Dimanche 9 février, les Suisses votaient pour ou contre la fin de l'immigration de masse. D'après l'institut de sondage Gfs, le « oui » l'aurait emporté avec 50,4% des voix. En remettant en cause la libre circulation au sein de l'UE, la Suisse devrait sortir de l'espace Schengen.

Suisse immigration referendum
© Photo Christian Mathieu/France 3 Alpes
« Selon nos dernières estimations, 50,4% des votants ont voté 'oui' », a déclaré Claude Longchamp, de l'institut GfS. Cette estimation, a-t-il ajouté, a une marge d'erreur de +ou- 0,7%. Il reste encore à décompter les voix de deux grands cantons, ceux de Zurich et de Berne. La majorité des cantons suisses a d'ores et déjà voté en faveur de ce texte. Pour qu'il soit adopté, le texte, visant à réguler l'immigration par un système de contingent et de quotas, doit obtenir une double majorité, la majorité des cantons et la majorité des votants.

Actuellement, le tableau des votes montre un fossé très clair entre d'une part la Suisse alémanique, associée au Tessin, et d'autre part la Suisse romande. Le premier camp a voté « oui » en faveur du texte, avec encore deux points d'interrogation, soit les cantons de Zurich et Berne.

Le deuxième camp a voté "non" au texte, ce qui devrait bouleverser les relations entre la Suisse et l'UE, avec la remise en question des accords de libre-circulation.

La Suisse sortirait de l'espace Schengen

Pour le politologue genevois Pascal Sciarini, si le oui l'emporte, ce sera « le chaos », car les relations entre la Suisse et l'UE risquent d'être complètement remises à plat. Ce petit pays alpin, peuplé de huit millions d'habitants, ne fait en effet pas partie de l'Union européenne, alors qu'il est cerné par des pays membres de l'UE. Liée par des accords bilatéraux avec cette dernière, âprement négociés pendant cinq ans, la Suisse a accepté d'ouvrir son marché du travail aux 500 millions d'actifs de l'UE.

Au moment de l'entrée en vigueur de la libre-circulation, qui s'est faite progressivement depuis 2002, les autorités avaient indiqué qu'il n'y aurait que 8 000 nouveaux arrivants par an maximum. En fait, la Suisse avec son insolente bonne santé économique qui tranche avec la crise dans la zone euro, en accueille bon an mal an 80 000 sur son marché du travail, un chiffre qui provoque la colère du parti UDC (droite populiste), le parti le plus important du Parlement suisse.

Si le « oui » l'emporte, la Suisse rétablira des quotas et contingents en fonction de ses besoins pour les immigrés, un système avec lequel elle a vécu avant les accords bilatéraux avec l'UE et qui représente beaucoup de tracasseries administratives, fustigées par les employeurs.

Le gouvernement suisse, la plupart des partis politiques ainsi que le patronat se sont prononcés de manière catégorique pour le « non ». Selon eux, freiner ou donner un coup d'arrêt à cette immigration signifierait la fin de la prospérité suisse. Bruxelles a d'ores et déjà indiqué que si la Suisse mettait fin à l'accord de libre-circulation, tous les autres accords liant Berne à l'UE seraient dénoncés ipso facto.

Les partisans du « oui », l'UDC en tête, répliquent en disant qu'il s'agit d'une question de souveraineté nationale, et que le pays ne doit pas se plier au « diktat » européen.

En outre, ce parti estime que l'immigration massive européenne constatée ces dernières années est la cause de nombreux maux dont souffre la Suisse, comme des transports en commun surchargés, une pénurie de logements, et des paysages défigurés par le bétonnage qu'opèrent les entreprises du BTP.

L'immigration de plus en plus importante en Suisse

L'immigration est devenue au fil des ans un sujet de crispation en Suisse. Pour répondre en partie aux protestations d'une partie de la population à ce sujet, le gouvernement a pris dernièrement des mesures destinées à rendre l'accès aux prestations sociales plus difficiles pour les nouveaux arrivants européens. En 2013, les étrangers représentaient 23,5% (1,88 million de personnes) de la population en Suisse.

Avant les accords de libre-circulation avec l'UE, il y avait environ 20% d'étrangers en Suisse. Actuellement, sur ces étrangers, 1,25 million sont issus de l'UE-27 ou de l'AELE. Les Italiens et les Allemands sont les plus nombreux, avec respectivement 291.000 et 284.200 ressortissants.

Ils sont suivis par les Portugais (237 000) et les Français (104 000). A titre d'exemple, l'an dernier, la population du canton de Neuchâtel a progressé de 10%, une hausse due à une arrivée massive de ressortissants portugais.

A ces étrangers, il faut ajouter, selon l'UDC, les frontaliers qui sont dans la région de l'Arc Lémanique, autour du lac Léman, quelque 113 000, dans le Tessin 60 000, tout comme dans la région de Bâle.


Le référendum sur l'immigration à Genève
Lieu de tournage : Genève. Intervenants : des électeurs; Rémy Pagani, député Ensemble à gauche; Pierre Vanek, député SolidaritéS genevois; Pierre Maudet, vice-président du Conseil d'Etat de Genève; François Longchamp, président du Conseil d'Etat de Genève