Image
© Inconnu
Le Comité Scientifique des Risques Sanitaires et Environnementaux (SCHER) a publié le 14 mars un avis intitulé Risques environnementaux et risques sanitaires indirects liés au mercure des amalgames dentaires [1].

Certes les experts y admettent que, « dans des conditions locales extrêmes (densité maximale de dentistes, utilisation maximale de mercure, absence de dispositifs de séparation dans le processus de traitement de l'eau) », il pourrait y avoir un risque pour les consommateurs de poisson.
Mais formulé autrement, le problème se résume ainsi : « Là où de bons contrôles environnementaux sont mis en place, le risque est absent ou négligeable. » En somme, il ne serait pas nécessaire de renoncer au mercure dentaire, il faudrait simplement « contrôler » son usage pour que le danger se volatilise.
Pourtant, on sait aujourd'hui que :
- Le mercure est une substance extrêmement toxique, pour laquelle il n'est pas possible de définir un seuil qui serait sans danger [2] ;
- Le mercure dentaire représentait en 2007 le quart de la consommation de mercure en Europe [3] : cette part relative augmente sans cesse, de sorte qu'il serait absurde de continuer à réglementer le mercure en faisant une exception de tolérance pour les amalgames dentaires ;
- Le mercure dentaire est la première source d'exposition directe au mercure de la population européenne [4] ;
- Le mercure dentaire est remplaçable dans toutes les situations : c'est donc une exposition qui peut être facilement supprimée [5] ;
- Le SCHER lui-même est obligé de d'admettre que pour une proportion considérable d'enfants européens les limites de sécurité d'exposition au mercure fixées par l'OMS ou les États-Unis sont dépassées. Comment justifier, alors, que l'on persiste à augmenter inutilement leur exposition ?
Les institutions - européennes ou françaises - ignorent ces faits pourtant bien établis, qui imposent une réponse évidente pour toute instance réellement soucieuse de santé publique et d'environnement. Elles préfèrent découper les problèmes en tranches si fines qu'on regarde au travers sans apercevoir le moindre danger. Ainsi le SCHER fait-il valoir qu'il n'est compétent ni pour parler des dangers du mercure en général, ni pour évaluer les effets cocktails, ni pour considérer l'implication du mercure dentaire dans les phénomènes d'antibiorésistances, ni pour s'intéresser à l'exposition professionnelle, ni pour proposer des recommandations relatives à l'amalgame, etc.

Ces question sont traitées par d'autres agences, ou bien, plus souvent, ne le sont pas du tout. Personne ne considère le problème d'un bout à l'autre et n'agit en conséquence.

Alors à quoi sert le rapport du SCHER ? Manifestement, à rien, sinon à complaire aux instances dentaires en repoussant l'interdiction, pourtant inévitable à terme, des amalgames. En somme, le SCHER nourrit la stratégie du doute mise au point par les leaders d'opinion sur les amalgames [6], au détriment de la santé et de l'environnement des Européens.

Notes :

[1]. http://ec.europa.eu/health/scientific_committees/consultations/public_consultations/scher_cons_06_en.htm

[2]. OMS, Mercure et soins de santé, Document d'orientation stratégique, 2005.

[3]. http://real.ehesp.fr/pluginfile.php/4701/mod_resource/content/11/modulenc/co/m6_2_2_UE_1.html

[4]. Cette augmentation relative tient au fait que les autres usages du mercure en Europe sont progressivement interdits ou sévèrement réglementés.

[5]. Selon le dernier rapport de l'ANSM, non publié pour l'indigence de sa bibliographie sur le mercure dentaire.

[6]. http://reseau-environnement-sante.fr/2014/04/01/dossiers-par-themes/communique-de-presse-1er-avril-2014-a-quoi-sert-le-rapport-du-scher-sur-le-mercure-dentaire/