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Lors d'un discours de 40 minutes à l'Université Catholique de Leuven, en Belgique, Jean-Claude Juncker a annoncé qu'il était hors de question que la Grèce sorte de la zone euro car « le monde anglo-saxon ferait tout pour détruire la zone euro » qu'il a qualifié de « zone de solidarité et de prospérité ».

L'occasion pour nous de ressortir l'article sur la Grèce, extrait de la lettre d'analyses et d'informations libre n°3 :

De Grexit en Grimbo

Les questions jamais évoquées dans la défaillance de la Grèce sont simples : qui va payer la casse, combien va-t-elle coûter et à qui ?

Les différents remboursements que doit honorer la Grèce auprès de ses débiteurs suscitent chaque fois une angoisse dans les milieux d'affaires. Il est clair que, dorénavant, elle ne pourra rendre qu'avec de l'argent qu'on lui prête. Les réformes exigées par la Troïka, ou quelques prêteurs que ce soit ne sont qu'une pantomime pour gagner du temps. D'aucuns devraient plutôt se demander : quelles surprises nous préparent-ils avec Poutine à la baguette ? Pour régler ses fonctionnaires au mois d'avril (400 millions d'euros), la Grèce a dû ponctionner toutes les réserves des communes et organismes publics du pays (1500) ; ce sont deux milliards qui ont été collectés, mais cette somme ne suffira pas pour le mois de mai. Pour comprendre l'incroyable imbroglio de cette situation, le monde de fous dans lequel nous vivons, il faut lire le rapport des sportifs les mieux payés de la planète et prendre le salaire annuel des deux premiers du classement pour régler cette somme.

Les chiffres régulièrement rapportés dans les articles de la presse spécialisée évoquent les sommes dues par l'Allemagne aux Hellènes, soit l'équivalent de sa dette à savoir trois cent milliards d'euros. Jolie conte de fées.

En fait, la BCE avant son deuxième plan de sauvetage, a transformé des obligations grecques contre de nouvelles qui ne peuvent pas subir de décote. 80% de l'argent concerné a été introduit dans les banques européennes qui les ont comptabilisées comme actifs dans leurs bilans, et s'en sont servis comme garanties (collatérales) pour les transformer en argent liquide. Ce plan de sauvetage ne s'est jamais retrouvé dans l'économie grecque, mais a servi aux banques européennes pour continuer à recevoir des liquidités ! Sachant qu'elles utilisent un levier de 26 pour un, sans parler des opérations de titrisation, au final, c'est un risque qui se chiffre en milliers de milliards !

Une défaillance de la Grèce ?

Ce mot tourne en boucle et comme l'affirmaient il y a déjà 4 ans les incompétents de Bruxelles, il n'y a pas de plan B, donc un risque majeur de crise à chaque échéance de la Grèce. Marc Fiorentino donne rendez-vous pour un défaut le 12 mai. Que cette date soit retardée ou pas ne changera rien au problème : les responsables de la Troïka et les chefs de gouvernements ne veulent pas déranger les orgies boursières, et n'ont aucune idée de ce qui adviendrait en cas de faillite imprévue et pourtant si prévisible.

L'arrogance occidentale

Les situations de crises géopolitiques s'accélèrent à un rythme effréné depuis le départ de la guerre civile en Ukraine. Les Européens foncent tête baissée à la remorque des États-Unis et de l'OTAN contre l'ours russe, sans s'inquiéter de son étrange passivité. Des pays européens et les entrepreneurs, en général, supplient le Kremlin d'arrêter l'embargo. Mieux encore, lors de sa dernière intervention, le président Poutine s'est fendu d'un commentaire compendieux envers le France et la vente des Mistrals ne demandant pas de pénalité, juste le remboursement en cas de non-livraison. En fait, le tsar de Moscou ne bouge pas, car il sait que nos heures sont comptées. Ce ne sont pas quelques centaines de milliards qui vont manquer en cas de défaut, c'est tout le système de financiarisation de la dette qui risque de s'effondrer.

Les obligations souveraines sont utilisées en garanties de fonds propres par les banques pour une bagatelle de dix fois le PIB de la planète, soit 700 mille milliards de dollars. Le talon d'Achille de la puissance militaire de l'OTAN, c'est le prix exorbitant de ses soldats. En cas de krach obligataire ou monétaire, plus d'armée. C'est à ce moment là qu'il va falloir mesurer le prix de l'arrogance stupide : les mercenaires, sans idéaux, ne font pas la guerre gratuitement.

L'Union européenne est sous la coupe de l'empire états-unien. En 2009, lorsque l'élite européenne a offert une somme d'argent pitoyable aux Grecs, Timothy Geithner, alors secrétaire au Trésor, a dû intervenir pour imposer à l'UE d'augmenter son fond de sauvetage de 500 milliards d'euros. Ils ont bourdonné et tergiversé, mais pour finir, ont fait ce que les Américains exigeaient. Ces derniers veulent utiliser la force militaire pour terminer leur plan hégémonique, quitte à enfoncer les économies du monde entier jusqu'aux entrailles de la terre ou dans des montages financiers les plus délirants possibles ; certains qu'ils ramasseront les marrons du feu par la force brutale. Les Russes jouent la montre attendant notre auto-destruction : l'échec des dernières négociations et les inquiétudes sur le plan B en disent plus qu'un long discours et leur donne mille fois raison.

George Santayana : « Ceux qui ne connaissent pas l'histoire sont condamnés à en répéter les erreurs ».