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Phobie fiscale, ou administrative, amnésie, bonne foi qui cache des pathologies plus graves, voilà quelques maladies qui guettent nos élus. Une épidémie qui risque de s'étendre si nous n'y prenons garde.

Ils sont actuellement une soixantaine, les parlementaires en délicatesse avec le fisc, qui a épluché consciencieusement leurs déclarations faites dans le cadre de la transparence de la vie publique. Ils sont beaucoup plus, en réalité, les élus de tous niveaux en délicatesse avec la déontologie.

Les nouvelles maladies qui semblent faire des ravages dans les rangs de nos édiles méritent qu'on s'y attarde et qu'on trouve rapidement les remèdes.

Malades ou incompétents ?

Le récent cas de phobie administrative que l'on croyait limité à Thévenoud, connait désormais une variante parmi les rangs de la droite. C'est ainsi que trois parlementaires de cette tendance ont pris les devants en révélant leurs démêlés avec le fisc. Pour l'un d'entre eux, il s'agit d'un « manque d'attention » dans l'évaluation d'un bien immobilier dans sa famille depuis les années 30. Idem pour le second, par ailleurs titulaire d'un compte en Suisse non déclaré depuis 1981 et qui plaide la bonne foi avec des arguments border line (« Dans mon esprit cet argent n'était pas à moi, c'était un héritage »).

Le troisième plaide la bonne foi dans une affaire de sous-évaluation d'un bien immobilier détenu dans le cadre d'une SCI et qui a comme conséquence de le faire échapper à l'impôt sur la fortune.

Tout irait bien dans le meilleur des mondes si ces braves gens n'étaient pas chargés de voter la loi qu'ils contournent allègrement aujourd'hui à leur profit, avec mention spéciale à Gilles Carrez, député depuis 1993 et Président de la commission des finances, et à Philippe Marini, Rapporteur général du budget à la commission des finances du Sénat dont on a peine à croire qu'ils ne connaissaient pas les dispositions fiscales qu'ils ont examinées de près.

L'incompétence à ce niveau relèverait du grand art, mais on a du mal à y croire, à moins que ce soit une maladie contractée dans les rangs des assemblées que l'on pourrait appeler amnésie fiscale, premier symptôme d'une maladie dégénérative qui devrait conduire les intéressés à un abandon de leurs mandats et une hospitalisation dans des services spécialisés.

Un risque d'épidémie croissant

L'amnésie, la « bonne foi » ou la phobie administrative semblent être des arguments courants chez ces malades du pouvoir, à tel point qu'on se demande si ces pathologies ne devraient pas faire l'objet d'une inscription sur la liste des maladies professionnelles, car à côté de ces trois exemples récents, de nouveaux foyers se déclarent : c'est par exemple un ex président de la république et son chef de parti qui déclarent ne pas être au courant de la disparition de 18 Millions d'euros pendant la dernière campagne. Un comble pour des gens prompts à stigmatiser les autres des pires turpitudes fiscales ou sociales.

Ce sont également ces élus locaux, conseiller de Paris pour l'une, qui critique la politique de logement social de la Ville tout en bénéficiant d'un logement social, d'un Maire de la Seine Saint Denis qui cumule une coquette indemnité d'élu avec des allocations chômage ou bien encore une élue des Hauts de Seine qui fait de même. Et les exemples sont légions !

Toute pudeur semble abandonner certains édiles une fois en poste et on pourrait ajouter à ces « malades professionnels » ceux qui plongent en toute conscience la main dans le pot de confiture et connaissent actuellement des démêlés avec la justice dont on ne connaîtra les résultats que dans 5 ou 10 ans, une fois les projecteurs et tous les recours éteints, et suffisamment de points accumulés pour couler une retraite paisible.

Des symptômes de mieux en mieux connus...

... mais des effets secondaires mal maîtrisés. Tout se passe en effet comme si cette forme de maladie provoquait des troubles sélectifs de la mémoire et un sentiment de supériorité et d'impunité excessifs. Or nous avons besoin d'élus performants intellectuellement et non de malades à la conscience altérée pour conduire les affaires du pays et l'aider à se redresser.

Comment expliquer en effet que la stigmatisation des demandeurs d'emploi et d'allocataire supposés fraudeurs soit courantes alors même que l'on voit rarement nos élus monter au créneau pour dénoncer la fraude sociale des entreprises (travail au noir en particulier) et la fraude à la TVA sinon par des troubles cognitifs ? Dans le premier cas, ce sont 2 ou 300 millions qui sont en jeu, et dans le second entre 30 et 40 milliards.

Fort avec les faibles et faible avec les forts, voilà le symptôme le mieux connus désormais de ces maladies professionnelles.

Pour une prise en charge urgente

« Tous ne mourraient pas, mais tous étaient atteints », voilà ce qui risque d'arriver si un véritable plan d'urgence sanitaire n'est pas rapidement mis en place.
Soigner les addictions, serait le premier volet de ce plan. Il consisterait à interdire strictement tout cumul de mandat et l'exercice de plus de deux mandats successifs. Le retour à une activité professionnelle normale comme sure de désintoxication, serait de nature à éradiquer la maladie.

L'éloignement, c'est-à-dire l'interdiction de rentrer dans une enceinte élective dès la survenue des premiers symptômes d'amnésie fiscale, de prise illégale d'intérêts ou de mise en examen pour escroquerie, constituerait le second volet du plan. Il va de soi que les indemnités de toute nature perçues seraient suspendues jusqu'à l'éventuelle guérison de l'intéressé qui retrouverait alors ses droits et reprendrait son mandat à la place de son suppléant.

Dans certains cas, l'internement dans des établissements adaptés, c'est-à-dire conçus pour éviter tout risque de récidive ou de contamination, s'avèrerait nécessaire, avec mise sous tutelle des intéressés, déclarés incapables majeurs.

Enfin, ce plan ne serait rien, sans prévention qui consisterait à éduquer le citoyen et à le dissuader de voter pour tout candidat qui ne renoncerait pas explicitement à ne pas cumuler de mandats et à se retirer immédiatement de toute fonction élective, sans droit à pension, en cas de symptômes avérés.
Nous avons besoin de représentants lucides pour conduire les affaires de notre pays, aussi, je ne doute pas un seul instant que les parlementaires non encore atteints sauront prendre rapidement les mesures sanitaires qui s'imposent.