Le Paraguay a reconnu hier la Palestine comme «Etat libre et indépendant» à l'intérieur des frontières de 1967 a annoncé ce même jour selon l'AFP le ministère paraguayen des Affaires étrangères. Suivant ainsi l'exemple de huit autres pays sud-américains dont le Brésil et l'Argentine.

«La République du Paraguay réitère explicitement la reconnaissance de cet Etat comme étant libre et indépendant, avec les frontières du 4 juin 1967», soit avant l'occupation par Israël de Jérusalem-est, la Cisjordanie et la bande de Ghaza, dit le ministère dans un communiqué rendu public hier. Une centaine d'Etats reconnaissait déjà la Palestine, la plupart depuis les années qui ont suivi la déclaration d' «indépendance» proclamée en 1988. Mais face au blocage du processus de paix, les responsables palestiniens ont intensifié leurs efforts pour obtenir la reconnaissance de leur Etat par de nouveaux pays. Une fois atteinte une masse critique de pays, ils espèrent porter leur revendication devant le Conseil de sécurité de l'ONU.

Le pays «réaffirme sa conviction que les négociations entre Israël et la Palestine doivent être relancées pour parvenir à la paix et à la sécurité pour les deux nations», conclut le communiqué du ministère paraguayen. Sur douze pays en Amérique du Sud, huit pays ont déjà reconnu l'Etat palestinien: le Venezuela dès 2005, et depuis le 3 décembre 2009, en cascade derrière le Brésil : l'Argentine, l'Equateur, la Bolivie, le Guayana, le Chili et le Pérou (ces deux derniers n'ont pas fait mention de tracé). Deux pays ont dit qu'il le ferait en 2011: l'Uruguay et le Surinam. Seule la Colombie devrait faire bande à part. «Israël est un allié très stratégique d'un point de vue militaire» pour le pays, explique le politologue colombien de l'université Alejo Vargas.

L'Amérique du Sud s'est rapprochée des pays arabes depuis le sommet de l'Aspa (Amérique du Sud-pays arabes) de 2005 à Brasilia, dans une démarche de développement des relations Sud-Sud. «A partir de 2005, les relations entre les pays d'Amérique du Sud et les pays arabes ont été de plus en plus denses et régulières», explique Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS) à Paris. Un troisième sommet du genre est prévu le 16 février à Lima. Selon Michael Shifter, du Dialogue interaméricain, une organisation basée à Washington, «le Brésil a été fondamental dans ce processus. Il mène depuis un certain temps une politique étrangère indépendante avec assurance (...) La reconnaissance de la Palestine par le Brésil a ouvert la voie aux autre pays sud-américains». Le Paraguay accueille une forte communauté d'origine arabe, notamment à Ciudad del Este, zone franche très active commercialement à la frontière du Brésil et de l'Argentine.

Le pays entretenait avec la Palestine des relations diplomatiques qui sont allées crescendo depuis 2005, à travers les ambassades du Brésil et d'Egypte. Le président paraguayen, Fernando Lugo, avait reçu à Asuncion, avec tous les honneurs d'un chef d'Etat, le président palestinien Mahmoud Abbas, le 27 novembre 2010. Les reconnaissances en cascade des pays latino-américains ont suscité la désapprobation de Washington qui les juge «contre-productives». Israël a également mis en garde contre «toute décision unilatérale» à l'égard des Palestiniens. Le Centre Wiesenthal, une organisation luttant contre l'antisémitisme, a estimé pour sa part que l'Amérique du Sud ne devait pas «s'embourber» au Proche-Orient mais se contenter de développer les questions commerciales avec cette région.