une année jusqu'à ce que le nouveau chef d'Etat, le général Jaruzelski, y mette fin le 13 décembre 1981 en instaurant l'état de siège, délégalisant le syndicat et emprisonnant de nombreux militants. La Pologne devient un pays fermé, les relations avec les pays occidentaux se tendent, Jaruzelski cesse de payer la dette. La guerre froide reprend de plus belle : l'URSS qui occupe l'Afghanistan commence à installer ses missiles SS20 dans ses pays satellites tandis que les Etats-Unis lancent la guerre des étoiles et installent les missiles Pershing en Europe occidentale. Face cette menace de guerre généralisée la situation ne peut pas durer. La Pologne reprend le paiement et les négociations pour payer la dette qui aboutissent à son admission au FMI en 1986. Parallèlement, face au nœud coulant de la dette, les communistes ne veulent pas être les seuls responsables de la catastrophe économique : ils négocient avec l'opposition en février 1989 (accord de la « Table Ronde ») une sortie du système. Les citoyens polonais pensent qu'ils ont remporté la lutte pour la démocratie et pourront désormais choisir leur destin en être humain libre et responsable et s'investissent dans les premières élections libres du 4 juin 1989. Le système international figé depuis 45 ans s'effondre autour d'eux : l'URSS doit retirer ses troupes des pays de l'Est et d'Afganistan, l'Allemagne est réunifiée, Gorbatchev salue « la Maison Europe » et un nouvel ordre mondial mais déjà l'URSS est démembrée et de nouveaux Etat nationalistes surgissent.

La « thérapie de choc » - premier plan d'ajustement structurel en Europe

Face à tous ces bouleversements, la dette demeure pourtant le moteur majeur des relations internationales et l'instrument efficace de la mise en place du nouvel ordre néolibéral. Lors des élections de 1989 la dette polonaise a augmenté mécaniquement jusqu'à atteindre 41,4 milliards de dollars! Les citoyens sont sommés de payer et l'économie vacillante ne leur permet pas d'espérer une amélioration probable. L'instabilité, la pénurie, l'inflation surtout rongent le pays alors même que le dernier gouvernement communiste a commencé un vaste programme de privatisation au profit des fonctionnaires du régime et a créé les premiers mécanismes du marché. C'est alors quà l'été 1989 les « Chicago boys » - Jeffrey Sachs et George Soros - s'installent à l'hôtel Mariott, le plus luxueux de Varsovie. Ils dictent au premier gouvernement non-communiste de Tadeusz Mazowiecki ce qui sera connu comme la «thérapie du choc » - ou « le grand plongeon dans une baignoire d'eau bouillante » : la transformation brutale d'un communisme d'Etat et d'une économie planifiée directement en une économie ultralibérale telle qu'elle n'existait même pas dans les pays occidentaux. L'artisan de cette politique est un homme inconnu des dirigeants de Solidarnosc que les conseillers américains installent comme ministre de l'économie : Leszek Balcerowicz. La promesse de réduction de l'énorme dette est assortie d'une seule condition : cet homme non élu par personne doit gouverner la Pologne et appliquer le plan de la stratégie de choc, le plan Balcerowicz. D'autres inconnus formés dans les universités américaines et par les fondations allemandes Adenauer et Ebert et des fondations américaines deviendront ministres dans les gouvernements de plus en plus ultralibéraux de Bielecki, Olszewski et Suchocka. Ils et elles trusteront tous les postes au sommet de l'Etat, des entreprises publiques, des banques et des universités jusqu'à former la nouvelle oligarchie compradore qui tient la Pologne d'une main de fer jusqu'à ce jour. Toute opposition sera impoyablement éliminée : les années 1990-1993 voient une véritable chasse aux sorcières dans les universités, les médias, les syndicats, les coopératives nettoyés de leurs « éléments de gauche », tandis que ceux qui arrivent à exprimer les mécontentements sociaux sont ridiculisés dans les médias, attaqués par la police et la justice (le cas du syndicat paysan « Audodéfense » de Andrzej Lepper) ou disparus dans de mystérieux accidents de voiture (Daniel Podrzycki, président du syndicat Août 80 et leader de la gauche anticapitaliste renaissante en 2005).

Car il faut déraciner méthodiquement toute opposition tout en faisant croire que la démocratie existe encore pour exécuter l'un des plus grands hold-hup de l'histoire polonaise: l'ouverture absolue et brutale des frontières aux productions des multinationales occidentales, la privatisation des meilleurs morceaux des entreprises que la nation polonaise s'est appliquées à construire depuis 1945, la mise au chômage de 6 millions de personnes travaillant dans les entreprises publiques fermées sur ordre du gouvernement ou vendues à bas prix, la destruction de structures publiques et parapubliques (associations, coopératives, services publics), la dilapidation méthodique du bien public par des détournements de fonds qui se chiffrent en milliards de dollars . Jusqu'à la prolifération de mafias nationales et internationales en Pologne après le licenciement de milliers policiers de la police criminels en 1993-94, accusés d'avoir servi sous le régime communiste ! C'est le règne du capitalisme sauvage... en échange d'un prêt de 3 milliards de dollars pour stabiliser un Zloty soumis à une impitoyable inflation jusqu'en 1995. Le résultat du choc est une chute de la production continue pendant 10 ans. Le niveau de PIB de 1989 est atteint uniquement en 1999, 10 ans plus tard ! 50% des emplois industriels ont disparu et avec eux des branches entières d'industrie : chantiers navals, marine marchande, chimie, aéronautique, d'autres sont sévèrement réduits (automobile, textile)... Des villes, des régions entières sont mises au chômage : Lodz, la capitale du textile n'est qu'une ville fantôme, les villes du sud industriel de Petite Pologne perdent la moitié de leur population active. Le nord et de nord-ouest de la Pologne sont sévèrement touchés par la fermeture brutale des milliers de fermes d'Etat dont les ouvriers agricoles incapables de retrouver une place dans le monde de la concurrence sombrent dans le chômage, la misère, l'alcoolisme. L'agriculture polonaise paysanne qui assurait un revenu à 37% de la population est soumise aux prix mondiaux : les paysans endettés pour moderniser leur outil se trouvent confrontés à des taux d'intérêt multipliés par 20, des milliers arrêtent leur exploitation au début des années 90, se suicident. Les protestations des paysans donnent naissance aux premiers mouvements populistes nationalistes de droite (syndicat Autodéfense) adroitement manipulés par l'Eglise et l'extrême droite afin de désigner non pas le véritable responsable, le capitalisme international, mais des « communistes » toujours prétendument aux manettes du pays. Il faut dire que le peuple polonais, effrayé par la destruction ultralibérale, vote en 1993, 1995 et 2001 pour les successeurs des communistes : la coalition du parti socialiste post-communiste et le président de la République Kwasniewski, ancien apparatchik. Mais si les socialistes réintroduisent quelques droits sociaux et reconstruisent l'appareil d'Etat, ils se soumettent entièrement aux exigences des institutions financières internationales, poursuivent les privatisations, accentuent le processus de transfert du bien public dans les mains de l'oligarchie privée issue du milieu de la nomenklatura communiste. Ils finissent même par soumettre la politique polonaise aux objectifs d'impérialisme guerrier des USA, reçoivent Goerge Bush en grande pompe à Varsovie et offrent le territoire polonais aux agents de la CIA qui y torturent les détenus de guerre. En politique intérieur ils n'exécutent pas le mandat que les électeurs leur ont donné pour revenir à la séparation de l'Eglise et de l'Etat, reconstruire l'école publique et gratuite et revenir à la liberté de l'IVG. Violant la volonté des électeurs, ils préfèrent soumettre le pays à l'Eglise et au capital international.

Pour cette « transformation » si dramatique pour les Polonais/es, l'oligarchie polonaise est récompensée par les créanciers occidentaux: dès février 1990 le « Club de Paris » accorde à la Pologne une réduction de 2/3 de sa dette de 32 milliards de dollars. Les 10 milliards restant doivent être payés en 8 ans. En mars 1994 la Pologne signe l'accord avec le « Club de Londres » qui réduit la dette polonaise( 11 milliards de dollars) de moitié, les reste est du jusqu'à 2012. Pour financer ce paiement, la Pologne vend sur les marchés financiers 8 milliards de dollars d'obligation Brady. Depuis, la Pologne paye toujours les intérêts de la dette : de 1995 à 2005, la Pologne a payé annuellement 2 milliards de dollars. Malgré cela et malgré les réductions, le pays est endetté à hauteur de 34 milliards de dollars en 2003, la veille de l'entrée dans l'Union Européenne. En 2008 La Pologne a payé 4,1 milliards de dollars de service de la dette. Et malgré tout, la dette atteint aujourd'hui à nouveau 42 milliards de dollars !

D'où vient la dette nouvelle ?

Pour répondre à cette question, il convient de reprendre l'analyse de cinq économistes de l'Académie des Sciences Polonaises et auteurs d'un premier bilan critique de la restauration du capitalisme en Pologne . Selon eux, le chiffre de 6% de croissance abondamment cité par les médias est trompeur. Sur 20 ans il faut calculer le taux de croissance en y incluant les années 90 ou le taux de croissance fut négatif, surtout entre 1990 et 1997 ! Après cette opération, le taux de croissance de 20 ans de système néolibéral tombe à 3% de moyenne - à comparer au 9% de croissance entre 1945 et 1965, les 20 premières années du régime communiste. Ensuite, un pays où le taux de chômage des actifs reste entre 15 et 20% pendant 20 ans ne saurait s'affirmer prospère ! Surtout si ce chômage n'est pas indemnisé ni réellement combattu et conduit à une économie informelle très étendue (commerce de rue, agriculture de survie, prostitution, jeux d'argent et autres « opérations vides »). Dès 2005 ces 3 à 5 millions de Polonais se mettent sur la route de l'émigration en Grande Bretagne, Irlande, mais aussi de façon saisonnière en Allemagne, France, Espagne, Italie, Suède, Norvège... Selon l'Association Européennes des Travailleurs Migrants, les Polonais travaillent dans le bâtiment et les travaux publics, l'industrie agroalimentaire (abattoirs), l'agriculture intensive, le tourisme, l'hôtellerie et la restauration et les services à la personne. Ils et elles sont massivement employés avec des contrats soumis à la « directive européenne de délégation » et fréquemment n'obtiennent aucunes prestations sociales faute de contrôle du paiement des cotisations. Nombreux sont ceux et celles qui ne ramèneront que peu d'économies à la maison et ne bénéficieront d'aucune retraite faute de paiement des cotisations. Analysant finement le développement de chaque secteur de l'économie polonaise depuis 20 ans, les cinq professeurs d'économie concluent que la Pologne ne vit que de quelques secteurs prospères : l'industrie extractive avec 100 000 mineurs employés dans les mines de charbon de Silésie, le cuivre très recherché sur les marchés internationaux, l'industrie agroalimentaire fortement investie par les multinationales qui font de la Pologne une plaque tournante de la production pour toute l'Europe de l'Est sans que les matières premièrs agricoles soient forcément achetées aux producteurs polonais. Ajoutons-y ce qui reste du textile, de l'automobile, des machines-outils, 100 000 personnes employées dans la grande distribution entièrement aux mains des capitalistes occidentaux et les services aux entreprises (informatiques, nouvelles technologies), le tableau sera complet. La Pologne est absente des industries à forte valeur ajoutée (biotechnologies, informatique, conception des produits), sa population est vieillissante, sa natalité faible ou négative. Il est tout à fait possible que ce soient les générations futures qui payeront au prix fort les effets négatifs cumulés de deux décennies de politiques ultralibérales.

Un des effets majeurs est la persistance d'un fort endettement public. Selon l'analyste politique Dariusz Zalega , comme dans tous les pays européens, ce sont les politiques d'imposition favorisant les entreprises multinationales qui sont à l'origine non pas d'une crise des dépenses, mais d'une crise des recettes. Le capital étranger investi en Pologne est en effet exonéré d'impôts totalement ou partiellement et ses bénéfices ne sont pas réinvestis sur place car la loi ne l'y oblige pas. Ainsi, la totalité des banques polonaises est aux mains du capital étranger ce qui de plus soumet la Pologne aux conséquences de spéculations dangereuses menées dans de lointains pays. De plus, la privatisation massive a privé l'Etat de ressources financières : la plupart des entreprises, infrastructures et services publics (la téléphonie par exemple a été privatisée dès 1991) ont été bradés en dessous de leur valeur. Et il y va sans dire que la logique des privatisations est une loi d'airain : une fois son bien vendu, l'Etat n'en tire un bénéfice qu'une seule fois, lors de la vente. Alors que si l'entreprise lui appartient, elle peut dégager des ressources sur un très long terme... L'Etat néolibéral est un instrument de l'oligarchie et malheureusement il ne se soucie plus du bien de ses citoyens sur le long terme. Il compense son manque à gagner par l'endettement sur les marchés financiers. De plus, l'impôt sur les sociétés est bas : il est passé de 38 à 19%. La fraude fiscale des entreprises est très importante faute d'une administration efficace et dévouée au service public (20 milliards par an environ). Le système d'imposition est injuste et favorise l'endettement public : il n'y a que trois tranches d'imposition, ce qui fait que les plus pauvres, les plus nombreux payent plus d'impôt sur le revenu que les plus riches. Même des personnes ne touchant que le salaire minimum de 300 Euros par mois payent l'impôt sur le revenu. Les 10% de Polonais les plus riches qui trustent 80% des richesses du pays investissent alors dans des obligations d'Etat et sont les premiers bénéficiaires de la dette polonaise.

L'endettement des ménages moyens (environ 800 Euros de revenu par mois) est très fort : la faiblesse des salaires conduit à un endettement croissant pour l'achat de biens de consommation (logement, voiture, vacances, électronique...). Il n'y a qu'à se promener dans les centres des villes polonaises pour voir les officines de crédit liées aux banques occidentales qui ont remplacé les boutiques, les cafés et les lieux culturels. Ces établissements proposent des prêts à la consommation avec une facilité racoleuse : on se voit proposer un crédit à l'achat d'un billet de cinéma, en retirant son épargne au guichet ou même dans un distributeur automatique d'argent! Gare au moment où il faudra bien payer ces dettes : la crise de la dette est plus que probable en Pologne, dans 6 mois ou dans 1 an. Il est possible que la crise éclatera fortuitement après les élections d'octobre où les socialistes sont donnés favoris. Ou après le championnat de football Euro 2012 pour lequel l'Etat polonais s'est également fortement endetté, tout comme la Grèce pour les funestes Jeux Olympiques de 2004. La crise de la dette se profile déjà avec la faillite prochaine des fonds de pension polonais, endettés à hauteur de 250 milliards de Zlotys. Sans parler d'un autre sujet jamais abordé par les politiques et les médias mais déjà source de grandes inquiétudes pour les associations locales de citoyens qui tentent en vain d'alerter l'Etat et l'Union Européenne sur la situation : les fonds structurels européens, censés permettre le développement régional et servir à la construction d'infrastructures, alimentent en fait l'endettement des villes et des collectivités territoriales car celles-ci doivent apporter d'important fonds propre afin de toucher les subventions. Incapables de le faire, les collectivités polonaises émettent des obligations vendues sur les marchés financiers... L'Union Européenne est touchée de plein fouet par la crise de la dette. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la crise de la dette polonaise est devant nous.

Sources

La dette polonaise de 1939 à 1970
  • Monika Karbowska, « La détente en Europe. Les relations Franco-Polonaises de 1956 à 1963 », mémoire de DEA d'Histoire des Relations Internationales Contemporaine, Université de Paris I Panthéon Sorbonne, 1995.
  • Monika Karbowska, notes pour une thèse de doctorat de 3ème cycle «Les relations franco-polonaises de 1956 à 1969 », Archives du MAE, des ministères de l'économie et du budget, de l'industrie et de l'équipement, de l'agriculture et de l'éducation nationale.
L'économie polonaise de 1980 à nos jours
  • Andrzej Karpiński, Tadeusz Kowalik, Paweł Kozłowski, Kazimierz Łaski, Stanisław Paradysz, « Dwudziestolecie polskich przemian. Konserwatywna modernizacja » (« 20 ans de transformations polonaises. La modernisation conservatrice »). Académie Polonaises des Sciences, Chaire des Sciences Economiques. Varsovie, 2011.
  • Urszula Kuzinska, "Le choc sans la thérapie. 20 ans après l'imposition de la doctrine néolibérale en Pologne », http://uep-eul.org/wp-content/uploads/2010/12/Urszula-Kuzińska-20-ans-de-choc-capitaliste-en-Pologne.doc
  • Jacek Tittenbrun "Z deszczu pod rynnę. Meandry polskiej prywatyzacji » (« De la pluie sous la gouttière. Les méandres de la privatisation polonaises »), 4 tomes, Zysk i ska, 2008-2009.
  • Naomi Klein, « La stratégie du choc », Actes Sud, 2009, chapitre sur la Pologne.
La dette polonaise de 1970 à nos jours
  • Dariusz Zalega, « La domination des fonds de pensions », dans « La dette ou la vie », sous la rédaction de Damien Millet et Eric Toussaint, CADTM 2011
  • Dariusz Zalega, « Skad sie bierze polski dlug publiczny ? » (« D'où vient la dette publique polonaise ? »), Monde Diplomatique Polska, juillet 2011