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On peut comprendre que de nombreux Occidentaux soient désorientés par les déclarations et la rhétorique de certains responsables occidentaux depuis le début des frappes russes en Syrie, le 30 septembre, et qu'ils finissent par se demander : « Mais de quel côté sommes-nous ? » Étant donné que les médias occidentaux ont passé ces deux dernières années à présenter l'ÉI comme l'incarnation du Mal absolu, l'intervention des Russes - sur l'invitation du gouvernement syrien - ne devrait-elle pas être vue comme une bonne chose ? Jusqu'ici, les résultats sont impressionnants. D'après le ministre russe de la Défense, voici les équipements de l'ÉI détruits au cours de la première semaine de bombardements :
  • 70 véhicules blindés
  • 30 autres véhicules
  • 19 installations de commandement
  • 2 centres de communication
  • 23 dépôts de munitions
  • 6 usines de fabrication d'engins explosifs improvisés, notamment des voitures piégées
  • plusieurs pièces d'artillerie
  • plusieurs camps d'entraînement
S'ils sont vraiment sincères lorsqu'ils disent que l'ÉI constitue la menace n°1 à la paix mondiale, les dirigeants du monde devraient être aux anges. Mais c'est loin d'être le cas. Au contraire, le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, hurle à l'agression russe et, encore une fois, demande le déploiement de davantage de troupes de l'OTAN tout le long de la frontière russo-européenne et en Turquie.

La « coalition » formée par les É-U (une soixantaine de pays) affirme bombarder l'ÉI en Syrie depuis plus d'un an. Vu le contraste avec les résultats des frappes russes en une semaine à peine, les frappes menées par les É-U et ses alliés s'avèrent pitoyables (c'est le moins qu'on puisse dire), avec un accroissement - et non une diminution - des territoires contrôlés par l'« État islamique » en Syrie. La seule conclusion que l'on puisse tirer, c'est que loin d'avoir entravé l'ÉI, ces frappes menées par les É-U l'ont au contraire aidé.

Avec le recul, on ne peut que s'interroger sur les rapports faisant état de largages « accidentels » d'armes tombées entre les mains de terroristes de l'ÉI. Si on met cela sur le compte de la « malchance », alors l'opération pilotée par les É-U s'avère un échec total, ce que d'ailleurs reconnaissent certains responsables militaires étasuniens qui ont témoigné devant le Sénat ces derniers mois.

Faire montre de « peu d'enthousiasme » vis-à-vis des frappes russes est une chose, mais c'en est une autre que de se montrer furieux au point d'attaquer d'emblée les efforts de la Russie pour éradiquer Daesh. On nous dit que 36 civils ont été tués le premier jour des frappes russes, d'après l'Observatoire syrien des Droits de l'homme, organisme douteux basé en Angleterre - en fait une équipe dirigée par un seul homme depuis son T4 dans le Kent.

La Russie est également accusée de ne s'en prendre qu'aux « rebelles modérés » entraînés par les É-U, rebelles dont la mission est prétendument de se débarrasser de Daesh, puis (on peut le supposer) des forces d'Assad. Mais quels « rebelles modérés » ? La première (et unique) couvée de « rebelles modérés » (une centaine) pondue il y a tout juste un mois - au prix d'un demi milliard de dollars US - a soit déserté, soit été kidnappée, et au final, il n'en reste plus que « 4 ou 5 ». Voilà les « rebelles modérés » que les É-U avaient promis de défendre via des frappes aériennes si Assad osait les toucher. Lâchés sur le territoire syrien depuis la Turquie il y a 3 semaines, ils ont immédiatement cédé leurs armes et leurs véhicules aux « terroristes d'al-Qaïda » et leur ont prêté allégeance.

Partant de là, il est clair que les « rebelles modérés entraînés par les É-U » que le gouvernement étasunien accuse les Russes de bombarder n'ont rien à voir avec les « 4 ou 5 rebelles récemment entraînés et passés du côté terroriste ». Les É-U répugnent à l'avouer ouvertement, parce que c'était un secret d'État jusqu'à mi-2013, mais les « modérés » auxquels ils font allusion sont en fait les quelque dizaines de milliers de mercenaires entraînés par la CIA au Qatar, en Jordanie, en Turquie et ailleurs, officiellement depuis 2012, mais peut-être même avant le début du Printemps arabe.

Si le gouvernement russe ne fait pas la distinction entre « rebelle modéré » et « terroriste islamiste », c'est parce ces groupes se comportent exactement de la même manière. Bien avant qu'ils ne soient rebaptisés Daesh/ÉI (ou qu'ils ne passent dans son camp - à vous de choisir), voilà ce que faisaient les « rebelles modérés syriens » entraînés par la CIA : Le ministre russe des Affaires étrangères a répondu comme il se devait aux « accusations » ridicules et pseudo-moralistes du gouvernement étasunien, en partageant ce dessin humoristique sur les médias sociaux :

Syrian moderate rebels
© Unknown
Daesh est en train de s'en prendre plein la poire, cela ne fait aucun doute : Elle est où, la couverture médiatique occidentale ? Les médias applaudissent-ils à cette véritable intervention humanitaire contre des créatures qui, selon le Premier ministre australien récemment désavoué, sont « pires que les Nazis »? Après tout, voilà des terroristes qui réduisent les femmes en esclavage, décapitent quiconque est soupçonné de s'opposer à eux, et abhorrent les trésors historiques et culturels tels que le site de Palmyre, classé Patrimoine mondial. Il y a à peine deux semaines, les médias occidentaux nous avertissaient : cette barbarie et cette brutalité pourraient atteindre l'Europe. Cachés parmi des millions de réfugiés fuyant vers le Nord, des « nuées » de djihadistes n'attendaient que de s'en prendre à nos libertés. Et là, le message (qui nous vient du gouvernement étasunien en particulier) est que « nous » devons protéger ces vecteurs de barbarie et de brutalité à tout prix. Dans quel camp sommes-nous ?

La directeur de campagne d'Amnesty International en Angleterre, Kristyan Benedict, s'inquiète des efforts de la Russie pour gérer la crise humanitaire, appelant à des manifestations contre l'intervention de Poutine en Syrie :


Bizarre, dans notre souvenir, Amnesty International n'a jamais appelé à des manifestations de ce genre lorsque la « coalition » étasunienne a bombardé illégalement la Syrie.

Et le Yémen dans tout ça ?

Il n'y a pas que le Pentagone qui s'évertue à formuler une réponse cohérente à l'arrivée de la Russie au Moyen-Orient. Des dizaines de fondamentalistes religieux saoudiens ont appelé au Djihad contre les Russes en Syrie.. Là encore, ils n'ont pas protesté contre l'l'intervention étasunienne en Syrie. Toute aussi ambivalente quant aux atrocités commises par Daesh et quant à la crise des réfugiés, l'Arabie Saoudite, qui incarne la même version corrompue de l'islam que Daesh, et qui a le même penchant pour la décapitation et l'utilisation des femmes comme esclaves sexuelles, a clairement exprimé sa position quant au renversement du régime nationaliste arabe et laïque d'Assad : Plus tôt cette année, l'Arabie Saoudite a illégalement envahi le Yémen avec le soutien des É-U et de ses amis. Tandis que les médias se focalisent sur les intentions diaboliques de la Russie en Syrie, c'est le silence radio sur ce qui se passe au Yémen, un silence facilité par le fait qu'en tant que présidente de la Commission des droits de l'Homme des Nations Unies, l'Arabie Saoudite a fait en sorte que tout débat à propos du Yémen soit interdit aux Nations Unies, malgré des preuves indiquant que les militaires saoudiens armés et entraînés par les É-U et la G-B ont délibérément ciblé des infrastructures civiles, tuant des milliers de personnes et générant une crise humanitaire tout aussi épouvantable.

Des scènes rappelant les atrocités commises par les Étasuniens en Afghanistan ne cessent d'émerger : Fausses interventions humanitaires contre véritables interventions humanitaires

Vous remarquerez aussi que, pour la première fois, il y a une couverture médiatique sur le terrain en Syrie. Nous devons croire sur parole le Pentagone quand il déclare que « 3 200 » frappes aériennes menées par les É-U en Syrie et en Iraq ont visé Daesh, mais les médias russes, eux, documentent le moindre mouvement des militaires russes, et ne se contentent pas des « médias sociaux » pour relayer les « informations ». La Russie a invité les É-U a partager ses renseignements sur les sites et les mouvements terroristes, mais ils ont refusé, ce qui pousse le vice-ministre russe des Affaires étrangères à se demander de quel côté sont les É-U :
Le refus de partager des renseignements sur les terroristes ne fait que confirmer une fois encore ce que nous savions depuis le début, à savoir que les objectifs étasuniens en Syrie n'ont pas pour but de créer les conditions d'un processus politique et d'une réconciliation nationale, a déclaré jeudi dernier le vice-ministre des Affaires étrangères Sergeï Ryabkov.

Je me risquerais même à dire qu'en agissant ainsi, les É-U et les pays qui ont rejoint leur coalition adoptent une position politiquement suspecte. La question est : pour quel camp vous battez-vous ?
En effet, pour citer ces paroles mémorables de George W Bush : « Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes. »


Quiconque soutient les É-U sur cette question s'aligne sur le principe destructeur incarné par les élites occidentales psychopathiques.

Et vous : êtes-vous « avec nous ou contre nous » ?

Cher Poutine : lettre de soutien au président russe pour son opposition aux É-U et à Daesh au Moyen-Orient