Image
© Peter Blanchard - flickr
L'industrie des pesticides, qui combat un règlement européen lui étant défavorable, fait comprendre à la Commission européenne que le partenariat transatlantique pourrait lui coûter très cher.

Le cinquième round vient de s'achever et personne n'est encore KO. Pourtant, les coups pleuvent dans les négociations sur le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (appelé TTIP selon son acronyme anglais ou Tafta, pour Transatlantic freetrade agreement). Si ce partenariat est signé - ce qui pourrait advenir à la fin de l'année prochaine - , les entreprises américaines pourraient, au nom d'un « traitement juste et équitable », s'opposer aux Etats de l'Union européenne (UE) dont certaines réglementations - notamment environnementales et sociales - lèseraient leurs intérêts. Le litige serait alors tranché par des tribunaux internationaux et privés.

Tafta, un cheval de Troie contre le principe de précaution ?

Certains industriels voient donc dans ces discussions l'occasion de grignoter des parts de marché. C'est semble-t-il le cas de l'association de promotion des pesticides dans l'agriculture Croplife International, installée à Bruxelles. Pour faire pression sur la Commission européenne - qui a plein mandat pour négocier ce traité côté UE - , un de ses représentants, Douglas Nelson, a brandi lors du cinquième round un rapport récent, rapportait mardi 27 mai le site d'information spécialisé Bna.com. Ce rapport sorti en février évalue à 65 milliards d'euros les pertes subies par les géants des produits phytosanitaires en raison d'un règlement européen 1107/2009 qui prévoit d'exclure du marché les pesticides « ayant des effets perturbateurs endocriniens pouvant être néfastes pour l'homme ». Une exclusion a priori, avant que le risque soit avéré, donc.

Bien que les critères scientifiques permettant de définir ces perturbateurs endocriniens (PE) n'aient toujours pas été détaillés par la Commission européenne, les lobbies des pesticides font valoir auprès de la Commission que, puisqu'un tel principe de précaution n'existe pas aux Etats-Unis, « si Tafta était adopté, ils pourraient demander des comptes sur leur manque à gagner lié au refus d'accès au marché », s'alarme François Veillerette, président de Générations futures, association qui alerte contre les dangers des pesticides et des perturbateurs endocriniens. « En cela, Tafta peut être très dangereux. Les industriels ont pour stratégie de se servir de Tafta comme fenêtre de tir pour attaquer le principe de précaution et faire pression auprès de la Commission européenne, dont ils ont déjà l'oreille... »

En effet, un document (en allemand) fuité par le parti des Verts allemand et publié sur le site Ttip-leak.eu, sorte de Wikileaks dédié au Tafta, révélait, en mars dernier, que 93% des réunions regroupant les parties prenantes au futur Tafta avaient lieu avec le secteur industriel et les groupes de pression...