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© Crédits photo : PA Photos/Whyld Lewis/PA Photos/ABACAJ.K. Rowling publie son nouveau roman, Une place à prendre.
Un journaliste américain a lu, en avant-première, Une place à prendre. Le New Yorker publie son long article.

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Une place à prendre (Éd. Grasset).
Le secret n'aura pas été gardé jusqu'au jour J. Un journaliste du New Yorker, Ian Parker, a en effet lu, en avant-première, les cinq cents pages de The Casual Vacancy (traduit en français sous le titre Une place à prendre). Il est l'une des rares personnes au monde à avoir pu prendre connaissance de ce roman entouré de mystère et dont aucun autre critique n'a pu se procurer les épreuves, comme c'est le cas habituellement. Ian Parker explique, dans son article, qu'il a pu lire ce manuscrit à la suite d'un accord avec l'auteur, mais qu'il n'avait pas le droit de prendre des notes, ni bien sûr, de faire des photocopies.

Deux jours d'avance, c'est peu, mais cela suffit à faire de ce joli coup de chance un scoop planétaire puisque les journalistes, les libraires et les lecteurs devront attendre jeudi (en Angleterre et aux États-Unis) et vendredi (en France) pour se procurer le premier roman destiné aux adultes signé par J.K. Rowling.

Ian Parker donne ainsi le «la», car ses premières impressions seront reprises et commentées dans quelques jours par les millions de fans que J.K. Rowling compte dans le monde (450 millions de livres de la saga Harry Potter vendus, tout de même...)

Alors que pense ce journaliste de The Casual Vacancy ?

Il ressort de sa lecture que ce volumineux roman est une œuvre à la fois sociale, noire et caustique. La langue y est volontiers crue, bien loin du style utilisé par la romancière dans les aventures du jeune sorcier. Ainsi, J.K. Rowling emploie des mots comme «préservatif», «vagin», «couilles», et bien d'autres termes explicites qu'on ne trouvait évidemment pas dans Harry Potter.

L'action se situe dans la petite ville imaginaire de Pagford, dans le sud-ouest de l'Angleterre, un endroit qui ressemble à celui dans lequel l'auteur elle-même a grandi. Dès le premier chapitre, le héros est assassiné. Il s'agit de Barry Fairbrother, un élu local engagé corps et âme dans la défense des jeunes en difficulté de la région. Ce personnage possède des qualités semblables à celles de Harry Potter: la tolérance, la constance et la volonté d'agir concrètement. Bref, c'est un modèle moral. Et malgré sa disparition prématurée, il restera présent en filigrane, tout au long du livre.

« Le roman tourne au noir »

L'intrigue d'Une place à prendre, publié en France par Grasset, est parfaitement illustrée par le titre anglais: The Casual Vacancy, choisi par la romancière parce qu'il correspond à un terme juridique britannique utilisé quand un siège se libère à la suite de la mort d'un élu ou de sa destitution, après qu'un scandale l'a éclaboussé. C'est ainsi qu'après le décès du fameux Barry, une âpre lutte politique débute. Ceux qui étaient les opposants du défunt vont alors tout faire pour que ses engagements sociaux soient abandonnés. Barry menait une politique d'aide à un quartier défavorisé. Il avait notamment permis aux adolescents de cette cité HLM d'être scolarisés dans le centre de Pagford. La ville avait aussi, sous l'impulsion de Barry, financé une clinique pour soigner les jeunes drogués. L'occasion pour l'auteur de procéder à une description très juste de l'adolescence, ce qui n'est pas étonnant de la part de la créatrice de Harry Potter. «Et le roman tourne au noir en une sorte de final à la Thomas Hardy», glisse Ian Parker, qui estime, par ailleurs, que l'intrigue souffre d'être un peu trop prévisible.

J.K. Rowling avait pensé dans un premier temps au titre «Responsable». «Parce que, explique-t-elle, c'est un livre sur la responsabilité. Dans un sens mineur - quelle est la part de notre responsabilité dans notre bonheur personnel - mais aussi dans un sens plus large - quelle est notre part de responsabilité envers les pauvres, les personnes défavorisées?»

Et quel était son état d'esprit pendant l'écriture du roman ?

«Je pensais que ce serait effrayant. Déjà, l'écriture m'a pris cinq années de travail. Je savais qu'en m'éloignant de Harry Potter, j'étais attendue au tournant. Ce n'était donc pas si confortable. Ainsi, pendant ces cinq années je n'ai pas cessé de me dire: "Tu as beaucoup de chance. Tu peux payer tes factures, tu n'a pas besoin de le publier." C'était une pensée libératrice. Un écrivain écrit généralement pour être lu, à moins de s'appeler J.D. Salinger.»