Arno Klarsfeld, le fils du couple de "chasseurs de nazis", qualifie les spectacles de l'humoriste de "meetings politiques à caractère antisémite".

Beate et Serge Klarsfeld, ici au mémorial de l'Holocauste à Berlin
© IPON-BONESS/SIPA Beate et Serge Klarsfeld, ici au mémorial de l'Holocauste à Berlin
La famille Klarsfeld, au nom des fils et filles des déportés juifs de France, a appelé vendredi à manifester mercredi à Nantes pour demander l'interdiction du spectacle que l'humoriste controversé Dieudonné doit y donner jeudi au Zénith, après ses dérapages antisémites répétés. Le couple de "chasseurs de nazis" Serge et Beate Klarsfeld et leur fils Arno seront eux-mêmes présents mercredi à 18 heures devant le Zénith de Nantes.

"On va à Nantes tous les trois", a affirmé à l'AFP Arno Klarsfeld, qui avait appelé la veille les Français à manifester contre tous les spectacles de Dieudonné après avoir été lui-même violemment pris à partie dans une vidéo postée mardi soir sur le compte YouTube de l'humoriste controversé. "Il est légitime et normal, quand quelqu'un tient des discours antisémites et dit que pas assez de juifs ont été gazés dans les chambres à gaz, que des gens se lèvent pour manifester."

"Les gens qui vont voir Dieudonné y vont pour entendre casser du juif, il fédère les antisémites de tous bords, qu'ils soient islamistes, d'ultra-gauche ou du noyau de l'extrême droite", a-t-il encore estimé. "Ses spectacles sont donc des meetings politiques à caractère antisémite."

Arno Klarsfeld "remercie" Manuel Valls

Dans le viseur du ministre de l'Intérieur Manuel Valls qui étudie depuis la semaine passée la possibilité de faire interdire ses spectacles à la suite d'un nouveau dérapage antisémite contre le journaliste de France Inter Patrick Cohen, Dieudonné a plusieurs fois été condamné pour des propos jugés antisémites. "Je remercie Manuel Valls pour ses prises de position", a indiqué Arno Klarsfeld.

Dieudonné doit à l'État 65 000 euros issus notamment de ses amendes pour propos racistes ou antisémites, dont plus de 37 000 euros en condamnations définitives qu'il n'a pas réglées. Manuel Valls a affirmé vendredi que "tous les services de l'État" doivent se mobiliser pour le contraindre à payer. "L'organisation frauduleuse d'insolvabilité est punie par la loi", a rappelé pour sa part la ministre de la Justice Christiane Taubira dans une tribune publiée par le site Huffington Post.

Christiane Taubira a en outre estimé que "sanctionner avec efficacité est indispensable mais ne suffira pas, pas lorsqu'un pitoyable bouffon spécule davantage sur les dividendes d'un scandale que sur les risques judiciaires". "Ces provocations putrides testent la société, sa santé mentale, sa solidité éthique, sa vigilance. Il nous faut y répondre, car la démocratie ne peut se découvrir impuissante face à des périls qui la menacent intrinsèquement. Il faut donc descendre dans l'arène, disputer pied à pied, pouce par pouce, l'espace de vie commune, faire reculer cette barbarie ricanante, la refouler, occuper le terrain par l'exigence et la convivialité", écrit la ministre.

Dieudonné porte plainte

Selon une source judiciaire, l'humoriste a déposé une plainte mardi au commissariat du 11e arrondissement pour "menaces réitérées de destruction du théâtre de la Main d'or", où il se produit à Paris, et "menaces de violences". L'enquête a été confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP). La BRDP est déjà en charge depuis lundi d'une enquête ouverte par le parquet de Paris sur des propos tenus par Dieudonné à l'encontre de Patrick Cohen.

Plusieurs maires des villes se trouvant sur le chemin de la tournée qu'il entame début janvier à Nantes ont demandé que ses spectacles soient interdits : outre Nantes, Marseille, Limoges en début de semaine, puis Nancy et Metz jeudi ou encore Tours vendredi.

En début de semaine à Nantes, entre 4 500 et 5 000 places avaient été vendues sur les 6 000 disponibles, selon la direction du Zénith.