Laura Knight-Jadczyk et Henry See, les éditeurs du livre Ponérologie Politique, ont répondu aux questions de Silvia Cattori à la place de l'auteur Andrew Lobaczewski qui, étant très âgé et malade, n'est plus à même de répondre.

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Andrew Lobaczewski
Silvia Cattori : Voici ce qu'un psychiatre m'a dit à propos de votre livre : « Je n'ai jamais lu nulle part ailleurs ce dont parle Andrew Lobaczewski, aucun livre n'a jamais traité ce sujet de cette manière. Il m'a immédiatement été utile dans le cadre de mon travail.

Ce qu'A. Lobaczewski affirme sur les comportements pervers/pathologiques - les conflits en entreprise tout comme dans la sphère politique où l'on dénombre de plus en plus de conflits et de plus en plus de pervers caractériels - m'a immédiatement permis de mieux comprendre, par exemple, le fonctionnement de ces individus qui créent des conflits au sein de leur travail et qui, où qu'ils aillent, polluent l'atmosphère ».

Je pense que tout le monde devrait lire Ponérologie Politique - la description du mal appliqué à des fins politiques - car ce livre nous donne les clés nécessaires à la compréhension de phénomènes qui souvent nous dépassent. Il décrit le mal de façon très parlante, sa véritable nature, la manière dont il se répand et détruit nos sociétés.

A. Lobaczewski a observé ceux qui incarnent le mal, il a examiné ce que la psychanalyse actuelle appelle « troubles de la personnalité antisociale (pervers caractériels) ». Non pas pervers au sens sexuel, mais au sens moral et relationnel. Pourquoi avoir choisi un titre aussi hermétique - « Ponérologie politique » - pour un livre qui devrait non seulement intéresser les psychologues et les psychiatres, mais aussi tout un chacun ?

Laura : Tout d'abord, je tiens à dire qu'il existe un lien émotionnel très fort entre le Dr Lobaczewski et nous, et nous l'avons contacté au sujet de cette interview. Il est très âgé et en très mauvaise santé depuis plus d'un an, Il regrette de ne pouvoir vous répondre personnellement ; il a tenté de le faire, mais à l'heure actuelle, il n'a même pas la force de rédiger plus que de brèves réponses à des questions écrites. Et même dans ce cas, il s'épuise et son attention se disperse au bout de quelques minutes de concentration. Nous voulons vraiment protéger sa santé et son bien-être, mais nous voulons aussi satisfaire aux demandes de réponses concernant ces questions importantes. Andrzej m'a confirmé par téléphone qu'il avait toute confiance en notre compréhension du sujet. Il a répété ce qu'il nous a dit quand il nous a contactés pour la première fois : à savoir qu'il cherchait quelqu'un qui allait dans la même direction et qui pensait de la même manière, quelqu'un à qui il pourrait remettre son travail - en quelque sorte repasser le flambeau - de même que tout le travail qui lui avait été transmis par d'autres. Il a passé des années à chercher quelqu'un, et c'est notre travail qui a répondu à ces critères.

Ceci étant dit, je vais répondre à votre question : Pourquoi Lobaczewski a-t-il choisi ce titre ?
Le premier point est qu'à l'origine, cet ouvrage était une série de documents techniques et universitaires provenant de sources diverses. Comme l'auteur l'explique dans son introduction, la majeure partie de cet ouvrage ne vient pas de lui, il en est juste le compilateur. Les universitaires ont tendance à choisir pour leurs articles des titres rédigés dans une terminologie abstraite, et les scientifiques considèrent qu'il est de leur prérogative de créer de nouveaux termes pour décrire leurs découvertes (par exemple, l'invention de mots comme quarks, muons, leptons, etc. par les physiciens), donc en ce sens, le titre se justifie entièrement.. Le terme « ponérologie » est un obscur concept théologique qui signifie « étude du mal ». Andrzej le savait, et il a décidé de récupérer et de réhabiliter ce mot pour en faire un usage scientifique, puisqu'il se trouve que notre science ne possède absolument aucun mot pour définir l'étude du « mal » en tant que tel. Nous en avons pourtant besoin.

Henry : Quand Lobaczewski nous envoya le manuscrit de ce livre, nous fûmes stupéfaits. Nous étions préoccupés par cette question : pourquoi, quel que soit le niveau de bonne volonté qui se manifeste dans le monde, y a-t-il autant de guerres, de souffrances et d'injustices ? Peu importe les plans, idéologies, religions ou philosophies conçus par les grands esprits, rien ne semble améliorer notre sort. Et c'est comme cela depuis des milliers d'années, cela ne cesse de se perpétuer encore et encore.

Nous faisions aussi des recherches sur le problème de la psychopathie depuis plusieurs années et avions publié de nombreux articles sur le sujet sur nos sites Web. Pour les besoins de la recherche, nous avions également retranscrit une version informatique du très riche ouvrage sur la psychopathie rédigé par le Dr Hervey Cleckley, The Mask of Sanity, avec la permission des propriétaires du copyright, cet ouvrage étant épuisé. Étant donné la richesse et l'importance de ce texte, nous l'avions rendu disponible gratuitement par le biais du téléchargement. Nous avions donc une bonne base sur la question et avions dans l'idée que la situation terrible à laquelle cette planète et ses habitants étaient confrontés était liée à la question de la psychopathie.

Laura : Permettez-moi d'ajouter que la raison pour laquelle nous faisions des recherches sur la psychopathie était, comme nous l'avons mentionné plus haut, que nous avions été nous-mêmes confrontés au phénomène. Nous étions engagés dans un travail de groupe avec d'autres personnes, et les phénomènes abordés dans Ponérologie en rapport avec les groupes et la façon dont ceux-ci sont corrompus par des déviants pathologiques s'infiltrant dans un groupe sous l'aspect de la normalité nous étaient très familiers sur une petite échelle sociale. Nous avions observé ces phénomènes et avions eu affaire à eux à de nombreuses reprises, bien qu'au début, nous ne fissions que naviguer au jugé. Nous savions qu'il se passait quelque chose d'étrange, seulement nous ne savions pas encore le nommer ou le catégoriser. Nous avions trouvé certaines dénominations et catégorisations dans des textes sur la psychopathologie, mais ils n'abordaient pas la dimension sociale.

Henry : Mais Ponérologie Politique présente le sujet d'une manière radicalement différente des autres textes sur la psychopathie, en suggérant que l'influence des psychopathes et autres déviants n'est pas qu'une simple influence parmi tant d'autres affectant la société, mais que, si les circonstances sont favorables, elle détermine la manière dont nous vivons, ce que nous pensons, et la façon dont nous jugeons ce qui se passe autour de nous. Quand on comprend la véritable nature de cette influence : qu'elle est sans conscience, sans émotion, égoïste, froide et calculatrice, dénuée de tous standards moraux ou éthiques, on est horrifié, mais en même temps, tout commence à s'éclairer soudainement.

Notre société perd de plus en plus son âme parce que les personnes qui la dirigent et qui donnent l'exemple sont sans âme - ils n'ont littéralement aucune conscience.

Quand vous en venez à comprendre que les rênes du pouvoir politique et économique sont entre les mains de personnes sans conscience qui ne possèdent pas de faculté d'empathie, cela permet de regarder ce que nous appelons le « mal » d'une façon totalement nouvelle. Le mal n'est plus seulement une question morale ; il peut alors être analysé et compris scientifiquement.

Avec Lobaczewski, le mot « Ponérologie » a été purgé de ses connotations religieuses - un contexte au sein duquel il n'a jamais fait de bien à la société dans son ensemble. Ce mot désigne la science du mal, de la compréhension scientifique de ses origines, et de la façon dont, telle une maladie, il peut infecter les individus et les sociétés.

Lorsque les législateurs et les grands patrons du monde des affaires sont des psychopathes, leur façon de penser et de raisonner - leur « moralité » - devient la culture et la « moralité » communes des populations qu'ils gouvernent. Quand cela se produit, le mental de la population est infecté de la même façon qu'un agent pathogène infecte un corps physique. La seule manière de nous protéger contre cette pensée pathologique est de nous vacciner contre elle, et cela se fait en en apprenant le plus possible sur la nature de la psychopathie et sur son influence sur nous. Fondamentalement, cette « maladie » particulière prospère dans un environnement où son existence même est niée, et où ce déni est planifié et délibéré.

Bien que le titre du livre semble hermétique, il faut le comprendre dans le contexte de la grande difficulté qu' a eue Andrzej à faire publier son ouvrage. Les deux premiers manuscrits furent perdus, comme il le décrit dans la préface. Le premier fut brûlé quelques minutes avant l'arrivée de la police lors d'une perquisition à son domicile, et le deuxième fut envoyé au Vatican via un intermédiaire dont on n'entendit plus jamais parler. La troisième version, celle publiée par « Red Pill Press », fut écrite lorsqu'Andrzej vivait aux États-Unis durant les années Reagan. Zbigniew Brzeszinki avait proposé de l'aider à trouver un éditeur, mais après plusieurs mois, il devint clair qu'au mieux, il ne faisait rien, et qu'au pire, il s'employait activement à faire en sorte que l'oeuvre ne soit jamais publiée.

Le manuscrit est resté dans un tiroir pendant plus de vingt ans. Il a été écrit pour un public professionnel, et le titre a été choisi en fonction de cela. C'est aussi la raison pour laquelle le texte lui-même est très dense, et le titre reflète exactement le fait qu'il n'a pas été écrit pour un public profane. Il a été écrit pour des professionnels et dans un style intellectuel reflétant son contexte originel.

Nous sommes actuellement en train de travailler à une version plus abordable de ses idées.

Silvia Cattori : Lobaczewski a étudié le fonctionnement de ces personnes non pas d'un point de vue politique, mais psychologique. Il est arrivé à déterminer la manière dont des fous, des idéologues et des agents disposant de pouvoirs répressifs, malgré leur inhumanité, en arrivent à obtenir l'adhésion de larges populations. Tout le monde n'aurait-t-il pas un fond pervers / pathologique, des périodes de vie marquées par une existence perverse / pathologique ?

Henry : Tout d'abord, il faut souligner que les « fous » n'ont pas besoin de l'adhésion de larges populations, mais seulement d'une minorité puissante qui puisse à la fois « orienter » la population et la contrôler. Regardez les sondages aux États-Unis. Cela fait des années que la popularité de Bush se maintient autour de 30% - et il s'agit de la population dans son ensemble. Mais parce que Bush est soutenu par une minorité très puissante - les gens qui détiennent les médias, l'industrie de l'armement et ses soutiens au sein de l'armée, les compagnies pétrolières, etc. - le mécontentement populaire ne compte pas. Et du moment que la politique de BUSH n'affecte pas négativement l'Américain moyen de façon trop flagrante, celui-ci ne se sent pas suffisamment menacé pour vouloir y changer quelque chose.

Laura : Aux États-Unis - et ailleurs dans le monde - même le peuple le plus oppressé et le plus injustement traité est facilement contrôlé par la peur et la crainte de perdre le confort matériel auquel il a accès : divertissements, sports, jeux, etc. Même l'échec du système éducatif, médical et des garanties sociales, ne pousse pas les gens à réellement remettre la situation en question. Nous avons affaire - pour reprendre les termes d'Aldous Huxley - à une dictature scientifique : du pain et des jeux.

En bref, la plupart des Américains sont conscients de leur oppression, et l'expriment dans les sondages, mais ceux qui sont au pouvoir ont réussi à les droguer avec une pléthore de distractions - la peur et le plaisir - suffisantes pour les garder sous contrôle.

Henry : Il y a la carotte et le bâton. Tant que les gens peuvent continuer à vivre dans l'illusion, ils le font. Quand l'illusion commence à se fissurer, alors le pouvoir actionne le bâton.

Laura : Les gens ont peur de faire des vagues par crainte de perdre ce qu'ils ont, de perdre leur tranquillité, de devoir faire des efforts pour résister. Après tout, cela leur prend tout leur temps de maintenir l'illusion, ils doivent trimer quotidiennement pour éviter qu'on leur reprenne leur 4×4, et ils veulent avoir du temps pour le match de football du samedi.

Henry : Ils s'imaginent aussi que de toute façon, BUSH n'a plus que quelques années devant lui. Le système s'auto-régulera. Le livre de Lobaczewski nous montre pourquoi cette façon de penser est extrêmement naïve. Le système qui est en place est un système pathologique qui est en désaccord profond avec la manière d'être ou la nature de la plupart des gens. Les gens de conscience sont dirigés par des gens sans conscience. Ce fait constitue l'injustice primordiale, et il est la base des autres maux de la société.

Laura : Ce système est resté secret pendant de nombreuses années parce qu'il y avait encore des gens de conscience qui se trouvaient à des postes élevés, mais avec le temps, ils ont tous été remplacés ou mis à l'écart d'une manière ou d'une autre, et maintenant la pathologie du système est à découvert, mais personne ne s'en soucie. Si vous regardez l'Histoire de ces cinquante dernières années, vous découvrirez que pratiquement tous les personnages publics qui sont mort tragiquement avaient une conscience, se souciaient du peuple, et avaient suffisamment d'influence pour causer des problèmes aux individus de type pathologique.

Henry : La seconde partie de votre question est très importante, parce que c'est cette idée que nous sommes tous plus ou moins pervers ou pathologiques, que nous avons tous une part d'ombre - selon les termes de JUNG - qui sert de support majeur au système pathocratique et permet aux psychopathes de se cacher parmi la population générale. On nous a convaincus que nous n'étions tous que des animaux et que tout le monde était capable de devenir un Hitler, un Bush ou un Mengele, si les circonstances s'y prêtaient. Nous y croyons parce que dans notre vie, nous avons tous fait des choses dont nous avons honte, pour lesquelles nous avons des remords. Nous connaissons ces pensées qui nous viennent dans des moments d'intense émotion, des pensées dont nous ne voudrions pas que les autres les connaissent ou les entendent. Nous sentons que nous avons cette part d'ombre en nous, une part de nous-mêmes dont nous ne sommes pas fiers. Parce que nous ressentons ce sentiment de honte et de remords concernant cet aspect de nous-même, nous projetons sur les autres cette capacité. Faire une telle projection revient à commettre l'erreur fatale.

Cela soulève deux questions.

Primo, il existe une différence énorme entre quelqu'un qui, par exemple, dans le feu d'une dispute avec son partenaire, perd son self-control et abuse physiquement ou psychologiquement de cette personne, et quelqu'un qui accomplit la même chose froidement, avec calcul et préméditation. Il s'agit dans les deux cas de mauvaises actions. Je n'essaie pas de minimiser les abus commis dans un moment d'émotion. Mais cette même personne, celle qui perd le contrôle momentanément, serait incapable de calculer et de planifier froidement cet acte. En son for intérieur, quelque chose reculerait face à cette idée. Chez le psychopathe, cette voix de la conscience n'existe pas. Les psychopathes sont capables de comploter le génocide d'un peuple, comme celui des Palestiniens ; les personnes de conscience n'en sont pas capables. Une personne peut être tuée dans le feu d'une dispute. Plusieurs milliers peuvent mourir en raison d'un froid calcul.

Laura : Une manière de comprendre cela est de considérer les études qui montrent que chez les psychopathes, non seulement les taux de crimes violents sont plus élevés, mais aussi que les types de crimes violents qu'ils commettent différent de ceux qui sont commis par les non-psychopathes. Une étude a montré que deux tiers des victimes de psychopathes étaient des hommes étrangers [à la famille - NdT] tandis que deux tiers des victimes de non-psychopathes étaient des membres de la famille féminins ou des connaissances féminines - des crimes passionnels. Les gens normaux peuvent commettre des actes de violence quand ils sont en état d'extrême bouleversement émotionnel, mais les psychopathes choisissent avec sang-froid leurs victimes dans un but de vengeance ou de punition, ou pour atteindre quelqu'objectif. C'est à dire que la violence psychopathique est instrumentale, un moyen d'arriver à ses fins - elle est prédatrice.

Henry : Secundo, dans une société dominée par « les valeurs pathologiques », si on peut utiliser cette expression, l'existence d'un petit groupe de gens sans conscience promouvant une culture de la cupidité et de l'égoïsme crée un environnement au sein duquel ce qui est pathologique devient la norme. Dans une société (comme les États-Unis aujourd'hui) où le président peut mentir en toute impunité sur des questions de vie ou de mort, un environnement pathologique est créé, au sein duquel le mensonge devient acceptable. La violence est acceptable. La cupidité est acceptable. Cela fait partie intégrante de l'idéologie du Rêve américain : tout le monde peut réussir, peu importe ceux à qui vous devrez faire du mal pour y arriver. Et c'est par les actes qu'ils doivent commettre pour réellement réussir que les germes de la pathologie sont semés. Dans cet environnement, les gens de conscience qui sont faibles et influençables endossent les caractéristiques du type pathologique afin de survivre et de réussir. Ils voient que leurs dirigeants mentent et trichent, et ils en déduisent que s'ils veulent avancer, alors ils peuvent eux-aussi mentir et tricher.

Laura : J'appelle cela la « Culture officielle ». Linda Mealeyn du Département de psychologie du College of St. Benedict à St Joseph dans le Minnesota, suggère qu'une société fondée sur la compétition - le capitalisme, par exemple - est une société où la psychopathie est adaptative et à des chances de s'accroître.

La psychopathie est une stratégie de vie adaptative qui réussit extrêmement bien dans la société américaine, et qui a donc augmenté au sein de la population. En outre, conséquence d'une société adaptative à la psychopathie, de nombreux individus qui NE sont PAS des psychopathes génétiques se sont adaptés de façon similaire, devenant des psychopathes « dans les faits », ou « sociopathes secondaires ». Autrement dit, dans un monde de psychopathes, ceux qui ne sont pas des psychopathes génétiques sont induits à se comporter comme des psychopathes, simplement pour survivre. Quand les règles sont établies de manière à rendre une société « adaptative » à la psychopathie, elle fait de chacun un psychopathe potentiel.susk

Henry : Si cette influence pathologique était retirée de la société, en mettant les psychopathes en quarantaine, en éduquant les gens de conscience aux symptômes de la pathologie, à ce qu'il faut considérer et à la façon dont gérer la manipulation, en changeant les systèmes créés par les psychopathes - si, au moyen de telles méthodes, nous étions capables de supprimer cette influence ponérogénique, alors l'autre pôle, celui de la conscience, serait le plus influent des deux, et les gens tendraient vers l'altruisme et la vérité plutôt que vers l'égoïsme et les mensonges.

Si nous étions capables de supprimer l'influence pathologique, nous découvririons peut-être que nos conceptions de la « nature humaine » sont erronées et mal évaluées, parce que nous acceptons en tant qu'« humains » ceux qui sont génétiquement sans conscience ; Supprimez-les, eux et leurs actions, de l'ensemble des données, supprimez leur influence de la société dans son ensemble, et les qualités supérieures de la nature humaine douée de conscience pourraient trouver des moyens d'expression que nous n'aurions jamais imaginés possibles.

Silvia Cattori : Comment peut-on discerner les psychopathes des gens sains ? Pouvez-vous nous faire le portrait du vrai psychopathe ? Pouvez-vous nous donner des exemples permettant de faire le lien avec quelque chose de plus général ? Quelles sont les facultés qui leur font défaut ?

Laura : Le portrait le plus simple, le plus clair et le plus vrai du psychopathe est donné dans les titres de trois riches ouvrages sur le sujet : Without Conscience [Sans conscience - NdT] de Robert Hare, The Mask of Sanity [Le masque de santé mentale - NdT] de Hervey Cleckley, et Snakes in Suits [Des serpents en costume-cravate - NdT] de Hare et Paul Babiak. Un psychopathe, c'est exactement cela : une personnne sans conscience. La chose la plus importante à retenir est qu'il se dissimule sous un masque de normalité qui est souvent si convaincant que même les experts sont trompés et, en conséquence, ces psychopathes deviennent « les Serpents en costume cravate » qui contrôlent notre monde. C'est la réponse en bref.

Henry : La culture populaire voit les psychopathes comme des personnages tels Hannibal Lecter, héros du « Silence des agneaux », c'est à dire des tueurs en série. Cependant, bien qu'un certain nombre de psychopathes soient des criminels et aient eu affaire à la justice et que certains soient en fait des tueurs en série, un grand nombre d'entre eux n'ont jamais d'ennui avec la justice. Ce sont les plus intelligents, et aussi les plus dangereux parce qu'ils ont trouvé des moyens d'utiliser le système à leur avantage.

Un grand nombre de traits caractérisent les psychopathes : l'un des plus évidents est l'absence totale de conscience. Tout sens de remords ou d'empathie envers les autres est absent chez eux. Ils peuvent être extrêmement charmants et sont experts pour charmer et hypnotiser leur proie par la parole. Ils sont également irresponsables. Rien n'est jamais leur faute ; quelqu'un d'autre ou le monde en général est toujours à blâmer pour tous leurs « problèmes » ou leurs erreurs.

Martha Stout, dans son livre The Sociopath next door [Le sociopatthe d'à côté - NdT], identifie ce qu'elle appelle le stratagème de la pitié. Les psychopathes utilisent la pitié pour manipuler les autres. Ils vous convainquent de leur donner encore une chance, et de ne parler à personne de ce qu'ils ont fait. Ainsi, un autre trait - l'un des plus importants - est leur capacité à contrôler le flux d'information.

Ils sont également incapables d'éprouver des émotions profondes. En fait, quand Robert Hare - un psychologue canadien qui passa sa carrière à étudier la psychopathie - fit passer des scanners cérébraux à des psychopathes tout en leur présentant deux séries de mots : une série de mots neutres sans association émotionnelle, et une série composée de mots chargés émotionnellement, alors que différentes zones du cerveau s'activèrent dans le groupe test des non-psychopathes, dans celui des psychopathes, les deux séries furent traitées par la même zone du cerveau, celle qui traite le langage. Ils n'eurent pas de réaction émotionnelle instantanée.

Toute notre vie émotionnelle est un mystère pour eux, et en même temps, elle leur fournit un outil formidable pour nous manipuler. Pensez à ces moments où nous sommes profondément affectés par nos émotions, et à quel point notre capacité à réfléchir s'en trouve affaiblie. Maintenant, imaginez que vous êtes capable de feindre une telle émotion, tout en restant calme et calculateur, tandis que la personne avec laquelle vous échangez est véritablement prise dans un tourbillon émotionnel. Vous pourriez avoir recours aux larmes ou aux cris pour obtenir ce que vous voulez, tandis que votre victime serait poussée au désespoir par les émotions qu'elle vivrait.

Il semble aussi qu'ils n'aient pas de réelle conception du passé ou du futur, vivant entièrement pour leurs besoins et désirs immédiats. En raison de la stérilité de leur vie intérieure, ils recherchent souvent de nouveaux frissons, depuis le sentiment de puissance ressenti en manipulant les autres jusqu'à l'engagement dans des activités illégales pour la simple poussée d'adrénaline qu'elles procurent.

Un autre trait du psychopathe est ce que Lobaczewski définit comme leur « connaissance psychologique spéciale » des gens normaux. Ils nous ont étudiés. Ils nous connaissent mieux que nous-ne nous connaissons nous-mêmes. Ils sont experts dans l'art de toucher nos points sensibles, d'utiliser nos émotions contre nous. Mais en plus, ils semblent même avoir une sorte de pouvoir hypnotique sur nous. Quand nous commençons à être pris dans la toile d'un psychopathe, nos facultés de réflexion se détériorent, se troublent. On dirait qu'ils nous jettent un sort.

Ce n'est que plus tard, une fois que nous ne sommes plus en leur présence, fascinés par eux, que la clarté de pensée réapparaît, et nous restons là à nous demander comment nous avons pu être incapables de réagir ou de nous opposer à leurs actes.

De nombreux livres écrits en anglais sur la psychopathie mentionnent les psychopathes en tant que groupe qui partage un ensemble de traits communs. L'échelle la plus largement utilisée pour mesurer la psychopathie a été développée par le Dr Hare. Il s'agit du PCL-R. Il énumère vingt traits que l'on peut trouver dans cette personnalité. Si le trait se manifeste quelquefois, on lui donne 1 ; si le trait domine la personnalité, on lui donne 2. Le total maximum est de 40. Les gens qui ont plus de 30 sur l'échelle PCL-R sont considérés comme des psychopathes.

Mais Lobaczewski est allé plus loin en donnant une taxonomie des différents types de psychopathes et autres types pathologiques, et en montrant la façon dont leurs déviances oeuvrent de concert pour former un système pathologique. Il a révélé certains travaux réalisés par des psychologues en Europe, travaux qui avaient été perdus au cours de la période communiste.

Laura : Le diagnostic est une question litigieuse ; il existe une controverse qu'il nous faut expliquer si l'on veut comprendre les possibilités de détection. D'un côté de la controverse, on trouve la description traditionnelle de la psychopathie dérivée de l'ancienne tradition européenne mentionnée par Lobaczewski, combinée à la tradition nord-américaine d'Hervey Cleckley, Robert Hare et d'autres. Elle s'accorde généralement avec l'expérience des psychiatres, psychologues, personnel de justice criminelle, psychopathologistes expérimentaux, et même des membres du public profane qui ont personnellement eu affaire à la psychopathie.

De l'autre côté de la controverse, on trouve un mouvement « néo-kraepelinien » (d'après Emil Kraepelin) dans le psychodiagnostic, mouvement étroitement associé aux recherches menées par l'université de Washington, à St Louis, dans le Missouri. Ce dernier point de vue est très étroitement aligné sur le critère de diagnostic du manuel psychiatrique américain connu sous les noms de DSM-III, DSM-III-R, et DSM-IV. L'approche fondamentale de cette école est que l'évaluation d'un psychopathe repose presque entièrement sur des comportements connus ou observables en public, ce qui va directement à l'encontre de ce que l'on sait concrètement au sujet des psychopathes : leur capacité à dissimuler leur véritable nature. L'argument avancé est qu'un clinicien est incapable d'évaluer avec fiabilité des caractéristiques interpersonnelles ou affectives. Une autre supposition est que la délinquance précoce est un symptôme capital d'ASPD. Cela tend à mettre lourdement l'accent sur le comportement délinquant ou antisocial, c'est-à-dire des comportements publiquement observables qui n'ont peut-être aucun rapport avec la structure interne de l'individu.

Quoiqu'il en soit, le DSM-III a établi que les psychopathes appartenaient à la classification « Troubles de la personnalité antisociale ».

Les critères du DSM-III pour l'ASPD ont été établis par un comité appartenant au groupe de travail sur le DSM-III de l'Association américaine de psychiatrie, et ont été légèrement modifiés par un autre comité pour le DSM-III-R. Les critères du DSM-IV ont aussi été établis par un comité, en faisant peu de cas de la recherche empirique. Ces critères se focalisent moins sur le comportement, et donc, ils ressemblent quelque peu aux critères établis pour d'autres troubles DSM-IV de la personnalité.

En raison des problèmes posés par le diagnostic DSM-III et DSM-III-R d'ASPD, l'Association américaine de psychiatrie a effectué un essai multi-sites pour collecter des données en préparation du DSM-IV. Les essais sur le terrain étaient destinés à déterminer si les traits de personnalité pouvaient être inclus dans les critères pour l'ASPD - qui ne reposent que sur les comportements publiquement observables - sans en réduire la fiabilité. L'intention des cliniciens qui firent pression en faveur de cette étude était de ré-aligner l'ASPD sur la tradition clinique et de mettre fin à la confusion entre ASPD et psychopathie.

Les résultats des observations sur le terrain démontrèrent que la plupart des traits de personnalité reflètant les symptômes de la psychopathie étaient aussi fiables que les modèles spécifiques de comportement du DSM-III-R, invalidant ainsi l'hypothèse originelle proposant d'exclure la personnalité du diagnostic d'ASPD / psychopathie.

Mieux, les résultats démontrèrent que le PCL-R de Hare mesurait concrètement la tendance latente à la psychopathie sous toutes ses formes ! Des analyses similaires des données rassemblées lors des essais sur le terrain montrèrent que les critères d'ASPD distinguaient moins bien le caractère psychopathique, particulièrement lorsqu'il attteignait des niveaux élevés ! Autrement dit, le critère d'ASPD établi par le DSM-III-R fut conçu - intentionnellement ou non - pour exclure les psychopathes les plus psychopathiques !

Malgré le fait que cette étude, ait permis d'établir une base empirique pour ajouter dans le DSM-IV des critères d'ASPD liés au contenu, cela ne fut pas pris en compte ; les critères adoptés pour le DSM-IV ne furent même pas évalués dans les essais sur le terrain.

La description textuelle de l'ASPD présente dans le DSM-IV (qui nous dit que l'ASPD est « aussi connu sous le nom de psychopathie ») contient des références aux caractéristiques traditionnelles de la psychopathie, mais sur de nombreux points, elle n'est pas conforme aux critères de diagnostic formels.

Une des conséquences de l'ambiguïté inhérente aux critères d'ASPD/psychopathie du DSM-IV est qu'elle laisse la porte ouverte à des procès au cours desquels un clinicien peut dire que l'accusé satisfait à la définition d'ASPD présente dans le DSM-IV, et un autre clinicien peut dire le contraire, et les deux peuvent avoir raison ! Le premier clinicien peut exclusivement utiliser les critères de diagnostic formels, tandis que le second clinicien peut dire « oui, l'accusé satisfait peut-être aux critères formels, mais il ou elle ne possède pas les traits de personnalité décrits dans la section « Caractéristiques associées » du texte du DSM-IV ». Autrement dit, un bon psychopathe avec un bon avocat peut commettre n'importe quel crime et s'en tirer à bon compte. Cet échec du DSM-IV à différencier entre psychopathie et ASPD peut avoir (et aura sans aucun doute) de très graves conséquences pour la société.

Lobaczewski mentionne le fait qu'en Allemagne nazie et en Russie stalinienne, les sciences psychologiques furent cooptées pour soutenir les régimes totalitaires, et que cela fut accompli par des psychopathes au pouvoir qui entreprirent ensuite de détruire toute possibilité de diffuser largement des informations précises sur la condition [psychopathique - NdT]. Il fait remarquer que tout régime constitué principalement de déviants pathologiques ne peut permettre à la psychologie de se développer et de s'épanouir librement, parce que le régime lui-même serait alors diagnostiqué comme pathologique, ce qui révélerait « l'homme derrière le rideau. ».

En se fondant sur des observations de première main du phénomène en question, Lobaczewski déclare que la répression du savoir est entreprise de façon typiquement psychopathique : à couvert et derrière un « masque de santé mentale ». Pour être capable de contrôler les sciences psychologiques, on doit savoir ou être capable de sentir ce qui se passe et quels domaines de la psychopathologie sont les plus dangereux. Un régime politique pathologique localise les individus psychopathes oeuvrant dans ce domaine (habituellement de très médiocres scientifiques), facilite leurs études universitaires et leurs diplômes ainsi que l'obtention de postes-clés avec un pouvoir d'encadrement des organisations scientifiques et culturelles. Ils sont alors en position d'écraser les personnes plus douées - étant motivés aussi bien par leur propre intérêt que par cette jalousie typique qui caractérise l'attitude du psychopathe envers les gens normaux. Ce sont eux qui surveillent les articles scientifiques pour leur « propre idéologie » et qui font tout pour s'assurer qu'un bon spécialiste se verra refuser la documentation scientifique dont il aura besoin.

Le fait est qu'au cours de ces cinquante dernières années, le concept de psychopathie a été fortement rétréci, et se réfère maintenant à un trouble de la personnalité spécifique, bien qu'il y ait eu des tentatives de supprimer entièrement la classification, en la remplaçant par le « trouble de la personnalité antisociale », qui peut comprendre une grande variété de comportements sans nécessairement exiger le diagnostic clinique de psychopathie. Robert HARE souligne à quel point il est crucial de comprendre que la psychopathie n'est pas synonyme de criminalité ou de violence ; tous les psychopathes ne s'engagent pas dans des comportements violents ou criminels. En même temps, les personnes violentes ou criminelles ne sont pas toutes des psychopathes.

Selon Robert Hare, Cleckley, Lobaczewski et beaucoup d'autres experts en psychopathie, un diagnostic de psychopathie ne peut se baser sur des symptômes comportementaux visibles à l'exclusion des symptômes interpersonnels et affectifs, parce qu'une telle procédure transforme en psychopathes de nombreuses personnes qui sont simplement blessées par la vie ou la société, et permet aux vrais psychopathes qui arborent un « masque de santé mentale » bien construit d'échapper au dépistage. D'après une documentation de plus en plus conséquente, beaucoup (ou la plupart) des psychopathes grandissent dans des familles aisées et stables, et deviennent des criminels en col blanc qui, à cause de leur argent et de leur position, ne subissent jamais la révélation publique de leurs comportements destructeurs privés, et échappent constamment au système judiciaire.

Venons en maintenant au diagnostic et/ou au dépistage en particulier : il existe un certain nombre de théories sur l'étiologie de la psychopathie : par exemple la psychopathie en tant que stratégie adaptative ou variante de la personnalité normale, ou encore dysfonctionnement du cerveau, trouble de l'attachement ou expression d'une pathologie dans la petite enfance, trouble d'apprentissage, etc. Très peu de preuves empiriques soutiennent l'idée que le vrai psychopathe est le résultat d'une enfance maltraitée, par contre de nombreuses preuves empiriques soutiennent une cause génétique. Le modèle neurobiologique nous donne l'espoir de détecter même le psychopathe le plus retors.

Comme Henry l'a mentionné, une étude portant sur les temps de réaction à divers mots - émotionnels, neutres, pseudo mots - a montré que les potentiels évoqués (ERP ) en tâches de décision lexicale chez des non-criminels indiquaient que les réponses aux mots positifs et négatifs étaient plus précises et plus rapides que les réponses aux mots neutres. Dans les cerveaux de ces sujets, les sites centraux et pariétaux indiquaient des composants ERP rapides précoces et tardifs par rapport aux mots émotionnels. On en déduit que les composants tardifs d'ERP indiquaient un traitement continu du mot.

Dans la même étude, les criminels non-psychopathes montraient également une sensibilité aux mots émotionnellement chargés. Les psychopathes, quant à eux, ne montraient aucun temps de réaction ou différence d'ERP entre les mots neutres et émotionnels. En outre, la morphologie de leurs ERPs présentait une différence saisissante par rapport à celle des non-psychopathes. Le composant tardif d'ERP qui était long et étendu chez les non-psychopathes était petit et bref chez les psychopathes. On pense que cela reflète le fait que les psychopathes prennent des décisions lexicales et traitent l'information de façon superficielle. Cela est confirmé par des études récentes d'imagerie cérébrale qui montrent que les psychopathes abusant de substances toxiques ont moins d'activité cérébrale durant la réalisation d'une tâche de décision lexicale que les non-psychopathes abusant des mêmes substances.

Hare et d'autres ont aussi découvert que les anomalies ERP des psychopathes ne s'arrêtaient pas au langage affectif mais incluaient aussi le langage abstrait. Une autre découverte curieuse notée dans deux études distinctes fut une onde négative exceptionnellement grande qui balayait les zones frontales du cerveau. Une interprétation possible est que cela reflète une profonde anomalie de traitement cognitif et affectif.

D'autres études récentes donnent des résultats et des conclusions similaires : à savoir que les psychopathes ont de grandes difficultés à traiter les éléments affectifs (émotionnels) à la fois verbaux et non-verbaux, qu'ils ont tendance à confondre la signification émotionnelle des événements, et le plus important, que ces déficits apparaissent dans les scanners du cerveau. Les psychopathes ont une distribution inter-hémisphérique inhabituelle des ressources de traitement, des difficultés à apprécier le sens subtil et les nuances du langage - comme les proverbes, les métaphores, etc. - ont une faible capacité de discrimination olfactive, vraisemblablement en raison d'un dysfonctionnement orbito-frontal, et pourraient être affectés par ce qui ressemble à une forme subclinique de trouble de la pensée caractérisée par un manque de cohésion et de cohérence dans le langage. Aucun autre modèle de psychopathie ne peut expliquer toutes ces anomalies cognitives et affectives, qui peuvent être détectées par des scanners du cerveau.

Le dernier point : nous travaillons sur le problème du trouble de la pensée, et tentons d'établir des règles générales afin que la personne lambda puisse réaliser ses propres estimations personnelles après avoir effectué des tests secrets au cours de discussions avec une personne qu'elle soupçonnerait de tromperie ou de manipulation (pour diverses raisons).

Mais il s'agit d'une question sensible. Comme Lobaczewski le fait remarquer, si un psychopathe se considère lui-même comme normal, ce qui bien-sûr est considérablement plus facile s'il est en position d'autorité, alors il considérera une personne normale comme différente, et donc anormale.
Les actions et réactions d'une personne normale, ses idées et critères moraux, étonnent le psychopathe, qui les voient comme anormaux . Quelqu'un de normal étonnera le psychopathe par sa naïveté, il considérera cette personne comme partisane de théories incompréhensibles sur l'amour, l'honneur et la conscience ; il ne sera pas loin de la traiter de « cinglé ». Cela explique pourquoi les gouvernements pathologiques ont toujours considéré les dissidents comme étant « mentalement anormaux ».

Le système judiciaire n'est pas fait pour gérer ce problème, car, évidemment, ce système est souvent la création d'individus pathologiques - ou du moins, ce sont eux qui l'administrent. Une législation bien pensée exigerait d'examiner scientifiquement les individus qui prétendent de façon trop insistante ou spécieuse que quelqu'un d'autre est psychologiquement anormal.

D'autre part, tout système social (ou tout dirigeant) pathologique au sein duquel la psychiatrie est utilisée pour des raisons politiques présente des problèmes supplémentaires. Toute personne se rebellant contre un système gouvernemental qui le choque par son étrangeté et son immoralité, peut facilement être désigné par les représentants dudit gouvernement comme un individu « mentalement anormal », quelqu'un qui a un « trouble de la personnalité » et qui devrait subir un traitement psychiatrique ; et les représentants de ce gouvernement ont de nombreux moyens à leur disposition pour prendre le contrôle de la procédure d'examen. Ils peuvent faire appel à un psychiatre scientifiquement et moralement dégénéré pour accomplir cette tâche.

Il s'agit donc d'une question épineuse...

Silvia Cattori : Pouvez-vous nous citer certains types identifiés par Lobaczewski ?

Henry : Comme la plupart des chercheurs, il opère une distinction initiale entre les déviances héréditaires et les déviances acquises, c'est-à-dire entre ceux qui sont nés pathologiques et ceux qui deviennent pathologiques à cause de blessures des tissus cérébraux ou de traumatismes dans leur enfance. Une blessure du tissu cérébral peut laisser des cicatrices qui changent ensuite la capacité de l'individu à percevoir et à ressentir. Ces zones du cerveau destinées à gérer ces fonctions ne peuvent le faire, et donc les données sont déviées vers d'autres zones normalement destinées à d'autres tâches. Lobaczewski nomme caractéropathes les individus dont le caractère se développe de manière déformée à cause de blessures ou de traumatismes. Il donne ensuite la liste des différentes formes de caractéropathies : le caractéropathe paranoïde (il cite Lenine comme exemple) ; la caractéropathie frontale, une déviance due à des blessures dans les zones frontales du cortex cérébral (Staline est un exemple de ce type) ; la caractéropathie induite par des substances (médicaments et drogues), causée par l'usage de produits qui endommagent le système nerveux central. Enfin, il cite les caractéropathies induites par les agents pathogènes (les maladies) (il suggère la possibilité que Franklin D. Roosevelt ait souffert de ce trouble), ainsi que certains personnages épileptiques (il cite César et Napoléon).

Les troubles héréditaires sont : la schizoïdie ou psychopathie schizoïdique, la psychopathie essentielle, la psychopathie asthénique, la psychopathie anankastique, hystérique et skirtoïde, et les individus qu'il qualifie de « chacals », c'est-à-dire ceux qui finissent comme tueurs à gages ou mercenaires. LOBACZEWSKI conjecture que ce dernier type est un mélange des autres types. Pour donner une idée, je vais juste évoquer deux types.

La psychopathie schizoïde est une déviance qui engendre des personnes hypersensibles et méfiantes qui ne tiennent aucun compte des sentiments des autres. Elles sont attirées par les idées grandiloquentes, mais leur nature psychologique appauvrie limite gravement leurs perceptions et transforment leurs soi-disant « bonnes intentions » en influences favorisant le mal. Leur idée de la nature humaine finit par pervertir leurs tentatives. Comme le dit Lobaczewski, l'espression typique de leur attitude envers l'humanité se retrouve dans ce qu'il appelle la « déclaration schizoïdique » : « La nature humaine est si mauvaise que dans la société humaine, l'ordre ne peut être maintenu que par un pouvoir fort créé par des individus hautement qualifiés au nom d'une idée supérieure ». Combien de mouvements contemporains, du fascisme au communisme en passant par le néoconservatisme, sont fondés sur cette idée ! On pourrait facilement imaginer que cette déclaration vient de Leo Strauss, par exemple.

Les psychopathes essentiels sont ceux qui se rapprochent le plus de l'idée de la psychopathie examinée par Cleckley, Hare, Babiak et d'autres. Lobaczewski fait cette remarque effrayante : « Ils apprennent à se reconnaître dans une foule dès l'enfance, et ils développent la conscience de l'existence d'autres individus similaires à eux. Ils prennent également conscience de leur différence par rapport au monde des personnes qui les entourent. Ils nous voient avec un certain recul, comme une variété paraspécifique ».

Pensez aux implications de cette déclaration : Ils sont, dans une certaine mesure, conscients d'appartenir à un groupe, et ce, même depuis l'enfance ! Reconnaissant leur différence fondamentale par rapport au reste de l'humanité, leur allégeance serait envers ceux de leur espèce, c'est-à-dire les autres psychopathes. Lobaczewski fait remarquer que, dans toute société, les individus psychopathiques créent souvent un réseau actif de collusions communes, séparé dans une certaine mesure de la communauté des gens normaux. Ils sont conscients d'être différents. Leur monde est éternellement divisé selon le mode « eux et nous » ; leur monde avec ses propres lois et coutumes, et l'autre « monde étranger » des gens normaux qu'ils considèrent comme rempli d'idées et de coutumes présomptueuses sur la vérité, l'honneur et la décence, à la lumière desquels ils se savent moralement condamnés. Leur propre sens déformé de l'honneur les pousse à tromper et à injurier les non-psychopathes et leurs valeurs. En contradiction avec les idéaux des gens normaux, les psychopathes ressentent comme un comportement normal le fait de rompre les promesses et les accords. Non seulement ils convoitent les biens et le pouvoir et les revendiquent comme un droit, simplement parce qu'ils (les psychopathes) existent et qu'ils peuvent se les approprier, mais ils prennent aussi un plaisir particulier à spolier autrui et usurper leurs biens ; ; ce qu'ils peuvent plagier, escroquer et extorquer sont des fruits bien plus savoureux que ceux qu'ils peuvent récolter par un travail honnête. Ils réalisent aussi très tôt à quel point leurs personnalités peuvent avoir des conséquences traumatisantes sur les personnalités des non-psychopathes, et apprennent comment tirer avantage de cette source de terreur afin d'atteindre leurs objectifs.

À présent imaginez à quel point les êtres humains qui sont totalement ignorants du sujet pourraient être abusés et manipulés par ces individus s'ils étaient au pouvoir dans différents pays, feignant d'être loyaux envers les populations locales tout en insistant sur les différences physiques évidentes et facilement discernables entre groupes (telles que la race, la couleur de peau, la religion, etc.). Les humains psychologiquement normaux seraient dressés les uns contre les autres sur la base de différences insignifiantes tandis que les déviants au pouvoir, dont la différence fondamentale par rapport au reste d'entre nous est l'absence de conscience, l'incapacité à éprouver des sentiments pour un autre être humain, récolteraient les bénéfices et tireraient les ficelles.

Je pense que cela décrit de façon assez juste la situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui.

Silvia Cattori : Pouvez-vous nous donner des exemples qui nous aideront à comprendre le problème de manière plus générale ?

Henry : A. Lobaczewski nous offre une analyse de la manière dont les différents types de psychopathes travaillent de concert pour former un système au sein duquel les personnes cliniquement pathologiques détiennent les clés du pouvoir et dirigent les gens psychologiquement normaux.

Au début du livre, Lobaczewski décrit ses expériences à l'université, où il rencontra le phénomène pour la première fois. Il se rendit à la bibliothèque pour emprunter quelques livres traitant de la psychopathie et découvrit avec étonnement qu'on les avait tous retirés ! Ce fait démontre qu'ils sont conscients de leur différence, au moins certains d'entre eux, et dans le cas de la Pologne sous le communisme, ces individus conscients de leur différence étaient suffisamment haut-placés et avaient suffisamment de pouvoir pour faire retirer les livres de la bibliothèque universitaire. Laura nous a dit que ce passage lui avait fait dresser les cheveux sur la tête ! Les implications de ce fait sont d'une portée considérable pour la compréhension de notre monde, de la façon dont il en est arrivé là, et de ce qu'il nous faut faire pour le changer.

Mais voici quelques exemples de comportement psychopathique rapportés par d'autres auteurs :

Une mère joue à cache-cache avec sa fille de 4 ans. Elle tient un grand couteau de cuisine dans la main. Elle dit à sa fille : « je vais compter jusqu'à cent, et si je te trouve, alors je te couperai les pouces ». La petite fille, terrifiée, se cache dans son placard, et la mère - qui sait que c'est probablement l'endroit où elle se cache - la laisse là, terrifiée, effrayée, traumatisée, jusqu'à la fin du jeu. Quand la mère ouvre la porte, elle se penche sur sa fille et entaille la peau d'un de ses pouces.

Une famille a deux fils. L'un d'eux se suicide avec un fusil de chasse. Le Noël suivant, les parents offrent ce même fusil à leur autre fils comme cadeau de Noël. Quand on leur demande pourquoi, ils répondent : « C'était une arme excellente ».

Comment un tel comportement peut-il être compatible avec un système de croyance qui nous dit que nous avons tous une étincelle divine en nous, ou que tout le monde a une conscience ? Pouvez-vous imaginer faire de telles choses à vos propres enfants ?

Notre système de morale ne nous donne aucun moyen de traiter cette maladie. Elle doit être comprise pour ce qu'elle est. Ces personnes ne peuvent être « soignées ». Imaginez ce même individu au pouvoir, et vous serez en mesure d'expliquer des scandales comme celui d'Enron. Hare rapporte des cas de psychopathes qui s'en prennent aux personnes âgées. Imaginons qu'une personne âgée ait été escroquée des économies de toute une vie - manifestement par un psychopathe. Un autre psychopathe contactera la victime, se faisant passer pour un avocat qui, moyennant finance, pourra récupérer son l'argent. La victime empruntera alors de l'argent à un ami ou un proche et le perdra au profit de l'avocat marron.

Laura : Un des facteurs principaux à prendre en compte dans la façon dont une société peut être accaparée par un groupe de déviants pathologiques est que la seule limitation est celle de la participation d'individus prédisposés au sein de cette société. Pour les déviants les plus actifs, Lobaczewski donne le chiffre approximatif de 6% en moyenne sur une population donnée. Bien sûr, ce chiffre varie selon les pays, en fonction de nombreuses variables. La société occidentale offre un large choix d'individus prédisposés.

Le psychopathe essentiel est au centre de la toile. Les autres psychopathies et caractéropathies décrites par Lobaczewski et d'autres forment le second niveau du Système de Contrôle Pathologique, et il est important de noter qu'ils sont bien plus nombreux que les psychopathes essentiels. Ainsi, ce groupe représente-t-il environ 6% d'une population donnée.

Le niveau suivant d'un tel système est composé d'individus qui sont nés normaux, mais qui sont déjà déformés par une exposition à long terme à des éléments psychopathiques via les influences familiales ou sociales, ou qui, par quelque faiblesse psychique, ont choisi de satisfaire aux exigences de la psychopathie pour leurs propres buts égocentriques. En termes de chiffres, selon Lobaczewski, ce groupe représente environ 12% d'une population donnée dans des conditions normales ; il est difficile, comme le fait remarquer Lobaczewski, de tracer une frontière précise entre ces derniers types et les déviants génétiques sans l'apport d'une science authentique et non-psychopathique. À l'heure actuelle, les distinctions ne peuvent être que descriptives.

Il se trouve donc que 18% d'une population donnée oeuvrent activement à la création et à la domination d'une pathocratie (ou font des tentatives qui vont dans ce sens). Le groupe de 6% constitue la noblesse pathocratique, et le groupe de 12% forme la nouvelle bourgeoisie, dont la situation économique est des plus avantageuse.

Une fois établi, le système psychopathique élitiste ronge tout l'organisme social, gâchant les compétences et pouvoirs de celui-ci. Une fois qu'une pathocratie a été établie, elle suit un certain chemin et possède certains pouvoirs « attractifs ». Dans une pathocratie, le système socio-économique émane de la structure sociale créée par le système du pouvoir politique, qui est un produit de la vision du monde élitiste propre aux déviants pathologiques. Ainsi, on peut dire que la pathocratie ressemble à un processus de maladie macrosociale créé par des agents pathogènes humains, et elle peut en venir à affecter une nation entière à un degré équivalent à un cancer qui diffuse ses métastases. La maladie macrosociale de la pathocratie suit exactement le même modèle que le cancer qui évolue dans un organisme en suivant un processus pathodynamique caractéristique.

Il est impossible de comprendre un tel phénomène pathologique en utilisant les méthodes des gens « normaux » qui ne prennent pas en compte les processus de pensée déviants des agents pathogènes humains. On pourrait certainement dire que le monde entier est gouverné par une « pathocratie cachée » (ou cryptopathocratie) depuis très longtemps. De nombreux chercheurs suggèrent qu'il y a toujours eu un « gouvernement secret » opérationnel même si le gouvernement « officiel » n'est techniquement pas une pathocratie. On peut suggérer que les psychopathes sont techniquement TOUJOURS en coulisse, même au cours des cycles historiques qui ne sont PAS des pathocraties (c'est à dire les « bonnes périodes » que Lobaczewski décrit comme la fondation d'un cycle hystéroïde qui ouvre la porte à une pathocratie à découvert).

Si nous utilisons le terme pathocratie à la place de « loi du gouvernement secret », alors toute l'Histoire devient une « pathocratie » et le mot perd son sens, il est donc important de noter que le terme « pathocratie » est le phénomène spécifique représentant une conséquence de l'hédonisme des bonnes périodes, et qu'elle est caractérisée par (100) cent% de psychopathes essentiels exerçant ouvertement des fonctions de commandement,,comme c'est arrivé en Allemagne nazie, en Russie communiste et en Europe de l'Est. Et, dois-je ajouter, comme cela se produit actuellement.

On ne peut réellement qualifier les questions auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui de « politiques », en utilisant les termes usuels des idéologies politiques, car, comme nous l'avons souligné plus haut, les déviants pathologiques opèrent sous un masque, en utilisant la tromperie et autres tactiques de manipulation psychologiques qu'ils pratiquent avec une grande ingéniosité. Si nous pensons ou croyons qu'un groupe politique portant tel ou tel nom est hétérogène eu égard à sa vraie nature, nous ne serons pas capables d'identifier les causes et propriétés de la maladie. N'importe quelle idéologie sera utilisée pour dissimuler les caractéristiques pathologiques aux experts comme aux gens ordinaires. Ainsi, tenter de se référer à ceci ou cela comme étant de « gauche » ou de « droite » ou « socialiste », « démocratique », « communiste », « démocrate » ou « républicain », etc., ne nous aidera jamais à comprendre l'auto-reproduction pathologique et ses influences externes expansionnistes. Comme le dit Lobaczewski, « Ignota nulla curatio morbi » ! Aucun mouvement ne réussira JAMAIS s'il ne tient pas compte de la psychopathie et de la ponérologie !

Silvia Cattori : Les pervers sont ceux qui face aux problèmes qu'ils ont créés disent : « C'est la faute des autres. Je n'ai rien à y voir ».

Henry : Exactement. Un exemple qui vient à l'esprit est celui du psychopathe cité par Hare qui tua ses parents et qui ensuite implora la compassion parce qu'il était orphelin !

Rien n'est jamais leur faute. Ils ne sont jamais responsables de quoi que ce soit.

Laura : J'aimerais expliquer un peu plus ce phénomène. Le psychopathe est un individu qui divise le monde en blanc et noir, bien et mal, et cette division est très rigide. La structure psychopathique est organisée autour d'une structure très simple : « c'est agréable : c'est bien / c'est désagréable : c'est mal ». Mais ce n'est pas parce que cette structure est rigide qu'elle est rationnelle ou stable ! Les choses sont bonnes ou mauvaises, mais ce qui est bon ou mauvais dépend des circonstances immédiates, c'est-à-dire de ce que le psychopathe veut à ce moment-là.

Mais il ne s'agit pas d'un « mécanisme de défense » ; c'est juste que, pour le psychopathe, la réalité à prendre en compte est centrée sur ce qui lui « est agréable » sans tenir compte des autres êtres humains, excepté en tant qu'objets qui peuvent satisfaire ses besoins. On pourrait presque dire que la structure psychologique du psychopathe est équivalente à celle d'un nouveau-né, et elle ne se développe jamais, ne grandit jamais.

Un nouveau-né n'a pas de soi interne, hormis en tant que centre d'un réseau d'entrées et de sorties neurologiques qui recherchent le plaisir et rejettent l'inconfort. Bien sûr, chez un psychopathe adulte, de circuits neurologiques hautement développés ont évolué au cours du processus d'apprentissage des meilleurs méthodes pour obtenir satisfaction de ses besoins et demandes.

Sous l'influence de cette structure interne, le psychopathe n'est pas capable d'apprécier les désirs ou besoins des autres êtres humains et les nuances subtiles d'une situation, ou de tolérer l'ambiguïté. Toute la réalité extérieure est filtrée via - rendue conforme à - cette structure interne primitive.

Quand le psychopathe est frustré, il semble ressentir que tout dans le monde « extérieur » est contre lui et qu'il est bon, qu'il souffre sans mesure et recherche seulement l'idéal d'amour, de paix, de sécurité, de beauté, de chaleur et de réconfort. C'est à dire que quand un psychopathe est confronté à quelque chose de déplaisant ou de menaçant, ceci (personne, idée, groupe, ou quoi que ce soit), est placé dans la catégorie « totalement mauvais » parce qu'évidemment, si le psychopathe ne l'aime pas, ça ne peut pas être bon !

Maintenant, venons-en au pire : quand les preuves démontrant qu'un choix ou qu'un acte du psychopathe a créé un problème ou a empiré une situation s'accumulent, cela aussi doit être nié comme quelque chose faisant partie du soi et projeté comme quelque chose venant « de l'extérieur ».

Cela signifie que tout ce qui est défini comme « mauvais » est projeté sur quelqu'un ou quelque chose d'autre, parce que la structure interne du psychopathe n'admet aucun tort, aucun mal, aucune erreur. Et gardez à l'esprit qu'ils ne fonctionnent pas comme cela par choix, mais parce qu'ils ne peuvent pas faire autrement. Ils sont faits ainsi. Ils sont comme le chat qui prend plaisir à torturer une souris avant de la manger. C'est exactement ce qu'ils font.

Les psychopathes sont des maîtres de l'Identification Projective. C'est à dire qu'ils projettent sur les autres tout ce qui est mauvais (souvenons-nous que « mauvais » change en fonction de l'objectif du psychopathe), ils tentent de manière manipulatrice d'induire chez les autres personnes ce qu'ils projettent. E Ils cherchent à contrôler les personnes qu'ils perçoivent comme manifestant ces « mauvaises » caractéristiques. De cette manière, le psychopathe prend du plaisir et sent qu'il « contrôlela situation ».

Gardez à l'esprit que ce que le psychopathe considère comme bon n'a rien à voir avec la vérité, l'honneur, la décence, la considération pour les autres, ou avec tout ce que désire le psychopathe àun moment donné. De cette manière, toute violation du droit des autres, tout acte répugnant et malveillant peut être commis par un psychopathe et il dormira comme un bébé (littéralement) la nuit parce qu'il n'a rien fait de mal !

George Bush et les néoconservateurs peuvent détruire l'Irak et appeler ça « instauration de la démocratie », cela ne leur pose vraiment aucun problème. Les psychopathes israéliens peuvent usurper la Palestine, massacrer les Palestiniens, justifier ces actes par la Bible et s'en trouver bien. Bien sûr, quand ils sont en train de mentir, ils le savent, mais dans leur for intérieur, ils croient que le véritable bien est ce qui leur procure du plaisir et les fait se sentir en sécurité dans ce monde. Et ils savent que des êtres comme eux seront moralement condamnés et attaqués par la majorité des autres êtres humains s'ils ne dissimulent pas sous un masque de justification solennelle leurs impulsions à satisfaire leurs désirs.

Silvia Cattori : Cela suggère-t-il que les pathocrates modernes, opérant au sein de ce qu'on appelle aujourd'hui la « société de l'information » ne sont guère différents des partisans d'Hitler ? Ceci mis à part qu'ils sont plus dangereux parce qu'ils ont des outils plus sophistiqués et sont capables d'utiliser les divers moyens de communication d'une manière plus consciente ?

Laura : Cela résume très bien la situation.

Henry : Le système pathocratique, c'est à dire un gouvernement constitué de déviants psychologiques, produira des effets similaires qu'il soit dissimulé sous le masque du fascisme, du communisme ou du capitalisme. L'idéologie elle-même n'est pas importante. Elle sert simplement de couverture et de point de ralliement à un certain pourcentage de la population dont ils ont besoin comme base de soutien.

Ce groupe de soutien croit aux slogans et est incapable de voir derrière le masque. Un certain pourcentage d'entre eux interprètera les slogans idéologiques avec les yeux de la conscience et croira que le but est d'améliorer notre sort. En conséquence, nous entendons des slogans sur la fraternité de l'homme, ou celle des exploités, des expressions creuses sur la justice et la liberté, l'apport de la démocratie en Irak, etc., tandis que la réalité est impuissance, division et asservissement. À mesure que certains individus qui soutiennent l'idéologie en viennent à voir le gouffre entre les idéaux et les actions des chefs du parti, certains s'en vont et sont remplacés par d'autres.

Dans le monde d'aujourd'hui où l'information est contrôlée par un petit nombre d'agences de presse, et où ces agences ont beaucoup de points communs avec les gouvernements pathologiques, un plus grand nombre de gens peuvent être influencés et infectés par le processus de pensée pathologique. Un exemple est la célèbre remarque que fit Madeleine Albright en 1996, quand on l'interrogea sur les cinq-cent-mille morts en Iraq - la plupart étant des enfants - conséquence de l'embargo. Elle répondit qu'elle pensait que « cela en valait la peine », c'est à dire que ces morts étaient le prix nécessaire à payer pour écraser Saddam Hussein . Il s'agit incontestablement d'une logique pathologique, et pourtant combien d'Américains ont-ils entendu cette réponse et n'y ont pas réagi ? Quiconque n'a pas été scandalisé en entendant cette déclaration a été infecté par la pensée pathologique, a été ponérisé. L'infection pathologique. a déformé sa pensée.

Silvia Cattori : L'absence de conscience et l'insensibilité à la souffrance sont-elles ce qui distingue les psychopathes des gens normaux ?

Henry : C'est probablement le point-clé que les gens doivent comprendre. Depuis des années, des artistes, des écrivains, des philosophes et d'autres tentent de comprendre pourquoi notre monde est une vallée de larmes perpétuelle. Ils ont tenté de trouver des explications moralistes. Lobaczewski consacre la première partie de son livre à une discussion sur la futilité de cette approche, suggérant à la place une approche scientifique fondée sur une compréhension du mal en tant que « maladie de société », en tant qu'actes commis par des déviants pathologiques au sein d'une société. Privés de la capacité à éprouver de l'empathie envers les autres, ces gens ne peuvent ressentir cette souffrance, pas plus qu'un chat ne ressent la souffrance d'une souris quand il joue avec elle avant de la tuer. Bush peut envoyer des milliers de soldats en Iraq ou en Afghanistan, où ils seront tués ou mutilés pour la vie, et où ils tueront des milliers de personnes et détruiront un pays entier, il peut autoriser la torture sur les prisonniers, peut soutenir les actions d'Israël dans les territoires occupés ou au Liban, mais aucune des souffrances qu'il cause n'est réelle pour lui. Chez ces personnes, il n'y a pas de structure mentale appropriée pour traiter ces émotions. Ils en sont physiologiquement incapables.

Laura : Ils n'ont pas le matériel mental requis pour faire fonctionner le programme d'empathie.

Henry : La seule souffrance que connaît le psychopathe, c'est quand on lui retire sa nourriture, et j'utilise le mot nourriture dans un sens symbolique : c'est à dire quand il n'obtient pas ce qu'il veut. Voilà le niveau de sa vie émotionnelle. Toute autre chose que nous pensons voir en eux vient de notre propre imagination qui projette sur eux notre propre réalité intérieure.

Et c'est ce que nous faisons tout le temps, parce qu'il est très difficile de comprendre réellement qu'il y a des gens dont la vie intérieure ne possède pas la richesse qui caractérise celle des gens normaux.

Laura : En réalité, quand nous projetons notre propre structure interne sur le psychopathe, nous nous comportons surtout de manière psychopathique ! Nous nous retrouvons dans un monde « noir et blanc » où les nuances de l'existence humaine ne sont pas prises en compte. Le fait est que tout le monde ne naît pas égal en termes d'intelligence, de talent, d'apparence physique, etc. Et de même que personne ne se ressemble physiquement, ils sont différents dans leur structure psychologique, même si certains éléments nous rassemblent en tant qu'espèce. Lobaczewski fait remarquer que c'est une une loi de la nature universelle : plus l'organisation psychologique d'une espèce donnée est élevée, plus les différences psychologiques parmi les unités individuelles sont grandes. L'homme est l'espèce la plus hautement organisée ; par conséquent, ces variations entre individus sont les plus grandes. À la fois qualitativement et quantitativement, des différences psychologiques existent dans toutes les structures du modèle de personnalité humaine.

L'expérience nous apprend que les différences psychologiques entre les gens sont souvent la cause de problèmes. Nous ne pouvons surmonter ces problèmes que si nous acceptons les différences psychologiques comme une loi de la nature et que nous en apprécions la valeur créative. Ces différences sont un grand cadeau pour l'humanité, permettant aux sociétés humaines de développer leurs structures complexes et d'être hautement créatives tant au niveau individuel que collectif. Grâce à la variété psychologique, le potentiel créatif de toute société est cent fois plus élevé qu'il ne pourrait l'être si notre espèce était psychologiquement plus homogène.

La personnalité humaine normale est constamment en train d'apprendre, de se développer, de changer. Un processus évolutif perpétuel est la situation normale. Certains systèmes politiques et religieux essaient d'induire une stabilité et une homogénéité excessives dans nos personnalités, mais ceci malsain pour l'individu et la société d'un point de vue psychologique.

Une société correctement éduquée psychologiquement connaîtra et comprendra les différences, et sera aussi au courant de la chose essentielle que les humains normaux ont en commun : la capacité à développer une conscience mature. De cette manière, les différences pourront être célébrées et le potentiel créatif pleinement optimisé.

Silvia Cattori : Si nous trouvons de plus en plus de manipulateurs et de gens pervers à tous les niveaux, est-ce parce que notre société favorise les narcissiques et les individualistes ?

Henry : N'est-ce pas ce que nous voyons avec les valeurs des néolibéraux ? L'idée entière du capitalisme est une idée narcissique. Aux États-Unis, qui sont le modèle affiché au reste du monde, on nous dit : « tout le monde peut devenir président ». C'est le mythe du succès individuel. « Visez la Première place. » « Si vous travaillez suffisamment dur, vous aussi, vous pourrez devenir riche et réussir. » « Si vous échouez, c'est votre propre faute ».

Face à cette mythologie, cette idéologie, les psychopathes sont mieux équipés pour la réussite que les gens de conscience, parce qu'ils n'ont pas de sensibilité éthique ou morale qui mettrait un frein à leurs actions. Ils sont tout à fait disposés à écraser n'importe qui pour arriver au sommet : poignarder dans le dos, mentir, répandre des histoires sur leurs rivaux sont tout à fait acceptables, sans jamais perdre de temps avec des remords.

L'imposition du néolibéralisme au reste du monde est aussi un moyen de ponériser de plus grandes parties du globe. C'est une idéologie pathologique cachée sous une pseudo-science économique.

Silvia Cattori : Commettons-nous une erreur quand nous imaginons que les souffrances créées par Israël en Palestine et par les États-Unis en Afghanistan et en Iraq prendront fin le jour où Bush ou Olmert, ou tout autre individu, quitteront le pouvoir ? Les causes sont-elles systémiques et même imperméables aux changements de parti politique et de gouvernement ?

Henry : Oui. Regardez les États-Unis. Chaque parti est le reflet parfait de l'autre. Pour préserver l'image de la démocratie, les deux sont nécessaires, les deux servent les mêmes maîtres. Mais il n'y a aucun leader aux États-Unis qui se lève et parle du génocide des Palestiniens. La mort de centaines de milliers d'Iraquiens est passée sous silence. Il n'y a pas de place pour la conscience au sein du gouvernement étasunien, des deux partis. Et le contrôle de la presse, sans parler d'autres moyens comme le chantage et les menaces, s'assurent que ceux qui pourraient parler n'aient pas les moyens de le faire.

Israël est un État fondé sur un grand mensonge : un « être suprême » a déclaré qu'un petit groupe de gens était « son peuple élu » et il leur a donné un petit bout de terre au Moyen-Orient il y a des milliers d'années. Le grand mensonge d'Israël et du judaïsme est aussi le mensonge fondamental du christianisme et de l'islam, les deux autres religions monothéistes. Nous avons donc une grande partie du monde qui vit depuis des milliers d'années avec des systèmes de croyance outrageusement absurdes - si on prend les enseignements au pied de la lettre et non comme des expressions déformées d'une vérité spirituelle supérieure sous-jacente.

Comment le fait de changer un des joueurs individuels (quel qu'il soit) de ce système va-t-il changer une dynamique qui se déploie sur des milliers d'années ? La structure pathocratique décrite par Lobaczewski s'applique non seulement aux gouvernements, mais aussi aux autres groupes et organisations - partout où le pouvoir s'accumule. Les organisations religieuses et les mouvements de libération peuvent entrer en ponérisation, et ce qui à l'origine était peut-être un outil de libération devient un outil d'asservissement.

Si, comme Lobaczewski le suggère, les psychopathes essentiels se reconnaissent entre eux et sont capables d'oeuvrer de concert pour atteindre des objectifs communs propres à leur « espèce para-spécifique », en opposition avec nos intérêts, alors nous avons là un mécanisme qui explique une structure de contrôle qui s'étend au loin, dans les brumes du passé, lorsque les premiers psychopathes établirent la première pathocratie. Soudainement, des théories qui jusque là avaient été rabaissées au niveau de « théories du complot » peuvent être examinées sous une nouvelle lumière, par des méthodes qui expliquent comment elles peuvent exister. Je pense qu'il s'agit là d'un domaine très important à explorer plus avant.

On peut poser une autre question : quel effet le fait de croire à un mensonge produit-il sur la personnalité ? Y a-t-il une pathologie qui soit fondée sur l'acceptation d'un mensonge fondamental comme pierre angulaire d'un système de croyance ? Des études ont été réalisées sur la « croyance » et le caractère des vrais croyants. Mais si l'erreur originale n'était pas tant la croyance que la croyance en un mensonge ? Toute croyance est-elle une croyance en un mensonge parce que notre savoir est imparfait ? Et une fois que nous sommes fixés sur la « croyance » envers et contre tout, subissons- nous une distorsion de notre personnalité ?

Mais pour revenir à votre question, il semble qu'Israël ait une place spéciale dans le monde aujourd'hui. Il peut ignorer la loi internationale et ne pas s'inquiéter d'avoir à rendre des comptes. Il peut déclencher des attaques brutales contre les Palestiniens et pourtant, il est toujours dépeint comme la victime - une tactique typiquement psychopathique. Les attaques contre les juifs dans le monde entier sont cataloguées et dénoncées tandis que les mêmes actes commis contre les Arabes et les musulmans sont acceptables - un autre trait psychopathique. Nous avons émis l'hypothèse dans d'autres livres que nous avons publiés, comme 911 : The Ultimate Truth, que les psychopathes au sommet de la pyramide ont choisi d'utiliser les juifs pour qu'ils jouent un rôle spécial dans le déclenchement d'une grande purge de la population humaine. L'idée qu'il existe une grande conspiration juive est l'histoire dissimulatrice diffusée par les pathocrates psychopathiques pour couvrir leurs propres plans. Il y a bien un complot, mais il n'est pas juif ; il est pathologique.

Silvia Cattori : Les choses ne peuvent-elles qu'empirer parce que le Mal macrosocial est le même Mal qui affecte l'humanité depuis l'aube des temps ? Un Mal en quelque sorte inhérent à la nature humaine et devant lequel nous sommes impuissants ?

Henry : Le Mal n'est pas inhérent à la nature humaine - du moins pas aux humains normaux qui ont été correctement éduqués. Cette question est un des points les plus importants soulevés par Lobaczewski dans son analyse du système pathocratique. Ce Mal systémique vient d'un petit groupe de gens qui n'ont pas de conscience, soit parce qu'ils sont nés comme ça, c'est-à-dire que ce sont des psychopathes génétiques, soit parce qu'en raison de blessures subies dans leur enfance, ou de leur éducation, leur conscience est morte ou s'est flétrie.

Par exemple, Lobaczewski pense que Staline était un caractéropathe. C'est à dire qu'il n'était pas né psychopathe, mais les traits pathologiques se développèrent suite à des blessures subies dans son enfance. Son type de pathologie peut être identifié. Donc en fait, les recherches de Lobaczewski sont libératrices parce qu'elles nous délivrent de l'idée que ces actes horribles commis par le Mal font partie de la « nature humaine » normale. Ces individus sont comme des microbes pathogènes dans un corps - comme un cancer dans la société, ou comme la lèpre. Certainement, un corps peut être rongé et détruit par la maladie, mais c'est du fait de la maladie, pas du corps lui-même.

Nous ne saurons pas réellement ce qu'est la nature humaine tant que nous n'aurons pas supprimé l'influence pathocratique et que nous ne serons pas capables de fonder une société vraiment humaine, c'est-à-dire menée et caractérisée par des valeurs en accord avec notre nature la plus élevée, notre conscience.

Silvia Cattori : Nous avons vu la facilité avec laquelle un George Bush ou un Tony Blair sont capables de mentir. Ils ne clignent même pas des yeux, lorsqu'ils mentent éhontément. Pensez-vous que des menteurs comme Bush et Blair, qui présentent les caractéristiques du narcissique et du manipulateur, soient nés pervers/pathologiques ?

Henry : Nous ne sommes pas psychologues et nous ne donnerons aucun diagnostic concernant des individus précis. Nous notons cependant que des histoires sur Bush ont circulé, d'après lesquelles il faisait exploser des grenouilles avec des pétards quand il était enfant. Il est également complètement irresponsable. Rien n'est jamais sa faute. Blair a le charme tranquille si fréquemment remarqué par les psychologues étudiant la question de la psychopathie. En ce qui me concerne, ce sont des personnages pathologiques. Mais ce qui est important, c'est le système, le système pathocratique. Les individus jouent différents rôles au sein du système selon leur type.

Silvia Cattori : Ces traits sont-ils intrinsèques à l'individu et peuvent-ils être corrigés ?

Henry : La correction dépend de beaucoup de variables... Avant de penser à corriger ces anomalies, il nous faut trouver les moyens de nous protéger de leur influence. Cela signifie, primo, d'admettre que de telles personnes existent et se retrouvent à des postes de pouvoir, et secundo, d'apprendre à reconnaître les signes de leurs manipulations et les caractéristiques pathologiques de notre propre processus de pensée, afin de nous libérer de leur influence.

Laura : Comme le dit Henry, il y a beaucoup de variables. Quand on parle des psychopathes, spécifiquement, le consensus général actuel est que non seulement on ne peut les guérir, mais qu'on ne peut les traiter.

Le premier problème est que si vous voulez traiter une maladie, vous devez avoir un patient. Le mot patient vient du latin et signifie « souffrir .» Un patient, par définition, est quelqu'un qui souffre et cherche un traitement.

Les psychopathes ne ressentent pas de détresse et ne pensent pas qu'il y ait quoi que ce soit qui n'aille pas chez eux, ils ne subissent pas de stress ou de névrose, et ne recherchent pas de traitement volontairement. Ils ne considèrent pas que leurs attitudes et comportements soient en quoi ce que soit mauvais, et les nombreux programmes de traitement qui ont été établis pour les aider à « développer de l'empathie » et des compétences interpersonnelles n'y changent rien. Le psychopathe ne reconnaît aucun défaut dans sa psyché, aucun besoin de changer. Ils seront cependant d'accord pour participer à des programmes de traitement en prison afin de pouvoir être libérés.

Quand on examina le taux de récidive des psychopathes et d'autres criminels en traitement, on découvrit que le taux de récidive général était aussi élevé dans le groupe traité que dans le groupe non traité, 87% et 90% respectivement, cependant le taux de récidive violente était considérablement plus élevé dans le groupe traité que dans le groupe non-traité : 77% et 55% respectivement. Par contraste, les non-psychopathes traités avaient des taux considérablement plus bas de récidive générale et violente - 44% et 22% respectivement - que les psychopathes non traités - 58% et 39% respectivement. Il semble donc que les programmes de traitement fonctionnent pour les non-psychopathes, mais aggravent en fait le cas des vrais psychopathes.

Un journaliste canadien faisant un reportage sur cette étude a écrit : « Après leur libération, on a découvert que ceux qui avaient les meilleures notes en terme de « bonne réaction au traitement » et qui avaient les plus hautes notes en « empathie » étaient ceux qui étaient les plus enclins à récidiver après leur libération. »

Voilà les psychopathes : ils peuvent simuler n'importe quoi pour obtenir ce qu'ils veulent.

La question est celle-ci : comment une thérapie peut-elle empirer le cas d'une personne ? Robert HARE émet la suggestion que la thérapie de groupe et la thérapie d'orientation psychanalitique aide en réalité les psychopathes à développer de meilleurs moyens aux fins de manipuler, tromper et se servir des gens, mais ne les aide en rien à se comprendre eux-mêmes.

Freud arguait que les psychopathes ne pouvaient être traités par la psychothérapie, précisément parce qu'avoir une conscience était un pré-requis nécessaire pour faire appel à la psychothérapie. C'est la conscience, jointe à la capacité de se préoccuper des autres, qui poussent à l'examen attentif de nos motivations - tout cela est à la base de notre comportement. Les psychopathes, eux, n'ont pas de conscience et n'éprouvent pas d'intérêt pour les autres, par définition.

Silvia Cattori : Comment peut-on savoir si l'on n'est pas soi-même psychopathe ? Que l'on n'a pas soi-même été influencé par les effets de leur perversion/pathologie pendant qu'ils occupaient des postes de pouvoir au sein d'une administration où nous nous trouvions - au sein d'un syndicat, d'un parti politique ou d'ailleurs ?

Laura : Pour la première partie de votre question, laissez-moi vous dire que ce n'est pas une question inhabituelle - pour un être un humain normal - mais maintenant, vous avez probablement compris que si une personne pense qu'il pourrait y avoir quelque chose « qui ne va pas » chez elle, c'est qu'elle n'est pas psychopathe ! Souvenez-vous : le/la psychopathe ne peut tout simplement pas concevoir que quelque chose n'aille pas chez lui/elle.

Henry : Il est tout à fait possible - à vrai dire, terriblement commun - de devenir ponérisé, selon les termes de Lobaczewski, c'est-à-dire d'être infecté par ce mal. C'est ce qui arrive quand vous commencez à accepter le raisonnement pathologique comme quelque chose de normal. Nous avons utilisé l'exemple de Madeleine Albright plus haut. Prenez le sport professionnel, comme autre exemple. L'intimidation sur le terrain en tant que composante légitime d'un sport comme le football est aujourd'hui acceptée comme quelque chose de normal. Nous avons vu durant la dernière Coupe du Monde, l'an dernier, que Materazzi avait impitoyablement provoqué Zidane pendant le match de finale. Les gens n'ont rien trouvé à redire. Ils acceptent que cela fasse partie du jeu aujourd'hui. Cependant, une telle violence verbale n'a rien à voir avec le football. Elle ne fait partie du jeu que parce que le monde du sport professionnel, et le monde du sport en général, ont été ponérisés. Ce qui est pathologique a fini par être accepté en tant que norme.

Et dès qu'une influence de ce type est acceptée, cette infection s'étend. Quand nous commençons à faire nôtres des formes de pensées pathologiques, à les accepter en tant que normes, notre capacité à réfléchir se détériore.

Silvia Cattori : Quand vous entendez des journalistes, des hommes d'État, des intellectuels et des écrivains, qui incitent le monde à faire la guerre à l'Iraq, à l'Iran, parce que c'est utile à Israël ou parce que nous avons besoin de leur pétrole, quelle est votre réaction ?

Laura : Je vois que cette question s'adresse au Dr Lobaczewski. Je tiens à souligner qu'Andrzej est très âgé et souffrant. Il est à peine capable de lire parce que ses yeux sont en mauvais état, et donc il n'est pas du tout au courant des événements actuels. Lorsque nous discutons de ces choses avec lui et lui exposons ce qui se passe réellement - une information à laquelle il n'a normalement aucun accès - il est terriblement attristé. Si seulement je pouvais vous montrer à quel point cela nous fend le coeur de voir sa peine. Notre réponse à sa tristesse qui est si poignante, quand vous réalisez ce qu'il a enduré durant toute sa vie, est de le protéger, de faire le travail en son nom et de lui assurer que tout ce qui peut être fait pour partager la connaissance à laquelle il a consacré toute sa vie, sera fait. Personnellement, je voudrais lui offrir un peu de paix par la promesse que nous avons repris le fardeau, et qu'il peut maintenant se reposer.

Silvia Cattori : Quand vous dites qu'il y a environ 6% de pervers/d'invidus pathologiques dans la population humaine, comment êtes-vous arrivés à ce nombre ?

Henry : Les 6% de Lobaczewski viennent de son analyse et de celle des autres membres du groupe avec lequel il travaillait. Mais c'était pour la Pologne. Il est possible que les taux varient selon les pays, suivant leurs histoires particulières. Si nous regardons l'Amérique du Nord ou l'Australie, des régions en partie colonisées par des gens forcés de quitter leurs foyers, des criminels, des aventuriers, nous pouvons nous demander si la perspective de conquérir des continents peut ou non avoir attiré certains types plus que d'autres. L'histoire de l'Ouest américain par exemple, et le génocide des peuples indigènes, n'indiquent-ils pas une incidence plus élevée de psychopathie ? Peut-être le niveau aux États-Unis est-il plus élevé aujourd'hui à cause de cela.

Laura : Une récente étude portant sur une population universitaire a suggéré la possibilité que 5% ou plus de cet échantillon soit considéré comme psychopathique. C'était une étude sérieuse destinée à dénicher les psychopathes qui ne sont pas criminels mais qui sont, au contraire, des individus qui réussissent au sein de la communauté. Cette étude a aussi démontré que la psychopathie se produit bien au sein de la communauté et à un taux probablement plus élevé que prévu ; et il apparaît que la psychopathie et les troubles de la personnalité se recoupent peu, en dehors du « Trouble de la personnalité antisociale ». Manifestement, un travail est nécessaire dans le but de comprendre les facteurs qui différencient le psychopathe qui respecte la loi (bien qu'il ne respecte pas la morale) du psychopathe qui enfreint la loi. Cela éclaire un des problèmes majeurs de la recherche qui a été menée jusque là, et qui s'est concentrée principalement sur des échantillons médicolégaux.

Silvia Cattori : La psychopathie inclut-elle les hommes et les femmes en général ?

Laura : Bien que la grande majorité des psychopathes soient des hommes, il y a des femmes psychopathes. Le rapport est de plus d'un homme sur dix contre approximativement une femme sur cent.

Silvia Cattori : Comment avez-vous établi que c'était plus fréquent chez les hommes ? Cela signifierait que sur l'ensemble de la population, presque une personne sur dix a des tendances psychopathiques plus ou moins fortes la poussant à créer un climat de conflit ?

Laura : Cela a été établi comme moyenne d'après différentes études. Comme celle citée plus haut portant sur une population universitaire (des étudiants en psychologie, d'ailleurs, ce qui devrait nous faire réfléchir !) donne un chiffre de 5% ou plus, nous pourrions penser que ces chiffres aussi élevés étaient dus à l'échantillon. D'autre part, cette étude a peut-être révélé des individus au comportement psychopathique qui n'étaient pas nécessairement de vrais psychopathes. Bien sûr, le chiffre pourrait être plus élevé à tel ou tel endroit, dans telle profession comparée à telle autre, etc. Ce qu'il est nécessaire de garder à l'esprit, c'est que les psychopathes, à cause de leur nature, s'élèvent au sommet quel que soit le milieu où ils se trouvent. Alors ne vous imaginez pas qu'ils sont en bas de l'échelle sociale, dans les bas-fonds de la société, et que vous ne les rencontrerez pas ou ne serez pas affectés par eux.

Silvia Cattori : Ce pourcentage semble très bas. Concerne-t-il seulement les pervers qui ont une position dominante et qui sèment la discorde et le désordre où qu'ils aillent ?

Henry : Il peut sembler bas parce que dans une société ponérisée, beaucoup de gens deviennent infectés par la maladie. Ils voient ce que font les autres, et n'étant pas assez forts eux-mêmes pour suivre leur propre code moral, si ce code diffère de celui de leurs voisins, ils suivent le troupeau. Ces gens sont le soutien de base du statu quo. Ils ne sont peut-être pas eux-mêmes psychopathes, mais ils soutiennent et défendent le statu quo.

Un autre aspect pour maintenir le soutien de base est le recours à la crainte, à des menaces ouvertes d'emprisonnement et de torture, à la crainte d'être étiqueté comme différent, comme « opposant au régime », et autres jugements de même acabit.

Laura : Gardez aussi à l'esprit les 12% d'individus sensibles à l'influence et au mode de pensée psychopathique. À la fin, vous avez un total de 18% ou plus d'une population donnée qui cherche à soumettre et à contrôler le reste. Si vous considérez alors ce reste, les 82%, et gardez à l'esprit la bell curb [courbe de Gauss - NdT], au moins 80% du reste suivra celui - peu importe qui - qui est au pouvoir. Et puisque les psychopathes ne sont aucunement limités dans leurs actes pour arriver au sommet, ceux qui sont au pouvoir sont généralement pathologiques. Ce n'est pas le pouvoir qui corrompt, ce sont les individus corrompus qui recherchent le pouvoir.

Silvia Cattori : Le conflit semble être une forme de nourriture pour ce type de personnalité perverse/pathologique. Parce qu'il leur permet de projeter leur agression, leur violence, sur les autres et d'éviter de se remettre en question ?

Henry : On pourrait dire que, n'ayant pas d'émotion en propre, ils se nourrissent de leur pouvoir à déclencher les émotions des autres. Ils jouissent du pouvoir que cela leur donne. Être « au-dessus » de telles démonstrations émotionnelles les fait se sentir supérieurs.

Silvia Cattori : Votre analyse du mensonge est très pertinente. Quand vous démontrez que le menteur a toujours raison, vous êtes très convaincant. Il y a là une nouvelle matrice pour comprendre comment fonctionnent les psychopathes. Vous expliquez très bien ce mécanisme du mensonge. Le mensonge est leur manière de fonctionner et de gagner. Je voudrais en savoir plus sur ce mécanisme du mensonge et sur ses effets. Comment fonctionne-t-il ? Ces menteurs sont-ils présents dans tous les domaines ?

Henry : Mentir est une stratégie très efficace, parce que très peu de gens pensent qu'il y a des menteurs purs et durs dans la société, des gens qui mentent systématiquement.

Pensez à un divorce ou à une autre affaire exposée devant un juge et des jurés. La plupart d'entre nous se rendra aux audiences avec en tête l'idée que la vérité est quelque part entre les deux. Les deux parties en conflit dans une affaire raconteront leur histoire, chacun embellissant un peu sa version, chacun se mettant sous son meilleur jour, et le juge ou le jury supposeront que la vérité est quelque part entre les deux.

Mais qu'arrive-t-il quand l'un des deux individus est un menteur et que l'autre dit la vérité ? Le menteur est à son avantage parce que le juge ou le jury s'attendra encore à ce que la vérité soit quelque part entre les deux. Donc, quelqu'un qui est victime d'un menteur et d'un manipulateur ne peut s'en sortir. Dire la vérité ne peut rendre à cette personne toute la justice qu'elle mérite, tandis que l'auteur d'un crime tirera toujours quelque chose du mensonge.

La vie quotidienne est comme ce tribunal. On est toujours disposé à donner aux autres le bénéfice du doute, si l'on est une personne morale. Le menteur et le manipulateur ne feront jamais cela et utiliseront contre elle la bonne volonté de la personne de conscience.

Mentir est donc toujours une stratégie gagnante. Cela peut en soi être le signe que nous vivons au sein d'un système pathologique !

Laura : Quand on considère la structure interne infantile du psychopathe, il n'est pas si difficile de comprendre l'aspect du mensonge. Le psychopathe ne ment même pas réellement, il « crée juste une réalité » afin qu'elle se conforme à ses désirs.

Je vais essayer d'expliquer. La réalité psychopathique existe de façon arbitraire : ils déclarent que les choses sont ainsi. Pour eux, ces déclarations représentent la réalité. La déclaration du moment peut contredire ce qu'ils ont dit à un autre moment. Cela ne signifie rien pour eux. Ils n'essaient jamais de gérer la contradiction car pour eux, il n'y a pas de contradiction. Souvenez-vous, les psychopathes ne peuvent comprendre des abstractions comme l'espace et le temps, et ce qu'ils ont dit il y a un moment sous le coup d'impulsions diverses est maintenant du passé, et par conséquent n'existe plus.

Les psychopathes démontrent un manque total de compréhension de ce que nous appelons les « faits ». Les humains normaux ont réellement du mal à concevoir cela, parce que pour nous, les faits font fondamentalement partie de notre vie. Nous vivons par eux, nous évaluons et jugeons en fonction d'eux. Nous établissons des faits, ensuite nous procédons à des tests et établissons d'autres faits. Quand nous débattons, nous commençons par des faits et montrons comment nous tirons nos conclusions à partir de ces faits.

Les psychopathes ne font pas cela. Cependant, parce qu'ils projettent leur propre structure interne sur les psychopathes, la plupart des gens ne comprennent pas cela. Les humains normaux qui ont un mode de pensée psychopathique essaient de se convaincre qu'il existe une autre raison expliquant cette bizarre condition mentale. Quand les psychopathes ne se préoccupent pas des faits, nous pensons que c'est intentionnel, qu'ils jouent un jeu avec nous. Nous pensons qu'ils sont bien au courant des faits, mais qu'ils ne veulent pas l'admettre.

Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Les psychopathes ne savent pas ce que sont les faits. Le concept de fait est en réalité une abstraction qu'ils ne peuvent saisir. Un cas illustrant cela est rapporté par un psychothérapeute : il demanda à sa patiente, une psychopathe, d'observer une chaise située à environ 1,80 mètre, près du mur. Il lui demanda ensuite de décrire la chaise. Ce qu'elle fit, de manière assez détaillée, excepté pour les pieds. La chaise qu'elle décrivit n'avait pas de pieds.

Le thérapeute le lui fit remarquer, et lui demanda comment la chaise pouvait être suspendue en l'air, sans pieds pour la soutenir. Elle répondit : « Je l'ai posée là. ». Le thérapeute demanda : « Si vous regardez ailleurs, tombera-t-elle par terre ? » Elle dit : « Non. Si je regarde ailleurs, la chaise n'est plus là ». Le thérapeute demanda : « Si vous regardez ailleurs, et qu'il s'avère que la chaise est toujours là ? ». Elle ignora la question.

L'idée populaire New Age basée sur l'adage « on se crée sa propre réalité » est un exemple de la manière dont la pensée psychopathique a infiltré notre société. Le principe est : « Si suffisamment de gens croient que quelque chose est vrai, alors ce qu'ils croient EST la réalité. »

En réponse à cela, on peut faire remarquer avec raison : « Il fut un temps où tout le monde, pour ce que nous en savons, croyait que le soleil tournait autour de la terre. C'était faux, et le croire n'y changea rien ». Mais si vous demandez à un psychopathe : « Êtes-vous en train de dire qu'à cette époque, le soleil tournait en fait autour de la terre - et que c'est seulement pour obéir à un changement de pensée chez les gens que la terre s'est mise à tourner autour du soleil ? », il vous ignorera ou vous accusera de déformer les « faits ».

Un être humain normal pensera naturellement que le refus du psychopathe à répondre à cette question, le fait qu'il se retourne contre vous en vous accusant de présenter les faits (ainsi que lui-même) sous un faux jour, est une admission tacite que ce qu'il dit est faux. Mais vous auriez tort sur ce point. Face aux preuves qu'ils ont tort, les psychopathes n'hésitent pas à faire des déclarations et des affirmations concernant sur ce qu'ils insistent être la réalité.

Ron Suskind, ancien reporter au Wall Street Journal et auteur de The Price of Loyalty : George W. Bush, the White House, and the Education of Paul O'Neill, a écrit :
« Au cours de l'été 2002, après avoir écrit un article dans Esquire qui déplut à la Maison Blanche - article parlant de l'ancienne Chargée de communication de Bush, Karen Hughes - je rencontrai un conseiller en chef de Bush. Il exprima le mécontentement de la Maison Blanche, puis me dit quelque chose que je ne compris pas totalement sur le moment - mais qui, je le crois maintenant, plonge au cœur même de la présidence de Bush.
L'assistant déclara que les types comme moi faisaient partie "de ce que nous appelons la communauté fondée sur la réalité", qu'il définit comme les gens qui "croient que les solutions émergent de [leur] observation judicieuse de la réalité discernable". J'acquiesçai et murmurai quelque chose à propos des principes des Lumières et de l'empirisme. Il me coupa : "Le monde ne fonctionne plus réellement ainsi" . "Nous sommes un empire maintenant, et quand nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous étudiez cette réalité - comme vous le faites, judicieusement - nous agissons à nouveau, créant de nouvelles réalités, que vous pouvez étudier aussi, et c'est ainsi que les choses se règleront. Nous sommes les acteurs de l'Histoire... et vous, vous tous, il ne vous restera qu'à étudier ce que nous faisons" ».
Ils ne mentent pas réellement - ils créent de « nouvelles réalités ». Rien de ce que nous appelons réalité n'est réel pour eux. Quand un être humain normal parle d'une chaise, il se réfère à une chaise qui tient sur ses propres pieds. Elle est là, que quelqu'un la voie ou non, que quelqu'un la mentionne ou non, que quelqu'un « déclare » ou non sa présence. Elle a sa propre existence souveraine. Mais il n'en est pas ainsi pour les vrais psychopathes. Les psychopathes, avec leur structure interne infantile, sont inaptes à comprendre que tout ce qui n'est pas eux existe en propre, séparé d'eux. Quelque chose ne devient réel qu'à partir du moment où ils reconnaissent cette réalité, et ils ne reconnaissent que ce qui est important pour eux en terme de ce qu'ils désirent, de ce qui leur procurera du plaisir.

Quand un être humain normal demande que les déclarations du psychopathe soient évaluées, le psychopathe déclare que celui qui fait une telle demande n'a aucune intégrité, ce qui signifie réellement que leur position - leur déclaration - ne tient pas !

Du point de vue du psychopathe, le monde est comme une scène holographique. Ils « déclarent » l'existence des choses. Tout est hologramme. Ils programment les hologrammes. Ils interagissent avec eux de toutes les manières qui leur conviennent. Ils sont sous leur contrôle total. Quand ils décident de supprimer un hologramme, il disparaît.

Un hologramme n'est pas censé penser par lui-même. Un hologramme n'est pas censé mesurer, évaluer, apprécier, etc. Et surtout, un hologramme n'est pas censé critiquer son maître.

Quand cela arrive, ils le châtient d'abord pour le ramener dans le rang. Si cela ne marche pas, ils le font « disparaître ». Et s'ils doivent le tuer pour ce faire, c'est ce qui arrive.

L'expérience a montré que peu importe ce que nous disons, ce que nous leur faisons remarquer, la quantité de preuves fournies, cela ne signifie rien pour les psychopathes. Ils n'ont qu'un but : nous tromper afin qu'on les classifie comme humains normaux de sorte qu'ils puissent continuer à nous duper, nous contrôler et nous utiliser pour leur propre pouvoir et gloire, parce que c'est ce qui leur donne du plaisir.

Silvia Cattori : Il y a par conséquent une interaction constante : l'individu pervers/pathologique ne peut dominer seul et a besoin d'alliés. Il doit donc former des clans et les unifier, offrant des avantages à ceux qui servent ses intérêts. Avantages qui les lient ensuite à eux, les maintiennent assujettis ? Autrement dit, si le système est pervers, alors chacun devient pervers et tout est perdu ?!

Henry : Oui et non. Il existe des faiblesses inhérentes au système pathocratique. Mais cela prend du temps. Lobaczewski décrit la dynamique à l'œuvre dans les pays de l'Est sous le communisme. Les pathocrates sont incapables de faire quoi que ce soit d'authentiquement créatif. Ils dépendent des gens de conscience pour leur créativité. Une société sans créativité est condamnée à périr tôt ou tard. Quand les principaux postes de pouvoir de cette société, du gouvernement, de l'industrie, des affaires sont tenus par des pathocrates, le cycle dégénérescent commence.

En même temps, les gens normaux commencent à voir la société pour ce qu'elle est, et ils inventent des stratégies de survie. Ils commencent à reconnaître que leurs dirigeants ne sont pas comme eux.

Malheureusement, quand une société recouvre ses sens, une autre idéologie masquant un autre groupe - ou bien le même groupe sous un autre nom - de déviants est déjà en place, prête à prendre sa place. Quand le communisme s'écroula en Union soviétique et dans les pays d'Europe de l'Est, les pathocrates capitalistes étaient prêts à s'emparer du butin, et parmi les pathocrates, certains communistes furent même capables de trouver un nouveau « nid » confortable au sein des « nouvelles » démocraties capitalistes.

La question est celle-ci : un tel processus a-t-il déjà commencé aux États-Unis - qui sont, à notre avis, le centre de gravité de la pathocratie aujourd'hui ? Étant donné que les pathocrates semblent motivés par un programme visant à réduire la population mondiale par millions sinon par milliards, par le biais des guerres ou d'autres moyens, nous sommes en droit de nous demander si nous aurons le temps de voir s'achever ce cycle. Nous ne sommes pas très optimistes.

Mais même si une expression particulière de la pathocratie tombe, le système lui-même reste en place, émergeant ailleurs, au sein d'un nouveau « centre ».

Silvia Cattori : L'exemple qui va dans cette direction est l'Iraq. Bush voulait la guerre à tout prix. Bush ment et il gagne. Il trouve des alliés de la même espèce que lui, comme Blair et Berlusconi. Les gens qui dénoncent leurs crimes et les combattent perdent. Cela semble être un parfait exemple de ce qui est décrit dans Ponérologie. Est-il impossible de dire non à ces monstres ?

Henry : Comment dire non quand les médias sont complètement contrôlés par d'autres pathocrates ? Vous pouvez descendre dans la rue, comme des millions de gens l'ont fait avant l'invasion de l'Iraq, mais cela n'a pas d'importance parce que les dirigeants politiques pathocratiques ne se soucient absolument pas de ce que pensent les gens. Il leur est indifférent qu'il y ait des milliers ou des millions de gens contestant leur politique - ils ont d' effrayantes armes militaires à leur disposition. Ensuite, les médias ont déformé le message des dissidents et les ont présentés comme des traîtres. Ils sont toujours considérés comme des traîtres après quatre ans, alors qu'il est devenu clair comme de l'eau de roche que Bush and Co ont eu tort de faire la guerre et qu'ils ont menti sur tous les points.

Pourtant, les États-Unis sont toujours en Iraq et il est politiquement impossible de réclamer plus qu'un simple « débat » sur une future réduction des troupes.

Ainsi, une des questions est celle-ci : dans un environnement aussi contrôlé, combien de gens voient-ils la réalité ? Et une autre se pose : dans une telle réalité, comment les gens qui voient les mensonges réagissent-ils et répondent-ils en faveur d'un changement ?

La majorité des gens ont eu leur conscience écrasée et ont accepté tant de compromis qu'ils sont incapables de penser ou de ressentir les choses correctement. Ils croient qu'il y a un nombre illimité de fondamentalistes islamiques se préparant à faire exploser leurs maisons et leurs écoles, peu importe la totale absurdité de cette idée, et malgré le fait que la majorité de tels attentats à la bombe soient des opérations « false flag ». Le fait bien établi que les agences de renseignement commettent des attentats à la bombe et accusent ensuite leurs opposants - il est impossible d'arguer que ce type de chose n'est pas une pratique régulière - devient moins crédible pour les gens aux États-Unis, au Royaume-Uni et ailleurs, que le conte de fées décrivant des centaines de fondamentalistes islamiques prêts à se faire exploser au nom d'Allah !

Repensez à ce que Lobaczewski écrit à propos du raisonnement confus qui se produit quand quelqu'un est en présence d'un psychopathe. Via les médias, cette confusion s'étend au-delà du contact personnel immédiat et devient un fléau affectant la société dans son ensemble. La société elle-même est infectée par la maladie.

Et pour ceux qui luttent pour retrouver leur santé mentale et qui voient les mensonges, la puissance à laquelle ils sont confrontés est si écrasante qu'ils peuvent facilement abandonner. La tâche semble trop grande.

Laura : Est-il impossible de dire « non » à ces monstres ? Non. Difficile ? Oui.

Les individus qui pensent que le changement peut s'effectuer via des processus légaux ou politiques ne comprennent pas que les lois et la politique, en général, soient toutes deux créées et contrôlées par des individus pathologiques qui les établissent à leur avantage, et non à celui de leurs compatriotes . Ainsi, les lois et la politique sont-elles des mesures insuffisantes pour contrer une société pathologique engendrée par les efforts et l'influence des déviants.

Une autre chose qu'il est important de retenir eu égard à la recherche de solutions via les moyens légaux ou politiques : la roublardise des déviants pathologiques est bien supérieure à celle des êtres humains normaux. La plupart des gens sont familiers de l'idée de la ruse exceptionnelle dont font preuve les fous, mais la psychopathie, sous ses différentes formes, possède un élément additionnel : le Masque de Santé mentale.

Récemment, nous avons vu Cindy Sheehan s'éveiller au fait que le parti démocrate n'était qu'une autre idéologie derrière laquelle opérait la psychopathie. Elle est partie, et d'après ce que j'ai compris, a maintenant décidé que le « 911 Truth Movement » était l'endroit où il fallait être. Je suis désolée de devoir l'informer que les psychopathes supervisent aussi ce spectacle. Vous ne pensiez tout de même pas qu'ils commettraient des crimes comme le 11 septembre sans assurer leurs arrières par l'invention et le contrôle d'un « mouvement pour la vérité », n'est-ce pas ?

Je reçois sans cesse des lettres de groupes d'action politique qui demandent de l'argent et du soutien. J'ai donné de l'argent et mon soutien, et j'ai aussi écrit de nombreuses lettres et e-mails leur disant que leurs « actions politiques » n'auraient aucun effet s'ils ne prenaient pas en compte la psychopathie dans l'équation. Ils étaient tous tellement certains que remettre les démocrates au pouvoir allait tout changer, mais le fait est que rien n'a changé. Tout cet argent et ces efforts ont été gâchés. Et maintenant, les gens s'en rendent compte alors que nous le disons depuis le début.

Je le redirai encore - et continuerai à le faire : tant qu'on n'accordera pas à la connaissance et à la prise de conscience de l'existence d'êtres humains pathologiques toute l'attention qu'elles méritent, et qu'elles ne feront pas partie de la connaissance générale de tous les êtres humains, il n'y aura aucun moyen de changer les choses d'une manière efficace et durable. C'est la première priorité, et si la moitié des gens qui s'agitent pour la Vérité, pour arrêter la guerre ou Bush ou je ne sais quoi d'autre consacrait leurs efforts, leur temps et leur argent à dévoiler la psychopathie, cela nous permettrait peut-être de progresser.

Finalement, le réel problème réside encore dans le fait que la connaissance de la psychopathie, et la manière dont les psychopathes dirigent le monde ont été efficacement cachées ; les gens n'ont donc pas la connaissance adéquate et nuancée dont ils auraient besoin pour apporter un véritable changement radical. À maintes reprises tout au long de l'Histoire, cela a toujours été « on prend les mêmes et on recommence ».

Quand vous avez affaire à des psychopathes, vous avez affaire à l'esprit criminel, et quand de tels esprits tiennent des positions de pouvoir absolu - comme c'est le cas aujourd'hui - rien ne peut les retenir - et rien ne les retiendra, c'est une certitude.

Bush (ou plus précisément, ceux qui tirent ses ficelles) a un contrôle quasi absolu de toutes les branches du gouvernement. Vous pouvez remarquer cela si vous observez soigneusement que, peu importe ce que Bush commet d'illégal, personne ne le prendra vraiment à partie. Tous les « scandales » qui ont fait surface, dont n'importe lequel aurait fait tomber toute autre administration, ne sont que des farces jouées pour le public, pour le distraire, pour lui faire penser que la démocratie est toujours active.

Il n'y a que deux choses qui puissent soumettre un psychopathe :

1) un psychopathe plus puissant ;

2) le refus absolu et non-violent de tous les autres de se soumettre à son contrôle, quelles que soient les conséquences. Si toutes les personnes normales aux États-Unis (et ailleurs) arrêtaient tout et refusaient de participer à la réalisation du moindre objectif du programme psychopathique, s'ils le faisaient en masse, si les gens refusaient de payer leurs impôts, si les soldats refusaient de combattre, si les fonctionnaires et les « robots » dans les entreprises refusaient d'aller au travail, si les médecins refusaient de traiter les élites psychopathiques et leurs familles, tout le système s'arrêterait brutalement.

Mais cela ne peut arriver que si les masses SONT INFORMÉES sur la psychopathie dans tous ses horribles détails. Ce n'est que s'ils savent qu'ils ont affaire à des créatures qui ne sont réellement pas humaines qu'ils peuvent avoir la compréhension de ce qu'ils doivent faire. Et ce n'est que quand ils seront suffisamment désespérés, au point que les malheurs que leur infligera le psychopathe au début de leur résistance paraîtront pâles en comparaison, qu'ils auront la volonté de le faire. C'est cela, ou bien la compréhension du monde que les psychopathes sont en train de créer pour leurs enfants, en tout cas l'amour pour l'humanité de demain, qui les motiveront à résister.

Silvia Cattori : Est-ce que Chirac, après avoir dit non pour l'Iraq, a fait des concessions majeures à Bush par peur de devenir un homme de paille ? Les pervers ont-ils besoin d'hommes de paille ?

Henry : Imaginez que vous êtes un politicien avec une conscience face à un monde dominé par des gens pour qui tous les moyens sont bons pour rester au pouvoir : chantage, intimidation, menaces. Dans quelle mesure le scandale en France sur les finances de Chirac quand il était Maire de Paris furent-elles utilisées pour le remettre dans « le droit chemin » ? Nous ne pouvons que spéculer.

Nous savons que Bush espionnait illégalement les citoyens américains ; faisait-il cela pour collecter des données qui pourraient être utilisées pour faire chanter et intimider les politiciens ou les journalistes de l'opposition qui posaient trop de questions ? Je pense qu'il serait naïf de ne pas considérer cette possibilité.

Laura : Je dis quelquefois en plaisantant qu'à présent, on peut probablement deviner qui sont les gentils en regardant ceux qui ont la plus mauvaise presse ! Mais ce n'est pas si simple. Nous ne pouvons oublier que la véritable guerre est celle de l'Élite psychopatique au pouvoir contre les Humains normaux. Les pervers ont-ils besoin d'hommes de paille ? Sûrement, cela fait partie de la mise en scène qu'ils élaborent pour nous. Tout comme cela fait partie de leurs tactiques de créer des attentats « false flags » pour diriger la haine contre ceux qu'ils souhaitent détruire, c'est totalement dans leur style d'opération de jouer au « good cop / bad cop ». C'est Machiavel 101.

Silvia Cattori : La dynamique que vous décrivez est aussi apparente dans l'utilisation des médias ; les journalistes qui soutiennent les principes de l'axe Tel Aviv-Washington ont toute liberté de soutenir ces guerres. Font-ils aussi partie des monstres ? Devons-nous classer ces menteurs des médias dans la catégorie des 6% ? Comment se fait-il que le public ne voit pas que ce sont des imposteurs ?

Henry : Une fois que le système est en place, ceux qui sont moralement faibles s'y rallient pour le défendre en échange de privilèges personnels. Leur propre intérêt les rend vulnérables à la contagion. En conséquence, chaque individu n'a pas besoin de faire partie d'un des nombreux types listés par Lobaczewski. Il y a des milliers d'individus moralement corrompus et faibles qui sont prêts à obéir aux ordres de ceux qui sont au pouvoir si cela leur apporte célébrité et fortune, ou ne serait-ce qu'une existence confortable et sans ennui.

Ce qui ne veut pas dire que les médias sont exempts de psychopathes, caractéropathes, ou des autres types présentés par Lobaczewski.

Silvia Cattori : Pour nous protéger du mal, il semble alors que chacun d'entre nous doive se demander s'il est en présence d'une de ces personnes perverses qui mentent et n'agissent que pour leur intérêt personnel. Mais les gens n'arrivent pas à croire que ces pervers/pathologiques sont des gens qui se nourrissent du mal, qui se nourrissent des conflits. Votre livre décrit cela de façon experte : les conflits sont leur nourriture ; ils adorent ces situations, ils ont besoin de cela pour exister. Une personne normale ne peut imaginer qu'au sein de la société, il y a un certain nombre de gens qui ne peuvent rien faire d'autre que de se nourrir du mal. Pensez-vous que les gens normaux sentent que quelque chose ne va pas mais qu'ils n'arrivent pas du tout à comprendre qu'ils sont des victimes et qu'ils souffrent à cause des mensonges et des manipulations des individus pervers/pathologiques ?

Henry : Oui. Mais il faut un fort caractère pour se battre pour ce qu'on sait être juste face à une opposition sociale omniprésente. Nous avons aussi tendance à accorder aux autres le bénéfice du doute parce que nous projetons nos propres modes de pensée et de comportement sur eux. Si nous ne sommes pas conscients qu'il y a des gens qui sont soit génétiquement incapables d'éprouver de l'empathie et des sentiments envers les autres, soit dont la conscience a été réprimée et détruite à cause de ce qu'ils ont vécu (et ils ne peuvent être guéris), et si nous ne savons pas comment ils fonctionnent et manipulent, nous resterons des victimes.

En tant que personne qui a fait partie d'organisations et d'associations militant pour un changement social, vous avez probablement vu la même dynamique à l'oeuvre. Le travail bénéfique et sincère de beaucoup de gens peut être détruit par les actions d'une seule personne. Cela ne donne pas beaucoup de chances au rétablissementt de la justice sur cette planète ! Ce n'est que quand ceux qui sont psychologiquement normaux parviendront à comprendre que nous avons un prédateur naturel, un groupe de gens qui nous voit comme une espèce « para-spécifique » qu'ils seront disposés à s'informer sur cette race semblable aux humains.

Laura : S'il existe un travail qui mérite des efforts et une dévotion à plein temps pour aider l'humanité dans cette période sombre que nous vivons actuellement, c'est bien l'étude de la psychopathie et la propagation de cette information sur une très grande échelle. Pour celui qui veut réellement faire quelque chose, diffusons aux gens l'information sur les agents pathogènes sociaux, apprenons d'abord comment les identifier, et ensuite nous pourrons décider de la marche à suivre.

Silvia Cattori : Les gens normaux, ceux qui ont une conscience, cherchent à trouver un compromis entre les deux. Diriez-vous qu'être gentil envers eux est une erreur parce que les individus pervers/pathologiques n'ont absolument aucune conscience, sont sans scrupule-s, et n'hésitent pas à s'emparer des postes au pouvoir, même s'ils sont incompétents ?

Henry : Nous en avons parlé plus tôt quand nous avons décrit la société comme un tribunal où tout le monde chercherait la vérité quelque part entre les deux . Tant qu'il y aura une quelconque idée de compromis, les gens de conscience seront toujours les perdants. On doit retirer à ces déviants psychologiques toute position de pouvoir qui leur permet de dominer les personnes de conscience, point. Les gens doivent se rendre compte que ce genre d'individus existe, et ils doivent apprendre à les détecter eux et leurs manipulations. La partie difficile est qu'on doit aussi lutter contre ces tendances en nous à la compassion et à la gentillesse pour éviter de devenir des proies.

Silvia Cattori : Les gens normaux ont besoin de garder en mémoire que tous les gens ne sont pas fondamentalement bons et ne prennent pas nécessairement des décisions qui sont bonnes pour la société. Les individus pervers/pathologiques se moquent de la moralité, pour eux, seuls leurs objectifs personnels comptent. Ils peuvent mentir sans se sentir le moins du monde impliqués dans ce qu'ils disent. Prenons le cas de Bush par exemple. Il peut dire n'importe quoi et il n'a pas du tout honte de mentir. Les individus pervers/pathologiques n'ont aucun scrupule à mentir, à détruire un pays, un peuple entier, tant que cela sert leurs intérêts ?

Henry : L'idée que « tous les hommes naissent égaux » et que nous sommes fondamentalement bons nous est assénée depuis notre naissance. On nous enseigne que Dieu nous a fait à son image, et que nous avons tous une étincelle divine en nous.

Mais la science nous montre que ce conte de fées religieux n'est pas vrai. L'humanité a un prédateur naturel, le psychopathe, et ce prédateur est invisible parce qu'il n'existe aucun signe facilement discernable qui permette de l'isoler.

En outre, tout au long de l'Histoire, on nous a divisés en groupes en fonction de distinctions physiques, culturelles, religieuses, ou n'importe quel élément facilement reconnaissable mis en avant par les psychopathes, tandis que notre véritable ennemi est resté masqué.

Nous avons même trouvé des livres traitant de psychopathie qui présentent l'argument que nous sommes tous psychopathes ! Nous voyons donc qu'il y a une tentative de sauver les apparences . Lobaczewski mentionne la psychologie et la psychiatrie comme outils utilisés par la pathocratie sous le communisme. Nous voyons la même chose aujourd'hui aux États-Unis. Il y a des déviants qui deviennent psychologues ou psychiatres et qui tentent de réécrire la psychologie du point de vue pathologique !

Silvia Cattori : Un des points faibles de notre société n'est-il pas la tolérance dont nous faisons preuve envers ces monstres ? Cela leur permet de créer plus de conflits et de tuer plus d'innocents.

Henry : Est-ce de la tolérance ou de l'ignorance ? Les gens ne sont pas conscients qu'il existe une catégorie de gens, que nous qualifions parfois de « pas tout à fait humains », qui nous ressemblent, qui travaillent avec nous, que nous retrouvons dans toutes les races, toutes les cultures, qui parlent toutes les langues, mais qui n'ont pas de conscience - et s'il y a quelque chose qui sépare réellement les humains des animaux, je suggérerais que c'est cela : la conscience.

Nous sommes tolérants envers les autres, en dépit des crimes les plus horribles, parce que nous projetons nos propres états intérieurs sur eux, nous supposons que quand ils expriment des remords, c'est qu'ils les ressentent vraiment. Mais pour ces déviants, il n'y a pas de remords, ce n'est qu'un rôle, un peu de comédie pour nous faire croire par la tromperie qu'ils sont « comme nous ».

Silvia Cattori : Alors, la seule chose à faire est de continuer à dire la vérité. Et de nous dire que même si ceux qui mentent gagnent toujours contre la vérité, à long terme, quand de plus en plus de gens diront la même chose, petit à petit cette vérité permettrapeut-être aux gens de réfléchir ?

Henry : La vérité est la seule chose digne de nos efforts. Ce qui nous sépare du psychopathe est notre conscience, et notre conscience doit devenir la voix de la vérité. La vraie conscience - si nous l'écoutons - nous élève au-dessus de l'exemple du comportement animal établi par les pathocrates. Pensez aux horreurs d'Abu Grahib. Si la conscience de ces soldats (à supposer qu'ils en aient une) n'était pas endormie, ils auraient refusé de commettre ces atrocités.
Si les milliards de gens dotés de conscience pouvaient entendre sa voix, il n'y aurait plus de guerre.

On trouverait d'autres moyens pour résoudre les différends. Si nous écoutions notre conscience, il n'y aurait plus de famine parce que nous ressentirions la peine et la souffrance de ceux qui meurent de faim et nous serions incapables de ne pas faire quelque chosepour les soulager. Et dans nos propres vies, nous devons penser à la façon dont nous tuons notre propre conscience et commencer à faire des choix douloureux afin de l'écouter avant qu'elle ne disparaisse pour toujours.

Silvia Cattori : En conclusion, il y a des manipulateurs partout. Ils forment une partie de la société qui est structurée selon ce modèle, une structure qui leur permet de se comporter selon ce fonctionnement psychologique pervers où qu'ils interviennent. Ce sont des gens à l'esprit tordus, qu'aucun code moral ne retient, prêts à tout pour défendre leurs intérêts. Ils sont de plus en plus nombreux. Ils ne sont pas nécessairement liés à une idéologie spécifique. Et dès que nous commençons à soupçonner quelqu'un d'appartenir à ce pourcentage de gens tordus, devons-nous adopter une attitude différente ?

Henry : Oui. Nous devons apprendre à dire non aux manipulations. Cela signifie qu'il nous faut apprendre de quelles façons nous sommes manipulés, et refuser d'entrer dans leur jeu.

Laura : De manière générale, une capacité à tricher, à entrer en compétition et à mentir s'avère être une adaptation extraordinairement réussie. Ainsi, l'idée que la pression de la sélection pourrait permettre à la sainteté de se répandre dans une société semble peu plausible en pratique. Il semble impossible de rivaliser avec les gènes qui promeuvent la compétitivité. « Les types bien » se font évincer ou leur « race » s'éteint. Les gens heureux ignorants de même. Aujourd'hui, le bonheur et la gentillesse sont de plus en plus rares, et la misère et la souffrance de ceux qui sont capables de ressentir de véritables sentiments, qui ont de l'empathie pour les autres êtres humains, qui ont une conscience, sont hélas monnaie courante. Et les manipulations psychopathiques sont destinées à nous rendre tous psychopathes.

Néanmoins, une prédisposition à la conscience et à l'éthique, peut l'emporter si et quand elle est aussi capable de mettre en pratique l'altruisme le plus profond : faire de l'objet de son empathie l'idéal le plus élevé ; répandre la liberté et l'altruisme au sens abstrait, pour les autres, y compris nos descendants.

En bref, nous devons investir notre « intérêt personnel» dans l'assurance collective que tous les autres sont heureux et bien disposés, aussi ; et en s'assurant que les enfants que nous mettons au monde ont le choix d'être heureux par nature et bienveillants les uns envers les autres.

Cela signifie que si la psychopathie menace le bien-être de l'avenir du groupe - ce qu'elle est en train de faire actuellement - alors on ne peut s'en sortir que par un refus massif de se laisser dominer par elle au niveau personnel, individuel. Préserver la liberté pour soi-même au sens pratique préserve au bout du compte la liberté des autres. La protection de nos propres droits COMME ceux des autres, garantit la position de libre-arbitre et les chances de bonheur pour tous. Si les psychopathes mutants posent un danger potentiel, alors la véritable empathie, la véritable éthique, la véritable conscience, commandent le recours à une thérapie prophylactique contre les psychopathes.

Ainsi, il apparaît qu'identifier les psychopathes, cesser d'interagir avec eux, les isoler de notre société, nous rendre indisponibles comme « nourriture » ou comme objets à tromper, manipuleret à utiliser, est la seule stratégie, la plus efficace, que nous puissions mettre en oeuvre.

Notes :

A. Lobaczewski. Ponérologie politique : étude de la genèse du mal appliqué à des fins politiques. Les Éditions Pilule rouge.

PCL-R : Psychopathy Checklist - Revised : liste des caractéristiques psychopathiques - NdT

Emil Kraepelin : psychiatre allemand (1856-1926) considéré comme le fondateur de la psychiatrie scientifique moderne. - NdT

DSM : Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) - NdT

ASPD : Antisocial Personality Disorder : trouble de la personnalité antisociale - NdT

ERP : Event Related Potential, Potentiel Évoqué en français (PE). En électroencéphalographie, un potentiel évoqué désigne le signal électrique produit par le système nerveux en réponse à une stimulation externe (son, lumière) ou interne (prise de décision, préparation motrice). Ce signal étant en général très faible, il est nécessaire de répéter l'enregistrement un grand nombre de fois de façon à moyenner toutes ces mesures et à obtenir une caractérisation du potentiel évoqué qui soit fiable. Source : Wikipédia - NdT

La tâche de décision lexicale est une expérience comportementale, c'est-à-dire une expérience visant l'exploration psychologique d'un comportement. Elle consiste à présenter des mots ou des pseudomots (chaînes de caractères qui respectent les règles phonotactiques de la langue, comme cateau). On demande alors aux sujets de répondre le plus rapidement et le plus précisément possible si c'est un mot ou un pseudomot. Cette tâche peut être visuelle ou auditive. Source : Wikipédia - NdT

On ne peut guérir ce que l'on ne connaît pas - NdT

Les attaques false flag (littéralement : faux drapeau) sont des attaques menées sous le couvert du drapeau adverse, dans le cadre d'opérations spéciales - NdT

Littéralement « gentil flic contre méchant flic ». C'est une technique policière éculée. Deux inspecteurs interrogent un suspect. L'un offre le café, une cigarette et s'évertue à détendre l'atmosphère. L'autre menace, crie, déstabilise. Scène classique, le second quitte la salle d'interrogatoire sous un prétexte quelconque et se met derrière une glace sans tain d'où il peut observer la suite des événements sans être vu. Le premier, le gentil, conseille au suspect de coopérer, car c'est le seul moyen de calmer son collègue qui est capable de commettre une « folie ». Source - NdT