Image
© akynouDouce France
Vous avez sans aucun doute entendu récemment parler dans la presse ces derniers jours du terme de "tourisme social" utilisé à l'occasion d'une décision de la Cour de justice européenne qui vient d'établir un lien direct entre droit de séjour et droit à bénéficier des prestations sociales dans un pays.

Il est énoncé le fait qu'un ressortissant d'un pays de l'Union européenne ne respectant pas toutes les conditions ouvrant à un droit de séjour dans un autre pays européen peut s'y voir refuser des prestations sociales au motif notamment qu'il ne recherche pas de travail.

C'est donc parce que 2 personnes roumaines (une mère . Elisabeta Dano et son fils Florin, arrivés en Allemagne en 2010), ont demandé à percevoir en 2013 des allocations sociales de subsistance que la cour européenne de justice a été saisie et a rendu son avis. Il y aurait déjà beaucoup à dire et à écrire sur cette décision qui plait surtout à toutes celles et ceux qui se replient dans leurs identités nationales et dans la volonté de ne pas déployer la moindre solidarité avec leurs homologues européens dans le besoin.

Il s'agirait donc de "tourisme social". Curieux détournement de termes. Nos concitoyens européens les plus pauvres font donc comme les plus riches : du tourisme. Le dictionnaire Larousse nous rappelle que le tourisme est "l'action de voyager, de visiter un site pour son plaisir". "Il regroupe l'ensemble des activités, des techniques mises en œuvre pour les voyages et les séjours d'agrément." Le "vrai" tourisme social existe bien : comme le précise le site du ministère de l'économie il a pour objectif de permettre à chacun de partir en vacances et de pratiquer des activités de loisirs.

Nous aurions donc là des plus pauvres qui, pour leur plaisir, et non leur nécessité organiseraient des voyages et des séjours d'agrément dans l'unique objectif de percevoir des aides sociales. Le plaisir qui va se nicher on ne sait où dans ces situations de misère cacheraient en Allemagne, un nouveau risque : celui de l'invasion d'immigrés qui viendraient « profiter » de leur système social. Rappelons qu'en Suisse ce sont d'ailleurs les Français qui "volent" le travail des "autochtones".

Vous ne serez sans doute pas surpris d'apprendre que cette décision est présentée comme une victoire par les partis d'extrême droite européens.

La réalité est toute autre : si les discours se multiplient, rien ne permet de constater cette notion de « tourisme social ». « C'est surtout un concept créé de toutes pièces par les courants d'extrême droite et repris en boucle par les commentateurs politiques », a réagi l'organisation France terre d'asile.

Selon un rapport réalisé en 2013 pour la Commission européenne, les immigrés intraeuropéens viennent principalement pour travailler. Les immigrés européens inactifs ne représentent que 0,7 à 1 % de la population totale de l'UE. L'étude souligne que les ressortissants d'autres pays membres ont un taux d'emploi supérieur à la moyenne, et perçoivent moins d'allocations que les nationaux. Par ailleurs, un récent rapport de l'OCDE note qu'au sein de l'Europe, les migrants contribuent plus en impôts et cotisations sociales qu'ils ne coûtent en prestations. Le "tourisme social" qui vise à "profiter" des aides n'existe pas.
Voilà comment fonctionne notre système d'information : Vous reprenez un terme qui rend "péjoratif" un concept issu des avancées sociales et du tourisme populaire, vous l'accolez à une idée qui n'est qu'un fantasme (l'invasion d'étrangers européens visant à dépouiller des "bons" nationaux qui cotisent et travaillent) et vous y ajoutez une décision de justice qui vise à éviter quelques rares excès et vous obtenez un nouveau concept utile et facilement compréhensible par tous. C'est ainsi que les idées reçues et les mécanismes d'exclusion fonctionnent. Ils sont renforcés par un langage inventé par nos populistes qui "surfent" sur les peurs et les fausses idées qui ne servent que leurs intérêts. Le plus désolant, c'est que cela marche et que peut être votre voisin vous parlera demain de ces "touristes sociaux" qui viennent "manger le pain" des français.