PARIS - L'analyse génétique de l'agent de la Peste noire, extrait de restes de cadavres médiévaux d'un cimetière de Londres, montre que ce germe, qui a ravagé l'Europe, est l'ancêtre de toutes les formes actuelles de la maladie, selon une équipe internationale de chercheurs.

Ce travail de reconstruction du génome de la bactérie à partir de dents de victimes de la peste bubonique qui a tué au moins 30 millions d'Européens en à peine cinq ans au 14e siècle (entre 1347 et 1351) est publié, mercredi en ligne, par la revue scientifique britannique Nature.

L'agent de la peste, découvert en 1894 par le Français Alexandre Yersin, est la bactérie Yersinia pestis. Son génome a été décodé en 2001.

La nouvelle étude est, elle, centrée sur l'ancien germe, responsable de la pandémie du Moyen-âge et la comparaison avec ses congénères contemporains.

Les données montrent que cette souche médiévale du bacille est l'ancêtre de toutes les flambées de peste qui sévissent aujourd'hui, selon le professeur Johannes Krause (Université de Tuebingen, Allemagne), un des auteurs.

L'étude montre qu'en six siècles, il n'y a pas eu de changements génétiques majeurs chez cette bactérie.

La similitude entre l'ancien germe et ses formes modernes rend peu vraisemblable l'idée que la virulence particulière de la Peste noire soit liée à la bactérie elle-même. D'autres facteurs doivent d'abord être considérés dans les discussions sur la susceptibilité des populations, comme l'environnement (climat...), les conditions sociales (misère, malnutrition, absence d'hygiène...), la dynamique des vecteurs (rats/puces), la présence d'autres maladies concurrentes ou encore la vulnérabilité des hôtes.

Comme la variole qui a fait des ravages parmi les Indiens d'Amérique totalement dépourvus d'immunité contre la maladie, la Peste noire aurait ainsi frappé les populations d'Europe occidentale qui n'avaient jamais été auparavant exposées à ce bacille émergent.

Reste à expliquer la pandémie de la peste de Justinien qui a sévi au 6e siècle dans l'Empire romain et dont on estime qu'elle a fait cent millions de morts dans le monde. Pour les auteurs, il s'agirait d'une variété différente de la bactérie actuelle voire d'une autre maladie.