Commentaire : Il devient chaque jour un peu plus évident que l'état d'urgence décrété par le gouvernement représente aussi le prétexte idéal afin de pouvoir répertorier les dissidences, de quelques natures qu'elles soient. Utiliser la coercition sur une population, c'est révéler aux yeux de tous, en substance, la réalité d'une psychologie dysfonctionnelle : l'Histoire ne nous apprend-elle pas que la violence est bien la solution la moins efficiente pour régler les problèmes ?

Pour aller un peu plus loin :

- La violence n'a pas toujours existé
- Violence, guerres : justification par une science détournée


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« La République est forte, la meilleure réponse au terrorisme, c'est de continuer à vivre comme avant ». Cela, c'est pour le discours public en boucle, pour Pujadas et le management de la peur pour les « bons français » mais il y a les « mauvais Français », suivez mon regard, les Arabes enturbannés, les Noirs qui aiment Dieudonné, les cailleras qui détestent les keufs, les anars de droite et de gauche qui crachent sur le politiquement correct, les frontistes ou les écologistes énervés, les réacs et anti "mariage pour tous", les identitaires et tous ceux qui la ramènent sur les impôts et les taxes et en viennent même à désigner du doigt le Qatar ou l'Arabie Saoudite. Cela en fait du monde, alors dans la plus grande discrétion, ce 24 novembre, le gouvernement français a déclaré au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe que les mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence nécessitaient, je cite, « une dérogation à certains droits garantis par la Convention européenne des Droits de l'Homme ». D'ailleurs, voici la formule exacte retenue par le gouvernement : "Some of them, prescribed by the decrees of 14 November 2015 and 18 November 2015 and by the Law of 20 November 2015, may involve a derogation from the obligations under the Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms".

En réalité, le gouvernement français fait ici application de l'article 15 de la Convention :
« 1. En cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l'exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international.

« 2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation à l'article 2, sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre, et aux articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7.

« 3. Toute Haute Partie contractante qui exerce ce droit de dérogation tient le Secrétaire général du Conseil de l'Europe pleinement informé des mesures prises et des motifs qui les ont inspirées. Elle doit également informer le Secrétaire général du Conseil de l'Europe de la date à laquelle ces mesures ont cessé d'être en vigueur et les dispositions de la Convention reçoivent de nouveau pleine application »
Ainsi, de la Convention, depuis le 24 novembre, seuls quatre droits restent intacts : le droit à la vie de l'article 2, l'interdiction de la torture et traitements inhumains ou dégradants de l'article 3, l'interdiction de l'esclavage de l'article 4, et le principe de légalité des infractions et des peines de l'article 7.


Commentaire : Hélas, on peut bien constater que ce qui reste intact, ce sont des droits à géométrie pour le moins variable...

- le droit à la vie, oui, sauf bien sûr quand on se prend une balle, une grenade ou un coup de matraque mal placé, qui nous fait passer de vie à trépas, « malencontreusement »
- l'interdiction de la torture et traitements inhumains ou dégradants, oui, sauf, qui sait, pendant les gardes à vue sordides et les interrogatoires musclés
- l'interdiction de l'esclavage, oui. Mais de quel esclavagisme parle t-on ? La main-mise de l'État et de son administration sur tous les aspects de notre vie à de quoi faire frémir.
- le principe de légalité des infractions et des peines, oui, en théorie. La pratique nous prouve très exactement le contraire : pour des malversations qui enverraient n'importe quel quidam pour des centaines d'années en prison, hommes d'affaires, banquiers et politiques s'en tirent sans trop de tracas.

La France s'est donc libérée du cadre de la Convention européenne pour tous les autres droits fondamentaux à savoir : la liberté d'expression, la liberté de réunion, la liberté de manifestation, la liberté d'association, la liberté de religion, la liberté d'aller et venir, les règles du procès équitable, l'intimité de la vie privée et de la vie familiale... Certes, il faudra justifier les violations mais ce sera en théorie très facile avec le contenu de la loi sur l'état d'urgence, en invoquant tout simplement des renseignements dignes de foi, mais devant rester confidentiels pour raison de sécurité.
Soyons donc prudents dans nos comportements comme dans nos commentaires car aujourd'hui n'est pas comme hier. Sachez tout de même que pour défendre nos libertés, nous pouvons encore invoquer le Pacte des Droits civils et politiques de 1966 qui est directement applicable et non touché et puis... et puis, il nous reste la protection de l'ONU avant la TGM. Car la TGM (dans le jargon à la mode : «la troisième guerre mondiale »), elle approche à grands pas avec en particulier la résolution 2249 de l'ONU, prise il y a quelques jours par la France, les USA et leurs alliés et qui suspend la souveraineté de la Syrie et de l'Irak. Par cette résolution 2249, les peuples Syriens et Irakiens sont tout bonnement privés de leur droit à l'autodétermination.

Cette résolution 2249 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies vient d'être publiée. Elle fut votée le vendredi 20 novembre. Pour mémoire, sur ce sujet de la lutte contre le terrorisme en général et de l'État islamique en Irak et au Levant en particulier, la Russie avait présenté un projet de résolution le 30 septembre, qui avait été accepté par la plupart des membres du Conseil mais bloqué par le Royaume-Uni, blocage soutenu par les États-Unis d'Amérique et la France, au motif que ce projet prévoyait une coordination des efforts de lutte contre l'État islamique : coordination entre intervenants mais également avec les pays où cette lutte est menée, ce qui ne convenait pas aux pays membres de l'Alliance atlantique. Le projet de résolution russe, légèrement modifié en des termes tendant à ménager les pays ennemis de la Syrie, a été encore présenté dans le nouveau contexte après les attentats de Paris et du Sinaï. Mais c'est alors que la France a présenté son propre projet et c'est le projet français qui a été voté le 20 novembre.

La résolution 2249 ne se réfère certes pas explicitement au chapitre VII de la Charte de l'ONU, ce qui laisse certains commentateurs dire qu'elle n'autorise pas l'usage de la force mais elle mentionne cependant explicitement une menace mondiale à la paix et à la sécurité internationale, ce qui revient au même puisque c'est le sujet du chapitre VII, et appelle les pays qui en ont les moyens à « prendre toutes les mesures nécessaires » pour, entre autres, « éradiquer les sanctuaires » que l'EI s'est taillés en Irak et en Syrie. Ce qui ne laisse guère de doutes sur le type de moyens à mettre en œuvre. D'ailleurs, elle ne condamne ni ne distingue les opérations militaires menées avec les résultats respectifs que l'on connaît de la part d'une soixantaine de pays conduits par les États-Unis depuis quinze mois, en violation de la souveraineté de la Syrie (donc en violation de la charte de l'ONU), et de la Russie depuis deux mois à la demande de la Syrie (donc en accord avec la charte).

Dans sa présentation du projet, la France avait insisté pour qualifier les attentats de Paris d'« acte de guerre », ce qui équivalait à une reconnaissance de l'État islamique en Irak et au Levant comme sujet de droit international. Elle n'a pas totalement obtenu gain de cause puisque cela a été requalifié en « menace contre la paix et la sécurité internationale ». Les États-Unis aussi ont perdu un point puisqu'ils s'étaient opposés récemment à un projet de résolution présenté par la Russie pour, notamment, qualifier le front Al-Nosra d'organisation terroriste, ce que les États-Unis refusaient formellement, or Al-Nosra figure comme organisation terroriste dans la résolution 2249, laquelle cite nommément le front Al-Nosra au même titre que l'EI.
Ce qu'il faut donc retenir et souligner de la résolution « française » 2249, c'est qu'elle suspend bien la souveraineté de la Syrie et de l'Irak, puisqu'elle ne mentionne pas leurs gouvernements ni la nécessité de les associer à ce que l'on entreprendra sur leurs territoires nationaux. Les pays qui en ont donc les moyens sont encouragés à engager des campagnes militaires « dans les zones contrôlées par l'EI en Irak et en Syrie » en ignorant totalement ces deux pays, leurs gouvernements et leurs frontières.
Afin que les choses soient bien claires, dans son discours d'explication des raisons pour lesquelles les États-Unis votaient en faveur de cette résolution, l'ambassadrice états-unienne Michele Sison a mentionné avec insistance l'urgence de procéder à un changement de régime en Syrie. François Hollande a confirmé dans son entretien avec Obama que l'objectif numéro un des deux pays était le renversement de Bachar El Assad. Or, nous avons souligné ici à plusieurs reprises que cette question était non négociable pour la Russie. On se dirige donc bien, à plus ou moins long terme, vers une confrontation finale.

Pour résumer : ce qui se cache derrière la résolution 2249 du Conseil de Sécurité de l'ONU, c'est sous le prétexte de quelques attentats terroristes dans une capitale européenne, la reconnaissance de l'État islamique en Irak et au Levant comme acteur international, l'intensification de la guerre contre la Syrie, l'enregistrement de sa perte de contrôle d'une partie de son territoire, et la suspension de sa souveraineté sur l'ensemble de celui-ci.

Sur ce front, la France de François Hollande n'a pas changé de cap et même s'est montré à l'ONU encore plus déterminée que jamais. Est-ce cela que la dictature veut à tout prix faire taire ? Il ne faut pas en effet qu'un seul clou dépasse pour pouvoir demain réécrire l'histoire à sa façon en diabolisant, voire en hitlérisant Poutine.