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En période hivernale, ils sont nombreux à composer le 115, numéro d'urgence du Samu social. « Ils », ce sont ces personnes en détresse, souvent des familles.

Le baromètre 115 comptabilise 78247 appels au numéro d'urgence en janvier 2014. Il indique une augmentation générale des demandes d'hébergement, tous publics confondus, entre décembre et janvier (4 %). Ces demandes représentent presque la totalité des appels reçus au 115. Le baromètre indique que le public demandeur est majoritairement composé de familles avec enfant(s). Or ce public est très mal servi, puisqu'on ne comptabilise que 32 % de réponses favorables. Mais ce sont les demandes de personnes isolées qui enregistrent la plus forte hausse dans les départements étudiés (8 %). En particulier celles des femmes seules (11 % dans les 37 départements, 24 % à Paris).

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Selon Florent Guéguen, directeur général de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars), la raison de cette augmentation de demandes féminines réside dans la conjonction de plusieurs facteurs : « Il n'y a pas d'explication scientifique à ce stade, car c'est une comparaison de mois en mois. Mais on peut préjuger que beaucoup de ces demandes viennent de femmes seules, sans emploi, à faible qualification et en phase de décohabitation, parfois suite à une rupture. Il peut arriver aussi qu'elles soient menacées, victimes de violences familiales. Et puis il y a la crise économique. Quand les ressources du couple chutent, c'est la femme la première victime ».

Comme les familles, les femmes isolées éprouvent de grandes difficultés à accéder à un hébergement. La raison ? Une inadéquation de l'offre au public. Les solutions proposées à ces deux catégories ne correspondent pas à l'évolution qu'elles ont connue. « Les parcs d'hébergement sont conçus sur le modèle des années 1980. 90 % des places sont proposées aux hommes seuls. Les premiers plans hiver ont été développés en se basant sur le public majoritaire à la rue : l'homme seul. Selon le modèle du clochard classique... » Dans les structures existantes, on ne mélange pas les différents publics. Il y a peu de mixité. Les parcs d'hébergement accueillent peu de femmes. « Pourtant, c'est le public le plus fragile, le moins bien protégé », déplore Florent Guéguen. Cette inadéquation entre l'offre et la demande s'exprime aussi dans la gestion saisonnière des centres d'hébergement.

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© inconnuFlorent Guéguen
Basée sur la logique du « thermomètre », l'offre n'est plus adaptée à la réalité de la détresse sociale. Car celle-ci ne dépend pas des températures. Et pourtant, elles régulent toujours la dynamique de l'ouverture des centres : accessibles en hiver, fermés l'été. La demande des femmes et des familles ayant fortement augmenté, l'Etat ne parvient pas à proposer des solutions adaptées. Et les oriente au contraire vers des solutions précaires, comme les hôtels. Pour Florent Guéguen, la responsabilité de l'Etat est totale. Il s'était engagé à trouver une alternative à la gestion saisonnière de l'hébergement et du système des « portes tournantes ». En effet, le défaut de solutions proposées aux personnes couplé à la durée courte des séjours attribués génèrent des demandes multiples. 72 % des personnes qui appellent le 115 sont déjà connues du service. « Le système est saturé. Alors ils abandonnent certaines personnes pour libérer des places fraîches. Elles ne restent que deux-trois nuits, sans recevoir l'accompagnement qu'elles devraient avoir. Au final, elles ne sortent jamais de la grande exclusion. On les abandonne, on les prend en charge, puis on les abandonne à nouveau... »

Et pourtant, ce public de femmes isolées ne représente pas un nombre de personnes important. Les pouvoirs publics pourraient créer des capacités déviées pour les femmes seules sans que cela soit trop onéreux. Cela supposerait une politique plus volontariste en matière de construction des logements « présociaux ». Parce que l'objectif de la Fnars, rappelle Florent Guéguen, ce n'est pas l'accès à l'hébergement, mais l'accès au logement. Il faut que ces personnes puissent sortir de ces structures pour aller vers des logements autonomes. Or, seuls 30000 logements présociaux seraient accessibles, ce qui, selon lui, n'est pas à la hauteur de la crise.

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La Fnars

Créée en 1956, la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars) est une fédération française d'organismes et d'associations proposant aux personnes en situation de grave détresse sociale un accueil, un hébergement et une aide à la réinsertion sociale. Elle fédère 870 associations ou organismes qui gèrent 2800 établissements et services sociaux accueillant, hébergeant, logeant et insérant 900000 personnes chaque année.