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L'histoire officielle nous enseigne que Robert Schuman, Ministre français des Affaires étrangères, inspiré par son grand ami Jean Monnet, commissaire au Plan, a sorti de son chapeau magique, en 1950, une déclaration qui révolutionnera le paysage politique européen . Mais cette « Déclaration Schuman » qui irradie le désir de paix et d'amour entre les peuples d'Europe, est-elle l'œuvre d'un visionnaire désintéressé, ou celle d'un simple pion des Etats-Unis ?

Le rôle des Etats-Unis dans la construction européenne

Grâce à l'ouverture des archives de la CIA, en 2000, Joshua Paul, Universitaire de Washington découvre un lien étroit entre le Mouvement Européen, organisation fédéraliste la plus importante d'après-guerre, et l'OSS (Bureau des services stratégiques), ancêtre de la CIA.

En effet, le Comité Américain pour une Europe Unie (ACUE), créé en 1949, en grande partie composé d'agents de l'OSS, a financé le Mouvement Européen de Robert Schuman et Paul-Henry Spaak. Les documents montrent par exemple qu'en 1958 l'ACUE a assuré 53,5 % du financement de l'organisation. De plus, l'European Youth Campaign, une branche du Mouvement européen, était entièrement financée et contrôlée par Washington. Son directeur belge, le Baron Boel, recevait des versements mensuels sur un compte spécial.

L'ACUE, dont les fonds proviennent de Ford et Rockefeller, deux personnalités clés des cercles mondialistes, ainsi que de milieux d'affaires ayant des liens étroits avec le gouvernement américain, avait un pouvoir de pression sur les instigateurs de la construction européenne comme l'atteste une note de la Direction Europe de l'OSS. Celle-ci datée de 1965, conseille au vice-président de la Communauté Economique Européenne, Robert Marjolin, d'empêcher tout débat jusqu'au moment où « l'adoption de telles propositions serait devenue pratiquement inévitable ».

Enfin le rôle de Jean Monnet dans la création de cette Europe n'est pas anodin. L'homme que le Général De Gaulle qualifiait de « petit financier à la solde des Américains » était de l'avis de beaucoup à la solde des hautes sphères Outre-Atlantique.

Des intérêts américains certains dans cette construction

La construction européenne était un enjeu du plus haut intérêt pour les Etats-Unis dans le combat contre le communisme et l'URSS. Les communautés nationales d'Europe occidentale faisaient barrage au même titre que les USA contre le bloc communiste, et une structure commune était susceptible d'empêcher les pays signataires de passer dans le camp des démocraties populaires. Dans la droite ligne du Plan Marshall, les pays d'Europe de l'ouest se sont donc tournés vers les USA et se sont donc alignés sur eux dans un contexte de Guerre Froide naissante.

Ensuite, moins dans la perspective d'une guerre idéologique contre les « forces du mal communistes », les Etats-Unis voyaient d'un bon œil la convergence des économies et l'ouverture des frontières européennes. Pour une économie comme celle des USA, le marché commun et l'Union monétaire des pays européen étaient une aubaine. Les pays européens considérés comme une grande zone économique ne pouvait que céder à la « soft law » américaine et voir les rayons de nos magasins se remplir des artefacts et technologies d'Outre-Atlantique. Une sorte de soumission par l'économie en somme.

Contredisant les découvertes de Joshua Paul et certaines informations déclassifiées révélant la forte implication financière de la CIA dans le Mouvement Européen, certains comme Jean-Marie Palayret du «Mouvement Européen International», prétendent que l'ACUE n'intervenait d'aucune manière dans les programmes d'action des fédéralistes. Les fonds, non soumis à un contrôle strict, laissaient le champ libre au mouvement traité comme un « agent indépendant ». Pour Palayret, les USA dans la lignée du plan Marshall finançait généreusement un mouvement fédéraliste ne visant que la paix. Difficile à croire !

La Construction européenne est un sujet polémique de la vie politique contemporaine. Elle est source de fantasmes et d'interrogations. L'origine historique de cet « Objet Politique Non Identifié » ne déroge pas à la règle. La personnalité de Schuman, très complexe, homme des frontières mais aussi administrateur à Vichy est loin d'inspirer confiance. Chacun se fera donc son opinion : Schuman, homme providentiel capable de bouleverser la vie politique européenne à jamais ou simple pantin dirigé Outre-Atlantique par des Etats-Unis plus soucieux de leurs intérêts hégémoniques que de la paix et l'harmonie entre les peuples sur le Vieux Continent ?