Nous évoquions, récemment, « la mauvaise réputation » de Georges Brassens et son fameux refrain « Non, les braves gens n'aiment pas que/L'on suive une autre route qu'eux ». Évidemment, cela s'applique parfaitement à la « stratégie vaccinale » du gouvernement... et à son stratège, Président jupitérien en diable, Emmanuel Macron, Président de tous les Français, qui souhaitait à « chacune-et-chacun » une année bienveillante il n'y a pas si longtemps.

citoyen
Tout le monde se concentre sur le moment de son entretien au Parisien où il dit vouloir « emmerder les non-vaccinés » le plus longtemps possible. Certes, tout est odieux, là-dedans : le fond, la forme et surtout, à mes yeux, cette fausse familiarité, forcée et calculée. Dans L'État-spectacle (1977), Roger-Gérard Schwartzenberg, politologue de gauche, se moquait déjà des tentatives de la droite pour faire peuple : Giscard jouant de l'accordéon ou s'invitant chez les Français, parce que de Gaulle disait de lui « son problème, c'est le peuple ». De Gaulle lui-même, un peu plus tôt, sortant de son habituelle distance, théorisée dans Le Fil de l'épée (« L'autorité ne va pas sans prestige, ni le prestige sans éloignement ») pour, disait Schwartzenberg, parler « le langage de Sganarelle » en interview : « On peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant « l'Europe, l'Europe, l'Europe ! ». »

On a donc, peu ou prou, droit au même sketch, en 2022, à l'extrême centre. Un bourgeois bien élevé qui utilise le registre le plus relâché en pensant que c'est une arme, que ça va « faire bien » - comme Chirac et « l'affaire qui fait pschitt ». Méprisable. Haïssable, même.

Mais, en vérité, le point le plus remarquable de cet entretien est celui où le président de la République, décidément bienveillant, considère qu'« un irresponsable n'est plus citoyen ». Emmanuel Macron vient de s'arroger le droit de dire qui est citoyen et qui ne l'est pas. Comme ça, tranquille, sans un coup de matraque ni un manifestant éborgné. Chapeau, l'artiste ! De plus, on n'a pas souvenance qu'il ait eu la même intransigeance avec les terroristes, dont Éric Ciotti rappelait judicieusement, sur France Inter, qu'il avait refusé, en 2016, de les déchoir de leur nationalité parce que « tout le monde est citoyen ».

Conclusion partielle du raisonnement : refuser un vaccin non obligatoire, c'est donc plus grave que d'assassiner des Français ? Plus grave que d'appeler au meurtre en chanson ? Plus grave que de violer, de piller, de saccager ce qui reste de notre cher beau pays ?

La France n'est pas en train de devenir décadente ; ça, c'est fait depuis longtemps. Depuis 1815, 1789, 1685 ou même 1314, pour les plus énervés. Elle vient d'inventer un autre régime, celui de l'inversion de toutes les valeurs : inciter à pendre les Blancs, c'est de l'art ; manifester contre le Grand Remplacement, c'est du terrorisme ; mettre la France à feu et à sang, ce n'est pas un motif de déchéance ; refuser la sainte piqûre, c'est de la sédition. On devient un loup quand on refuse d'être un mouton. D'ailleurs, la possibilité de conditionner l'accès aux supermarchés à la détention du passe vaccinal n'a pas ému grand monde. Michel-Édouard Leclerc lui-même en est convenu sur BFM. Alors qu'il s'agit tout simplement de manger...

Emmanuel Macron a-t-il perdu l'élection sur un coup facile, en lançant les dés une fois de trop ? Les Français vont-ils s'apercevoir - enfin - qu'ils ont fait n'importe quoi ? Lénine disait : « Le communisme, c'est les Soviets plus l'électrification. » Macron, c'est la Corée du Nord avec la fibre. On attend le réveil du peuple. On se prend à rêver.