Commentaire :
"Notre but est de faire toute la lumière. C'est bien pour les victimes que nous travaillons"
Heureusement que Fenech est là pour nous recadrer, nous qui avions l'audace lexicale et syntaxique de croire que "faire toute la lumière" voulait dire déterminer les raisons d'une situation ou encore découvrir la vérité sur, ou encore éclairer et faire disparaître les incompréhensions ou les malentendus au sujet de.

Non, non, non. Notre ignorance étant guérie, on sait maintenant, grâce au langage politicien, que faire la lumière signifie occulter, cacher aux yeux de, dissimuler, camoufler, étouffer, taire, ne pas aborder, passer sous silence, éclipser, cacher, masquer les tenants et les aboutissants d'une situation, d'une enquête, d'un attentat.

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© JACQUES DEMARTHON
Un peu plus de quatre mois après les attentats qui ont ensanglanté Paris et Saint-Denis, une reconstitution est organisée ce jeudi 17 mars au Bataclan, dans le 11e arrondissement parisien. Dans cette salle de concert, fermée depuis le drame, 90 personnes ont perdu la vie sous les balles des terroristes de l'organisation État islamique. « Nous avons demandé aux forces de l'ordre qui sont intervenues, la BRI, le Raid, la police, de venir. Nous allons voir chronologiquement quelle a été leur intervention, pourquoi il a fallu trois heures entre la première attaque et (la fin de) l'intervention, trois heures pour extraire les dernières victimes », a expliqué le député Georges Fenech, président de la commission d'enquête, devant la presse, alors que l'accès au Bataclan était barré.

"C'est bien pour les victimes que nous travaillons"

Présente devant la salle de spectacle, qui a connu le bilan le plus meurtrier le 13 novembre, Nadine Ribet-Reinhart, dont le fils Valentin, 26 ans, a été tué au Bataclan, a dénoncé « une parodie scandaleuse » de justice. « On se réveille un matin et on découvre qu'il va y avoir une reconstitution. Elle n'était pas annoncée. On apprend qu'il n'y aura pas d'avocat, pas de partie civile, pas de victime, pas de presse », a-t-elle réagi, en pleurs. « Nous ne savons toujours pas à quelle heure nos enfants sont décédés. Sur le certificat (de décès), on a entre le 13 et le 14 novembre 2015. On ne sait pas quand les secours sont arrivés. On a besoin d'information pour savoir, pour comprendre », a poursuivi Nadine Ribet-Reinhart. "Notre but est de faire toute la lumière. C'est bien pour les victimes que nous travaillons", lui a répondu Georges Fenech.

La reconstitution est organisée à huis clos pour éviter toute fuite dans la presse, selon la volonté même de Georges Fenech. Une partie des auditions sera en effet couverte par le secret pendant vingt-cinq ans. Et toute personne à la langue trop pendue s'exposerait à un an de prison. La commission d'enquête parlementaire relative aux « moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015 », qui compte 30 députés de tous bords, a été lancée fin janvier. Elle rendra son rapport le 14 juillet.

Les attentats du 13 novembre, qui ont frappé 8 sites à Paris et Saint-Denis, ont fait 130 morts et 350 blessés. Le nombre total de victimes, physiques ou psychologiques, est estimé à 4 000.