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© AFPLe chantier du barrage de Sivens est suspendu jusqu’à nouvel ordre
Contrairement à ce qui avait été prévu, aucun débat ni vote n'ont eu lieu au conseil général, la suspension ayant visiblement été entérinée lors de deux réunions préparatoires jeudi soir et vendredi matin.

Comme attendu, le conseil général du Tarn a suspendu vendredi le chantier du barrage de Sivens, sans fixer de date butoir, cinq jours après la mort d'un manifestant lors d'affrontements avec les forces de l'ordre. « Le drame intervenu dans la nuit de samedi à dimanche conduit l'assemblée départementale à prendre acte de l'impossibilité de poursuivre toute activité liée au déroulement du chantier sur le site de Sivens », a déclaré le président socialiste du conseil général du Tarn, Thierry Carcenac, lors d'un discours au conseil général du Tarn à Albi.

Contrairement à ce qui avait été prévu, aucun débat ni vote n'ont eu lieu au conseil général, la suspension ayant visiblement été entérinée lors de deux réunions préparatoires jeudi soir et vendredi matin. M. Carcenac a appelé à « mettre en oeuvre les préconisations des experts mandatés par le ministère de l'Écologie  ». Ces ingénieurs recommandent de poursuivre le projet mais de réduire le volume d'eau destiné à l'irrigation afin d'en minimiser l'impact environnemental.

Appel à l'apaisement

Faisant référence à ces recommandations, M. Carcenac a « demandé à l'État de les étudier et d'en assumer toutes les conséquences », appelant « solennellement à l'apaisement, à la modération et au respect des Tarnaises et Tarnais qui vivent sur le site et à proximité ». « On a décidé de suspendre les travaux (...) Sans définir de délai. Mais ce n'est pas un abandon », a expliqué Didier Houlès, vice-président divers-gauche du conseil général.

Le département du Tarn est maître d'ouvrage de ce barrage-réservoir. Jusqu'à présent, un seul des 46 conseillers généraux s'est opposé au projet. Mais la mort de Rémi Fraisse a tout bouleversé. L'enquête privilégie désormais la thèse d'un décès dû à l'explosion d'une grenade offensive lancée par un gendarme. Et dans différentes villes, des manifestants crient: « Carcenac, y'a du sang sur ton barrage ». La France s'interroge sur la légitimité même du projet, contesté localement depuis 2011, et qui avait été qualifié de « non sens » et de « stupidité » avant même le drame, par les élus écologistes José Bové et Noël Mamère.

Des mois de contestation

« L'ensemble des conseillers généraux est prêt à optimiser ce projet pour réduire au maximum son impact environnemental », a assuré le député socialiste Jacques Valax, conseiller général du Tarn depuis 19 ans. Pour lui, le projet doit bien être mis en œuvre, en dépit de la contestation: « il en va de la pérennité de nos institutions », dit-il.

Jacques Pagès (divers gauche) - seul conseiller général du Tarn ayant voté « contre » le projet de barrage - se dit « très pessimiste » . Car dans leur rapport publié lundi, « les experts mandatés par le ministère de l'Écologie expliquent pourquoi il n'aurait pas fallu faire ce barrage », dit M. Pagès. « Mais les mêmes experts concluent que maintenant, il va falloir le faire quand même, parce qu'il est déjà trop avancé... C'est affligeant! »

Le Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, qui regroupe de nombreux opposants au barrage, demande directement au chef du gouvernement Manuel Valls de prononcer « l'abandon immédiat du projet ». Et il réclame « un dialogue », pour que ses « propositions alternatives » soient prises en compte. Le syndicat des Jeunes agriculteurs du Tarn exige, lui, des « actions fortes » des autorités. Il veut absolument voir « réaliser » ce projet qu'il juge « nécessaire et urgent » pour « assurer la vie économique d'un territoire rural pauvre ».

Document : Le rapport d'expertise, ici.