Après avoir été adoptée par de nombreuses villes des USA, Blue Cruch débarque dans le royaume de sa très gracieuse majesté.

Deux services de police britanniques ont commencé de tester ce logiciel de prédiction qui prétend pouvoir déterminer où et quand auront lieu les crimes futurs.

Le Criminal Reduction Utilising Statistical History, tel est son nom, Crunch pour les intimes et plus précisément Blue Cruch en référence à la companie qui l'a développé : IBM. Une vielle histoire que le contrôle de la population chez IBM à qui on doit le systeme de cartes pérforées dont la référence etait tatouée sur les prisonniers des camps Nazis.

Aujourd'hui, modernité oblige, on a rangé les cartes perforées et les aiguilles à tatouer.

L'idée est de stocker tous les incidents criminels dans une base de données, d'en analyser les caractéristiques et de les recouper avec toutes sortes d'autres données provenant de sources aussi variées que les rapports d'espionnage, des profils comportementaux de délinquants ou les prévisions météorologiques. Crunch est supposé identifier des zones sensibles où certains types de crimes ont de fortes probabilités de se produire dans le futur.

Contrairement au film « Minority report », cette approche nouvelle de la lutte contre la délinquance ne fait pas appel à des voyants extra-lucides.

Les prédictions de Blue Crunch sont le résultat de recoupements statistiques, une branche de l'analyse statistique qui s'appelle "predictive analytics" (Analyses prédictives).

Blue Crunch a été d'abord testé à Memphis, Tennessee, où ses promoteurs du projet prétendent avoir atteint une réduction de 31% de la criminalité générale et de 15% des actes avec violence.

Le concept ne va pas jusqu'à instaurer une accusation de « pre-crime ». Les patrouilles sont simplement orientées vers les lieux où les statistiques prédisent que la criminalité a le plus de chance d'avoir lieu.

Au niveau individuel, le « pré-crime » commence cependant à prendre forme avec l'utilisation de systèmes d'analyse prédictive dans plus en plus de décisions de remise en liberté conditionnelle. Les logiciels passent au crible le passé du détenu : les conditions de logement, son éducation, ses amitiés, ses moyens de subsistance, son mode de vie, son état émotionnel, des attitudes etc. avant de donner une sentence de « rechute probable » ou pas.

En Floride, le système a été appliqué à de jeunes mineurs délinquants dans le but de prédire leur potentialité future de verser dans le crime afin de déterminer quels programmes de redressement et de réinsertion leurs seront appliqués.

Selon Mark Cleverley, responsable chez IBM des programmes pour le gouvernements, Crush ne ferait qu'améliorer les pratiques existantes.

En réalité, la mise en place de ce type de recoupement analytique de données jusque là séparée ne fait que préfigurer ce que sera un monde où les informations détenues par les autorités pourront être sans limite croisées entre elle et utilisée pour déterminer le traitement spécifique que l'administration adoptera vis à vis de chacun des citoyens.

Ce type de recoupement était jusque récemment considéré comme une violation de la vie privée . C'était justement pour limiter la détention et l'exploitation abusive des informations individuelles que la CNIL a été créée.

Mais aujourd'hui, la CNIL est devenue un dinosaure fossilisé vivant. Son rôle a été considérablement rogné et devient consultatifs sur tous les points majeurs.

Bientôt, votre ADN, votre état civil, notre carnet scolaire, vos évaluations, votre situation fiscale, votre attitude au volant, vos va et viens dans le monde, vos opinions exprimées sur Agoravox, vos fadettes, vos fréquentations et toutes sortes d'autres informations pourront être recoupées dans des systemes d'analyse prédictive et détermineront l'attitude de l'état à votre égard.

Souriez. Big-brother n'aime pas qu'on fasse la tronche !