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Ded Moroz, le Père Noël russe
La presse a rapporté les conditions dans lesquelles s'est déroulée la rencontre, dite impromptue, mais préparée depuis déjà quelques jours, entre François Hollande et Vladimir Poutine, à Moscou, hier 6 décembre 2014. Ceux qui, comme moi, regrettaient le fait que la France se soit laissé entraîner par sa faiblesse atlantiste dans une quasi-guerre froide avec la Russie, ont repris quelque espoir à cette nouvelle.

La modération du ton des deux présidents, leurs sourires réciproques pourraient laisser augurer que la diplomatie française retrouve à cette occasion un peu d'autonomie. Pour notre pays, plus encore que pour les autres États de l'Union européenne, la possibilité de coopérations stratégiques avec la Russie est essentielle, tant sur le plan économique que culturel.

François Hollande aurait-il commencé à le comprendre ?

Il ne faut pas être trop optimiste. Les pressions pour ramener la France dans le rang, tant au sein de l'Union que de l'OTAN, vont se déchaîner. Il est à craindre que, dès demain, l'on s'en aperçoive. Ces pressions viendront nécessairement de la diplomatie américaine, mais aussi sans doute d'Angela Merkel, saisie depuis quelques semaines d'une passion anti-russe que rien ne justifierait, sauf des causes qui lui seraient personnelles [1]. Se présentant mardi pour prendre le tète de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), Angela Merkel suscite de plus en plus de critiques de la part du patronat allemand, qui lui reproche sa rigueur vis-à-vis de Moscou. L'attitude plus ouverte de François Hollande ne fera qu'accentuer ces critiques.

Cela explique-t-il cela ? C'est-à-dire le ton peu diplomatique par lequel la Chancelière a reproché à la France, ce dimanche, son incapacité à se réformer [2] ?

L'affaire du Mistral sera évidemment symbolique de l'évolution des rapports entre la France et la Russie. N'anticipons pas ce qui va se passer, mais reprenons un peu d'espoir.

Cependant il y aurait bien d'autres dossiers sur lesquels la reprise d'une coopération avec Vladimir Poutine pourrait aussi se révéler symbolique d'une évolution en profondeur des relations entre la France et la Russie. Nous pensons notamment à la relance du projet de gazoduc South Stream [3]. Contrairement à l'Allemagne, la France n'est pas assoiffée de gaz. Pour autant, de bonnes coopérations entre les géants énergétiques français et leurs homologues russes seraient indispensables pour les deux parties.

Quid cependant des sanctions décidées par Washington à l'égard de Moscou, qui pénalisent autant la France, sinon plus, que la Russie ?

Rêvons un peu. Pourquoi, sur fond de Grand-père Gel, le père Noël russe (Ded Moroz, alias Дед Мороз), ne pas décider en grande cérémonie d'honorer les commandes russes de dindes et d'oies de Noël ? Tout l'édifice imposé par les ânes et éléphants d'outre-Atlantique s'effondrerait.

Quoi qu'il en soit, l'impromptu de Moscou montre à ceux connaissant mal les subtilités du jeu diplomatique qu'il ne faut jamais jurer de rien en ce domaine. Des situations apparemment bloquées peuvent se débloquer d'un coup. Malheureusement, l'inverse est toujours tout autant possible.

Notes :

[1] Merkel, jeune et innocent(e)... (vineyardsaker, français, 02-12-2014)

[2] Angela Merkel met en garde la France et ses réformes « insuffisantes » (lefigaro.fr, français, 07-12-2014)

[3] Qui est le gagnant dans l'arrêt du gazoduc South Stream ? Qui est le perdant ? A vous de voir ! (vineyardsaker, français, 06-12-2014)