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Un manifestant au chômage, devant le Capitole, à Washington D.C. Crédits photo : JASON REED/REUTERS
Près de la moitié des représentants du peuple américain sont millionnaires, et leurs profits augmentent tandis que le pays connaît une crise économique sans précédent depuis 2008.

Alors que les Américains s'appauvrissent constamment depuis 2004, la tendance est inverse au Capitole où les élus sont de plus en plus riches. C'est ce que révèle une enquête publiée par le New York Times, basée sur des données du Centre pour une politique réactive (Center for Responsive Politics), et qui montre que 250 des 535 membres du Congrès américains sont millionnaires. Si l'endroit a toujours été peuplé par des personnes plutôt aisées, l'écart avec le reste du peuple n'a en revanche jamais été aussi marqué.

Le revenu net médian des représentants et sénateurs culmine à 913.000 de $ (705.000 €) et ne cesse d'augmenter, quand celui des Américains dans son ensemble, continuellement en baisse, avoisine aujourd'hui les 100.000 $ (77.000 €). Plus surprenant, le revenu du Congrès a augmenté de 15% en sept ans, période durant laquelle celui des Américains les plus fortunés a pour sa part stagné. Pour tous les autres, le revenu médian a baissé de 8% pour cette même période. Si cet écart de richesse aurait pu passer inaperçu en temps normal, en pleine crise économique, il choque.

Des fortunes qui dépassent les 100 millions de $

Parmi ces représentants américains millionnaires, dix d'entre eux ont même une fortune évaluée à plus de 100 millions de $. Il y a Darrel Issa, un représentant républicain de Californie, qui possède près de 300 millions de dollars, d'après un article de CBSNews. Il est talonné de près par John Kerry, le candidat démocrate à la présidentielle de 2004 défait par George Bush. Son porte monnaie pèse près de 240 millions de $.

Car si certains gagnent plus que bien leurs vies, d'autres, à l'instar de Pete Stark, représentant démocrate élu en Californie, qui doit 11 millions de $, ont des dettes à combler. C'est une des raisons qui a poussé plusieurs démocrates membres du Congrès à s'opposer violemment à la proposition de Nancy Pelosi, leur chef de file chez les représentants: elle-même à la tête de 196 millions de $, elle voulait imposer un gel des revenus pour les membres du Congrès.

La politique réservée aux riches

Pour tenter d'expliquer comment les parlementaires font pour continuer de s'enrichir en ces temps de morosité économique, plusieurs pistes sont évoquées. Certains analystes, cités par le New York Times, estiment que c'est tout simplement parce que la politique s'adresse avant tout aux personnes aisées. Lors des élections de 2010, le coût d'une campagne victorieuse pour le Sénat s'élevait en moyenne à 10 millions de $ et à 1,4 million pour une place au sein de la Chambre des représentants. De facto, seules des personnes avec déjà des moyens conséquents sont à même de se lancer en politique.

Une fois entré au Congrès, le parlementaire touche un salaire annuel de base de 174.000 $ (qui a augmenté de 10% depuis 2004, soit un peu moins que l'inflation). À ce salaire s'ajoutent plusieurs avantages auquel le citoyen lambda n'a pas accès: des primes d'ancienneté, des pensions de retraite et une sécurité sociale en or.

Un réseau et de multiples avantages

Le Washington Post explique aussi qu'une fois en place, les sénateurs et les représentants jouissent d'un réseau et de nouveaux moyens qui leurs permettent d'augmenter leurs pécules. Les données récoltées par le Center for Responsive Politics montrent que les parlementaires feraient d'excellents résultats sur les marchés boursiers. D'après des chercheurs de l'université de Géorgie, qui ont étudié la question, ces performances seraient le fruit d'un «important avantage d'informations» dû à leurs positions.

Alors que Barack Obama vient de promulguer une loi prolongeant jusqu'à fin février les allégements fiscaux pour 160 millions de salariés et les allocations chômage, le fossé qui sépare les membres du Congrès et le reste de la population n'a jamais été aussi profond. Selon plusieurs récents sondages, environ 13% seulement des Américains sont satisfaits du travail mené par le Congrès. Ils sont 83% à le désapprouver.