Aux États-Unis, une enquête menée par le gouvernement a révélé que les jugements de plus de 200 affaires ont été biaisés par des preuves erronées fournies par le FBI entre 1980 et 2000. Résultat : des innocents ont été emprisonnés ou condamnés à mort. Le ministère américain de la Justice et la police fédérale le reconnaissent aujourd'hui; et il pourrait ne s'agir que d'un début.
"Le ministère de la Justice et le FBI ont formellement reconnu que la quasi-totalité des médecins légistes d'une unité d'élite du FBI ont donné des témoignages biaisés dans pratiquement tous les procès pour lesquels ils ont avancé des preuves contre un accusé dans une affaire criminelle durant plus de deux décennies, avant 2000."
Le Washington Post l'affirme : des dizaines de citoyens innocents ont été emprisonnés et/ou exécutés entre 1980 et 2000 à la suite d'analyses erronées menées par le laboratoire d'analyse de cheveux au microscope du FBI.

Parmi les 28 experts que compte cette unité de la police fédérale américaine, "26 ont exagéré les correspondances médico-légales de manière à favoriser les procureurs dans 95% des 268 procès révisés jusqu'à présent".

Preuves douteuses et statistiques trompeuses

Concrètement, ils ont systématiquement témoigné de leur "quasi-certitude" quant aux résultats de leurs analyses des cheveux sur les scènes de crime, assortissant ces données douteuses de statistiques "incomplètes ou trompeuses tirées de leur travail avec des cas individuels". Il faut savoir qu'aucune recherche ne permet aujourd'hui de déterminer à quelle fréquence les cheveux de différentes personnes peuvent apparaître identiques (le laboratoire pointé du doigt a d'ailleurs changé de technique d'analyse à partir de 2000).

L'enquête a été menée par le National Association of Criminal Defense Lawyers (l'Association nationale des avocats de la défense dans des affaires criminelles) et l'Innocence Project (une association engagée contre les erreurs judiciaires) qui assistent le gouvernement américain dans ce qui est aujourd'hui "la plus grande révision des preuves médico-légales après condamnation dans l'histoire du pays".

Sur l'ensemble des procès revus jusque-là, 32 accusés ont été condamnés à mort, dont 14 ont déjà été exécutés ou sont morts en prison.

2500 cas à revoir

Le Washington Post nuance toutefois les conclusions qu'il faut en tirer : les erreurs du FBI ne signifient pas à elles seules que les jugements rendus ne sont pas les bons; il pouvait, selon les affaires, exister d'autres preuves de la culpabilité des suspects. Cette enquête met néanmoins en lumière "l'un des plus grands scandales de médecine légale et, durant des décennies, l'échec des tribunaux nationaux à cacher ces informations scientifiques bidon aux jurys".

Les accusés et les procureurs fédéraux de 46 États ont déjà été avertis de ces nouveaux éléments et devront dès lors déterminer s'il y a des motifs suffisants pour un recours. Quatre accusés ont déjà été disculpés.

En tout, le FBI a identifié environ 2500 affaires dans lesquelles son laboratoire d'analyse a apporté une correspondance médico-légale de cheveux. L'ensemble de ces 2500 cas seront donc révisés.