Nul hôpital psychiatrique ni médicament ne parvenaient à guérir Mary de ses troubles obsessionnels compulsifs et de ses troubles du déficit de l'attention avec hyperactivité - qui se manifestaient par des pensées effrayantes et des comportements répétitifs. Jusqu'au jour où, raconte The Verge, un psychiatre de Boston aborda sa maladie sous un angle différent. Il lui demanda comment allait son intestin, si elle avait des problèmes de digestion, de constipation, de reflux acide... La réponse était oui. Le médecin lui prescrivit des probiotiques, ces « bactéries bénéfiques qui habitent notre intestin ».

Des enfants jouent dans une maquette géante d'intestin installée sur une place du centre-ville de Lyon, en 2010.
© Jean-Philippe Ksiazek/AFPDes enfants jouent dans une maquette géante d'intestin installée sur une place du centre-ville de Lyon, en 2010.
L'effet fut probant, tous les symptômes ayant disparu au bout d'un an. Rien d'étonnant pour le psychiatre, le docteur Greenblatt, pour qui « l'intestin est vraiment notre second cerveau ». « Il y a plus de neurones dans l'appareil digestif que partout ailleurs, excepté le cerveau », explique-t-il. Selon une émission de France Inter, il y a en effet 100 à 200 millions de neurones dans le système digestif, qui communique avec l'encéphale grâce au nerf vague.


Commentaire : Il est peut-être utile de préciser qu'en français, le mot « tripes » est un anagramme du mot « esprit ». Voir le livre du Dr Eric Ancelet, Pour en finir avec Pasteur, Editions Collections résurgences


D'après l'article de The Verge, ce type d'approche, inhabituelle en psychiatrie, est de plus en plus explorée par la science. Certes, on connaît depuis longtemps les liens entre certaines émotions et états mentaux - la peur, l'anxiété ou la dépression par exemple - et l'appétit ou la digestion. Mais les scientifiques n'y voyaient qu'une communication du cerveau vers le ventre. « Maintenant, une nouvelle compréhension des billions de microbes vivant dans notre intestin révèle que cette communication ressemble plus à une super autoroute à plusieurs voies qu'à une route en sens unique », explique The Verge. Des découvertes qui invitent à cesser de séparer totalement le cerveau du reste du corps, estime James Greenblatt.

Des études en laboratoire ont ainsi montré que des souris privées de bactéries avaient un comportement plus à risque, et montraient des signes d'une plus grande anxiété ; ou bien qu'en transplantant des bactéries d'un groupe de souris timides à un autre groupe de souris audacieuses, on modifiait significativement leur comportement. Il semblerait que, selon une autre étude sur des humains, même des probiotiques en compléments alimentaires puissent altérer le fonctionnement du cerveau - un résultat à prendre toutefois avec prudence.

Ces études touchent à un « vaste, complexe et mystérieux royaume du corps humain : environ 90 % de nos cellules sont en fait des bactéries, et les gènes des bactéries sont plus nombreux que les gènes humains, dans un rapport de 99 à 1 », affirme le site américain. Les bactéries commencent à pulluler en nous à partir de l'accouchement et de nos premiers contacts avec le monde. Des recherches montrent que c'est le développement de ce microbiome (milieu où vit la microflore de notre organisme) dans les premières années de la vie qui peut être déterminant pour la santé mentale de l'adulte.

Ce lien étant reconnu, la question de l'action sur ces bactéries pour soigner des troubles mentaux reste ouverte. « Les scientifiques ne sont pas encore exactement certains de quelles espèces de microbes font partie d'un microbiome sain, ni si certaines souches de bactéries sont absolument vitales pour les fonctions mentales, ou si la clé est un juste équilibre [de ces micro-organismes] », conclut The Verge.