Selon «The Guardian», 61 personnes seraient mortes de faim et de soif en mer. Elles auraient pourtant été repérées, mais pas secourues

L'accusation est grave. Selon le journal britannique The Guardian, l'OTAN et des effectifs militaires européens non identifiés auraient laissé une soixantaine de migrants mourir de faim et de soif en Méditerranée. L'Alliance a démenti, hier, avoir refusé de porter assistance au navire en détresse à la fin de mars.

«Un seul porte-avions était sous commandement de l'OTAN à cette date, le navire italien Garibaldi, et il se trouvait à plus de 100 milles nautiques au large, a affirmé Carmen Romero, porte-parole de l'organisation. Par conséquent, toute déclaration affirmant qu'un porte-avions de l'OTAN a repéré puis ignoré le navire en détresse est fausse.»

Selon le Guardian, un navire transportant 72 personnes, dont une vingtaine de femmes et deux enfants en bas âge, a quitté Tripoli le 25 mars en direction de l'île italienne de Lampedusa. Après une avarie, le bateau s'est retrouvé à la dérive. Les migrants auraient alors averti, grâce au téléphone satellitaire du navire, un prêtre érythréen qui dirige une association à Rome. Et ce dernier a alerté les garde-côtes italiens.

Les survivants ont raconté que peu après, un hélicoptère militaire leur a fourni des bouteilles d'eau et des biscuits puis les a avertis qu'un navire allait venir les secourir. Ce qui ne fut pas le cas. L'embarcation se serait plus tard approchée d'un porte-avions, sans recevoir non plus de secours. Selon les personnes interviewées par le quotidien britannique, deux appareils ont pourtant décollé du navire et ont survolé leur bateau à basse altitude alors qu'ils se tenaient debout et brandissaient deux bébés affamés.

S'en sont suivis une dizaine de jours à la dérive. «Chaque matin, nous nous réveillions et trouvions plus de corps. Nous les gardions pendant 24 heures puis les jetions par-dessus bord», a raconté Abu Kurke, un des onze survivants qui ont finalement touché terre le 10 avril en Libye.

Suite à son enquête, le Guardian estime que le porte-avions pourrait être le navire français Charles de Gaulle, «qui opérait en Méditerranée à ces dates». Mais l'armée française dément catégoriquement. «Nous n'avons pas croisé ce type d'embarcation. Nous nous serions évidemment portés à son secours», a affirmé un porte-parole de l'état-major au site Rue 89.

La Méditerranée est actuellement le théâtre d'un intense flux migratoire. Des milliers de réfugiés sont arrivés ces dernières semaines à Lampedusa. Mais près de 800 personnes auraient péri au cours de la traversée, selon le HCR. Le 6 avril dernier, au moins 250 migrants somaliens et érythréens ont trouvé la mort dans le naufrage de leur embarcation. Dimanche, trois cadavres ont été retrouvés sous un bateau qui s'était échoué la nuit précédente près de Lampedusa, avec plus de 500 personnes à bord. Ce même jour, des réfugiés arrivés de Libye ont affirmé avoir assisté au naufrage d'une autre embarcation et avoir vu «énormément de cadavres».