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L’immense région active 2192, vaste de 125.000 km, photographiée le 24 octobre en Vendée par Pascal Paquereau. Les taches sombres ornées de pénombres ont une température approximative de 3.000 °C tandis que la surface de la photosphère, en jaune, où l’on distingue sans difficulté sur ce superbe cliché les granules (environ 1.000 km chacun), il fait environ 5.900 °C. © Pascal Paquereau, Spaceweather
Il n'est pas rare d'observer des taches sombres sur la photosphère, la surface visible du Soleil. Celles-ci sont d'ailleurs plus nombreuses lorsque notre étoile éprouve une inversion de son champ magnétique, caractéristique de ses cycles d'activité d'une durée moyenne de 11 ans. Aussi, même si l'actuel cycle 24 a vraisemblablement vu son activité culminer ces derniers mois - un pic qualifié de « mini maximum » - , rien n'interdit le développement d'immenses régions actives comme celle qui a transité sur la face visible du Soleil entre le 18 et le 28 octobre 2014.

Désignée par le sigle AR2192 (AR signifie Active Region), cette surface que l'on voit sombre par contraste et ornée d'auréoles appelées aussi pénombres, ne se compose pas d'une seule et unique tache, mais d'un véritable archipel d'îlots de dimensions variables. Les magnétogrammes collectés par l'instrument HMI du satellite SDO (Solar Dynamics Observatory) montrent par ailleurs la polarité qui les anime, responsable d'innombrables boucles magnétiques. Quand l'énergie qu'elles accumulent est brutalement relâchée, on peut alors observer des éruptions solaires. Les plus puissantes sont classées X tandis que celles d'une intensité plus modérée sont de classe M.

Étendue sur plus de 125.000 km, AR2192 est d'ores et déjà considérée comme la plus importante du cycle 24 et n'a pas à rougir de sa rivale du cycle précédent (en 2001), lequel fut pourtant plus intense. Maculant l'hémisphère solaire orienté vers la Terre, sa taille est souvent comparée à celle de Jupiter et représente 11 fois celle de notre planète.



Six éruptions de classe X en neuf jours

C'est le 18 octobre qu'elle fut remarquée pour la première fois. Au cours des dix jours qui suivirent, le groupe de taches solaires produisit pas moins de 22 éruptions de classe M et 6 événements beaucoup plus puissants classés X. Le plus fort, X3.1, survint le 24 octobre à 14 h 28 TU. Bien que cela puisse surprendre, peu d'éjections de masses coronales (CME en anglais) furent observées au cours de cette période.

Ce mercredi 29 octobre, la « super région active » a atteint le limbe ouest de notre Soleil. Même si elle est sur le point de disparaître derrière notre étoile, AR2192 n'a pas pour autant dit son dernier mot. En effet, sa position actuelle ne nous met pas à l'abri en cas d'un sursaut brutal, car la rotation de l'astre solaire connecte son champ magnétique avec celui de la Terre par un effet de spirale. En outre, dans une quinzaine de jours, il est fort probable qu'elle fasse son retour à l'est comme cela fut maintes fois observé avec d'autres groupes de cette ampleur.

Enfin, les chercheurs rappellent que la taille d'une région active n'est pas un gage d'éruptions qui surclasseraient les autres. L'événement de Carrington par exemple, qui frappa la Terre le 1er septembre 1859, fut produit par une super tempête solaire de classe X35 issue d'une tache de taille moyenne... De même que plus récemment, au cours du cycle 19 qui culmina vers 1960, de nombreuses puissantes éruptions furent enregistrées mais presque aucune tache exceptionnelle n'a été remarquée.