Une étude, publiée dimanche 26 mai dans la revue britannique Nature Geoscience, soulève l'hypothèse que les minéraux découverts dans les cratères de la Lune pourraient bien être les restes d'astéroïdes qui se sont désintégrés à sa surface, et non pas les entrailles lunaires exposées au grand jour par de tels impacts.
Les spécialistes ont en effet toujours pensé que les météorites se vaporisaient purement et simplement lorsqu'ils entraient en collision avec un corps céleste comme la Lune, mais ces nouveaux travaux pourraient les obliger à réviser la composition du satellite naturel de notre Terre.
Origine extérieure, voire extraterrestre ?
L'olivine et la spinelle, deux minéraux relativement rares, ont été découverts dans de nombreux cratères lunaires mais sont quasi inexistants ailleurs sur la surface. On avait donc logiquement attribué leur présence au choc violent des astéroïdes qui les aurait fait surgir du sous-sol de la Lune. Or ces deux composants sont couramment présents dans les astéroïdes et les météorites, et ont été trouvés au cœur des cratères de Copernic, de Theophilus et de Tycho, qui font une centaine de kilomètres de diamètre.
Des chercheurs chinois et américains ont simulé par ordinateur la formation de tels cratères. Et, selon leurs calculs, un astéroïde s'abattant sur la Lune à moins de douze kilomètres par seconde serait seulement fragmenté et déformé par le choc, mais il ne s'évaporerait pas. Autrement dit, on pourrait en retrouver les traces.
« Nous en concluons que certains des minéraux inhabituels observés dans les pics centraux de nombreux cratères d'impact sur la Lune peuvent avoir une origine extérieure, et pourraient ne pas provenir de la Lune », écrivent les chercheurs.
Selon l'un des auteurs, Jay Melosh, de l'université Purdue d'Indiana (Etats-Unis), cela résoudrait l'énigme posée par des études précédentes qui avaient démontré que les cratères comme Copernic n'avaient pas une taille suffisante pour avoir exhumé les roches contenues dans les entrailles de la Lune. « Les planétologues devraient donc prendre garde à ne pas se servir de la composition des cratères lunaires pour en déduire celle de l'intérieur de la Lune, qui pourrait fort bien ne pas être de l'olivine », a-t-il expliqué.
Dans un commentaire séparé publié par Nature, Erik Asphaug, de l'Université d'Etat de l'Arizona, estime cependant que le cratère Copernic présente bien des signes d'un impact à haute vitesse, un scénario difficilement conciliable avec la nouvelle théorie défendue par Jay Melosh et son équipe. Et il émet une hypothèse encore plus osée : pourquoi les spinelles découvertes sur la Lune ne proviendraient pas de la Terre elle-même ? En effet, voici plusieurs milliards d'années, des collisions d'astéroïdes sur la Terre auraient été capables de projeter des débris jusque sur la Lune, à une vitesse suffisamment faible (2 km/s) pour que ces roches terrestres s'y soient déposées intactes.
Commentaire :
Il est évident depuis longtemps qu'un grand impact peut éjecter des matériaux d'une planète. Les stries du cratère Tycho, facilement observables aux jumelles, couvrent tout l'hémisphère lunaire et sont une preuve que des matériaux peuvent être envoyés à des milliers de kilomètres d'un site d'impact. Un grand impact rapide sur le sol de la Terre enverrait une masse de roches terrestres égale à une fraction d'un pour cent de la masse de l'impacteur en orbite autour du Soleil. La plupart de ces matériaux seraient rapidement capturés par la Terre, une partie tombera finalement sur le Soleil, mais une petite proportion, sujet à la faible influence des perturbations planétaires aléatoires serait finalement éjectée du système solaire. On estime que quelque chose comme 10 tonnes de matériaux de surface de la Terre, à cause d'impacts terrestres passés flottent dans l'espace interstellaire chaque année. Un gramme de sol rocheux pauvre peut contenir 10 millions de microbes et les microorganismes occuperont chaque micro fissure dans un bloc rocheux. Protégés de la lumière ultraviolette, il est probable que les microorganismes pourraient survivre durant, disons, une centaine de milliers d'années avant que les rayons cosmiques ne les détruisent finalement. Ce chiffre peut être prudent : des temps de survie de 100 millions d'années contre les rayons cosmiques ont été proposés.
~ William P. Napier, cité dans « Les comètes géantes, messagères de vie et de mort »
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