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© NAML'un des forages du champ gazier de Groningue.
C'est bien l'exploitation du gaz de Groningue qui est responsable des séismes ayant détruit des milliers de logements en 2012 et 2013, confirme le rapport d'une autorité indépendante. De quoi saper la confiance des Néerlandais dans leur industrie gazière et leurs autorités.

Ni le gouvernement néerlandais, ni ExxonMobil, ni la Royal Dutch Shell n'ont jamais considéré le risque sismique en un demi-siècle d'exploitation du plus gros gisement européen de gaz naturel. Telle est la principale conclusion d'un rapport, rendu public mercredi 18 février, par le bureau néerlandais de la sûreté, une autorité indépendante.

Deux fois la consommation française

L'histoire commence en 1959. Dans le sous-sol de la région de Groningue (nord des Pays-Bas), on découvre de gigantesques réserves de gaz naturel. Mis en exploitation quatre ans plus tard, le gisement «éléphant» de Groningue produit rapidement une centaine de milliards de mètres cube d'hydrocarbures par an: l'équivalent de deux années de consommation française actuelle!

L'exploitation du champ est confiée à la Nederlandse Aardolie Maatschappij (NAM), une co-entreprise appartenant, à parts égales, à la Shell anglo-néerlandaise et à l'américaine ExxonMobil. Le tout sous la supervision du gouvernement néerlandais, trop content de récupérer, chaque année, une dizaine de milliards d'euros de taxes « gazières ».

Séismes destructeurs

L'histoire aurait pu en rester là. Le 8 août 2012, des séismes provoquent d'importants dégâts. Des dizaines de milliers de logements et de bâtiments publics sont touchés. Du jamais vu de mémoire de géologue hollandais! La terre tremble de nouveau le 8 février suivant. Rares sont, désormais, les semaines sans secousses. L'exploitation du gaz, qui a toujours été considérée comme sûre, est montrée du doigt. La confiance entre les représentants de la NAM et les 150.000 habitants de la région de Groningue est rompue.

Le gouvernement néerlandais ne prend pas les choses à la légère. Après avoir reconnu, sur le tard, l'origine gazière des tremblements de terre de 2012 et 2013, La Haye débloque 1,2 milliard d'euros (en fait payés par la NAM), sur 5 ans, pour dédommager les victimes. En novembre dernier, le gouvernement ordonne de réduire de 80% la production dans la petite (mais prolifique) région de Loppersum, située à proximité de l'épicentre de la zone sismique. La production totale du champ gazier est désormais limitée à 42 milliards de mètres cube par an.

Ce train de mesures n'a pas calmé les Néerlandais. Fin novembre 2014, 700 propriétaires et une douzaine de bailleurs ont assigné la NAM devant la justice et lui réclament le paiement de la valeur de 100.000 logements. La justice n'a pas tranché. Il semble néanmoins acquis que la NAM devra réduire de nouveau sa production. Ce qui ne fera pas le bonheur de ses clients (dont la France) qui souhaitent plus que jamais réduire leur dépendance à l'égard du gaz russe.