Une écrasante majorité bipartisane (sauf l'IdV, Italia dei Valori), en modifiant l'article 81 de la Constitution, a fait de l'Italie une république fondée sur l'équilibre du budget, dans laquelle la souveraineté appartient au marché
[1]. L'Etat, récite le nouveau texte, assure l'équilibre entre les recettes et les dépenses de son bilan, en tenant compte des phases du cycle économique. Il y a cependant un problème : comment fait-on pour assurer l'équilibre si on décide une dépense sans savoir à combien elle se monte ? La question doit être transmise aux
onorevoli[2] qui ont approuvé la modification de la Constitution, car ce sont eux aussi qui ont approuvé l'acquisition des avions de chasse étasuniens F-35. Sans savoir combien ils finiraient par coûter. Ils ont d'abord cru (ou fait semblant de croire) les bonimenteurs de Lockheed qui parlaient de 65 millions de dollars par avion. Mais il y avait une combine : c'était le prix de l'avion « nu », sans même le moteur. Ils ont ensuite cru (ou fait semblant de croire), les
onorevoli, le ministre de la défense Di Paola, le plus grand soutien du F-35 : au parlement il a raconté que chaque avion de chasse coûtera dans les quatre-vingt millions de dollars, mais on s'attend à ce que le chiffre soit de plus en plus bas. Et quand le gouvernement Monti a décidé de « recalibrer » l'achat des F-35 de 131 à 90 unités, les
onorevoli se sont réjouis de l'épargne ainsi obtenue. Elle aussi non quantifiable, le coût réel de l'avion demeurant dans les nuages.