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D'après une étude française publiée mardi, le travail de nuit serait nocif chez les femmes. Perturbant le rythme biologique, il ferait augmenter d'environ 30% le risque de cancer du sein.

Si ce n'est pas la première fois que l'effet néfaste du travail nocturne est mis en évidence, c'est une nouvelle alerte que lance une étude française publiée dans la revue International Journal of Cancer. Une alerte qui concerne cette fois-ci essentiellement les femmes. En effet, selon les travaux menés par des chercheurs de l'Inserm, travailler de nuit augmenterait le risque de cancer du sein chez les femmes. Une découverte qui tend à confirmer la décision prise en 2010 par le Centre international de recherche sur le cancer qui a classé le travail nocturne comme probablement cancérogène.

Pour arriver à cette nouvelle conclusion, l'équipe de chercheurs dirigée par Pascal Guénel, du Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations de l'Inserm se sont basés sur les données de l'étude générale Cécile menée sur les facteurs environnementaux, professionnels et génétiques sur le cancer du sein. Une étude qui a suivi pas moins de 1.250 femmes atteintes d'un cancer du sein et 1.350 femmes non touchées, dans deux départements français, en Ille-et-Vilaine et en Côte-d'Or (choisis pour des raisons pratiques). En comparant les données, les chercheurs ont ainsi constaté que le risque des femmes travaillant la nuit était supérieur d'environ 30% à celui des autres qui n'avait jamais eu une telle activité.

L'étude relève même une augmentation du risque particulièrement marquée pour les femmes ayant travaillé la nuit pendant plus de quatre ans et pour celles qui ont alterné travail de nuit et travail de jour, plus perturbant pour l'horloge interne. En effet, le travail nocturne est reconnu comme un perturbateur du rythme circadien qui gère l'alternance veille-sommeil et régule de nombreuses fonctions biologiques. C'est d'ailleurs cet effet qui serait selon les spécialistes, à l'origine du potentiel cancérogène du travail de nuit.

Un risque encore plus accru chez les futures mères

"D'une manière générale, toutes les études sur le travail de nuit partent de l'hypothèse d'une perturbation du rythme circadien qui entraîne une perturbation du cycle hormonal, suspectée d'entraîner un risque accru de cancer", indique l'épidémiologiste travaillant à Villejuif en région parisienne. Ainsi, une étude chez des infirmières avait déjà montré un excès de risque de cancer du sein pour celles travaillant la nuit. Mais l'originalité de l'étude est qu'elle a porté ici sur une population féminine générale et qu'elle a traité de manière relativement détaillée les types et les durées des activités de nuit effectuées, souligne le chercheur cité par l'AFP.

De plus, les travaux ont montré un risque accru (50% au lieu de 30%) pour les femmes qui ont commencé à travailler la nuit avant leur première grossesse. Dans ce cas, l'hypothèse est qu'avant la première grossesse, les cellules des glandes mammaires, pas encore complètement différenciées, sont encore plus vulnérables à des perturbations, explique M. Guénel.

Un risque qu'il faudra prendre en compte

Néanmoins, l'épidémiologiste tient à relativiser ces résultats. Si l'augmentation observée est significative d'un point de vue statistique, elle reste plutôt légère et "signifie que le risque relatif est de 1,3 alors que par comparaison le risque relatif de cancer du poumon chez les fumeurs est de dix". De même, le risque du travail nocturne est du même ordre de grandeur que d'autres risques connus de cancer du sein comme les mutations génétiques, l'âge tardif de la première grossesse ou les traitements hormonaux.

"Désormais plusieurs études vont globalement dans le sens d'une augmentation du risque de cancer liée au travail de nuit", souligne toutefois M. Guénel. C'est donc un problème de santé publique qu'il faudra prendre en compte à un moment donné.