Traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet

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Cinq militants du mouvement Hamas ont été assassinés dans cette frappe israélienne - Photo : AA
La bande de Gaza se remet d'une nuit de frappes aériennes et navales par les forces israéliennes et craint de voir s'intensifier les opérations.


Les Palestiniens de la bande de Gaza se préparent à des frappes ininterrompues pendant « Opération bordures protectrices », l'agression militaire israélienne contre l'enclave qui a commencé mardi aux aurores.

Tout de suite après son annonce vers 1H du matin, heure locale (22:00 GMT), l'armée israélienne a procédé à 65 frappes aériennes et 3 frappes navales contre 50 objectifs dans la bande de Gaza pendant la nuit, détruisant 5 maisons et blessant 16 Palestiniens dont 7 enfants.

Le Cabinet de Sécurité israélien s'est mis d'accord, à 18H lundi soir, pour intensifier les frappes sur Gaza en réponse aux tirs de roquettes en provenance des territoires occupés sans toutefois envoyer des troupes sur le terrain.

Dimanche soir et lundi matin, 3 frappes israéliennes ont tué 9 Palestiniens dans le camp de réfugiés de al-Bureij et à Rafah. Selon les brigades al-Qassam du Hamas, 7 des hommes tués à Rafah - Ibrahim 'Abdeen par des bombes et Ibrahim al-Bal'aawy, Abdul-Rahman az-Zamely, Mustafa Abu Morr, son jumeau Khaled Abu Morr, Yousef Sharaf Ghannam, et Jom'a Abu Shallouf dans une frappe ultérieure sur un tunnel - faisaient partie de leurs combattants.

« L'ennemi paiera un lourd tribut, » a déclaré le porte-parole du Hamas Sami Abu Zohri en réponse aux attaques.

Des sources dans l'armée ont affirmé à des médias israéliens que les combattants avaient été tués par leurs propres explosifs qu'ils déplaçaient dans les tunnels.

Mazen al-Jadya et Marwan Salim, tués dans une frappe précédente sur al-Bureij, étaient des combattants des brigades Abd al-Qadir al-Husseini.

Les groupes armés palestiniens ont riposté par des dizaines de tirs de roquettes sur Israël. Dans une déclaration au petit matin, les brigades al-Qassam ont prévenu que le groupe "répondrait en élargissant le champ de ses objectifs" si Israël continuait à viser les maisons car, a-t-il ajouté, « en bombardant des maisons civiles ils franchissent la ligne rouge. »

L'échange vient après presque un mois d'escalade de la tension suite à des raids israéliens, des détentions et des fusillades en Cisjordanie et un durcissement de l'étranglement de la bande de Gaza après la disparition des 3 jeunes colons qu'on a plus tard retrouvés morts près de Hébron le 12 juin.

« C'est une autre forme d'escalade, » a dit Noor Harazeen, une journaliste de Gaza à Middle East Eye, lundi soir, avant l'annonce de l'opération par Israël.

« Dans les escalades précédentes, il y avait quelques frappes aériennes ici et là et les combattants de la résistance tiraient quelques roquettes," a-t-elle ajouté. "Cela ne durait que quelques jours et les Israéliens bombardaient surtout des endroits déserts en faisant peu de martyrs et de blessés. »

Mardi, les magasins de Gaza étaient plus fréquentés qu'un matin normal de Ramadan, le mois pendant lequel les musulmans jeûnent toute la journée, parce que les gens faisaient des stocks de produits de consommation.

« Cette opération va faire des morts à Gaza, » a dit Maher Azzam, un étudiant en droit du quartier al-Nasser de la ville de Gaza à Middle East Eye, mardi matin.

« Ça va être l'enfer ici, » a-t-il ajouté. « Personne ne pourra sortir de chez lui parce qu'Israël va viser tout ce qui bouge à Gaza. »

Les précédentes agressions militaires israéliennes en 2008-2009 et en 2012 ont contraint des milliers de Gazaouis à rester enfermés chez eux pendant des jours et des jours.

Pourtant ce sont dans les maisons privées que les Israéliens ont tué le plus de monde à la fois : 49 Palestiniens de la famille Samouni 2009 et 12 dans la maison des Dalou en 2012.

Et comme Israël recommence à viser les maisons privées, les Palestiniens ne sont pas plus à l'abri dans leur maison aujourd'hui que ceux qui ont été tués dans leurs maisons lors des précédents raids.

« Ils vont tuer des citoyens et détruire des maisons comme d'habitude mais à une bien plus vaste échelle, » a dit Azzam.

Une guerre contre les moyens de subsistance

Avec la fermeture du terminal de Kerem Shalom, la seule route que peuvent emprunter les importations de Gaza, à toutes les marchandises, sauf l'essence, la pression israélienne s'est accrue sur l'enclave.

Les familles de 377 prisonniers palestiniens ont été interdites de visite pendant plusieurs semaines.

Dimanche, Israël a réduit la zone de pèche autorisée aux pécheurs de Gaza de 6 miles nautiques, la distance maximum autorisée suite aux accords conclus avec les groupes palestiniens armés pour mettre fin au conflit de 2012, à 3 miles nautiques.

Le ministre palestiniens de l'agriculture a déclaré que cette décision qui s'est accompagnée de menaces de tirer sur les contrevenants était une « guerre contre des milliers de pécheurs palestiniens et leurs moyens de subsistance ».

Nizar Ayyash, un porte-parole du syndicat des pécheurs de Gaza a dit à Ma'an News que les pécheurs allaient continuer de pécher dans les 6 miles nautiques et qu'ils « verraient bien si on allait leur tirer dessus. »

L'opération israélienne dans la bande de Gaza s'accompagne d'une offensive en Cisjordanie. Depuis le 12 juin, l'armée israélienne a tué au moins 5 Palestiniens - Mustafa Hosini Aslan, Mahmoud Jihad Muhammad Dudeen, Ahmed Said Soud Khaled, Muhammad Ismail Atallah Tarifi, et Yousef Abu Zagha - et en a emprisonné plus de 830.

Pendant la même période, 17 Palestiniens ont été tués et plus de 50 ont été blessés dans la bande de Gaza, a annoncé, mardi, le ministre palestinien de la santé.

« Cette fois-ci ce n'est pas seulement une escalade à Gaza, » a dit Harazeen. « Cela s'accompagne de raids en Cisjordanie et dans la Palestine occupée depuis 1948. On peut parler d'une agression contre toute la Palestine. Ce qui se passe en Cisjordanie affecte la population de Gaza et ce qui se passe à Gaza affecte la Cisjordanie. »

Le Hamas a donné ses conditions pour un cessez le feu ; elles incluent les termes du précédent accord conclu avec Israël lors de la trêve de 2012 et la libération des Palestiniens libérés dans l'échange de prisonniers de 2011 qu'Israël a remis en prison.

« L'escalade va continuer, » dit Harazeen. « Je ne crois pas que les populations de la bande de Gaza et de Cisjordanie vont supporter ces attaques israéliennes sans rien dire. »

Les Gazaouis qui ont déjà enduré deux agressions miliaires au cours des six dernières années, semblent pour la plupart se résigner à cette nouvelle attaque et aux nouvelles épreuves à venir.

« La vie quotidienne à Gaza commence à se dégrader, » a dit Wafaa Abu Hajajj, journaliste à Gaza, lundi soir. « La population a peur d'une nouvelle guerre. Mais les Gazaouis sont forts. Après tout ce qu'ils ont subi, ils sont capables de faire face à n'importe quoi. »

Mardi matin, de bonne heure, les bombes ont commencé à tomber en quantité. « La population qui a supporté avec endurance les guerres précédentes, sera capable de supporter aussi celle-ci, » a affirmé Azzam.