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Il y a 70 ans presque jour pour jour Harold Agnew sortait en souriant d'un baraquement du projet Manhattan à Los Alamos avec une petite valise spéciale contenant le cœur de plutonium de la bombe « Fatman » qui allait être larguée le 9 août 1945 sur la ville de Nagasaki provoquant la mort instantanée d'environ 80000 personnes.

Triste anniversaire que de voir cet homme souriant, un simple ingénieur et employé de haut rang de l'armée américaine, alors qu'il savait que ce joujou allait être utilisé contre le Japon pour détruire une ville, tuer des civils et mettre fin à la guerre tout en assurant par la suite l'emprise hégémonique des USA sur le Japon et quelques autres pays de la région qui perdurera jusqu'à nos jours. La charge de plutonium d'environ 7 kilos - la taille d'une balle de tennis - conduisit à la fission effective de moins de un kilo en raison de la configuration loin d'être optimale des explosifs entourant cette charge. La puissance de l'explosion fut néanmoins près de deux fois plus élevée que celle d'Hiroshima, trois jours plus tôt.

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Agnew fut récompensé pour ses bons et loyaux services ayant permis de mettre fin à la guerre et fut pour cette raison nommé directeur des laboratoires de Los Alamos, contribuant au développement de l'arsenal nucléaire américain. La bombe arriva sur l'ile de Tinian dans la partie nord de l'archipel des Marianes et ses composants y furent assemblés sous la direction d'Agnew.

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Tinian et Saipan furent prises aux Japonais en juin 1944 après ce que l'on peut appeler une extermination systématique de tous les Japonais présents sur ces îles, militaires et civils, et Tinian en particulier devint en quelques mois la plus grande base aérienne du monde : pas moins de 1500 bombardiers B29 décollaient et atterrissaient jour et nuit pour répandre le feu et la mort sur les grandes villes japonaises dont en particulier Tokyo situé à 1500 miles de cette île d'une grande importance stratégique.

Il y a donc 70 ans on s'affairait dans l'archipel des Marianes pour mettre le Japon définitivement à genoux. Les Américains avaient provoqué l'attaque de Pearl Harbor en harcelant les navires commerciaux japonais dans le Pacifique nord-ouest. Ils ne voulaient déjà pas entendre parler d'une domination japonaise sur cette région. Leur stratégie n'a pas changé depuis, l'armée américaine est toujours à Guam (Marianes du sud) et à Okinawa (Japon) ainsi que dans de nombreuses bases sur les principales îles japonaises, en Corée, aux Philippines ou encore en Thaïlande.


Commentaire : Petite précision, tout de même :

" En décidant de consacrer un film à l'offensive surprise qu'ont menée les Japonais contre la base américaine de Pearl Harbor le 7 décembre 1941, Michael Bay s'attaquait à une page particulièrement controversée de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. S'il ne fait aucun doute, en effet, que l'empire du Soleil-Levant prépara dans le plus grand secret ce raid de cent quarante-cinq minutes qui permit d'anéantir pas moins de 15 navires et 188 avions, la Maison-Blanche ne fut peut-être pas aussi surprise que le veut la légende par cette réédition du coup de Port-Arthur en 1905 lors de la guerre russo-japonaise.

Bon nombre d'historiens, ayant eu accès aux archives du Pentagone et à celles de Franklin Delano Roosevelt, ont en effet émis l'hypothèse que le président démocrate était, depuis des semaines, averti de l'imminence de l'opération japonaise, mais qu'il avait préféré enfouir dans un tiroir les rapports de ses services secrets qui avaient percé les codes nippons. Favorable à l'entrée en guerre de son pays contre les forces de l'Axe (Allemagne, Italie et Japon), il devait tenir compte de l'existence, aux Etats-Unis, d'un fort courant isolationniste dirigé par le sénateur Arthur Vandeberg et d'un lobby pro-allemand très puissant, dont les principaux représentants étaient l'ancien ambassadeur Joseph Kennedy et Charles Lindbergh.

Pour neutraliser ses opposants, Roosevelt aurait décidé de garder secrètes les informations relatives à l'imminence de l'attaque japonaise, quitte à prendre quelques précautions, en faisant notamment quitter Pearl Harbor aux porte-avions, le fleuron de la flotte du Pacifique, dont la perte aurait pu avoir de très graves conséquences, et quitte à sacrifier quelques centaines de vies humaines. De fait, les anciens dirigeants du camp isolationniste, Arthur Vandeberg ou Hiram Johnson, sénateur démocrate de Californie, furent les premiers à se rallier à la Maison-Blanche et à faire une véritable ovation au président lors de son célèbre discours devant le Congrès le 8 décembre 1941."

Extrait d'un article de Marianne.


Mais revenons aux bombes. Il est intéressant de noter que J. Robert Oppenheimer, considéré comme le père de l'arsenal nucléaire américain, pensait en 1944 qu'il faudrait au moins 50 bombes nucléaires pour venir à bout du Japon, ça donne rétrospectivement une bonne image de la mentalité du complexe militaro-industriel américain qui depuis la fin de la seconde guerre mondiale entretient l'attitude militariste et impérialiste des USA. L'Etat Major américain considérait que ces bombes atomiques d'un nouveau genre ne présentaient aucune différence sinon en termes d'échelle de puissance destructrice avec les armements conventionnels de l'époque tels que les bombes Torpex dopées à la poudre d'aluminium et à la trinitro-perhydro-triazine, un explosif deux fois plus puissant que le TNT classique. Le Programme Manhattan avait donc doté l'armée américaine de ces super-bombes, la radioactivité n'étant qu'une conséquence mineure et négligeable.

Aujourd'hui, à la veille du 70e anniversaire de la première utilisation de bombes nucléaires au cours d'un conflit armé qui ne fit que des victimes civiles, il était opportun de rappeler ces faits car même si les Américains sortirent vainqueurs de ce conflit, ce n'est pas une raison pour ne pas les considérer comme des criminels de guerre. La mémoire ne doit pas oublier non plus qu'après les bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki, la ville de Koromo, alors fief de la firme Toyota - aujourd'hui renommée Toyota - fut entièrement détruite par des bombardements incessants et ce dernier fait de guerre conduisit à la capitulation sans conditions du Japon le 15 août 1945. De nombreux généraux japonais furent pas la suite déclarés criminels de guerre par les USA ... drôle de confusion de termes : les vainqueurs ont toujours raison.