Une histoire secrète de la traque des anciens nazis menée par le gouvernement des États-Unis révèle qu'en fait les services secrets américains, à commencer par la CIA (agence centrale de renseignement), ont protégé et accueilli sur le sol des États-Unis des milliers de nazis après 1945. Le Département d'État a pourtant cherché depuis quatre ans à garder secret ce rapport de 600 pages que s'est finalement procuré le New York Times. Il contient des révélations étonnantes sur des dizaines d'affaires concernant des nazis célèbres.

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© ReutersJohn Demjanjuk
Ce document décrit la traque posthume du Docteur Josef Mengele, l'ange de la mort d'Auschwitz, dont un morceau de cuir chevelu preuve irréfutable de sa mort au Brésil en 1979 était conservé dans le tiroir d'un bureau d'un fonctionnaire du Département de la justice. Il raconte l'histoire du meurtre d'un ancien SS caché dans le New Jersey sans doute par une organisation juive et l'erreur d'identification par le gouvernement de l'ancien garde du camp de Treblinka, John Demjanjuk, connu sous le nom d'Ivan le Terrible.

Le rapport est un catalogue des échecs et des réussites (plus de 300 nazis démasqués) d'une équipe d'avocats, d'historiens et d'enquêteurs constituée en 1979 par le Département américain de la justice pour retrouver les nazis. Ce qu'il révèle de pire tient à la façon dont la CIA a utilisé de nombreux nazis à son profit. Cette information était connue des historiens mais pas son échelle et son caractère presque systématique.

Le rapport du Département de la justice décrit ainsi « la collaboration du gouvernement avec les persécuteurs », des nazis « ont bien reçu la permission d'entrer aux États-Unis » tandis que le gouvernement connaissait leur passé. « L'Amérique qui se vante d'être un refuge pour les persécutés, est devenue dans une moindre mesure, un refuge pour les persécuteurs ».

Le rapport souligne les oppositions au sein même du gouvernement sur ces questions et estime que le nombre de nazis entrés aux États-Unis est de plusieurs milliers mais inférieur à 10 000. Ce qui reste une énigme est la raison pour laquelle le Département de la justice a refusé depuis 2006 de rendre le rapport public affirmant qu'il n'était pas terminé, qu'il ne représentait pas une position officielle et qu'il contenait de « multiples erreurs et omissions ».

Il contient aussi une multitude d'histoires peu reluisantes. Comme l'aide offerte en 1954 par la CIA à Otto Von Bolschwing, un collaborateur d'Adolph Eichmann qui l'a aidé à mettre en place la solution finale de la question juive et a ensuite travaillé aux États-Unis pour l'agence centrale de renseignements. Dans une série de documents, la CIA étudie le moyen de permettre à Otto Von Bolschwing de nier son passé si celui-ci refait surface.

Même chose pour Arthur L. Rudolph, un scientifique nazi qui dirigeait l'usine de munitions de Mittelwerk où des esclaves travaillaient jusqu'à la mort et qui a été ensuite utilisé pour les programmes de fusées américains. Il a même été honoré par la NASA et est considéré comme le père de la fusée Saturn V utilisée notamment dans le programme spatial Apollo.

Le Département de la justice américain a aussi apparemment trouvé en 1997 une « preuve irréfutable » que la Suisse a bien acheté de l'or aux nazis qui avait été récupéré sur les juifs victimes de l'holocauste. Mais sous la pression du Département d'État, la « preuve irréfutable » a été passée sous silence.