Traduction : Resistance 71

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Pourquoi tolérons-nous la menace d'une nouvelle guerre mondiale en notre nom ? Pourquoi autorisons-nous les mensonges qui permettent de prendre ce risque ? L'échelle de notre endoctrinement, écrivait Harold Pinter est « un acte brillant, amusant même et hautement performant d'hypnose », comme si la vérité « ne se passait jamais alors même qu'elle se déroule ».

Chaque année, l'historien américain William Blum publie son « résumé sommaire des archives de la politique étrangère américaine », qui montre que depuis 1945, les États-Unis ont renversé ou tenté de renverser plus de 50 gouvernements, beaucoup démocratiquement élus, qu'ils ont lourdement interféré dans les processus électoraux de 30 pays, bombards des populations civiles dans 30 pays, utilisé des armes chimiques et biologiques et tenté d'assassiner des leaders politiques étrangers.

Dans bien des cas, la Grande-Bretagne fut un collaborateur. Le degré de souffrance humaine, sans parler de l'aspect criminel, est peu reconnu en occident, et ce malgré la présence des moyens de communication les plus avancés du monde et des journalistes soi-disant les plus libres. Il est indicible que le plus grand nombre de victimes du terrorisme, de « notre terrorisme », sont des musulmans. Que le djihadisme extrême qui a mené aux attentats du 11 Septembre, fut nourri et développé comme arme de la politique anglo-américaine (Opération Cyclone en Afghanistan), est une information supprimée. En Avril, le ministère des affaires étrangères américain nota que, après la campagne de l'OTAN en 2011, « La Libye est devenue un havre de paix pour les terroristes ».

Le nom de « notre » ennemi a changé au cours des années, du communisme à l'islamisme, mais généralement c'est une société indépendante de la puissance occidentale et qui occupe un territoire riche en ressources naturelles ou ayant une position stratégiquement intéressante. Les leaders de ces nations jugées obstructives sont en général violemment écartés, comme les démocrates Mohamed Mossadeq en Iran et Salvador Allende au Chili, ou ils sont assassinés comme Patrice Lumumba au Congo. Tous sont soumis à une campagne de dénigrement, de caricature et de villification de la part des médias occidentaux, pensez à Fidel Castro, Hugo Chavez et maintenant Vladimir Poutine.

Le rôle de Washington en Ukraine n'est différent que dans ses implications pour le reste d'entre nous. Pour la première fois depuis les années de Ronald Reagan, les États-Unis menacent d'emmener le monde à la guerre. Avec l'Europe de l'Est et les Balkans désormais des postes d'avant-garde pour l'OTAN, le dernier état tampon frontalier avec la Russie est mis à sac et en pièce. Nous, en occident, soutenons des néo-nazis dans un pays où des nazis ukrainiens soutinrent Hitler. Après avoir manigancé le coup d'état contre le gouvernement démocratiquement élu de Kiev, Washington planifiait de saisir la base navale historique de la Russie et portail vers les mers chaudes: la Crimée et échoua. Les Russes se sont défendus, comme ils l'ont fait à chaque menace et invasion de l'occident depuis près d'un siècle.

Mais l'encerclement stratégique de l'OTAN s'est accéléré, ainsi que des attaques orchestrées par les États-Unis contre les Russes ethniques d'Ukraine. Si Poutine peut être provoqué à venir à leur aide, son rôle de paria pré-établi sera alors justifié pour le déclenchement d'une guerre /guérilla par l'OTAN qui aura toutes les chances de déborder sur la Russie elle-même.

Au lieu de cela, Poutine a mis à jour les va t'en guerre en recherchant un arrangement avec Washington et l'UE, en retirant des troupes de la frontière russo-ukrainienne et en appelant les Russes ethniques d'Ukraine de reporter leur referendum provocateur du week-end. Ces ukrainiens bilingues représentent un tiers de la population ukrainienne et ils ont recherché depuis longtemps une fédération démocratique reflétant la diversité ethnique du pays qui serait à la fois indépendante et autonome de Moscou. La plupart de ces gens ne sont ni « séparatistes » ni « rebelles », mais des citoyens qui veulent vivre en paix et en sécurité dans leur patrie.

Comme les ruines de l'Irak et de l'Afghanistan, l'Ukraine a été transformée en un parc à thème de la CIA, géré par le directeur de la CIA John Brennan depuis Kiev, avec des « unités spéciales » de la CIA et du FBI mettant en place une « structure « sécuritaire » qui supervise les attaques sauvages sur ceux qui s'opposent au coup de février. Regardez les vidéos, lisez les compte-rendus des témoins oculaires du massacre d'Odessa ce mois-ci. Des voyous fascistes envoyés par bus ont brûlé le QG des syndicats, tuant 41 personnes coincées à l'intérieur. Regardez la police attendre et ne rien faire. Un médecin décrivit avoir essayer de sauver des victimes « mais j'étais stoppée par des radicaux ukrainiens pro-nazis. L'un d'eux m'a violemment poussé, me promettant que bientôt moi et autres juifs d'Odessa allaient connaître le même sort... Je me demande pourquoi le monde garde le silence. »

Les Ukrainiens parlant russe luttent pour leur survie. Lorsque Poutine a annoncé le retrait des troupes russes massées à la frontière, le ministre de la défense de la junte de Kiev, un membre fondateur du parti fasciste Svoboda, pavana pour dire que les attaques contre les « insurgés » continueraient. Dans un style tout à fait orwellien, la propagande de l'occident a pirouetté ceci en disant que « Moscou cherchait à orchestrer le conflit et la provocation », d'après William Hague (ministre de la défense britannique). Son cynisme n'a d'égal que les félicitations grotesques d'Obama pour la junte issue du coup pour sa « remarquable retenue » suivant le massacre d'Odessa. Illégale et dominée par les fascistes, la junte est décrite par Obama comme étant « dûment élue ». Ce qui compte n'est pas la vérité, avait jadis dit Henry Kissinger, « mais ce qui est perçu comme la vérité. »

Dans les médias américains l'atrocité d'Odessa a été minimisée comme étant une « tragédie », « trouble et obscure » dans laquelle des « nationalistes » (néo-nazis) ont attaqué des « séparatistes » (gens collectant des signatures pour un referendum pour une Ukraine fédérale). Le Wall Street Journal de Ruppert Murdoch a condamné les victimes en titrant « Le feu mortel en Ukraine aurait été allumé par les rebelles dit le gouvernement ». La propagande en Allemagne a été digne de la guerre froide avec le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung avertissant ses lecteurs de la « guerre non déclarée » de la Russie. Pour les Allemands, c'est une ironie amère que Poutine soit le seul leader qui condamne la montée du fascisme en Europe au XXIème siècle.

C'est devenu un truisme populaire que de dire que « le monde a changé » après le 11 septembre (2001). Mais qu'est-ce qui a changé ? D'après le grand lanceur d'alerte Daniel Ellsberg, un coup d'état silencieux s'est produit à Washington et un militarisme rampant fait maintenant la loi. Le Pentagone effectue aujourd'hui des « opérations spéciales », guerres secrètes, dans 124 pays du globe. Domestiquement, une montée drastique de la pauvreté et une hémorragie des libertés sont des corollaires historiques d'un état en guerre perpétuelle. Ajoutez à cela le risque de guerre nucléaire, et la question brûle les lèvres : Pourquoi tolérons-nous tout ceci ?