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L'Union Européenne s'est totalement inclinée et a adopté les sanctions économiques contre la Russie tant demandées, non pardon, exigées par les États Unis. Si l'on estime les pertes à 23 milliards d'euros pour l'économie russe, on attend au minimum déjà 40 milliards de perte sèche pour l'économie des pays de la zone euro. En période de crise, c'est une décision raisonnable s'il en faut. Afin de couler l'Europe. Quant à la Russie, c'est un effet politique qui est attendu, plus qu'économique. Il faut faire tomber le régime. La Russie doit être alignée ou ne peut être.

L'on parle très souvent des risques encourus par l'économie russe suite aux différentes sanctions adoptées par les États Unis et l'UE. La liste de ces sanctions devient très longue, trop longue pour n'avoir qu'un caractère économique. Après les sanctions personnelles, l'UE a franchi le pas et s'attaque à des secteurs entiers de l'économie russe : la finance à la seule exception de la Sberbank, l'armement et l'énergie. Ca tombe bien, l'Europe va ainsi revoir sa dépendance énergétique, passer du gaz russe réel moins cher au potentiel gaz de schiste américain plus cher et pour lequel il faudra encore construire les infrastructures. En attendant, l'on peut toujours travailler au réchauffement climatique.

D'une manière générale, voici les données prévisionnelles annoncées par le Comité des représentants permanents de l'UE ou COREPER. Et la manière dont les chiffres sont présentés est intéressante : oui les économies européennes et russe sont liées, mais on ne cherche pas à approfondir les risques pour l'économie européenne, et encore moins à diffuser l'information sur un mode grand public. Où sont les reportages aux infos du soir, juste la température sur les plages ? Où sont les émissions grands publics qui vont expliquer aux français ce qu'ils vont perdre, car il faut soutenir la politique américaine, en remboursement du plan Marshall ? Évidemment chacun évite de se poser la question et de trop en parler, juste ce qu'il faut pour pouvoir affirmer que l'information existe, si quelqu'un est intéressé, car nous sommes en démocratie. Regardez les chiffres et vous comprendrez pourquoi :
  • Accès aux marchés financiers : en 2013, 47% des obligations émises par les institutions publiques russes l'ont été sur les marchés européens, soit 7,5 milliards d'euros. Combien de perte pour les marchés européens après les sanctions ?
  • Le volume des exportations/importations d'armes entre la Russie et l'UE est de 3,2 milliards d'euros par an, dont 300 millions euros d'importation par la Russie d'armement européen. Combien de perte sèche pour l'économie européenne ?
  • L'Europe exporte pour 4 milliards de biens à double usage, c'est-à-dire des biens ayant notamment un usage militaire. Il s'agit notamment d'ordinateurs, de pièce électroniques etc. Autant de pertes pour les entreprises européennes.
  • L'Europe exporte pour 150 millions de technologies sensibles, notamment pour le forage de pétrole.
De son côté, la Russie ne reste pas inerte. La première réaction est la guerre commerciale : « Lait, fromage, oignons d'Ukraine, pêches de Grèce, prunes de Serbie, pommes et choux de Pologne, viande d'Espagne : selon Rosselkhoznadzor, l'agence sanitaire russe, tous ces produits contiennent des substances nocives, sont infectés par de dangereuses bactéries ou ne respectent pas les normes réglementaires. ». Évidemment, on peut en sourire, le microbe politique est bien connu. Mais les producteurs apprécieront. D'autres réactions, en revanche, peuvent ne plus faire sourire les entreprises européennes. Toute la presse occidentale s'est empressée de souligner les difficultés de la filliale low cost d'Aéroflot, Dobrolet, qui est tombée sous le coup des sanctions économiques, mais les conséquences risquent de coûter très cher aux compagnies européennes. En mesure de rétorsion, la Russie pourrait interdire le survol de l'espace russe aux compagnies étrangères assurant les vols vers l'Asie. Certes, Aéroflot perdrait environ 300 millions de dollars dans l'année, mais les pertes pour la Lufthansa s'élèveraient à plus d'un milliard pour trois mois. En fait, nous sommes dans une situation ubuesque dans laquelle les entreprises européennes et donc l'économie européenne, vont devoir payer pour le renforcement de l'hégémonie économique et politique américaine, au détriment de ses propres intérêts. Pour cela, un blocus informatif et analytique quant aux conséquences réelles sur les économies des différents pays de l'UE est mis en place et sera maintenu autant que nécessaire. En parallèle, l'on va discuter de l'impact potentiel sur l'économie russe des sanctions adoptées par les États Unis et l'UE. Nous verrons aussi comment sera traitée la question de la relocalisation de la production en Russie, des courbes du chômage etc. Cela ne sera pas traité.

Car le but des sanctions n'est pas de détruire, dans les faits, l'économie russe, mais d'en détruire la crédibilité à l'extérieur afin d'entraîner un mouvement de méfiance en matière d'investissement et de justifier une baisse de notation par les agences en charge de cela. A l'intérieur du pays, le but est de créer un climat particulier. Celui du manque potentiel. Les russes ont suffisamment le souvenir du « déficit » soviétique, pour avoir une peur panique du manque. Créer artificiellement ce manque en ancrant l'idée qu'il pourrait exister est un moyen réel de chercher à diviser la population, aujourd'hui solidaire, quant à la politique menée par le Kremlin.

La Russie doit être alignée ou ne peut être. Dans ce modèle. Elle doit donc conceptualiser son modèle, pour pouvoir le diffuser. Et les attentes existent.