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La mort, la destruction et les souffrances causées par l'assaut mené depuis onze jours par Israël contre une Bande de Gaza appauvrie et densément peuplée se sont fortement accrues vendredi dernier. Les troupes israéliennes et leurs colonnes de véhicules blindés ont continué à s'enfoncer dans ce territoire dans le cadre d'une invasion lancée la nuit précédente, alors que les bombardements aériens, terrestres et maritimes s'intensifiaient.

Le bilan a rapidement atteint les 300 morts vendredi, pendant que le nombre de blessés se montait à plus de 2200. Ce qui se déroule à Gaza est un crime de guerre calculé et sauvage contre une population largement sans défense, exécuté avec le soutien plein et entier de Washington et la complicité de l'Union européenne, des régimes arabes et de l'Autorité palestinienne (AP) du président Mahmoud Abbas.

Il n'est pas exagéré de comparer la terreur mortelle et la punition collective imposées par l'IDF (Force de défense israélienne) à Gaza avec les méthodes des nazis dans le Ghetto de Varsovie. Une puissance de feu massive est déchaînée contre une étroite bande de territoire délimitée sur deux côtés par Israël et ses armées d'invasion, sur un troisième par la frontière égyptienne cadenassée, et sur le quatrième par une mer emplie de navires de guerre israéliens. Sa superficie totale est à peu près équivalente à celle de la ville américaine de Philadelphie, avec une population de 20 pour cent plus élevée.

Israël, dans un acte de terreur psychologique, a largué des tracts ordonnant à plus de 100 000 Palestiniens de la région frontalière de quitter leurs logements. La réalité cependant est qu'il n'y a nulle place où ils ne soient pas exposé à l'assaut. Ceux qui restent chez eux sont considérés comme des « terroristes » ou des « boucliers humains, » qui peuvent être tués sans ménagement.

Des médecins de la ville de Beit Hanoun, à la frontière nord-est de Gaza, ont fait savoir vendredi soir qu'une famille entière de huit personnes avait été massacrée par un obus de char qui a détruit leur maison, ensevelissant les corps sous les décombres. Le porte-parole des services d'urgence, Ashraf al-Qudra a identifié les victimes comme étant la famille Abu Jurad, deux hommes, deux femmes et quatre enfants. Les noms des enfants étaient Hania, Ahlam, Samih et Musa - deux filles et deux garçons. L'un d'eux était un bébé de cinq mois.

Les responsables des Nations unies à Gaza ont fait savoir vendredi que le nombre de Gazaouis qui cherchent refuge dans les locaux de l'ONU a doublé et dépasse les 40 000. Mais la nourriture commence à manquer dans ces locaux, et l'alimentation en électricité et en eau a été coupée pour la grande majorité de la population.

Les hôpitaux de Gaza, qui ont été débordés par l'afflux de blessés alors qu'ils manquaient déjà des approvisionnements de base, ont eux-mêmes été pris pour cible à plusieurs reprises depuis le début de l'invasion terrestre israélienne par des tirs d'artillerie et des frappes aériennes, ce qui constitue clairement un crime contre l'humanité.

L'hôpital Al-Quds a été frappé de nuit, d'après l'agence de presse Ma'an. Le bombardement a déclenché un incendie qui a endommagé plusieurs services de l'hôpital. Les bombes ont également frappé l'hôpital Beit Hanoun, endommageant ses étages supérieurs et déclenchant une panique chez les patients et le personnel. Des obus de chars ont également frappé l'hôpital al-Wafa dans la ville de Gaza.

« Des chars d'assaut israélien tirent sur l'hôpital, ils ont touché plusieurs étages, et plusieurs infirmières ont été blessées, » a déclaré son directeur, Basman Alashi, à l'agence de presse AFP. « Il n'y a aucun endroit sûr à Gaza, » a-t-il ajouté. « Si un hôpital n'est pas sûr, qu'est-ce qui l'est ? »

Un reportage fait depuis l'hôpital Nasser dans la ville de Khan Yunis au Sud de la Bande de Gaza, réalisé par l'AFP, donne une idée du bilan humain atroce infligé par l'agression israélienne. Parmi ceux qui sont arrivés à l'hôpital jeudi soir, il indique que beaucoup étaient des enfants, et qu'au moins onze sont morts.

L'une des patientes s'appelle Khadija Abu Hama, 25 ans, grièvement blessée quand des chars d'assaut ont tiré sur son quartier. D'après le reportage, « un éclat d'obus a traversé la plupart de son corps, brisant son bras gauche et faisant sortir son œil gauche, et s'est logé dans son cerveau. » « Près d'elle, il y avait Uday al-Astal, 18 ans, maintenant paralysé du côté droit après qu'un éclat d'obus a pénétré dans son cerveau. » Il a été blessé au cours d'un bombardement qui a tué quatre des six membres de sa famille, dont deux enfants de quatre et six ans. Un autre membre de sa famille également en soins intensifs a eu la jambe amputée.

Le docteur Moataz al-Jubur, qui est en charge de ce service, a déclaré à l'AFP : « Le monde entier regarde pendant que les Palestiniens se font massacrer. Ce sont des gens innocents, des gens qui étaient assis à côté de leur maison, des gens qui étaient avec leur famille. Où devraient-ils aller ? »

D'après des responsables des services de santé, au moins 63 Palestiniens ont été tués à Gaza vendredi. Durant ce temps un soldat israélien est mort, victime apparemment du « tir ami » d'un char israélien.

Il y a des informations selon lesquelles Israël qui a rappelé 18 000 réservistes supplémentaires (ce qui porte le total des troupes israéliennes mobilisées dans cette guerre à 65 000), aurait également utilisé des armes interdites par les conventions internationales comme des obus à fléchettes, une arme anti-personnelle qui sature une zone avec des fléchettes mortelles, ainsi que des armes chimiques.

Pendant qu'avait lieu ce massacre, le président Barack Obama a parlé vendredi soir avec Netanyahu et a proposé au régime israélien un soutien inconditionnel des États-Unis pour son opération sanglante de Gaza. Ensuite, à des journalistes de la Maison blanche, il a dit qu'il avait « réaffirmé [s]on soutien vigoureux pour le droit d'Israël à se défendre ». Il poursuivit en disant « aucune nation ne devrait accepter des roquettes tirées contre ses frontières. »

Cela, pendant que des missiles, des bombes et des obus pleuvaient sur Gaza.

Obama a dit ensuite : « nous soutenons les efforts que font les Israéliens du point de vue militaire pour s'assurer que les roquettes ne soient pas tirées sur leur territoire. Nous avons également dit que pour nous les opérations militaires actuelles au sol visent à régler le problème des tunnels, et nous espérons qu'Israël continuera à aborder ce processus de manière à minimiser les pertes civiles. »

Si la situation n'était pas si tragique, les remarques d'Obama seraient presque comiques. L'idée que cette vaste entreprise militaire serait menée pour arrêter des roquettes qui ont tué un seul Israélien en l'espace de onze jours, ou que l'IDF se cantonnerait à détruire des tunnels, est ridicule. L'idée qu'Israël agirait pour minimiser les pertes civiles, qui représentent 80 pour cent des tués, dont un bon quart d'enfants, est obscène.

Le ministre américain des Affaires étrangères John Kerry a de façon analogue réaffirmé le « droit à se défendre » d'Israël, tout en insistant pour un cessez-le-feu « dès que possible, » une formule que Tel Aviv a correctement interprétée comme un feu vert américain pour mener comme il l'entend sa guerre contre le peuple de Gaza.

L'attaque de Gaza a été préparée bien avant qu'une seule roquette ne soit tirée depuis ce territoire. C'était au départ une réaction à l'acceptation par le Hamas d'un gouvernement de « consensus national » avec le président de l'AP (Autorité palestinienne) Mahmoud Abbas, qui réunirait les deux territoires séparés de Gaza et de la Cisjordanie en une seule entité. Le Hamas n'avait aucun poste dans ce gouvernement et pour la première fois en huit ans, il a rendu une partie de l'autorité à Gaza à l'AP, une organisation totalement soumise à Israël et aux États-Unis. Néanmoins, Tel Aviv était déterminé à maintenir la séparation entre les deux territoires, alors même que Washington reconnaissait le nouveau gouvernement.

Le gouvernement Netanyahu s'est donné pour objectif de faire échouer cet accord d'unité, en renforçant le blocus de Gaza et en empêchant le paiement des salaires à ses 43 000 employés du secteur public. En même temps, il s'est servi de l'enlèvement de trois jeunes colons en Cisjordanie, qui ont été retrouvés morts plus tard, comme prétexte pour une répression contre les membres du Hamas dans les territoires occupés, arrêtant plus de 600 personnes et lançant une vague de répression dans laquelle au moins dix Palestiniens ont été tués. C'est cette violente campagne de punition collective qui a provoqué les premiers tirs de roquettes depuis Gaza.

Sur un plan plus fondamental, la guerre est le mode d'existence de l'Etat sioniste. Celui-ci provoque continuellement des conflits armés comme le moyen d'extérioriser les immenses contradictions qui se sont accumulées au sein d'une des sociétés les plus polarisées au monde.

Le gouvernement Obama, comme les précédents gouvernements depuis plus d'un demi-siècle, soutient le militarisme Israélien comme le moyen de faire progresser les objectifs de l'impérialisme et d'affirmer son hégémonie sur un Moyen-Orient riche en pétrole.

Démentant les dires d'Obama sur le fait qu'Israël restreindrait ses opérations à la destruction des tunnels, Netanyahu a signalé vendredi qu'Israël se préparait à aggraver encore le bain de sang de Gaza. « Mes instructions [...] à l'armée israélienne, avec l'approbation du cabinet de sécurité, sont de se préparer à la possibilité d'un élargissement, un élargissement important, de l'opération au sol, » a-t-il déclaré aux journalistes au quartier général de l'armée israélienne à Tel Aviv.

Des éléments significatifs au sein de son propre gouvernement, dont le ministre des Affaires étrangères, le fascisant Avigdor Lieberman, ont exigé que l'armée israélienne réimpose son contrôle sur tout Gaza et tue, capture ou expulse tous les membres du Hamas - des objectifs de guerre qui impliquent le meurtre de dizaines de milliers de Palestiniens.