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Je lisais un article titré : « Tout ce sang sur les mains de Poutine ». C'était tentant de prendre le contrepied et de titrer ainsi mon article : « Tout ce sang sur les mains d'Obama ». Je l'aurais fait pour réduire la nuisance du discours russophobe et anti-Poutine. Ce discours, relayé aveuglément par nombre de médias et de propagandistes, ne me paraît pas correspondre à la réalité. De plus il est dangereux : il prépare à des suites que je n'ose imaginer. J'ai d'autres espoirs qu'une nouvelle haine est-ouest.

L'occident veut-il liquider Vladimir Poutine ?

La cécité, le déni, l'évitement de ceux qui diabolisent Poutine m'étonne. Peut-être suis-je autant critiquable qu'eux, pour les mêmes raisons inversées. Pas plus que les adversaires de M. Poutine je ne peux prouver mes dires, qui se fondent sur une appréciation en partie extrapolée des évènements. Qui veut la guerre ? Les putschistes de Kiev, probablement, car cela renforce temporairement un pouvoir d'une faiblesse désastreuse. Et leurs alliés - je ne puis me départir d'une suspicion à l'encontre de leurs motivations. Leur tactique d'humiliation permanente à l'encontre de l'administration russe vise à déclencher une réaction pour justifier a posteriori leur discours et toute intervention militaire. Il n'y a pas besoin d'avoir fait l'ENA pour observer que ni Kerry Ni Obama n'ont montré la moindre velléité réelle de trouver une solution pacifique et qu'ils jouent aux cow-boys en jetant de l'huile sur le feu.

J'ai lu ce que fit le pouvoir communiste à l'époque : l'Holodomor, la pression sur les petits Etats, mais je doute que l'on puisse comparer le président actuel à Staline ou même Brejnev. Ni à un tsar du passé. L'ancien du KGB a évolué, développé pour son pays une vision fondée sur la culture, les valeurs, un nationalisme romantique, une perception géostratégique, et a mis en place une volonté politique de reconstruire cette nation indispensable à l'équilibre mondial. Les valeurs russes dérangent nombre de déracinés mentaux en occident, qui n'arrive plus à produire que des théories pathologiques comme le gender, le rejet du corps et le père-kleenex, la culpabilisation du masculin et de la virilité, entre autres, ou l'officialisation de l'exploitation du ventre des femmes pauvres et la vente de bébés. L'occident mondialisé et multiculturaliste est en réalité une forme de fascisme intolérant aux valeurs des autres. On nous fait croire que l'économie libre est le salut, alors qu'elle n'est que la liberté du plus fort et que l'accord transatlantique sonnera la fin du politique au profit des oligarchies.

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L'acharnement contre Poutine se nourrit, à mon avis, de beaucoup de projections, de fantasmagories et de paranoïa. L'avenir proche dira qui a raison. Pour ma part je n'ai pas peur de Vladimir Poutine ni de la Russie. Je crois ses dirigeants plus mesurés qu'on ne veut le faire croire, mais je crois aussi qu'ils défendront les populations qui leur sont associées comme ils l'ont toujours fait. La Russie n'abandonne pas les siens, ni ses valeurs, pas plus que les Etats-Unis.

Certains, sans l'exprimer aussi explicitement, se demandent comment arrêter Poutine, par quels moyens. Cela signifie qu'ils sont clairement ouverts à une ingérence en vue d'une liquidation physique. Qu'ils le disent et qu'ils ne prétendent pas défendre la démocratie.

Certes Vladimir Poutine n'est pas un dirigeant mou. Il sait ce qu'il veut et visiblement son administration partage sa vision. Car il n'est pas seul à décider. La propagande russophobe voudrait l'isoler, le montrer tout-puissant, probablement pour ensuite justifier toute action à venir contre lui. Pour cela on le traite de tsar, de dictateur, de sanguinaire, on lui impute tout. Médias et politiques occidentaux se déchaînent. Le but est d'imprimer dans les esprits disponibles des occidentaux un mantra très simple :

Poutine = méchant dictateur.

Ce qui n'est pas prouvé. L'attitude du président russe à l'inauguration des JO de Sotchi était particulièrement réservée. Il n'avait rien d'un mégalomane totalitaire. Cette observation vaut bien les stéréotypes collés sans prudence par les médias occidentaux sur le président de la Fédération de Russie. La Crimée ? Elle était russe depuis 1744, jusqu'à ce que Krouchtchev la cède à l'Ukraine sans référendum. Entretemps il y eut la guerre, menée principalement par la France pour limiter l'expansionnisme russe. Cocasse quand on sait que la France elle-même a été très fortement expansionniste.

La Tchétchénie ? On saura peut-être un jour qui a poussé cette république à vouloir rompre avec Moscou. Qui avait intérêt à déstabiliser et morceler la Russie, l'un des territoires les plus riches au monde en hydrocarbures et en différents minerais ? L'Europe aurait-elle préféré un Etat djihadiste tchétchène à ses portes ?

Un pouvoir vertical

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Y a-t-il des instructeurs à Donetsk et dans d'autres villes de l'est du pays ? C'est possible - et heureusement : ils doivent se défendre contre le nouveau pouvoir. Mais y a-t-il vraiment besoin d'instructeurs ? Il y a certainement parmi ces gens des militaires ukrainiens pro-russes capables d'organiser les milices d'auto-défense. Quant aux photos fournies par la propagande américaine, cela tient du bricolage d'amateur. Même de grands médias anglo-saxons mettent en doute ces images et ce qu'on veut leur faire dire.

Mais si l'on fait cette comptabilité, continuons : qui a préparé les putschistes du Maidan ? La Pologne a-t-elle formé des membres de Pravy Sektor à la guérilla urbaine ? Et qui est derrière le premier ministre Yatsenyuk ? Qui, à Kiev, a tabassé presque à mort un candidat pro-russe à l'élection présidentielle du 25 mai prochain ? La milice privée américaine Blackwater est-elle en Ukraine ? Qui a tiré sur des résistants de l'est la nuit de Pâques ? Pravy Sektor a-t-il incendié un village de roumains en Bucovine ukrainienne ?

Alors, oui, Poutine a une conception forte du pouvoir, et il semble que la population l'accepte et le désire. Les russes ne sont pas idiots. Gouverner un territoire si vaste ne se fait pas par des atermoiements. La culture politique russe est plus verticale qu'horizontale. Le nationalisme russe n'est pas très différent du nationalisme américain, et il est plutôt mesuré. Cela fait-il de Vladimir Poutine est-il un dictateur ? A ma connaissance il n'y a pas de présence policière massive dans les rues. Les touristes peuvent aller où ils veulent. Ils passent la frontière normalement. Il n'y a pas de portrait de grandeur stalinienne de Poutine dans les rues. Il n'y a pas de discours à la Mussolini. Il y a probablement moins de contrôle sur les citoyens qu'aux Etats-Unis, qui ne sont malheureusement plus vraiment un modèle de démocratie.

Les mains d'Obama

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Qu'en est-il de Barak Obama ? A-t-il amené de la paix ? Non, il a continué la guerre en Afghanistan. Il la continue maintenant avec des drones qui tirent sans forcément savoir sur qui ils tirent, pilotés à distance par des sortes d'amateurs de jeux vidéos qui ne voient même plus la couleur du sang.

Obama a du sang sur les mains en Syrie pour avoir armé les islamistes, djihadistes anti-occidentaux, les fidèles de l'Arabie Saoudite (pays qui soutient financièrement les régimes les plus islamisants). Une bonne partie des supposés 150'000 morts de Syrie est à mettre au compte d'Obama. Il a donné l'ordre d'abattre Ben Laden, disant ensuite : Justice est faite. Mais ce n'est pas cela, la Justice. Cela, c'est une caricature digne des cow-boys, pas d'une nation civilisée. Barak Obama cautionnant cela comme un exemple de justice est indigne de la démocratie. Si à l'époque j'avais approuvé cela en tant qu'acte de guerre, je ne peux considérer qu'une quelconque justice ait été rendue puisque l'accusé n'a pas pu se défendre ni être entendu. Si encore tout cela n'est pas qu'une mise en scène. La crise ukrainienne me fait douter de beaucoup d'autres choses.

Si l'on mesure le sang sur les mains, je ne suis pas certain qu'Obama en ait moins.

Si des pays occidentaux se donnent le droit de protéger leurs intérêts, je ne vois pas au nom de quoi la Russie ne pourrait pas faire de même.

Je le redis : l'objectif à long terme des européens doit être une alliance avec la Russie. Ce sera un des outils d'une paix durable, et des retrouvailles. Une nouvelle noce, des retrouvailles historiques, l'effacement du passé douloureux, une nouvelle ère. Avec l'Amérique, l'Europe fait figure de fille soumise et taiseuse, car Obama ne dialogue pas : il assène. Avec la Russie elle serait une partenaire libre et fière. Ce serait un choc psychologique salutaire, qui donnerait un nouveau souffle au continent. Mais qui osera ne serait-ce qu'en évoquer l'idée ?