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Je suis évidemment envahi de tristesse ce soir, évidemment, avec une pensée pour les dizaines de victimes.

On a encore droit aux désormais classiques scènes hallucinantes sur les chaines "d'information", vecteur principal de la diffusion de la terreur en France - scènes qui devraient entrainer la saisie immédiate de la carte de presse des journalistes concernés.

Mention spéciale pour le journaliste ayant hurlé ce soir "La France est en guerre" - ce qu'on confirme facilement, vu qu'on bombarde depuis des années bon nombre de pays (Afghanistan, Libye, Mali, Syrie...), et qu'on y mène nombre d'opérations clandestines.

On est en guerre ? Eh oui, vu que c'est nous qui l'avons déclarée...

Mais bon, c'est vrai que "la guerre" ne commence que lorsqu'il y a des morts en France, jamais quand on tue des personnes (qui sont en fait des "non-personnes") à l'étranger - mêmes victimes innocentes collatérales. Par chance un autre crétin sur i-télé a même hurlé qu'Obama était "le chef du monde libre", on croit rêver devant tant de bêtise. Je vous laisse lire le billet précédent sur le rôle de la CIA en Syrie.

Ils sont quand même incroyables ces islamistes syriens : on les bombarde depuis 1 an, et ils osent réagir...


Commentaire : Plus précisément, les Russes les combattent effectivement depuis un mois, tandis que la Coalition Internationale menée par les États-Unis n'a fait que bombarder le désert depuis 1 an.


On notera aussi que, au XXIe siècle, la France est "en guerre" quand elle est attaquée par une multitude de 8 personnes avec des fusils ? Ce qui montre la fragilité de nos sociétés. 250 000 morts en Syrie, à cause de nos politiques occidentales délirantes pour mémoire... Combien dorment encore, chez nous, ou caché dans les masses de réfugiés ?

Pour tout vous dire, je suis particulièrement ému car j'étais dans un bistrot des Halles à Paris ce soir, pas si loin de République, que j'en suis parti à 22h15, que la dernière personne à qui j'ai parlé était un lecteur du blog croisé par hasard, qu'on a parlé géopolitique, Syrie, des dangers de notre politique extérieure, et que, véridique, mes derniers mots avec lui ont été à propos du terrorisme, lui disant "il y a un truc qui m'étonne et me réjouit toujours, c'est qu'il n'est pas encore venu à l'esprit des terroristes d'envoyer 20 ou 50 combattants avec juste une kalachnikov tirer régulièrement dans la foule, un terroriste tous les jours, on se retrouverait sous un régime totalitaire en France en quelques semaines." Vous imaginez donc ma frayeur et mon émotion quelques minutes après...

Vous imaginez aussi enfin mon immense colère contre, certes les assassins (Hollande les a assurés de notre détermination à les combattre - le fait qu'ils soient dispersés façon puzzle devant cependant limiter leur frayeur...), mais également contre nos dirigeants, qui reviennent comme d'habitude la mine triste sur l'air du "Quelle horreur, mais pourquoi nous attaque-t-on, bien sûr on n'a rien fait de mal...". Surtout que cela fait désormais des mois qu'on parle ici de la Syrie et des dangers générés.

Rassurez vous : Cazeneuve ne démissionnera probablement pas (il a finalement réussi à protéger les Franciliens aussi bien qu'il a protégé les journalistes de Charlie Hebdo, il pourra continuer - et oui, un autre n'aurait pas fait mieux, mais on serait ici au moins dans le symbole), Fabius non plus ("Al-Nostra, bon boulot sur le terrain", "il faut armer l'opposition syrienne", ), et on nous demandera de nous rassembler derrière François Hollande, qu'une commission d'enquête parlementaire n'ennuiera probablement pas quant à ses livraisons d'armes en Syrie pour combattre Assad - qui ne nous a jamais rien fait, lui... - et qui se retrouvent chez les islamistes. Combien de centaines, de milliers de Syriens tués par des armes françaises ? Qui sème le vent... Voilà ce qui se passe quand on passe d'une diplomatie classique basée sur nos intérêts à une diplomatie "des valeurs", comme le rappelait Kissinger dans cet article ("Le traité de Westphalie a été fondé sur la nécessité de parvenir à un arrangement avec l'autre, pas sur une sorte de moralité supérieure. Les nations indépendantes ont décidé de ne pas intervenir dans les affaires des autres États. Ils ont créé un équilibre des forces qui nous manque aujourd'hui.") ou Todd dans celui-ci ("Il est inquiétant pour l'anthropologue que je suis de voir les relations internationales sortir d'une logique rationnelle et réaliste pour rentrer dans des confrontations de moeurs dignes de sociétés primitives.").
"Au cours des cinq dernières années au moins, l'Arabie saoudite, le Qatar, les Émirats arabes unis, la Jordanie et la Turquie ont tous apporté un soutien financier et militaire considérable à des réseaux militants islamistes liés à al-Qaïda qui ont engendré l'« État islamique » que nous connaissons aujourd'hui. Ce soutien a été apporté dans le cadre d'une campagne anti-Assad de plus en plus intense dirigée par les États-Unis." [Nafeez Ahmed, journaliste britannique à The Guardian et à la BBC] - (Source : Middleeasteye.net)

"Question : Personne n'évoque le lien entre l'idéologie de ces organisations terroristes et celles diffusées par l'Arabie saoudite et le Qatar... Réponse : A. C. Effectivement, pourtant ce n'est pas faute de le répéter: ce que nous appelons « salafisme », en arabe, cela s'appelle « wahhabisme». Et là nous sommes à contre-emploi de manière systématique et dans toutes les situations d'affrontement militaire, puisqu'au Moyen-Orient, au Sahel, en Somalie, au Nigeria, etc., nous sommes alliés avec ceux qui sponsorisent depuis trente ans le phénomène terroriste." [Alain Chouet, ancien chef du service de renseignements de sécurité à la DGSE] (Source : L'Humanité)

"Le Qatar a financé le Front Al-Nosra (ou Nosra) jusqu'à la scission intervenue en avril 2013. L'organisation, rattachée à Al-Qaïda, est pourtant inscrite sur la liste terroriste des Etats-Unis depuis le 20 novembre 2012 et la déclaration d'Hillary Clinton. Après la scission en avril 2013 - autrement dit la séparation entre Nosra dirigé par le syrien Al-Joulani et l'Etat islamique (EI) conduit par l'irakien al-Baghdadi - le Qatar a choisi de soutenir l'EI contrairement à l'Arabie Saoudite qui continue de financer Nosra." [Fabrice Balanche, maître de conférences à l'Université Lyon 2 et directeur du Groupe de Recherches et d'Etudes sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à la Maison de l'Orient] (Source : Challenges)

"Le calcul de l'Occident a été celui d'une chute rapide de Bachar al Assad et pour cet unique objectif, nous n'avons pas hésité à confier la sous-traitance du conflit à certains pays du Golfe, Qatar et Arabie Saoudite en tête. [...] La France soutenait les « opposants » et les laissait financer par les pays du Golfe, Arabie saoudite et Qatar en tête, pays qui ont soigneusement acheté une partie des élites françaises, empêchant ainsi tout débat sur la question. Cette alliance contre nature, court-termiste, est à l'origine d'une des plus grandes erreurs stratégiques de ces dernières années." [Frédéric Pichon, chercheur associé à l'Equipe Monde Arabe Méditerranée de l'Université François Rabelais (Tours)] (Source : Les-Crises.fr)
Oh, j'imagine aussi qu'on nous demandera de manifester ce dimanche ou un autre contre le terrorisme - bon courage, ça a été super efficace la dernière fois.

Les médias continueront à en faire comme d'habitude des tonnes dans l'émotion, dans le "Revivez minute par minute cette soirée d'horreur", dans le "oh, il 'y a aucun équivalent dans l'histoire, dans le monde, etc", dans le "oh, le monde est solidaire avec nous c'est beau", alors que le double de morts dans l'avion russe il y a deux semaines a été présenté a minima, qu'Obama n'y a pas vu une atteinte contre toute l'humanité, et où je n'ai vu naitre aucune mobilisation #JeSuisRusse, pas plus que #JeSuisLibanais avant-hier... #Non-Personnes...


Commentaire : Les massacres en Afghanistan, à Gaza, en Irak, en Syrie et au Liban - frappé la veille des attentats de Paris par le pire attentat depuis 1990 - ne soulèvent que peu d'indignation en Occident. De Kunduz à Paris, tout le monde devrait lever la voix face au massacre d'innocents par une clique de psychopathes.


On nous enjoindra la sacro-sainte "soupe à l'union nationale" - qui visera à blanchir tout le personnel politique - chuut, ne posez surtout pas de questions, ne demandez pas des comptes, union on a dit.

On se drapera du lin blanc de notre innocence, de notre éternelle "inculpabilité" - meuh non, aucun Syrien n'est mort en raison des actions de notre gouvernement bien sûr, il ne pense qu'à notre sécurité...

On hurlera aux moyens policiers en plus - après tout, il faut juste empêcher des assaillants armés en voiture de tirer sur des gens - trop facile.

On espionnera évidemment encore plus les citoyens - ça marche bien, la preuve.

On ne rappellera pas qu'il n'y a évidemment presque rien à faire pour empêcher des terroristes déterminés à agir dans ces conditions assez "simples". Et que la bonne solution est plutôt d'empêcher ces hommes de devenir terroristes, et pour cela il faut avoir des politiques étrangères honorables et humaines. On notera que, "étrangement", les terroristes ne visent jamais la Suisse ou la Hongrie...

Bref SURTOUT on ne demandera aucun compte à nos dirigeants qui ont pour tâche d'assurer notre sécurité directement et surtout indirectement (politique étrangère) - ni responsables, ni coupables, on verra même leur cote de popularité monter, comme d'habitude...

Enfin, mention spéciale aux gouvernements de l'Arabie Saoudite, du Qatar, de la Turquie, et à la CIA, qui financent et soutiennent les islamistes en Syrie : on vous méprise, allez au diable !


Commentaire : Espérons que ces attentats mettent en lumière la politique criminelle de la France au Moyen-Orient, la cause principale des massacres de Paris.


Tout comme nos dirigeants que vous achetez, qui préfèrent faire des communiqués hallucinants avec vous (pour demander à la Russie d'arrêter de bombarder Al-Qaïda !), plutôt que de vous combattre...
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