Des chercheurs américains de l'université d'état de l'Oregon ont découvert, pour la première fois dans une espèce animale, qu'il existe un ADN égoïste qui endommage en réalité l'organisme et pousse le bouchon jusqu'à diminuer ses chances de survie. Curieusement, il y aurait une similitude avec les dégâts que l'on constate lorsqu'on vieillit.

Il s'agit d'un petit bouleversement de paradigme biologique si vous y réfléchissez bien. Ce serait une bonne piste pour étudier sous un autre angle le processus de vieillissement. Cet ADN ne se trouve pas n'importe où, mais dans la mitochondrie. Nous avons déjà plusieurs fois énoncé ici qu'assez récemment, il avait fallu se rendre à l'évidence que la mitochondrie qui fournit à nos cellules l'énergie dont elle a besoin pour vivre, résulte d'une vieille symbiose, un peu comme si une bactérie avait parasité une autre et qu'elle avait pu coexister et survivre mieux que les autres pour former toute la vie complexe sur notre planète. La mitochondrie a son propre ADN qui est transmis par la mère via l'ovule.

Il s'agit d'une symbiose, mais la coopération n'est pas obligatoirement parfaite. Pour l'analogie, c'est un peu comme un couple homme/femme qui aurait du mal à joindre les deux bouts seuls, mais cela ne les empêche pas d'avoir des intérêts pas toujours convergents pour autant...

La découverte a été réalisée quasiment par accident en étudiant un type de ver. En réalité toutefois, cet ADN mitochondrial égoïste avait déjà été repéré dans les plantes, mais jamais chez les animaux, car on ne croyait pas que cela ait pu exister. La mitochondrie agit en général pour le bien de la cellule, mais l'ADN que l'on a trouvé a de grandes différences avec celui que l'on connaissait. Il a tendance à se copier plus rapidement que les autres brins d'ADN. Il n'a aucune utilité pour la cellule à proprement parler et, même dans certains cas, l'endommagerait. Dans le cas des plantes, cela peut empêcher la floraison et pourrait provoquer la stérilité.

Les vers qui ont cet ADN ont moins de descendants et/ou moins d'activité musculaire ! Pour ces vers là, la sélection naturelle n'est pas vraiment au sommet de son art... Cela peut choquer les puristes darwiniens, car ce que vous lisez dans les manuels à tendance à vous faire penser que la Nature se débarrasse de ce qui est encombrant. Dans le cas du ver nématode étudié, les tailles de la population seraient trop faibles pour éliminer cet ADN. Encore une fois, les défauts que provoque cet ADN sont très similaires à ceux liés au vieillissement et l'on constate davantage de cet ADN dans le ver lorsqu'il vieillit.

Est-ce que ces différences biologiques sont derrière le dysfonctionnement de la mitochondrie ? À creuser !

Pour aller plus loin: Clark KA, Howe DK, Gafner K, Kusuma D, Ping S, et al. (2012) Selfish Little Circles: Transmission Bias and Evolution of Large Deletion-Bearing Mitochondrial DNA in Caenorhabditis briggsae Nematodes. PLoS ONE 7(7): e41433. doi:10.1371/journal.pone.0041433