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Peut-on punir le fait de (mal) s'informer ? 76 % des sympathisants et militants Républicains consultés par l'application Direct Citoyen estiment qu'il faut punir pénalement le fait de consulter des sites djihadistes sans motif légitime.

Depuis plusieurs semaines, les militants des Républicains (ex-UMP) peuvent donner leur avis sur toute une série de sujets soumis à leur avis par la direction du parti, grâce à l'application Direct Citoyen. Nous avons beaucoup dit sur le manque de protection des opinions personnelles (recevant le silence comme seule réponse à nos interrogations), mais l'application a le grand mérite de faire évoluer la vie politique vers davantage de démocratie participative, en permettant une remontée plus représentative des idées des militants de base.

C'est dans ce cadre que les militants ont été amenés ces derniers jours à donner leur avis sur une proposition formulée par Les Républicains. "Pour un contre la création d'une infraction punissant toute personne consultant sans motif légitime des sites djihadistes", demandait le parti dirigé par Nicolas Sarkozy. Sur plus de 3 100 votants à l'heure où nous publions ces lignes, les trois quarts (76 %) se disent favorables à cette proposition de censure inversée, qui consiste non plus à condamner celui qui s'exprime, mais celui qui écoute :

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Après une première tentative échouée de l'UMP en 2012, la pénalisation de la fréquentation de sites d'apologie du terrorisme est entrée dans la loi dans le cadre du plan anti-Djihad présenté l'an dernier par le Premier ministre Manuel Valls. Le gouvernement avait alors fait adopter en novembre 2014 une loi anti-terrorisme qui, outre la possibilité pour le ministère de l'intérieur d'ordonner la censure de sites accusés de faire l'apologie du terrorisme, permet de punir la consultation de sites qui ne sont pas encore bloqués, ou le fait de contourner le blocage. Mais il ne s'agit pas pour le moment d'une infraction autonome, comme l'est la consultation de sites pédophiles.

Actuellement l'article 421-2-6 du code pénal ne punit pas en tant que tel le fait de "consulter habituellement un ou plusieurs services de communication au public en ligne ou détenir des documents provoquant directement à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie", mais en fait l'un des éléments matériels permettant de caractériser l'infraction de préparation à la commission d'actes de terrorisme, si c'est associé au fait "de détenir, de rechercher, de se procurer ou de fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui".
Si la proposition des Républicains prospère, c'est le fait de visiter un site qui deviendra l'infraction, de façon autonome, quelle que soit l'intention de l'internaute. Si l'on en croit la question, seul le "but légitime", comme celui du journaliste ou du chercheur souhaitant faire son travail, sera une excuse. Mais pas le fait d'être un simple curieux qui veut se renseigner sur un adversaire désigné, pour lequel nos propres troupes sont envoyées combattre à l'étranger.