François Hollande a été sifflé et pris à partie par quelques habitants de Carmaux dans le Tarn. Dans cette commune, fief de Jean Jaurès, où l'on avait voté à 70% pour lui au second tour de la présidentielle de 2012, c'est la déception qui domine.


François Hollande voulait, avec sa visite à Carmaux, "démontrer" qu'il y a pas de rupture entre la pensée de Jean Jaurès et sa propre politique économique. Raté. En marge de l'hommage au socialiste dont on célèbre le centenaire de la mort cette année, le président de la République a été pris à partie par des habitants de cette commune du Tarn qui, aux élections municipales, a déjà adressé un avertissement à son maire PS.

C'est la déception qui domine les commentaires qui ont fusé, mêlés aux sifflets qui rappellent ceux qui avaient visé François Hollande lors des cérémonies du 11 novembre sur les Champs Elysées. Ce mercredi, il avait tenu à s'offrir un bain de foule, près de la place Jean Jaurès, avant de prononcer un discours. Une femme lui a lancé: "J'ai 51 ans, je suis au chômage. J'ai cru en vous Monsieur Hollande." Au passé... alors que le président lui a répété qu'il travaillait pour "faire baisser" le chômage, l'indicateur phare de son quinquennat.

Une autre femme a interpellé le président, remettant en cause la légitimité de sa présence dans la ville de Jean Jaurès. "Vous êtes venu à Carmaux, il y a deux ans. Et vous ne tenez pas vos promesses. Pensez à nous, pensez à nous. Jaurès, il ne parlait pas comme vous et vous venez le saluer aujourd'hui." Quelques encouragements lui ont aussi été apportés, mais ils sont restés au second plan.

Le centre-ville de Carmaux était pourtant quasi-désert, d'après les commentaires que des journalistes ont postés sur Twitter. "Les habitants ont disparu", s'étonnait même un invité cité par l'une des reporters qui suivent le déplacement du président de la République. Un important dispositif de sécurité a en effet été déployé "pour des raisons protocolaires".

Mais il a été vivement critiqué par les curieux venus voir François Hollande, qui leur a répondu de "venir avec [lui]" malgré tout. Insuffisant pour faire taire la grogne. "En 2012, on était là et aujourd'hui on ne peut même pas aller au dépôt de la gerbe", a déploré une habitante. "S'il voyait ça, Jaurès se retournerait dans sa tombe!", s'est indignée une autre femme, citée par l'AFP.

"L'impatience? Je la comprends"

"L'impatience? Je la comprends", a répondu François Hollande plus tard, lors de son discours. "J'entends les interrogations, y compris de mes propres amis", a ajouté le président qui défend actuellement un plan de 50 milliards d'euros d'économie. "Nous avons été élus, j'ai été élu pour redresser la France", a-t-il plaidé devant un auditoire silencieux.

Des élus FN dans la ville de Jean Jaurès

Peu avant l'arrivée de François Hollande, la CGT avait organisé une manifestation contre sa politique "d'austérité". "On ne sait pas ce qu'il vient faire, à part récupérer l'image de Jean Jaurès", déclarait un syndicaliste interrogé par Le Parisien. Dans cette ville où François Hollande avait engrangé 70% des suffrages au second tour de l'élection présidentielle, une manifestante se disait "plus désespérée que déçue" par le président de la République.

Cette défiance croissante s'était également manifestée lors des élections municipales à Carmaux, commune dominée par les socialistes depuis plus d'un siècle. Certes, le maire socialiste sortant a été réélu. Mais ce fut "sans gloire", titrait La Dépêche. Une liste divers gauche s'était maintenue au second tour et le FN, arrivé troisième, y avait largement devancé l'UMP. Et "pour la première fois des élus Front national siègent au conseil" municipal de la ville de Jean Jaurès.