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Le cerveau de l'homme rapetisse. Depuis Cro-magnon, c'est-à-dire environ 35 000 ans, il a perdu environ 10% de son volume soit l'équivalent d'une balle de tennis.

Certains comme le cogniticien David Geary, pensent que la société devenant de plus en plus complexe, nous sommes tellement assistés socialement et culturellement que nos besoins cérébraux diminuent par rapport à ceux de nos ancêtres obligés de se battre et donc de trouver sans cesse de nouvelles solutions pour survivre dans un environnement infiniment plus hostile qu'aujourd'hui.

D'autres, comme l'anthropologue Brian Hare y voient la preuve d'un avantage évolutif.

S'appuyant sur des recherches sur les animaux domestiques et sur les singes, il constate qu'une augmentation de la tolérance de l'autre s'accompagne d'une diminution de la taille du cerveau

Si la thèse de la socialisation de l'homme, qui rendrait obsolète certaines capacités cérébrales est juste, que pouvons-nous attendre de l'évolution dans l'ère post-humaine dans laquelle nous sommes entrés avec la multitude de prolongements et prothèses dont dispose l'homme pour interagir avec son environnement ?

Parmi ces prolongements il y a indiscutablement ceux que nous offre le monde connecté d'internet.

Marshall Poe prétend que le net n'est qu'un changement de média et que nous ne faisons après tout pas grand-chose de nouveau de ce que nous faisions avec les journaux, la radio, la télévision et le téléphone avant son apparition même si nous le faisons différemment.

Nicolas G Carr auteur d'un lumineux article intitule "Google nous rend-il idiot ?" défend au contraire l'idée que le comment, c'est-à-dire l'usage d'internet, interagi sur le contenu et sur la façon dont nous abordons l'acquisition des informations et des connaissances.

Les nouveaux assistants informatiques que nous connaissons aujourd'hui et ceux qui vont probablement apparaître dans les années à venir engloberont dans un même continuum toutes les technologies de communication.

Ils sont déjà notre horloge, notre imprimerie et notre machine à écrire, notre calculatrice et notre téléphone, notre radio et notre télévision.

Ils remplacent nos dictionnaires, nos agendas, notre collection de disques, notre bibliothèque, nos films et je ne sais quoi encore.

Comme le rappelle Maryanne Wolf, psychologue du développement à l'université Tufts, la lecture n'est pas une capacité instinctive de l'homme mais bien un apprentissage.

Il y a donc fort à parier que la place grandissante des prothèses communicantes qui se multiplient est et sera de moins en moins neutre sur notre façon de regarder, de lire et même de penser.

Personne ne peut prédire si cette évolution conduira à une nouvelle réduction de la taille du cerveau d'un homme complètement immergé dans sa technologie.

Socrate, dans le Phèdre de Platon, craignait qu'avec l'apparition de l'écrit les hommes ne risquent de devenir "remplis de l'orgueil de la sagesse au lieu de la sagesse réelle".

On sait l'essor extraordinaire qu'a pris l'écriture avec l'invention de l'imprimerie.

La fantastique aventure de la pensée humaine n'aurait probablement pas été possible sans les écrits des grands philosophes.

La révolution internet marque le début d'une nouvelle ère dans la communication.

Le succès phénoménal de Facebook, l'incroyable déballage de Wikileaks, l'omniprésence de Google ne sont pas des épiphénomènes mais bien les signes d'un changement profond dans notre façon de communiquer, d'accéder à l'information et d'aborder la connaissance.

Ce changement radical de paradigme informationnel s'accompagne bien sûr de nombreux dangers.

La clé reste comme toujours la capacité de l'homme d'élever sa réflexion au niveau de ces formidables opportunités de développement.