L'Afssaps, qui avait en novembre annoncé le chiffre de 500 décès a minima, a commandité une autre étude, plus étendue dans le temps, qui révèle un nombre de victimes plus important.

Combien de décès sont attribuables au Mediator? Le 16 novembre, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) rendait public le chiffre de 500 décès a minima. Elle confirmait ainsi la fourchette donnée par Le Figaro le 14 octobre. Quelques jours plus tard, Jacques Servier, le fondateur et patron du laboratoire qui a commercialisé le médicament, déclarait dans Le Monde du 21 novembre: «Nous voudrions comprendre où ils sont. Qui a intérêt à tuer ses patients?»

Ce chiffre de 500 décès a été établi par l'épidémiologiste Catherine Hill (Institut Gustave-Roussy de Villejuif). C'est à la demande de l'Afssaps, qui l'a contactée le 10 novembre, que la chercheuse s'est lancée dans ce calcul.

En réalité, l'Afssaps avait déjà, fin octobre, sollicité deux autres chercheurs, Mahmoud Zureik, directeur de recherche à l'Inserm, et Agnès Fournier, épidémiologiste à l'Inserm. Selon ces derniers, le nombre de morts attribuables au Mediator s'établissait entre 1000 et 2 000. Et c'est après avoir reçu leurs résultats inquiétants que l'Agence a sollicité Catherine Hill. «Notre estimation est tout à fait concordante avec la sienne, qui conclut à 3 500 personnes hospitalisées pour valvulopathies et à 500 morts minimum, confie Mahmoud Zureik . Toutes ces estimations globales sont basées sur une période de surveillance de mortalité de quatre ans après l'hospitalisation.» Agnès Fournier justifie sa méthodologie: «Pour répondre à la question qui nous avait été posée, à savoir combien ce médicament avait fait de morts, il me semblait opportun de fournir un nombre total de décès. Et non pas un chiffre ne prenant en compte que le court terme.»

Ce qui différencie les calculs de Catherine Hill de ceux de Mahmoud Zureik et d'Agnès Fournier, c'est la prise en compte du long terme. «D'après les connaissances médicales - et tous les cardiologues s'accordent sur ce point -, les patients hospitalisés pour valvulopathies, même s'ils ne décèdent pas pendant les premières années après leur hospitalisation (ce qui est le cas pour environ 90 % des patients dans le rapport de la Cnam), restent sujets à une surmortalité à plus long terme», explique Mahmoud Zureik.

Les trois chercheurs qui ont travaillé à la demande de l'Afssaps ont eu en leur possession les mêmes données de la Cnam pour réaliser leurs extrapolations. Il s'agit de 303336 personnes exposées au Mediator en 2006 (70 % d'entre elles ne sont pas diabétiques) dont 597 ont été hospitalisées au moins une fois pour valvulopathie. Parmi ces hospitalisations, on dénombrait 64 décès. Pour faire simple, c'est la prise en compte de la surmortalité des 533 malades non décédés dans les quatre ans qui aboutit à la différence entre les 500 morts et la fourchette de 1 000 à 2 000 décès. Catherine Hill estime aujourd'hui que cet éventail «n'est pas du tout déraisonnable ni exagéré». Le 16 novembre, l'Afssaps n'a pas mentionné cette fourchette.